La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/08/2006 | SUISSE | N°C.216/05

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 16 août 2006, C.216/05


Cause {T 7}C 216/05 Arrêt du 16 août 2006IIe Chambre Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Borella et Kernen. Greffière :Mme Berset S.________, recourant, représenté par Me Olivier Subilia, avocat, chemin desTrois-Rois 5bis, 1005 Lausanne, contre Caisse publique cantonale vaudoise de chômage, rue Caroline 9, 1014 Lausanne,intimée, Tribunal administratif du canton de Vaud, Lausanne (Jugement du 16 juin 2005) Faits: A.S. ________, travaillait en qualité de chef technique d'exploitation auservice de la société X.________ Sàrl. S.________ est le mari de X.________,associée gér

ante avec signature individuelle, laquelle détient dix-neuf p...

Cause {T 7}C 216/05 Arrêt du 16 août 2006IIe Chambre Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Borella et Kernen. Greffière :Mme Berset S.________, recourant, représenté par Me Olivier Subilia, avocat, chemin desTrois-Rois 5bis, 1005 Lausanne, contre Caisse publique cantonale vaudoise de chômage, rue Caroline 9, 1014 Lausanne,intimée, Tribunal administratif du canton de Vaud, Lausanne (Jugement du 16 juin 2005) Faits: A.S. ________, travaillait en qualité de chef technique d'exploitation auservice de la société X.________ Sàrl. S.________ est le mari de X.________,associée gérante avec signature individuelle, laquelle détient dix-neuf partssociales sur vingt. S. ________ a été congédié par son employeur avec effet au 31 mars 2003. Le 7avril 2003, il a déposé une demande d'indemnité de chômage à compter du 1eravril 2003. Par décision du 4 février 2004, la Caisse cantonale de chômage (la caisse) arejeté la demande au motif que l'épouse de S.________ dirigeait l'entreprisequi l'avait licencié. Par décision du même jour, la caisse a exigé del'assuré la restitution du montant de 28'648fr.50 représentant lesindemnités de chômage indûment perçues du 1eravril au 30 novembre 2003.Saisie d'une opposition contre ces deux décisions, la caisse les a rejetéespar une nouvelle décision du 22 juillet 2004. B.Par jugement du 16 juin 2005, le Tribunal administratif du canton de Vaud arejeté le recours formé contre cette décision par l'assuré. C.S.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dontil demande la réforme en ce sens que le versement de l'indemnité de chômageest confirmé. A titre subsidiaire, il conclut à ce qu'il soit libéré del'obligation de restituer les prestations en cause. A titre très subsidiaire,il demande le renvoi de la cause à l'autorité intimée pour nouvelle décisiondans le sens des considérants, le tout sous suite de frais et dépens. La caisse et l'Office régional de placement de Nyon s'en remettent à justice.Quant au Secrétariat d'Etat à l'économie, il a renoncé à se déterminer. Considérant en droit: 1.Le litige porte sur le droit du recourant à l'indemnité de chômage ainsi quesur l'obligation de ce dernier de restituer la somme de 28'648fr50 au titrede l'indemnité versée entre le 1er avril et le 30 novembre 2003. En revanche,dans la mesure où la conclusion subsidiaire du recourant tend à l'obtentiond'une telle remise qui n'a pas fait l'objet d'une décision, elle sort del'objet du litige et doit être déclarée irrecevable (cf. ATF 126 V 399 ssconsid. 2). 2.2.1Selon l'art. 31 al. 3 let. c LACI, n'ont pas droit à l'indemnité en cas deréduction de l'horaire de travail, les personnes qui fixent les décisions queprend l'employeur - ou peuvent les influencer considérablement - en qualitéd'associé, de membre d'un organe dirigeant de l'entreprise ou encore dedétenteur d'une participation financière à l'entreprise; il en va de même desconjoints de ces personnes, qui sont occupés dans l'entreprise. Dans un arrêt M. du 4 septembre 1997 publié aux ATF 123 V 234, le Tribunalfédéral des assurances a explicité les motifs fondant l'applicationanalogique de cette règle à l'octroi de l'indemnité de chômage (consid. 