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17/08/2006 | SUISSE | N°6P.114/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 17 août 2006, 6P.114/2006


{T 0/2}6P.114/20066S.240/2006 /rod Arrêt du 17 août 2006Cour de cassation pénale MM. les Juges Schneider, Président,Wiprächtiger et Kolly.Greffière: Mme Kistler. X. ________,recourant, représenté par Me Yves Donzallaz, avocat, contre Ministère public du canton du Valais, Palais de Justice, case postale 2050,1950 Sion 2. Procédure pénale, appréciation des preuves, arbitraire (art. 9 Cst.); cultureet préparation de chanvre (art. 19ch. 1 LStup), complicité (art. 25 CP), recours de droit public et pourvoi en nullité contre le jugement du Tribunalcantonal du canton du Valais,Cour pé

nale I, du 24 avril 2006. Faits: A.Par jugement du 7 juin 2004,...

{T 0/2}6P.114/20066S.240/2006 /rod Arrêt du 17 août 2006Cour de cassation pénale MM. les Juges Schneider, Président,Wiprächtiger et Kolly.Greffière: Mme Kistler. X. ________,recourant, représenté par Me Yves Donzallaz, avocat, contre Ministère public du canton du Valais, Palais de Justice, case postale 2050,1950 Sion 2. Procédure pénale, appréciation des preuves, arbitraire (art. 9 Cst.); cultureet préparation de chanvre (art. 19ch. 1 LStup), complicité (art. 25 CP), recours de droit public et pourvoi en nullité contre le jugement du Tribunalcantonal du canton du Valais,Cour pénale I, du 24 avril 2006. Faits: A.Par jugement du 7 juin 2004, le juge des districts de Martigny et St-Mauricea reconnu X.________ coupable d'infraction et de contravention à la loifédérale sur les stupéfiants (art. 19 ch. 1 et art.19a ch. 1 LStup), decomplicité de cette infraction (art. 25 CP et 19 ch. 1 LStup) ainsi que deviolation de la loi fédérale sur les armes (art.33 al. 1 let. a Larm). Ill'a condamné à une peine d'emprisonnement de cinq mois et demi, avec sursispendant trois ans, cette peine étant partiellement complémentaire à la peinede trente jours d'emprisonnement prononcée par le Tribunal cantonal du Valaisle18décembre 2002. Le juge a renoncé à révoquer un précédent sursis, mais aprolongé le délai d'épreuve d'une année. Enfin, il a confisqué lesstupéfiants ainsi que divers objets en vue de leur destruction. Statuant le 24 avril 2006, la cour pénale I du Tribunal cantonal du canton duValais a admis partiellement l'appel de X.________, considérant que lescontraventions à l'art. 19a ch. 1 LStup commises avant le 1er octobre 2002étaient prescrites et que les faits élucidés ne permettaient pas de retenirl'application de l'art. 33 LArm. Elle a réduit en conséquence la peineinfligée à X.________ à cinq mois d'emprisonnement, tout en maintenant lesursis. B.En résumé, l'arrêt cantonal retient les faits suivants:B.aEntre mai 1999 et octobre 2001, X.________ a cultivé chaque année unesurface de 1000 m2 de chanvre, soit 750 plants, pour le compte de Y.________Sàrl. Il a vendu à cette société l'intégralité de sa production. Pour lasaison 2001, il a conclu avec Y.________ un contrat de culture, spécifiantnotamment que le but de la culture était la production d'huile essentielle.Les variétés de chanvre cultivées, qui n'étaient pas autorisées par laréglementation agricole, avaient un taux de THC supérieur à 0,3 %, ce dontX.________ était conscient. La société Y.________ était exploitée parZ.________, qui était connu dans le milieu du chanvre et qui avait étécondamné à plusieurs reprises pour des infractions à la LStup, notamment àseize mois de prison ferme en 2000, pour avoir vendu des coussins"thérapeuthiques" fourrés de sommités florales de chanvre séché, destinés enréalité au marché récréatif. Il a été établi que Z.________ n'avait pasdistillé de l'huile essentielle ou du moins une quantité marginale à laquantité de chanvre récoltée. B.b Au mois de juin 2000, X.________ a ouvert un commerce de chanvre et dedérivés du chanvre, à l'enseigne "A.________", à Sion. B.b .aEntre 2001 et 2003, il a produit annuellement et en moyenne 400boutures ou plantons de chanvre à son domicile, à Saxon, et a acquis auprèsde Y.