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14/08/2006 | SUISSE | N°4C.140/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 14 août 2006, 4C.140/2006


{T 0/2}4C.140/2006 /ech Arrêt du 14 août 2006Ire Cour civile Mme et MM. les Juges Klett, juge présidant, Favre et Mathys.Greffier: M. Carruzzo. A. ________,défenderesse et recourante, représentée par Me Michel Amaudruz, contre X.________,demanderesse et intimée, représentée parMe Philippe A. Grumbach. contrat de bail à loyer; évacuation, recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre d'appel en matière de baux etloyers du canton de Genève du6 mars 2006. Faits: A.A.a B.________, né en 1910, est décédé le 26 mai 2004. Le défunt laissaitpour héritiers son fils Louis, né en

1938, qu'il avait eu avec sa premièreépouse, décédée en 1999, ainsi q...

{T 0/2}4C.140/2006 /ech Arrêt du 14 août 2006Ire Cour civile Mme et MM. les Juges Klett, juge présidant, Favre et Mathys.Greffier: M. Carruzzo. A. ________,défenderesse et recourante, représentée par Me Michel Amaudruz, contre X.________,demanderesse et intimée, représentée parMe Philippe A. Grumbach. contrat de bail à loyer; évacuation, recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre d'appel en matière de baux etloyers du canton de Genève du6 mars 2006. Faits: A.A.a B.________, né en 1910, est décédé le 26 mai 2004. Le défunt laissaitpour héritiers son fils Louis, né en 1938, qu'il avait eu avec sa premièreépouse, décédée en 1999, ainsi que sa seconde épouse, A.________, uneressortissante française, née en 1942, avec qui il s'était marié le 4 octobre1999, à l'âge de 89 ans, sous le régime de la communauté de biens, et quiétait auparavant la compagne de son second fils, prénommé D.________, décédéen 1997. Tant ce mariage que la succession de B.________ ont donné lieu à desprocédures, dont certaines n'ont pas encore été liquidées, qui opposent, enparticulier, C.________, formellement exhérédé par feu son père, àA.________, sa belle-mère. A.b La société anonyme X.________ est propriétaire d'un immeuble sis àGenève, à l'endroit indiqué dans sa raison sociale. C.________ en estl'actionnaire majoritaire et l'administrateur unique. A.________ prétendavoir acquis par donation de feu son mari la propriété de 24 des 50 actionsde ladite société. Celle-ci lui dénie toutefois la qualité d'actionnaire. A une date indéterminée, X.________ a remis à bail à A.________ unappartement de six pièces situé au deuxième étage de l'immeuble en question.Le loyer mensuel, charges non comprises, a été fixé en dernier lieu à 2'300fr. A.c Par avis du 13 juillet 2004, la Société privée de gérance, agissant pourle compte de la bailleresse, a imparti à la locataire un délai de 30jourspour s'acquitter des loyers échus à cette date, en la menaçant de résilier lebail si elle ne s'exécutait pas dans ce délai. Dans deux courriers des 20 juillet et 11 août 2004 adressés à lareprésentante de la bailleresse, le conseil de la locataire a fait valoir lecaractère abusif du congé en expliquant que le défaut de paiement du loyerétait la conséquence du refus de la bailleresse de verser les dividendes àses actionnaires. Par avis officiel du 24 août 2004, la représentante de la bailleresse arésilié le bail de A.________ pour le 31 octobre 2004, les loyers échusn'ayant pas été payés dans le délai comminatoire. B.B.aLe 24 septembre 2004, la locataire (ci-après: la défenderesse) a saisi laCommission de conciliation d'une requête en contestation du congé. Latentative de conciliation n'a pas abouti et la cause a été portée, lelendemain, devant le Tribunal des baux et loyers. De son côté, la bailleresse (ci-après: la demanderesse) a déposé, le 26novembre 2004, une requête en évacuation qu'elle a soumise ensuite auTribunal des baux et loyers, après que la Commission eut tenté sans succès deconcilier les parties. Les deux procédures ont été jointes. Par jugement du 7 avril 2005, le Tribunal des baux et loyers a déclarévalable le congé litigieux et ordonné à la défenderesse d'évacuerimmédiatement l'appartement occupé par elle. B.b Saisie par la défenderesse, la Chambre d'appel en matière de baux etloyers a rendu, le 6 mars 2006, un arrêt au terme duquel elle a confirmé lejugement de première instance. Les juges d'appel ont estimé, en résumé, que les conditions d'application del'art. 257d CO étaient réalisées en l'espèce. Selon