7).Il suffit d'y renvoyer. Ainsi, la jurisprudence étend l'exclusion du conjointdu droit à l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail, au droità l'indemnité de chômage (cf. arrêt non publié M. du 26 juillet 1999 [C123/99]; voir aussi Regina Jäggi, Eingeschränkter Anspruch aufArbeitslosenentschädigung bei arbeitgeberähnlicher Stellung durch analogeAnwendung von Art. 31 Abs. 3 lit. c AVIG, RSAS 2004, p. 9 s.). En effet, lesconjoints peuvent exercer une influence sur la perte de travail qu'ilssubissent, ce qui rend leur chômage difficilement contrôlable. En outre,aussi longtemps que cette influence subsiste, il existe une possibilité deréengagement. Dans ce cas également, il s'agit de ne pas détourner laréglementation en matière d'indemnité en cas de réduction de l'horaire detravail, par le biais d'une disposition sur l'indemnité de chômage (DTA 2005p. 131 [arrêt W. du 7 décembre 2004, C 193/04]). 2.2 Le recourant fait tout d'abord valoir que l'application de cettejurisprudence revient à retenir l'existence d'un abus de droit ou d'unefraude à la loi dans tous les cas de demande d'indemnités de chômage par unassuré qui se trouve dans une position analogue à celle d'un employeur, demême qu'au conjoint de celui-ci. En cela, il critique les principesdéveloppés ci-dessus et sollicite un changement de la jurisprudence constantede la Cour de céans en la matière. Or, pour qu'un revirement de jurisprudencesoit compatible avec le principe de l'égalité de traitement que l'art. 8 al.1 Cst. a repris de l'art. 4 al. 1 aCst. sans en modifier la portéematérielle, il faut qu'il repose sur des motifs objectifs, à savoir uneconnaissance plus approfondie de l'intention du législateur, un changementdes circonstances extérieures ou l'évolution des conceptions juridiques. Lesmotifs doivent être d'autant plus sérieux que la jurisprudence est ancienne.Si elle se révèle erronée ou que son application a conduit à des abusrépétés, elle ne saurait être maintenue (ATF 131 V 110 consid. 3.1, 130 V 372consid.5.1, 129 V 292 consid. 2.2, 373 consid. 3.3, 127 V 273 consid. 4a,355 consid. 3a et les références). En l'occurrence, la jurisprudence incriminée résulte d'une interprétationattentive de la loi et prend en considération le but et le sens de ladisposition concernée. Le recourant se limite pour sa part à exposer sapropre interprétation du texte légal en niant le bien-fondé de l'applicationanalogique de l'art. 31 al. 3 let. c LACI au versement de l'indemnité dechômage, si bien qu'on ne voit pas en quoi elle pourrait justifier lechangement de cette jurisprudence bien établie. 2.3 Le recourant se prévaut en outre d'une violation des principes de lalégalité, de la réserve de la loi, de la protection de la sphère privée (art.13 Cst. et 8 CEDH) du droit au mariage et de la famille (art. 14 Cst. et 12CEDH). S'il est vrai que la jurisprudence, fondée sur l'art. 31 al. 3 let. c LACI,n'est pas applicable aux personnes qui entretiendraient des liens étroitsavec leur employeur sans être mariées, il n'en demeure pas moins que cerégime résulte directement de la loi qui exclut du droit à certainesprestations le conjoint occupé dans l'entreprise d'une personne mentionnée àl'art. 31 al. 3 let. c LACI, lorsqu'il existe un risque de mise àcontribution abusive de l'assurance. C'est ainsi qu'une clause d'exclusionidentique à celle de l'art. 31 al. 3 let. c LACI figure -pour les mêmesmotifs- aux art. 51 al. 2 LACI (indemnité en cas d'insolvabilité) et 42 al.3 LACI ( indemnité en cas d'intempéries) lequel renvoie à l'art. 31 al. 3LACI. Ces considérations relatives au principe de la légalité s'appliquentégalement à la prétendue violation de la réserve de la loi, dès lors quecelle-ci en est partie intégrante, aux côtés de la suprématie de la loi,selon la conception classique (voir par exemple ATF 131 II 565 consid. 3.1).Ce(s) moyen(s) doit (doivent) être rejeté (s). Le respect de la vie privée, consacré à l'art 13 Cst. -qui concordelargement avec l'art. 8 CEDH- confère à toute personne le droit d'organisersa vie et d'entretenir des rapports avec d'autres personnes, sans que l'Etatne l'en empêche; il inclut le respect de la vie intime (cf. Message duConseil fédéral du 20 novembre 1996 relatif à une nouvelle Constitutionfédérale, in FF 1997 I 154; SJ 2005 I p. 31 consid 2.3 et les références). Lanégation du droit à l'indemnité de chômage à un (ancien) employé d'unesociété dans laquelle son conjoint détient un pouvoir décisionnel neconstitue pas une ingérence arbitraire des pouvoirs publics proscrite parl'art. 13 Cst. (cf. à propos de cette disposition: Auer/Malinverni/Hottelier,Droit constitutionnel suisse, vol. II: Les droits fondamentaux, 2ème édition,Berne 2006, p.185 ss ch. 381 ss). Ces considérations s'appliquent mutatismutandis à la prétendue violation de l'art. 14 Cst. -lequel se recoupe trèslargement avec l'art. 13 al. 1 Cst.; cf. SJ 2005 I p. 31 consid. 