________ Sàrl 200 boutures supplémentaires dont 150 ont été mises enterre, le solde étant écoulé dans son magasin. Du 25 août 2001 au 26 juin2003, il a vendu dans son commerce 924boutures de chanvre, de variétés avecune teneur en THC supérieure à 0,3 %, sous la dénomination de plantesornementales, réalisant ainsi un chiffre d'affaires de 13'066 fr. 10. Ilestimait à 7% le taux de THC des plantes à maturité, et était conscient queles plantes vendues pouvaient être consommées comme stupéfiants vu leur tauxde THC à maturité. Parallèlement à la vente de ces boutures, il vendait à sesclients, parmi lesquels se trouvaient des consommateurs de drogue douce,toutes sortes d'accessoires en relation avec la production et la consommationde chanvre récréatif, tels que pollinators (appareils destinés à extraire larésine), lampes Kit de 400et 600 W pour culture indoor, engrais, machines etpapiers destinés à rouler les cigarettes, pipes et balances. B.b .bLe 18 octobre 2001, X.________ a loué un pollenisator à un client. Cetappareil permet d'extraire les graines de toute plante médicinale, mais sertaussi à extraire la résine des plantes de chanvre. X.________ savait que leclient entendait utiliser cet appareil à des fins illégales, pour produiredes stupéfiants. De mars 2002 à juin 2003, il a vendu, sous la dénomination "Pollinator PalmMaker", vingt-et-un appareils assimilables au pollenisateur précité, au prixde 29 fr. la pièce. Il était conscient qu'un usage illégal pouvait être faitde ces appareils. B.b .cD'avril 2002 à juin 2003, X.________ a mis en vente dans son magasin duchanvre sous l'appellation "thé naturel", qui avait une concentration ensubstance active de l'ordre de 0,8 % à 1,5 %. Sauf erreur de sa part, sonfournisseur aurait fait figurer un taux de THC inférieur à 0,3 % sur lespaquets, rendant ainsi ces tisanes "réglementaires", sans qu'il ait à seposer la question de leur teneur en substance active. Une telle mention n'acependant pas été mise en évidence par la police sur les quinze paquetsséquestrés. B.b .dX.________ a importé de l'étranger des graines de chanvre, donnant àmaturité des plantes, à haute teneur en THC. Il les a vendues, de mars 2002 àjuin 2003, dans les mêmes conditions que les boutures, le prix de certainssachets atteignant 40 fr. 50 l'unité. C.Contre l'arrêt cantonal, X.________ dépose un recours de droit public et unpourvoi en nullité devant le Tribunal fédéral. Dans le premier, il se plaint,pour l'essentiel, d'arbitraire dans l'établissement des faits etl'appréciation des preuves. Dans le second, il dénonce une violation del'art. 19 ch. 1 LStup, soutient que les conditions de la complicité ne sontpas réalisées et critique la peine qui lui a été infligée. Dans les deuxrecours, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué. Invité à se déterminer sur le pourvoi, le Ministère public valaisan n'a paspris position dans le délai qui lui était imparti. Le Tribunal fédéral considère en droit: I. Recours de droit public 1.1.1 Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre unedécision cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens(art. 84 al. 1 let. a OJ). Il n'est en revanche pas ouvert pour se plaindred'une violation du droit fédéral, qui peut donner lieu à un pourvoi ennullité (art. 269 al. 1 PPF); un tel grief ne peut donc pas être invoqué dansle cadre d'un recours de droit public, qui est subsidiaire (art. 84 al. 2 OJ;art. 269 al. 2 PPF). 1.2 En vertu de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit, à peined'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits constitutionnels oudes principes juridiques violés et préciser en quoi consiste la violation.Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'a donc pas àvérifier de lui-même si la décision attaquée est en tous points conforme audroit ou à l'équité. Il n'examine que les griefs d'ordre constitutionnelinvoqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours. Le recourant nesaurait se contenter de soulever de vagues griefs ou de renvoyer aux actescantonaux (ATF 129 I 185 consid. 1.6 p. 189, 113 consid. 2.1 p. 120; 125 I 71consid. 1c p. 76). Le Tribunal fédéral n'entre pas non plus en matière surles critiques de nature appellatoire (ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495). 