eux, en effet, à supposerque la locataire ait à tout le moins rendu vraisemblable sa qualitéd'actionnaire de la bailleresse - question qui a été laissée indécise -, ellen'avait pas invoqué de manière suffisamment claire la compensation dans ledélai de grâce, se contentant d'opposer à la bailleresse le caractère abusifde la résiliation. De surcroît, la défenderesse n'avait pas chiffré sacréance compensante, constituée, selon elle, des dividendes non versés, nidémontré l'exigibilité de cette créance, supposé qu'elle en fût titulaire. Lacour cantonale a encore relevé que la défenderesse n'avait pas démontré, nimême allégué, avoir agi contre la société bailleresse, et non contreC.________, en vue d'obtenir une pièce, tel le rapport de gestion, qui luieût permis de rendre vraisemblable son droit à un éventuel bénéfice, ni avoirentrepris une quelconque démarche pour toucher sa part de dividendes àlaquelle elle prétend avoir droit. Ainsi, l'impossibilité de déterminer lacréance invoquée en compensation résultait de l'inaction de la défenderesse. Sans doute, poursuit la cour cantonale, un congé donné pour défaut depaiement du loyer pourrait-il être jugé abusif si l'état de gêne du locataireavait pour origine un comportement fautif du bailleur. In casu, ladéfenderesse perd toutefois de vue, en soutenant que le congé lui a été donnéà l'initiative de l'autre actionnaire de la demanderesse, qu'elle était enpremier lieu liée à cette dernière par un contrat de bail, lequel luiimposait des obligations telles que le paiement du loyer. A cet égard, lefait qu'elle aurait pu disposer des moyens financiers nécessaires au paiementdu loyer si le bénéfice de la demanderesse avait été distribué ne concernepas cette relation contractuelle. En outre, comme la défenderesse le concèdeelle-même, ce n'est pas la bailleresse qui aurait éventuellement provoqué sesdifficultés financières, mais un autre actionnaire. La demanderesse s'estcontentée de résilier le contrat de bail parce que le loyer n'était plusversé, si bien qu'aucun comportement abusif ne peut lui être reproché. C.La défenderesse interjette un recours en réforme. Dans ses conclusionsprincipales, elle invite le Tribunal fédéral à: " Principalement ... 3.- Annuler l'arrêt rendu le 6 mars 2006 par la Cour de justice de la Républiqueet canton de Genève.4.- Dire que l'arriéré de loyer réclamé par la SI à A.________ est compensé parla créance de dividendes de A.________ envers la SI, moyennant quoi le congéprononcé par l'intimée doit être annulé. 5.- Dire que A.________ est autorisée à faire valoir cette compensation pour lesloyers à venir. 6.- Si par impossible le Tribunal fédéral ne devait pas faire droit auxconclusions prises sous chiffres 4 et 5 ci-dessus, dire que la résiliationprononcée par avis du 24 août 2004 est abusive, qu'en conséquence cetterésiliation est nulle, et que A.________ est autorisée à demeurer dans l'appartement qu'elle occupedans les locaux de la SI.... Si mieux n'aime le Tribunal fédéral ...10.- Retourner la cause à l'instance cantonale pour complément d'instruction,conformément à l'art. 274d CO, ceci afin d'établir, avec la collaboration del'intimée: - la qualité d'actionnaire de A.________ dans la SI ainsi que l'importance desa participation, cas échéant par le biais de son droit à la succession nonencore partagée de son défunt mari, B.________; - la part revenant à A.________, en sa qualité d'actionnaire de la SI, desbénéfices non encore distribués de celle-ci. 11.- Inviter l'instance cantonale, une fois l'instruction complétée, à seprononcer une nouvelle fois sur la validité du congé prononcé par l'intimée. ..." La défenderesse a requis, en outre, sa mise au bénéfice de l'assistancejudiciaire. Par décision du 9 juin 2006, la Ire Cour civile a rejeté larequête et invité la défenderesse à verser une avance de frais de 4'000 fr.L'intéressée s'est exécutée en temps utile. La demanderesse n'a pas été invitée à déposer une réponse au recours. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Emanant de la partie qui a succombé dans ses conclusions et dirigé contre unedécision finale rendue en dernière instance cantonale par un tribunalsupérieur (art. 48 al. 1 OJ) sur une contestation civile dont la valeurlitigieuse dépasse le seuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ; cf. ATF 119 II 147consid. 1; 111 II 384 consid. 