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16/08/2006 | SUISSE | N°2P.116/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 16 août 2006, 2P.116/2006


{T 0/2}2P.116/2006/svc Arrêt du 16 août 2006IIe Cour de droit public MM. et Mme les Juges Merkli, Président,Yersin et Berthoud, Juge suppléant.Greffière: Mme Dupraz. X. ________,recourant, représenté par Me Sylvain Métille, avocat, contre Département de la justice, de la sécuritéet des finances du canton de Neuchâtel,Château, case postale, 2001 Neuchâtel 1,Tribunal administratif du canton de Neuchâtel,rue du Pommier 1, case postale 3174, 2001 Neuchâtel 1. Résiliation des rapports de service, recours de droit public contre l'arrêtdu Tribunal administratif du canton de Neuchât

eldu 20 mars 2006. Faits: A.X. ________, né le 13 août 1951, a été...

{T 0/2}2P.116/2006/svc Arrêt du 16 août 2006IIe Cour de droit public MM. et Mme les Juges Merkli, Président,Yersin et Berthoud, Juge suppléant.Greffière: Mme Dupraz. X. ________,recourant, représenté par Me Sylvain Métille, avocat, contre Département de la justice, de la sécuritéet des finances du canton de Neuchâtel,Château, case postale, 2001 Neuchâtel 1,Tribunal administratif du canton de Neuchâtel,rue du Pommier 1, case postale 3174, 2001 Neuchâtel 1. Résiliation des rapports de service, recours de droit public contre l'arrêtdu Tribunal administratif du canton de Neuchâteldu 20 mars 2006. Faits: A.X. ________, né le 13 août 1951, a été nommé gendarme dès le 1erjuillet 1972par le Département de police, actuellement le Département de la justice, dela sécurité et des finances, du canton de Neuchâtel (ci-après : leDépartement cantonal). Après avoir occupé un poste de secrétaire aux archivesjudiciaires de la Police cantonale neuchâteloise de décembre 1993 à septembre1998, il a été réintégré au sein de la Gendarmerie neuchâteloise à partir du1er octobre 1998. Il a été affecté au poste de A.________ en qualité de chefde groupe, puis de remplaçant du chef de poste le 1er avril 2001 et enfin enqualité de chef de poste dès le 1eroctobre 2001, avec le grade desergent-major dès le 1er janvier 2002. En automne 2002, la hiérarchie de X.________ a appris que deux de sessubordonnés du poste de A.________ avaient rencontré d'importantesdifficultés relationnelles avec lui. Elle a alors proposé à X.________ undéplacement "à l'interne" pour une mission temporaire à l'issue de laquelleserait examinée son affectation dans une nouvelle fonction n'impliquant pasde conduite de personnel. Le 30 avril 2003, le commandant de la Policecantonale neuchâteloise a demandé au Département cantonal d'ouvrir uneprocédure de renvoi à l'encontre de X.________, qui avait refusé la mutationproposée. Par décision du 19juin 2003, le Département cantonal a résilié lesrapports de service de X.________ avec effet au 30 septembre 2003 en raisondes graves doléances dont il avait fait l'objet de la part de sescollaborateurs, tant au poste de B.________ (cf. rapport du commandant de laPolice cantonale neuchâteloise du 26 février 1993) qu'à celui de A.________(cf. lettre du Département cantonal à X.________ du 7 novembre 2002). Saisi d'un recours contre la décision du Département cantonal du 19juin2003, le Tribunal administratif du canton de Neuchâtel (ci-après : leTribunal administratif) l'a admis, par arrêt du 16 septembre 2003. Il aconsidéré que les documents mettant en évidence les conflits relationnelssurvenus au poste de A.________ ne constituaient que des allégations qu'ilappartenait au Département cantonal de vérifier. Il a en outre précisé qu'ilconvenait de ne pas écarter la procédure de l'avertissement préalable. B.Chargé de l'instruction du dossier, le Service juridique du canton deNeuchâtel (ci-après: le Service juridique) a procédé à l'audition de quatretémoins. Par décision du 28 septembre 2004, le Département cantonal a résiliéles rapports de service de X.________ avec effet au 31 décembre 2004. Il aestimé que le comportement de X.________ excluait la poursuite des rapportsde service et qu'un avertissement ne pouvait pas entrer en considération dèslors que seule était en cause l'attitude de l'intéressé dans la gestion dupersonnel. X. ________ a déposé un deuxième recours, contre la décision du Départementcantonal du 28 septembre 2004, auprès du Tribunal administratif. Par arrêt du20 janvier 2005, celui-ci a admis le recours et renvoyé à nouveau la cause auDépartement cantonal pour qu'il établisse rigoureusement les faits, enparticulier qu'il vérifie la réalité des reproches formulés à l'encontre deX.