2.Le recourant se plaint, pour l'essentiel, d'arbitraire dans l'établissementdes faits et l'appréciation des preuves (art. 9 Cst.), ainsi que de laviolation de la présomption d'innocence et du principe in dubio pro reo (art.32 al. 1 Cst. et 6 § 2 CEDH). 2.1 Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou unprincipe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manièrechoquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral nes'écarte de la solution retenue par la cour cantonale de dernière instanceque si elle apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec lasituation effective, adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droitcertain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquéesoient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dansson résultat (ATF 131 I 57 consid. 2 p. 61; 129 I 8 consid. 2.1 p. 9, 173consid. 3.1 p. 178). Lorsque le recourant - comme c'est le cas en l'espèce - s'en prend àl'appréciation des preuves et à l'établissement des faits, la décision n'estentachée d'arbitraire que si le juge ne prend pas en compte, sans raisonsérieuse, un moyen de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'il setrompe manifestement sur le sens et la portée d'un tel élément, ou encorelorsqu'il tire des déductions insoutenables à partir des éléments recueillis(ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9; 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 I 208 consid.4a p. 211). Lorsque la cour cantonale a forgé sa conviction quant aux faitssur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents, il ne suffitpas que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même chacun d'eux pris isolément soit àlui seul insuffisant. L'appréciation des preuves doit être examinée dans sonensemble. Il n'y a pas d'arbitraire si l'état de fait retenu pouvait êtredéduit de manière soutenable du rapprochement de divers éléments ou indices.De même, il n'y a pas d'arbitraire du seul fait qu'un ou plusieurs argumentscorroboratifs soient fragiles, si la solution retenue peut être justifiée defaçon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter laconviction. 2.2 Consacrée par les art. 32 al. 1 Cst. et 6 par. 2 CEDH, la présomptiond'innocence interdit au juge de prononcer une condamnation alors qu'iléprouve des doutes sur la culpabilité de l'accusé. Des doutes abstraits outhéoriques, qui sont toujours possibles, ne suffisent cependant pas à exclureune condamnation. Pour invoquer utilement la présomption d'innocence, lecondamné doit donc démontrer que le juge de la cause pénale, à l'issue d'uneappréciation exempte d'arbitraire de l'ensemble des preuves à sa disposition,aurait dû éprouver des doutes sérieux et irréductibles au sujet de laculpabilité (ATF 127 I 38 consid. 2 p. 40; 124 IV 86 consid.2a p. 87/88; 120Ia 31 consid. 2e p. 38, consid. 4b p. 40). La présomption d'innocence et le principe in dubio pro reo, qui en est lecorollaire, sont des garanties de rang constitutionnel, dont la violation nepeut être invoquée que par la voie du recours de droit public (art. 269 al. 2PPF; ATF 120 Ia 31 consid. 2b p. 35/36 et 2e p.38). Elles concernent tant lefardeau de la preuve que l'appréciation des preuves (ATF 120 Ia 31 consid. 2cp. 36). En tant que règles sur le fardeau de la preuve, ces principessignifient, au stade du jugement, que le fardeau de la preuve incombe àl'accusation et que le doute doit profiter à l'accusé. Comme règles surl'appréciation des preuves, ils sont violés lorsque le juge, qui s'estdéclaré convaincu, aurait dû éprouver des doutes quant à la culpabilité del'accusé au vu des éléments de preuve qui lui étaient soumis (ATF 124 IV 86consid. 2a p. 88; 120 Ia 31 consid. 2c p. 37). Le Tribunal fédéral examinelibrement si ces principes ont été violés en tant que règles sur le fardeaude la preuve, mais il n'examine que sous l'angle de l'arbitraire la questionde savoir si le juge aurait dû éprouver un doute, c'est-à-dire celle del'appréciation des preuves (ATF 124 IV 86 consid. 2a p.88; 120 Ia 31 consid.2e p. 38). 3.Le recourant conteste d'abord sa condamnation en relation avec la culture etla livraison de chanvre à Y.________. Il reproche à la cour cantonale d'avoiradmis l'usage illégal du chanvre qu'il a cultivé pour le compte de Y.________sur la base des connaissances qu'elle aurait tirées du dossier Z.