1), le recours en réforme est en principerecevable, puisqu'il a été interjeté en temps utile (art. 54 al. 1 OJ enliaison avec l'art. 34 al. 1 let. a OJ) et dans les formes requises (art. 55OJ). 2.Sous chiffres 17 à 24 de son mémoire de recours, la défenderesse mentionne"des faits omis par la Cour de justice". Elle se borne à les énoncer et àindiquer les éléments de preuve censés les corroborer, en observant, à titreliminaire, que "ces faits ont été régulièrement allégués par [elle] devantles deux instances cantonales", mais sans préciser ni où ni comment. Lesconditions d'application des art. 63 al.2 et 64 OJ ne sont, dès lors, pasréalisées dans le cas présent. De même, la défenderesse méconnaît le pouvoir d'examen de la juridictionfédérale de réforme lorsqu'elle énumère, sous chiffre 26 de son mémoire derecours, un certain nombre de circonstances, avec références à diversespièces du dossier cantonal, en vue d'établir que la question - laisséeouverte par la Chambre d'appel - de sa qualité d'actionnaire de lademanderesse, à ses yeux fondamentale, aurait dû être tranchée parl'affirmative. 3.En premier lieu, la défenderesse reproche à la cour cantonale d'avoir violél'art. 274d al. 3 CO. 3.1 Aux termes de cette disposition, le juge établit d'office les faits etapprécie librement les preuves; les parties sont tenues de lui présentertoutes les pièces nécessaires à l'appréciation du litige. Le principed'instruction ainsi posé n'est pas une maxime officielle absolue, mais unemaxime inquisitoire sociale dont le but est de protéger la partie réputée laplus faible et d'assurer l'égalité des parties, ainsi que d'accélérer laprocédure. C'est dire que le juge ne doit pas instruire d'office le litigelorsqu'une partie renonce à expliquer sa position. En revanche, il doitinterroger les parties et les informer de leur devoir de collaboration et deproduction des pièces; il n'est tenu de s'assurer que les allégations etoffres de preuve sont complètes que s'il a des motifs objectifs d'éprouverdes doutes sur ce point. L'initiative du juge ne va pas au-delà del'invitation faite aux parties de mentionner leurs moyens de preuve et de lesprésenter. La maxime inquisitoire prévue par le droit du bail ne permet pasd'étendre à bien plaire l'administration des preuves et de recueillir toutesles preuves possibles (ATF 125 III 231 consid. 4a p. 238). Au surplus, lamaxime inquisitoire sociale ne modifie pas la répartition du fardeau de lapreuve (arrêt 4C.185/2003 du 14octobre 2003, consid. 2.1).3.23.2.1Selon la défenderesse, la cour cantonale aurait violé l'art. 274d al. 3CO en laissant ouverte la question de sa qualité d'actionnaire. Il n'en estrien. Les juges d'appel ont, en effet, volontairement renoncé à administrerdes preuves sur ce point, parce qu'ils ne l'ont pas considéré commejuridiquement pertinent pour la solution du litige. 3.2.2 Toujours sous l'angle de l'art. 274d al. 3 CO, la défenderesse déploreensuite que la Chambre d'appel se soit contentée d'observer que la créanceinvoquée par elle en compensation n'était "ni chiffrée, ni déterminable",tout en refusant d'instruire plus avant cette question. Elle affirme avoirproduit toutes pièces utiles à ce sujet et formulé devant les deux instancescantonales des conclusions tendant à la fourniture des pièces manquantes. Dèslors, en considérant qu'il n'incombait pas à la juridiction spécialisée enmatière de baux d'éclaircir ce point et en reprochant à la défenderesse den'avoir pas introduit une action séparée en reddition de comptes, les jugesgenevois auraient violé, non seulement la disposition citée, mais encore lesprincipes de l'économie de la procédure et de la gratuité. Ces deux derniers principes ne relèvent pas du droit privé fédéral. Parconséquent, la défenderesse n'est pas recevable à en invoquer la violationpar la voie du recours en réforme (cf. art. 43 al. 1 et 55 al. 1 let.c OJ). Pour le reste, le recours n'est pas suffisamment motivé dans la mesure où sonauteur fait simplement état, sans plus amples précisions, de pièces quin'auraient pas été prises en considération par la Chambre d'appel et deconclusions prises devant les juridictions cantonales aux fins d'obtenir laproduction de ces pièces.Au demeurant, ces pièces, selon la défenderesse, lui auraient permis dechiffrer et de déterminer son droit au dividende. Cependant, comme onl'exposera plus loin, que l'intéressée puisse faire valoir son droit à undividende n'implique pas encore qu'elle ait été titulaire d'une créancecompensante au moment où elle a été mise en demeure de payer son loyer (cf.consid. 