________ et qu'il détermine notamment si la détresse dans laquelle troiscollaborateurs s'étaient trouvés pouvait avoir son origine dans d'autresévénements. C.A la suite du nouvel arrêt de renvoi du 20 janvier 2005, le Service juridiquea procédé à une enquête générale, sous forme de questionnaire adressé àvingt-deux collaborateurs ayant travaillé aux côtés de X.________. Celui-ci aeu la possibilité de se prononcer sur les résultats de cette instruction.Puis, par décision du 27 mai 2005, le Département cantonal a résilié lesrapports de service de X.________ avec effet au 31 août 2005. Il a relevé quecette résiliation s'imposait en raison du climat insoutenable dans lequelX.________ avait plongé les collaborateurs du poste de A.________, ce quiempêchait d'envisager une réintégration de l'intéressé dans sa fonction. Saisi d'un troisième recours, contre la décision du Département cantonal du27 mai 2005, le Tribunal administratif l'a rejeté par arrêt du 20 mars 2006.Il a retenu en substance que l'interrogatoire sous forme écrite des personnesayant travaillé sous les ordres de X.________ n'était pas critiquable et que,malgré la formulation du questionnaire qui ne respectait pas les instructionsde l'arrêt de renvoi susmentionné du 20 janvier 2005, les informationsrecueillies répondaient partiellement à ses attentes. Ces déclarationsconfirmaient que le comportement de l'intéressé était à l'origine des gravesdifficultés d'ordre relationnel vécues par certains de ses subordonnés. LeTribunal administratif a ensuite rappelé qu'un renvoi pour justes motifs,même en l'absence d'une faute de l'agent concerné, pouvait être fondé sur larupture des rapports de confiance liant l'autorité à ses collaborateurs;ainsi, un juste motif pouvait être réalisé lorsqu'un fonctionnaire, par saseule présence, perturbait la bonne marche du service. Selon le Tribunaladministratif, il était vain d'accorder à X.________ un délai pours'améliorer dans la conduite du personnel dès lors que sa seule présence, enraison du climat qu'il avait instauré, était objectivement de nature àprovoquer des perturbations. D.Agissant par la voie du recours de droit public, X.________ demande auTribunal fédéral, avec suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt duTribunal administratif du 20 mars 2006. Il se plaint de la violation del'interdiction de l'arbitraire et de garanties de procédure, plusparticulièrement du droit d'être entendu ainsi que de l'indépendance et del'impartialité du tribunal. Le Tribunal administratif et le Département cantonal concluent au rejet durecours. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recoursqui lui sont soumis (ATF 132 III 291 consid. 1 p. 292). 1.1 Selon la jurisprudence relative à l'art. 88 OJ, le recours de droitpublic est ouvert uniquement à celui qui est atteint par l'acte attaqué dansses intérêts personnels, actuels et juridiquement protégés (ATF 130 I 306consid. 1 p. 309). Le recours formé pour sauvegarder l'intérêt général ou nevisant qu'à préserver des intérêts de fait est en revanche irrecevable (ATF126 I 43 consid. 1a p. 44, 81 consid. 3b p.85). Sont des intérêts personnelset juridiquement protégés ceux qui découlent d'une règle de droit fédéral oucantonal ou directement d'une garantie constitutionnelle spécifique pourautant que les intérêts en cause relèvent du domaine que couvre ce droitfondamental (ATF 129 I 113 consid. 1.2 p. 117, 217 consid. 1 p. 219). Laprotection contre l'arbitraire inscrite à l'art. 9 Cst. - qui doit êtrerespectée dans toute l'activité administrative de l'Etat - ne confère pas àelle seule la qualité pour agir au sens de l'art. 88 OJ (ATF 131 I 366consid. 2.6 p.371; 126 I 81 consid. 3-6 p. 85 ss). Enfin, il incombe aurecourant d'alléguer les faits qu'il considère comme propres à fonder saqualité pour recourir, lorsqu'ils ne ressortent pas de façon évidente de ladécision attaquée ou du dossier (ATF 120 Ia 227 consid. 1 p. 229; 115Ib 505consid. 2 in fine p. 508).S'agissant de la fonction publique, la jurisprudence considère que l'agentqui reçoit son congé n'a qualité pour former un recours de droit public quesi le droit cantonal subordonne son licenciement à des conditions matérielles(ATF 126 I 33 consid. 