________,alors que lui-même n'aurait eu accès qu'aux auditions de son frère et deZ.________, ainsi qu'au rapport de la police. Ce faisant, la cour cantonaleaurait violé le principe de l'égalité des armes, le droit d'être entendu, leprincipe de la loyauté du procès, ainsi que la présomption d'innocence. Il est établi - et non contesté - que la teneur en THC du chanvre cultivéétait supérieure à 0,3 % et que le recourant a livré la totalité de sarécolte à Y.________, exploitée par Z.________, dont il connaissait lesdémêlés judiciaires - par ailleurs notoires - en relation avec le commerce dechanvre. Au vu de ces éléments, il n'est pas arbitraire ni contraire à laprésomption d'innocence d'avoir retenu que le recourant avait cultivé duchanvre en vue de la production de stupéfiants. Il est sans importance queZ.________ se soit ou non rendu coupable de trafic de stupéfiants, puisque laloi n'exige pas que des stupéfiants aient été effectivement extraits desplantes cultivées (cf. consid. 8.1). Dans ces conditions, on ne voit pas quelintérêt aurait eu le recourant à consulter le dossier de Z.________; lerecourant ne donne du reste aucune explication sur ce point. Dans la mesureoù il est recevable, le grief soulevé doit donc être rejeté. 4.Le recourant s'en prend ensuite à sa condamnation en relation avec lesproduits vendus dans son commerce, à l'enseigne A.________. 4.1 Le recourant soutient que la cour cantonale aurait établi les faits demanière arbitraire, en retenant que les boutures qu'il a cultivées et venduesdans son commerce étaient destinées à des fins illicites. En l'espèce, la cour cantonale s'est fondée sur plusieurs indices pouradmettre que ces boutures étaient destinées à la production de stupéfiants.Elle a vu, avant tout, un élément propre à établir la destination illicitedans la panoplie complète du producteur/consommateur de produits cannabiquesque proposait le recourant dans son magasin. Elle s'est également fondée surles déclarations du recourant, qui a admis avoir des consommateurs de droguedouce parmi sa clientèle. Enfin, elle a relevé que les prix pratiqués necorrespondaient pas à ceux exigibles pour de simplesplantes de décoration eta noté que le recourant lui-même et sa familleétaient consommateurs dechanvre sous forme de stupéfiants, produits que l'on a retrouvés en quantitéimportante à son domicile. Les critiques formulées par le recourant à l'encontre de ces indices sontinfondées. C'est en vain qu'il reproche à la cour cantonale de ne pas avoirétabli que les clients avaient effectivement produit des stupéfiants desboutures qu'il leur avait vendues, dès lors que la loi n'exige pas que lesacquéreurs soient punissables ou aient été condamnés selon les art. 19, 19aou 19c LStup. Lorsque le recourant soutient que les prix pratiqués n'étaientpas excessifs, en comparaison avec un rosier en pot qui coûte 15 fr., iloublie qu'il ne vendait pas, pour ce prix, des plantes, mais de simplesboutures, de sorte que sa comparaison n'est pas pertinente. Enfin, il estsans pertinence que le recourant n'ait pas vendu ces plantes à des mineurs etqu'il ait pris des précautions pour faire comprendre à ces clients que
lesboutures vendues n'avaient qu'un but ornemental. Au vu des éléments mentionnés par la cour cantonale, il n'est pas arbitraired'avoir conclu que les boutures vendues étaient destinées à des finsillicites. Les griefs soulevés doivent donc être rejetés. 4.2 Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir retenu, de manièrearbitraire, qu'il savait que les tisanes qu'il vendait contenaient uneconcentration en THC supérieure à 0,3 %. Il explique que, sauf erreur, sonfournisseur aurait fait figurer un taux inférieur à 0,3 % sur les paquets etque rien dans le dossier ne permettrait d'établir l'inexistence d'une tellemention. Pour déterminer le contenu de la pensée, qui constitue un "fait interne", lejuge doit se fonder sur des éléments extérieurs révélateurs. En l'espèce, ilest établi que le recourant vendait déjà des plantes et des graines dechanvre dont la teneur en THC dépassaient 0,3 % en vue de la production destupéfiants. En outre, selon le recourant, le taux en THC des tisanes qu'ilvendait était insignifiant, car pour obtenir un effet autre que placebo, letaux de THC devait être supérieur à 3 %. Quant à l'argument du recourant,selon lequel son fournisseur faisait figurer un taux en THC inférieur à 0,3 %sur les paquets, la cour cantonale l'a réfuté, au motif qu'une telle mentionne figurait pas sur les quinze paquets séquestrés par la police. Au vu de ceséléments, il n'est pas arbitraire d'avoir conclu que le recourant étaitconscient que la teneur en THC des tisanes dépassait la limite légale de 0,3%. Mal fondé, le grief soulevé doit être rejeté. 