4.2 ci-après). 4.La défenderesse fait valoir qu'elle a éteint sa dette par voie decompensation (art. 120 CO) dans le délai de grâce qui lui avait été fixé. 4.1 La compensation n'a lieu qu'autant que le débiteur fait connaître aucréancier son intention de l'invoquer (art. 124 al. 1 CO). 4.1.1 Pour que la dette soit éteinte par voie de compensation en temps utile,il est donc nécessaire, dans la procédure de l'art. 257d al.1 CO, que lelocataire l'invoque avant l'expiration du délai de grâce (ATF 119 II 241consid. 6b/bb). Le débiteur doit exprimer clairement son intention de compenser. Ladéclaration doit permettre à son destinataire de comprendre, en fonction descirconstances, quelle est la créance compensée et quelle est la créancecompensante. Si le débiteur ne précise pas quelle est la créance compensée etquelle est la créance compensante, sa déclaration est incomplète et, par voiede conséquence, dépourvue d'effet (arrêt 4C.174/1999 du 14 juillet 1999,consid. 2b, publié in SJ 2000 I p.78). Savoir s'il y a eu ou non une déclaration de compensation pendant le délai degrâce est une question de fait (arrêt 4C.8/2006 du 29 mars 2006, consid.4.2). En revanche, dire si la déclaration de compensation faite durant cedélai est suffisante, au regard de l'art. 124 al. 1 CO et de la jurisprudencey afférente, est une question d'interprétation de la manifestation de volontéunilatérale émise par la partie qui soulève l'objection de compensation (cf.art. 18 CO). Comme telle, cette question relève du droit. 4.1.2 Il est constant que les courriers des 20 juillet et 11 août 2004,censés valoir déclarations de compensation, ont été adressés à la bailleresseavant l'expiration du délai comminatoire de 30 jours fixé par lettre du 13juillet 2004.Selon la Chambre d'appel, la locataire se serait contentée d'y opposer à labailleresse le caractère abusif de la résiliation, sans formuler clairementson intention de compenser les arriérés de loyer. Il est exact que le textedes deux lettres susmentionnées, reproduit in parte qua sous chiffres 39 et40 de l'acte de recours, ne contient pas le terme de "compensation". Cettecirconstance n'est cependant pas décisive. Il en appert, à tout le moins etsans équivoque, que la défenderesse refuse de payer le loyer parce qu'elleestime abusif de la part de la demanderesse d'en réclamer le paiement alorsqu'elle n'a pas versé à l'actionnaire-locataire les dividendes qui lui sontdus. 4.2 Force est ainsi d'admettre, contrairement à l'avis de la Chambre d'appel,que la compensation a été valablement invoquée en l'espèce.
Il reste àvérifier si les conditions de la compensation étaient réalisées au moment oùcelle-ci a été invoquée. C'est le lieu de rappeler que le droit de compenser suppose l'exigibilité dela créance compensante (Nicolas Jeandin, Commentaire romand, n.11 ad art.120 CO). Cette créance consiste, en l'espèce, dans le dividende de la sociétéimmobilière revêtant la qualité de bailleresse. En vertu de l'art. 660 al. 1CO, tout actionnaire a droit à une part proportionnelle du bénéfice résultantdu bilan, pour autant que la loi ou les statuts prévoient sa répartitionentre les actionnaires. C'est l'assemblée générale qui a le droit inaliénablede fixer le dividende (art. 698 al. 2 ch. 4 CO). Encore faut-il qu'unbénéfice résulte du bilan ou que des réserves aient été constituées à ceteffet (art. 675 al. 2 CO). En outre, l'organe de révision doit avoir présentéà l'assemblée générale un rapport sur le résultat de sa vérification de laproposition concernant l'emploi du bénéfice (art. 728 al. 1 et 729 al. 1 CO).La créance de dividende est, en principe, exigible dès que son montant a étéfixé (Peter Forstmoser/Arthur Meier-Hayoz/Peter Nobel, SchweizerischesAktienrecht, p. 493, n. 62 ad § 40). Dans le cas particulier, il n'est pas établi que l'assemblée générale de lasociété demanderesse ait fixé des dividendes pour les exercices antérieurs àcelui durant lequel la défenderesse a cessé de payer son loyer. Cettedernière note d'ailleurs elle-même, à cet égard, sous chiffre 34 de son actede recours, pour le déplorer, que des assemblées générales de cette sociétén'ont pas pu être tenues en raison de l'obstruction de C.