1 p. 34; cf. aussi ATF 120Ia 110 consid. 1a et 1b p.112 et 107 Ia 182 consid. 2a et 2b p.184). L'arrêt incriminé fonde le licenciement du recourant sur l'art. 45 de la loineuchâteloise du 28 juin 1995 sur le statut de la fonction publique(ci-après: le Statut) qui, en substance, habilite l'autorité de nomination àordonner le renvoi d'un titulaire de fonction publique pour des raisonsd'inaptitude, de prestations insuffisantes, de manquements graves ou répétésaux devoirs de service ou pour d'autres motifs graves ne permettant plus lapoursuite des rapports de service. La législation neuchâteloise subordonneainsi le licenciement du recourant à de justes motifs, soit à des conditionsmatérielles, de sorte que l'intéressé a qualité pour recourir au sens del'art. 88 OJ. 1.2 Pour le surplus, déposé en temps utile et dans les formes prescrites parla loi, le présent recours est en principe recevable au regard des art. 84 ssOJ, si bien que le Tribunal fédéral peut entrer en matière. 1.3 Selon l'art. 90 al. 1 lettre b OJ, l'acte de recours doit - sous peined'irrecevabilité - contenir un exposé des faits essentiels et un exposésuccinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés,précisant en quoi consiste la violation. Lorsqu'il est saisi d'un recours dedroit public, le Tribunal fédéral n'a donc pas à vérifier, de lui-même, sil'acte attaqué est en tout point conforme au droit et à l'équité; iln'examine que les moyens de nature constitutionnelle, invoqués etsuffisamment motivés dans le mémoire de recours (ATF 130 I 26 consid. 2.1 p.31, 258 consid. 1.3 p. 261/262; 110 Ia 1 consid. 2a p.3/4). En outre, dansun recours pour arbitraire, le recourant ne peut pas se contenter decritiquer l'acte entrepris comme il le ferait dans une procédure d'appel oùl'autorité de recours peut revoir librement l'application du droit. Il doitpréciser en quoi l'acte attaqué serait arbitraire (ATF 128 I 295 consid. 7ap. 312).C'est à la lumière de ces principes que doivent être appréciés les moyenssoulevés par l'intéressé. 2.Le recourant se plaint de la violation de garanties de procédure, qui sontdes droits de nature formelle. Dans la mesure où la violation de tels droitséquivaut à un déni de justice formel, elle entraîne en principe l'annulationde l'acte entrepris sans qu'il soit même nécessaire de vérifier si, au fond,l'acte en cause apparaît justifié ou non. En conséquence, il convientd'examiner en priorité les griefs relatifs à ces droits. 2.1 Le recourant reproche au Tribunal administratif d'avoir violé son droitd'être entendu, en ce sens qu'il n'a pas été entendu personnellement et qu'iln'a pas pu s'exprimer sur la résiliation pour justes motifs dans l'intérêt duservice. Il reprend en outre sa critique sur le mode d'audition des témoinset le choix des personnes entendues pour en déduire qu'il n'a pas pu fairevaloir correctement son point de vue. 2.1.1 Le contenu du droit d'être entendu est déterminé en premier lieu parles dispositions cantonales de procédure, dont le Tribunal fédéral necontrôle l'application et l'interprétation que sous l'angle de l'arbitraire;dans tous les cas, l'autorité cantonale doit cependant observer les garantiesminimales déduites de l'art. 29 al. 2 Cst., dont le Tribunal fédéral examinelibrement le respect (ATF 127 III 193 consid. 3 p. 194; cf. aussi ATF 125 I257 consid. 3a p. 259). Le recourant invoque non seulement l'art. 29 Cst., mais encore l'art.28 dela constitution de la République et Canton de Neuchâtel du 24 septembre 2000(ci-après: Cst./NE) et l'art. 47 du Statut. Les dispositions cantonalesprécitées ne semblent pas fournir à l'intéressé une protection plus grandeque la garantie constitutionnelle fédérale. Le recourant ne le démontre entout cas pas. Dès lors, le grief soulevé doit être examiné exclusivement à lalumière des principes déduits directement de l'art. 29 al. 2 Cst. (cf. ATF119 Ia 136 consid. 2c p.138/139 au sujet de l'art. 4 aCst.). Le droit d'être entendu garanti constitutionnellement comprend le droit pourl'intéressé de prendre connaissance du dossier, de s'exprimer sur leséléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situationjuridique, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donnésuite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administrationdes preuves essentielles ou, à tout le moins, de s'exprimer sur son résultatlorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 129 II 497consid. 