2.3-,garantissant le droit au mariage et à la famille et dont l'art. 12 CEDHconstitue le pendant (Auer/Malinverni/Hottelier, op. cit. p. 201 ss ch 411ss, not. ch. 413 et 414). En particulier on ne voit pas en quoi les principesconsacrés par l'arrêt ATF 123 V 234 seraient un obstacle au mariage ou à laconstitution d'une vie de famille. Ces deux moyens doivent dès lors êtrerejetés dans la mesure où ils sont recevables. 2.4 Au vu de ce qui précède, c'est à juste titre que l'administration et lespremiers juges ont nié le droit de l'assuré aux indemnités de chômage. 3.Il reste à examiner la question de la restitution des indemnités perçues aucours de la période en cause. 3.1 L'art. 25 al. 1 LPGA, auquel renvoie l'art. 95 al. 1 LACI et aux termesduquel les prestations indûment touchées doivent être restituées (1èrephrase), est issu de la réglementation et de la jurisprudence antérieures àl'entrée en vigueur de la LPGA (ATF 130 V 319 consid. 5.2 et les références).Selon cette jurisprudence, développée à partir de l'art. 47 al. 1 LAVS (danssa teneur en vigueur jusqu'au 31décembre 2002) et applicable par analogie àla restitution d'indemnités indûment perçues dans l'assurance-chômage (cf.ATF 122 V 368 sv. consid. 3, 110 V 179 consid. 2a, et les références),l'obligation de restituer suppose que soient remplies les conditions d'unereconsidération ou d'une révision procédurale de la décision par laquelle lesprestations en cause ont été allouées (ATF 129 V 110 consid. 1.1, 126V23sv. consid. 4b, 122 V 21 consid. 3a). La reconsidération et la révision sont désormais explicitement réglées àl'art. 53 al. 1 et 2 LPGA qui codifie la jurisprudence antérieure à sonentrée en vigueur: selon un principe général du droit des assurancessociales, l'administration peut reconsidérer une décision formellement passéeen force de chose jugée sur laquelle une autorité judiciaire ne s'est pasprononcée quant au fond, à condition qu'elle soit sans nul doute erronée etque sa rectification revête une importance notable. En outre, par analogieavec la révision des décisions rendues par les autorités judiciaires,l'administration est tenue de procéder à la révision d'une décision entrée enforce formelle lorsque sont découverts des faits nouveaux ou de nouveauxmoyens de preuve, susceptibles de conduire à une appréciation juridiquedifférente (SVR 2004 ALV n°14 p. 43 sv. consid. 3 [arrêt D. du 23 mars 2004,C 227/03]; ATF 127 V 469 consid. 2c et les références). 3.2 En l'espèce, ainsi que les premiers juges l'ont retenu, le paiement del'indemnité de chômage au recourant résulte d'une décision manifestementerronée. En effet, du moment que son épouse occupe une fonction dirigeante ausein de l'entreprise X.________ Sàrl, l'allocation d'une indemnité de chômageau recourant apparaît sans nul doute erronée. En outre, la rectification desdécisions (matérielles) d'octroi de ladite prestation revêt incontestablementune importance notable au vu de son montant (28'648fr.50), de sorte que lesconditions d'une reconsidération au sens de l'art. 53 al. 2 LPGA et de lajurisprudence, partant d'une restitution, sont réunies. Le recours se révèledès lors mal fondé. Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Dans la mesure où il est recevable, le recours est rejeté. 2.Il n'est pas perçu de frais de justice. 3.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal administratif ducanton de Vaud, à l'Office régional de placement Nyon et au Secrétariatd'Etat à l'économie. Lucerne, le 16 août 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances La Présidente de la IIe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.216/05
Date de la décision : 16/08/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-08-16;c.216.05 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award