________. Il suit delà que la défenderesse n'était pas titulaire, en 2004, d'une créance dedividendes exigible qu'elle aurait pu compenser avec la créance d'arriérés deloyers de la demanderesse.En écartant l'objection de compensation, la cour cantonale a, dès lors, renduune décision dont le résultat, sinon les motifs, est conforme au droitfédéral. Le grief tiré de la violation de l'art. 120 CO apparaît ainsi dénué defondement. 5.A l'appui de son recours en réforme, la défenderesse reproche enfin à laChambre d'appel de n'avoir pas annulé le congé incriminé, alors qu'ilcontrevenait aux règles de la bonne foi (art. 271 al. 1 CO). 5.1 La disposition citée est applicable, à titre exceptionnel, lorsque larésiliation du bail a pour cause la demeure du locataire (David Lachat,Commentaire romand, n. 10 ad art. 257d CO). Le droit du bailleur de résilierle bail s'oppose alors à celui du locataire d'être protégé contre unerésiliation abusive. Le juge ne peut annuler le congé litigieux que sicelui-ci est inadmissible au regard de la jurisprudence relative à l'abus dedroit et à la bonne foi; il faut des circonstances particulières pour que lecongé soit annulé (ATF 120 II 31 consid. 4a p. 33). Tel sera le cas, parexemple, quand le bailleur, lors de la fixation du délai comminatoire,réclame au locataire une somme largement supérieure à celle en souffrance,sans être certain du montant effectivement dû (ATF 120 II 31 consid. 4b p. 33s.). Le congé sera également tenu pour contraire aux règles de la bonne foisi le montant impayé est insignifiant (ATF 120 II 31 consid. 4b p. 33), sil'arriéré a été réglé très peu de temps après l'expiration du délaicomminatoire, alors que le locataire s'était jusqu'ici toujours acquitté àtemps du loyer, ou si le bailleur résilie le contrat longtemps aprèsl'expiration de ce délai (Lachat, ibid.; Pierre Wessner, L'obligation dulocataire de payer le loyer et les frais accessoires, in 9e Séminaire sur ledroit du bail, Neuchâtel 1996, p. 24). C'est au destinataire du congé de démontrer que celui-ci contrevient auxrègles de la bonne foi, en particulier que le motif invoqué par le bailleurn'est qu'un prétexte (ATF 120 II 105 consid. 3c; Lachat, op. cit., n. 9 adart. 271 CO). Le caractère abusif ou non de la résiliation s'apprécie aumoment où l'auteur du congé manifeste sa volonté de mettre un terme aucontrat (arrêt 4C.176/2004 du 8 septembre 2004, consid. 2.1). Le motif pour lequel un congé est donné relève des constatations de fait (ATF115 II 484 consid. 2b p. 486; 113 II 460 consid. 3b p. 462). 5.2 En soi, il n'y a rien d'abusif à résilier le bail d'un locataire qui nepaie plus son loyer (arrêt 4C.35/2004 du 27 avril 2004, consid. 3.2.2). Aussila défenderesse n'est-elle pas recevable à soutenir, comme elle le fait souschiffre 46 de son mémoire de recours, que la demanderesse n'avait aucunintérêt digne de protection à résilier son bail. Pour le surplus, ce n'est pas le lieu d'examiner les reproches que ladéfenderesse formule à l'adresse de C.________ dans le contexte de laliquidation de la succession de feu B.________. Enfin, la défenderesse n'a pas emprunté les voies légales spécifiques qui luieussent permis d'obtenir, notamment, la convocation (forcée) des assembléesgénérales de la demanderesse (cf. art. 699 al. 4 CO; ATF 112 II 145) et,partant, la fixation des dividendes auxquelles elle prétend avoir droit.Aussi excipe-t-elle en vain de l'abus de droit pour remédier aux conséquencesde son inaction. 6.Cela étant, le présent recours ne peut qu'être rejeté. Son auteur, qui s'estvu refuser le bénéfice de l'assistance judiciaire, devra, dès lors, payerl'émolument judiciaire afférent à la procédure fédérale. En revanche, iln'aura pas à indemniser son adverse partie, celle-ci n'ayant pas été invitéeà déposer une réponse. Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 2.Un émolument judiciaire de 4'000 fr. est mis à la charge de la recourante. 3.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à laChambre d'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève. Lausanne, le 14 août 2006 Au nom de la Ire Cour civiledu Tribunal fédéral suisse La juge présidant: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.140/2006
Date de la décision : 14/08/2006
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-08-14;4c.140.2006 ?
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