2.2 p. 504/505; 127 III 576 consid. 2c p. 578/579). A lui seul,l'art. 29 al. 2 Cst. ne confère pas le droit d'être entendu oralement (cf.,au sujet de l'art. 4 aCst., ATF 122 II 464 consid. 4c p. 469; AlfredKölz/Isabelle Häner, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege desBundes, 2eéd., Zurich 1998, n. 150, p. 53), ni celui d'obtenir l'audition detémoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1 p. 428/429). Au surplus, la jurisprudenceadmet que le droit d'être entendu n'empêche pas l'autorité de mettre un termeà l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former saconviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciationanticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude queces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 130 II 425consid. 2.1 p. 429 et la jurisprudence citée). 2.1.2 Comme cela ressort de l'arrêt entrepris, le recourant a eu diversentretiens avec les commandants de la Gendarmerie et de la Police cantonaleneuchâteloises dès l'automne 2002. Le 11 novembre 2002, il a également étéentendu personnellement par la Conseillère d'Etat en charge du Départementcantonal. En outre, le 31 janvier 2003, celle-ci a à nouveau proposé aurecourant de le rencontrer personnellement, accompagné de son conseil,invitation à laquelle il n'a pas donné suite. Dès qu'il a été question del'ouverture d'une procédure de renvoi, le recourant a eu la possibilité des'exprimer, ce qu'il a fait, par courrier du 23 mai 2003. Dans cesconditions, il faut admettre que son droit d'être entendu a été respecté.Pour le surplus, l'autorité intimée n'était pas tenue d'inviter le recourantà se déterminer sur l'un ou l'autre point de l'argumentation juridiquequ'elle entendait développer dans son arrêt. Si l'audition de témoins est la règle en procédure civile, elle ne constituequ'un moyen de preuve subsidiaire en procédure administrative (ATF 130 II 169consid. 2.3.4 p. 173). Le Service juridique, en charge de l'instructioncomplémentaire ordonnée par le Tribunal administratif, était habilité àprocéder par l'envoi d'un questionnaire écrit. Le 18 mars 2005, il ad'ailleurs confirmé qu'il agirait de la sorte au recourant, qui souhaitaitprivilégier l'audition de témoins, sans que l'intéressé réagisse formellementcontre cette prise de position. Si le recourant estimait que d'autrescollaborateurs devaient être interpellés, il lui incombait d'en dresser laliste; s'il jugeait opportun de recueillir des déclarations de collèguesfavorables à ses méthodes de direction
du poste de A.________, il luiappartenait de formuler à cet effet les questions idoines. Le recourant estmalvenu de critiquer le choix des personnes entendues dès lors qu'il avait lapossibilité de compléter la liste établie et qu'il n'en a pas fait usage. Parailleurs, les insinuations du recourant selon lesquelles les témoignagesrecueillis auraient été orchestrés par la hiérarchie sont dépourvues de toutepreuve ou même de tout indice de pression indûment exercée. Au demeurant, lerecourant n'a pas fait état de telles irrégularités dans ses observations du17 mai 2005 sur les mesures d'instruction ordonnées et les témoignagesfavorables exprimés par certains collègues contredisent l'hypothèse dedéclarations influencées et contrôlées. C'est donc en vain que le recourantfait valoir une atteinte au droit d'être entendu. Pour ce qui concerne les moyens du recourant liés au mode d'audition destémoins et au choix de ceux-ci, il convient de se reporter au considérant 3.2ci-dessous. 2.2 Le recourant se plaint encore de la violation d'autres garantiesconstitutionnelles de procédure. Il soutient qu'il incombait au Tribunaladministratif de reprendre entièrement l'instruction de la cause et deprocéder lui-même à l'audition des personnes dont il estimait le témoignagenécessaire plutôt que de statuer, de guerre lasse, sur un dossier dontl'instruction était insatisfaisante. L'intéressé invoque à cet égard les art.29 et 30 Cst. ainsi que les art. 28 et 29 Cst./NE, dont la portée estsemblable à celle des dispositions constitutionnelles fédérales précitées,comme le recourant le reconnaît. En droit interne, le droit à un procès équitable est consacré essentiellementpar