4.3 Le recourant se plaint que la cour cantonale aurait arbitrairement retenuqu'il savait pertinemment que le client auquel il avait loué un pollenisateurallait l'utiliser à des fins illégales. Le dossier ne permettrait pas nonplus d'établir que les appareils assimilables au pollenisateur que lerecourant avait vendus avaient été concrètement utilisés de manièreillicite. Comme on le verra à propos du pourvoi en nullité, le recourant a été reconnu,à tort, coupable de complicité de violation de la LStup pour avoir loué etvendu ces appareils. L'arrêt attaqué sera donc annulé sur ce point, de sorteque les griefs relatifs à cette condamnation sont sans objet. 4.4De manière générale, le recourant reproche à la cour cantonale de s'êtrefondée sur le seul arrêt du Tribunal fédéral du 8 décembre 2005 (1P.711/2005)pour conclure à sa culpabilité, omettant de la sorte d'analyser lescirconstances concrètes de l'espèce. Elle aurait ainsi violé la présomptiond'innocence, le principe de l'accusation et le fardeau de la preuve ainsi quel'obligation d'instruire à charge et à décharge. Un tel grief consistant à critiquer en bloc et de manière largementappellatoire la violation de différents droits constitutionnels ne répond pasaux exigences de forme. Il ne permet pas de saisir immédiatement lesdifférentes critiques et leur motivation spécifique. Ne satisfaisant pas auxexigences de clarté et de précision posées à l'art. 90 al. 1 let.b OJ, legrief soulevé doit être déclaré irrecevable. 5.Enfin, le recourant critique la peine qui lui a été infligée. 5.1 Le recourant soutient que la cour cantonale aurait appliqué l'art.193CPP/VS de manière arbitraire, en s'imposant un certain devoir de réserve danssa tâche d'individualisation de la peine. Le Tribunal fédéral revoit l'interprétation et l'application du droitcantonal sous l'angle restreint de l'arbitraire; il ne s'écarte de lasolution retenue que si celle-ci se révèle insoutenable, en contradictionmanifeste avec la situation effective, ou si elle a été adoptée sans motifsobjectifs et en violation d'un droit certain. En revanche, sil'interprétation défendue par la cour cantonale ne s'avère pas déraisonnableou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de lalégislation en cause, elle sera confirmée, même si une autre solution -éventuellement plus judicieuse - apparaît possible (ATF 123 I 1 consid. 4a p.5; 122 I 61 consid. 3a p. 66/67; 122 III 130 consid. 2a p. 131 et les arrêtscités). L'art. 193 CPP/VS prévoit que "le tribunal peut confirmer, atténuer ouaggraver le jugement de première instance". La cour cantonale a ainsi unplein pouvoir de cognition en fait et en droit. Elle ne saurait cependant sevoir reprocher d'appliquer arbitrairement l'art. 193 CPP/VS en considérant laloi comme violée qu'en cas d'abus ou d'excès du pouvoir d'appréciation et nonlorsque le juge de première instance exerce son pouvoir d'appréciation. Laréserve que s'impose la cour cantonale se justifie, dans la mesure où, mise àpart l'interrogatoire de l'accusé, elle rend souvent son jugement sur la basedes actes du procès en première instance (art. 190 CPP/VS). Au demeurant, lacour cantonale abandonne sa réserve lorsque le réexamen des faits et de leurqualification juridique aboutit à une modification quant aux infractionsretenues contre l'accusé (RVJ 1984 p. 173). Le grief d'arbitraire dansl'application du droit cantonal est ainsi mal fondé. 5.2 Enfin, le recourant reproche à la cour cantonale de ne pas avoir tenucompte de certains éléments lors de la fixation de la peine. Ce faisant, ils'en prend à l'application du droit fédéral (art. 63 CP), de sorte que songrief est irrecevable. 