l'art. 30 al. 1 Cst. relatif aux garanties de procédure judiciaire. Seloncette disposition, toute personne dont la cause doit être jugée dans uneprocédure judiciaire a droit à ce que sa cause soit portée devant un tribunalétabli par la loi, compétent, indépendant et impartial. En droitinternational, l'art. 6 par. 1 CEDH prévoit que toute personne a notammentdroit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant etimpartial, établi par la loi, qui décidera en particulier des contestationssur ses droits et obligations de caractère civil. Selon la jurisprudence,l'art. 6 par. 1 CEDH ne s'applique pas aux litiges relatifs à la cessationdes rapports de service des fonctionnaires, dont la fonction implique uneparticipation à l'exercice de la puissance publique (ATF 126 I 33 consid. 2bp.34/35).Le recourant ne démontre pas que sa cause aurait été jugée par un tribunalqui n'aurait pas été établi par la loi et qui ne serait ni compétent, niindépendant ou impartial; il n'explique pas en quoi le Tribunal administratifserait dépourvu de ces caractéristiques. Dans ce sens, son argumentation estmanifestement insuffisante au regard des exigences de l'art. 90 al. 1 lettreb OJ. Le seul fait que le Tribunal administratif n'ait pas ordonné l'auditiondes personnes entendues par voie de questionnaire ou n'en ait pas entendud'autres ne saurait signifier qu'il ne répond pas aux exigencesd'impartialité et d'indépendance requises par l'art. 30 al. 1 Cst. Lesgaranties constitutionnelles du justiciable en matière de déroulement del'instruction d'une procédure judiciaire relèvent, en fait, du droit d'êtreentendu. A cet égard, le recourant a d'autant moins de raisons de se plaindrede l'absence d'audition de témoins qu'il n'a pas requis ce mode de preuvedans son recours du 20 juin 2005 au Tribunal administratif, ni dans sesobservations complémentaires adressées le 19 août 2005 à cette autorité. Lemoyen que le recourant tire d'un prétendu manque d'équité, d'indépendance etd'impartialité du Tribunal administratif n'est donc pas pertinent. 2.3 Les arguments du recourant fondés sur la violation des garantiesconstitutionnelles de procédure doivent en conséquence être écartés. 3.Le recourant se plaint d'arbitraire dans la constatation des faits et dansl'application du Statut. Il invoque à ce sujet l'art. 9 Cst. et l'art.9Cst./NE qui ne lui confère pas une protection plus étendue que ladisposition constitutionnelle fédérale. 3.1 Une décision est arbitraire lorsqu'elle contredit clairement la situationde fait, qu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair etindiscuté ou qu'elle heurte d'une manière choquante le sentiment de lajustice et de l'équité. A cet égard, le Tribunal fédéral ne s'écarte de lasolution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si elleapparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situationeffective, adoptée sans motifs objectifs ou en violation d'un droit certain.De plus, pour qu'une décision soit annulée, il ne suffit pas que samotivation soit insoutenable; il faut encore que cette décision soitarbitraire dans son résultat. En outre, il n'y a pas arbitraire du seul faitqu'une autre solution - en particulier une autre interprétation de la loi -que celle de l'autorité intimée paraît concevable, voire préférable (ATF 131I 217 consid. 2.1 p. 219; 129I173 consid. 3.1 p. 178; 120 Ia 369 consid. 3ap. 373). Enfin, lorsque le recourant s'en prend à l'appréciation des preuveset à l'établissement des faits, la décision n'est arbitraire que si le jugen'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'ila omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre àmodifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des élémentsrecueillis, il a fait des déductions insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1p. 9). 3.2 Le recourant reproche d'abord au Tribunal administratif de n'avoir pasretenu que l'autorité de nomination avait désigné son remplaçant avant mêmel'ouverture de la procédure de renvoi dirigée à son encontre, qu'il avait étéévalué positivement à maintes reprises, en particulier en 1999, 2000 et 2001,et qu'il avait été privé de la faculté de poser des contre-questions auxpersonnes entendues par voie de questionnaire. Il lui fait également grief den'avoir pas examiné ses objections liées au mode d'interrogation et au choixdes témoins ainsi que de n'avoir pas tiré "la juste conclusion" de laconstatation selon laquelle le Service juridique n'avait pas respecté lesinstructions de l'arrêt de renvoi précité du 20 janvier 2005. Il est exact que l'arrêt entrepris ne mentionne pas la nomination, avec effetau 1er novembre 2003, du caporal Y.________ en qualité de chef de poste àA.________. En fait, le remplacement du recourant, à titre provisoire, avaitété ordonné le 24 janvier 2003 déjà, alors que l'intéressé se trouvait enincapacité de travail. Le recourant n'indique toutefois pas en quoi la lacuneprécitée aurait conduit le Tribunal administratif à rendre une décisionarbitraire. A cet égard, sa motivation ne répond pas aux exigences de l'art.90 al. 1 lettre b OJ. Au demeurant, le Tribunal administratif n'avait pasexclu, dans ses deux premiers arrêts, que le recourant pût être réintégrédans sa fonction, quand bien même il aurait peut-être dû l'exercer dans unautre poste que celui de A.________. En outre, l'absence de mention des évaluations positives dont le recourant afait l'objet ne porte pas à conséquence dans la mesure où l'intéressé aeffectivement fonctionné comme chef de poste dès le 1eroctobre 2001 et où iln'a jamais fait l'objet d'une évaluation dans l'exercice de la fonction pourlaquelle son comportement a été gravement mis en cause. Par ailleurs, lerecourant a été invité, le 24février 2005, à soumettre au Service juridiquela liste de ses propres questions, avec l'indication des destinatairesauxquels ces questions devaient être adressées. Dans la mesure où il arenoncé à cette possibilité, le recourant ne saurait se plaindre d'en avoirété privé. Une copie de l'ensemble des réponses recueillies a été transmisele 7 avril 2005 à l'intéressé, qui a bénéficié de la faculté de déposer sesobservations. Or, dans son écriture du 17 mai 2005, le recourant n'a passollicité d'autres mesures d'instruction.Au surplus, le Tribunal administratif s'est prononcé dans l'arrêt attaqué surle choix du Service juridique de procéder par l'envoi d'un questionnaireécrit. Pour ce qui est du choix des personnes entendues, il était loisible aurecourant de proposer l'audition d'autres collaborateurs, ce dont il s'estabstenu. Enfin, l'autorité intimée a exposé de manière convaincante lesraisons pour lesquelles elle estimait que les réponses apportées à desquestions ne respectant pas les instructions données dans son arrêt de renvoidu 20 janvier 2005 avaient néanmoins permis d'établir l'existence de motifsjustifiant la résiliation des rapports de service de l'intéressé. Les griefs du recourant fondés sur l'arbitraire dans la constatation desfaits doivent dès lors être écartés. 3.3 Alléguant une application arbitraire du droit, le recourant fait valoirqu'en retenant comme juste motif de licenciement le seul intérêt du service,le Tribunal administratif lui a fait supporter la longueur de la procédure aucours de laquelle il a obtenu gain de cause à deux reprises. Par ailleurs, sasituation n'était pas comparable à celle du fonctionnaire dont le renvoi pourraisons graves avait été confirmé le 14 février 2000 par le Tribunal fédéral(ATF 126 I 33). En outre, l'embarras de l'autorité de nomination de leréintégrer dans sa fonction ne justifiait pas un licenciement. Ainsi, l'arrêtentrepris serait arbitraire dans son résultat. 3.4 L'art. 45 al. 1 du Statut, intitulé "Renvoi pour justes motifs ou raisonsgraves" a la teneur suivante: "Si des raisons d'inaptitude, de prestations insuffisantes, de manquementsgraves ou répétés aux devoirs de service ou d'autres raisons graves nepermettent plus la poursuite des rapports de service, l'autorité qui a nommépeut ordonner le renvoi d'un titulaire de fonction publique". Alors que le licenciement disciplinaire suppose une faute (cf. ATF 118Ib 172consid. 2b non publié; RDAF 1995 p. 464, 2P.215/1993, consid. 