6.Au vu de ce qui précède, le recours de droit public doit être rejeté dans lamesure où il n'est pas irrecevable ou sans objet. Le recourant, qui succombe,doit supporter les frais (art. 156 al. 1 OJ). II. Pourvoi en nullité 7.Saisi d'un pourvoi en nullité, le Tribunal fédéral contrôle l'application dudroit fédéral (art. 269 PPF) sur la base exclusive de l'état de faitdéfinitivement arrêté par la cour cantonale (cf. art. 277bis et 273 al. 1let. b PPF). Le raisonnement juridique doit se fonder sur les faits retenusdans la décision attaquée, dont le recourant ne peut s'écarter. Le Tribunalfédéral n'est pas lié par les motifs invoqués, mais il ne peut aller au-delàdes conclusions du recourant (art. 277bis PPF). Celles-ci, qui doivent êtreinterprétées à la lumière de leur motivation, circonscrivent les pointslitigieux (ATF 126 IV 65 consid. 1 p. 66). 8.Condamné en application de l'art. 19 ch. 1 LStup pour avoir cultivé et vendudu chanvre, le recourant conteste que celui-ci ait concrètement servi à desfins illicites. 8.1 L'art. 19 ch. 1 LStup déclare punissable celui qui, sans droit, cultivedes plantes à alcaloïdes ou du chanvre en vue de la production de stupéfiants(al. 1). Il punit également celui qui, sans droit, offre, distribue, vend,fait le courtage, procure, prescrit, met dans le commerce ou cède desstupéfiants (al. 4). Le chanvre est une plante à double usage, pouvant aussi bien être consomméeillégalement comme stupéfiant interdit qu'utilisée légalement à titre deplante d'ornementation ou pour en tirer de nombreux produits, tels quetextiles, cordes, papiers, huiles, bières, thés, cosmétiques, etc. Selon lajurisprudence, les différentes formes commerciales du chanvre ne sontconsidérées comme des stupéfiants au sens de la loi que si la teneur en THCest supérieure à la limite légale, soit 0,3 % (ATF 126 IV 198 consid. 1 p.200). Bien que n'ayant aucune teneur en THC, la bouture de chanvre n'est riend'autre qu'une plante de chanvre, de sorte qu'elle tombe également sous lecoup de l'interdiction lorsqu'elle permet d'obtenir, après croissance, duchanvre à haute teneur en THC (arrêt du Tribunal fédéral 6S.189/2001 du31mai 2001, publié in Pra 90/2001 n° 182 p.1107). La jurisprudence a précisé que le taux de THC ne permettait cependant pas, àlui seul, de conclure à la punissabilité de l'auteur, mais qu'il fallaitencore que le but visé soit l'extraction de stupéfiants (ATF 130 IV 83consid. 1.1 p. 86). Le recourant déduit de cette jurisprudence que la culturede chanvre est un délit de résultat, avec pour conséquence que les autoritésde poursuite pénale doivent établir que le chanvre cultivé a concrètementservi à une finalité illicite. Cette interprétation ne peut être suivie. Pourque le producteur de chanvre soit punissable, il suffit d'établir que le butvisé est la production de stupéfiants et que ce but est accepté par l'auteur.Il n'est pas nécessaire que des stupéfiants soient effectivement produits etnotamment que l'acquéreur soit punissable pour extraction ou consommation destupéfiants. 8.2 En l'espèce, l'arrêt attaqué a retenu, de manière à lier la cour de céanset sans arbitraire, que le chanvre cultivé pour Y.________, lequel avait uneteneur en THC supérieure à 0,3 %, devait servir à la production destupéfiants, ce que le recourant a accepté (cf.consid.3). Il est sansimportance de savoir si tel a été finalement le cas et, en particulier, siZ.________ s'est rendu coupable d'extraction de stupéfiants. Il est également établi que les boutures et les graines que le recourant avendues dans son magasin permettaient d'obtenir, après croissance, du chanvreà haute teneur en THC. Le recourant a vendu ces boutures et ces graines, envue de la production de stupéfiants, dans la mesure où il vendaitparallèlement à sa clientèle, parmi laquelle se trouvaient des consommateursde drogue douce, du matériel en relation avec la production et laconsommation de chanvre récréatif (consid. 4.1). Il n'est pas nécessaired'établir que, concrètement, tel ou tel client a effectivement extrait desstupéfiants des plantes et des graines vendues. En définitive, la cour cantonale n'a donc pas violé le droit fédéral, encondamnant le recourant en application de l'art. 19 ch. 1 al. 1 et 4 LStuppour avoir cultivé et vendu du chanvre. Mal fondés, les griefs soulevésdoivent être rejetés. 