1b p. 466),jurisprudence et doctrine admettent la possibilité d'une résiliation pourjustes motifs sans qu'une faute soit imputable au fonctionnaire, lorsque lacontinuation de son activité est devenue impossible, même en raisond'événements ne tenant pas au comportement de l'intéressé. Peuvent ainsi êtreconsidérées comme justes motifs toutes les circonstances qui, d'après lesrègles de la bonne foi, font admettre que l'autorité qui nomme ne peut pluscontinuer les rapports de service (cf., par analogie, art. 337 CO). Knappfait une distinction claire (Blaise Knapp, Précis de droit administratif, 4eéd., Bâle 1991, nos 3156-3167, p. 645/646) entre les causes de cessationd'emploi dues au fait de l'agent, telles qu'incapacité, non respect desconditions d'éligibilité, justes motifs tenant à la personne, et les causestenant à l'intérêt du service, par exemple lorsque, par sa seule présence, lefonctionnaire perturbe la marche du service, notamment en cas de conflit depersonnalités au sein d'un même service (Blaise Knapp, op. cit., no 3163, p.646). Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de juger que l'art. 45 al. 1 duStatut se prêtait à une telle interprétation, en ce sens que l'expression"autres raisons graves [qui] ne permettent plus la poursuite des rapports deservice" ne devait pas forcément se rapporter à un comportement déterminé dufonctionnaire et qu'un renvoi pouvait intervenir sans faute de l'intéressé;en outre, l'art. 46 du Statut, prévoyant que le fonctionnaire mis en causedoit disposer d'une occasion de s'améliorer, ne s'applique que "lorsque lesfaits reprochés au titulaire de fonction publique dépendent de sa volonté oulorsque les exigences de la fonction ne sont pas remplies à satisfaction", cequi laisse entendre que de justes motifs peuvent exister en dehors de telscas (cf. ATF 126 I 33 consid. 3c non publié). Ainsi, l'interprétation duTribunal administratif selon laquelle de justes motifs de renvoi peuvent êtrefondés sur le seul intérêt du service ne prête pas le flanc à la critique.L'instruction à laquelle le Service juridique a procédé après l'arrêt derenvoi précité du 20 janvier 2005 a permis d'établir que, lorsqu'il étaitchef de poste à A.________ le recourant avait instauré un climat tendu etconflictuel résultant de critiques et de dénigrements formulés à l'encontrede ses subordonnés au point que plusieurs d'entre eux avaient déclaré qu'ilsrefuseraient de travailler sous ses ordres et demanderaient leur mutation encas de réintégration du recourant. Comme celui-ci avait perdu la confiancenon seulement de ses subordonnés, mais encore de ses supérieurs, le Tribunaladministratif pouvait retenir, sans arbitraire, que l'intérêt du servicejustifiait le licenciement du recourant. Cette conclusion s'imposait d'autantplus que l'intéressé avait refusé une affectation n'impliquant pas des tâchesde commandement.Contrairement à ce que soutient le recourant, ce n'est pas la longueur de laprocédure qui a amené l'autorité intimée à maintenir son licenciement, maisbien la confirmation des reproches formulés à son encontre dès l'automne2002. Même s'il a obtenu gain de cause à deux reprises devant le Tribunaladministratif, ces succès ne signifiaient pas que le recourant n'avait rien àse reprocher; les deux arrêts de renvoi n'étaient fondés que sur des lacunesdans l'établissement des faits. Si l'instruction de la cause avait étéconduite avec diligence, la décision de licenciement respectant lesconditions de forme aurait simplement été notifiée plus tôt. En outre, ilimporte peu que le recourant n'ait pas été inquiété pénalement et que son casn'ait pas connu de retentissement médiatique. L'élément décisif est que lerecourant a démontré, au travers de son comportement, son incapacité àdiriger un poste de gendarmerie. C'est cette incapacité, et non pas unquelconque embarras de l'autorité de nomination de le réintégrer dans safonction, qui a abouti à son licenciement, résultat dépourvu d'arbitraire. Les moyens du recourant tirés d'une interprétation et d'une applicationarbitraires du Statut sont en conséquence infondés. 4.Vu ce qui qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il estrecevable. Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (art. 156 al.1, 153 et 153a OJ) et n'a pas droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 2.Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant. 3.Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, auDépartement de la justice, de la sécurité et des finances et au Tribunaladministratif du canton de Neuchâtel. Lausanne, le 16 août 2006 Au nom de la IIe Cour de droit publicdu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.116/2006
Date de la décision : 16/08/2006
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-08-16;2p.116.2006 ?
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