9.En relation avec la location du pollenisateur et la vente d'appareilsassimilables, le recourant a été condamné pour complicité de l'infraction del'art. 19 ch. 1 LStup. 9.1 A la différence du cas du considérant précédant, l'infraction porte surun appareil et non directement sur des stupéfiants, de sorte que seule lacomplicité peut entrer en considération. L'art. 25 CP punit celui qui auraprêté assistance à autrui pour commettre un crime ou un délit; la complicitéà une contravention n'est en revanche pas punissable, à moins que la loi nele prévoie expressément (art. 104 al.1 CP). Selon la doctrine et lajurisprudence, le délit ou le crime auquel le complice entend participer doitrecevoir au moins un commencement d'exécution (accessiorété "réelle"). Lecomplice n'est punissable que si l'acte principal atteint un degré deréalisation tel que son auteur est lui-même punissable en vertu des art. 21 à23 CP; le terme "commettre" (art. 25 CP) inclut en effet la tentative soustoutes ses formes. La participation accessoire reste impunissable tant que leprojet commun n'a pas atteint le stade de la tentative (ATF 81 IV 285 consid.II/1b p. 292; Marc Forster, Basler Kommentar, n. 3 ss ad art.26, p. 298;Stratenwerth, Schweizerisches Strafrecht, Allgemeiner Teil I, 3e éd., Berne2005, § 13 n. 89; Trechsel, Schweizerisches Strafgesetzbuch, Kurzkommentar,2e éd., Zurich 1997, p. 95, n. 23). 9.2 En l'espèce, la cour cantonale a retenu que le recourant avait loué,respectivement vendu, les appareils litigieux et qu'il devait sérieusementenvisager que ceux-ci soient utilisés pour produire des stupéfiants. La courde céans ignore cependant si les clients du recourant devaient produire desstupéfiants pour leur propre consommation ou en vue de les remettre à destiers. Dans le premier cas, seule une contravention entrerait enconsidération (art. 19c et 19a LStup), et toute complicité est exclue (art.26 LStup et 104 al. 1 CP). Dans le second cas, il faudrait encore établir queles appareils en cause ont effectivement été utilisés pour extraire desstupéfiants. Il ne suffit pas en effet que les appareils aient été vendus envue d'extraire la résine du chanvre, mais encore faut-il que le délitprincipal, ici l'extraction de stupéfiants, ait au moins atteint le seuil dela tentative. La cour cantonale a donc violé le droit fédéral en condamnantle recourant pour complicité de trafic de stupéfiants sur la base des faitsretenus dans l'arrêt attaqué. Le pourvoi doit être admis sur ce point. 10.L'admission partielle du pourvoi entraîne l'annulation de l'arrêt attaqué etle renvoi de la cause à la cour cantonale. Le recourant a en outre soulevé ungrief relatif à la fixation de la peine. A la suite de l'admission partielledu pourvoi sur la question de la complicité de l'infraction définie à l'art.19 ch. 1 LStup, la cour cantonale devra revoir la peine, de sorte qu'il ne sejustifie pas de traiter ce grief. 11.Le recourant obtient partiellement gain de cause, de sorte qu'il y a lieu deconsidérer que la part des frais qui devrait être mise à sa charge pour lapartie où il succombe (art. 278 al. 1 PPF) est compensée par l'indemnité quidevrait lui être allouée pour celle où il obtient gain de cause (art. 278 al.3 PPF). Il n'y a donc pas lieu de percevoir de frais ni d'allouer d'indemnitéau recourant. Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: I. Recours de droit public 1.Le recours est rejeté, dans la mesure où il n'est pas irrecevable ou sansobjet. 2.Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.II. Pourvoi en nullité 3.Le pourvoi est partiellement admis, l'arrêt attaqué est annulé et la causeest renvoyée à la cour cantonale pour nouveau jugement; pour le surplus, lepourvoi est rejeté. 4.Il n'est pas perçu de frais ni alloué d'indemnité.III. Communication 5.Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, auMinistère public valaisan et au Tribunal cantonal du canton du Valais, Courpénale I. Lausanne, le 17 août 2006 Au nom de la Cour de cassation pénaledu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6P.114/2006
Date de la décision : 17/08/2006
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-08-17;6p.114.2006 ?
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