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04/08/2006 | SUISSE | N°6S.209/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 04 août 2006, 6S.209/2006


{T 0/2}6S.209/2006 /rod Arrêt du 4 août 2006Cour de cassation pénale MM. les Juges Wiprächtiger, juge présidant,Kolly et Karlen.Greffière: Mme Paquier-Boinay. X. ________,recourant, représenté par Me Guy Zwahlen, avocat, contre Y.________,intimé, représenté par Me Jacopo Rivara,Procureur général du canton de Genève,case postale 3565, 1211 Genève 3. Lésions corporelles par négligence, violation grave des règles de lacirculation (art. 125 CP, art. 90 ch. 2 LCR), pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Chambre pénale de la Cour de justicedu canton de Genève du 27 mars 2006.

Faits: A.Le 4 mai 2004, Y.________, qui circulait au volant de sa voi...

{T 0/2}6S.209/2006 /rod Arrêt du 4 août 2006Cour de cassation pénale MM. les Juges Wiprächtiger, juge présidant,Kolly et Karlen.Greffière: Mme Paquier-Boinay. X. ________,recourant, représenté par Me Guy Zwahlen, avocat, contre Y.________,intimé, représenté par Me Jacopo Rivara,Procureur général du canton de Genève,case postale 3565, 1211 Genève 3. Lésions corporelles par négligence, violation grave des règles de lacirculation (art. 125 CP, art. 90 ch. 2 LCR), pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Chambre pénale de la Cour de justicedu canton de Genève du 27 mars 2006. Faits: A.Le 4 mai 2004, Y.________, qui circulait au volant de sa voiture à Genève,sur la rue de la Servette en direction de Meyrin, a heurté un piéton,X.________. Celui-ci a subi diverses blessures, qui ont nécessité plusieursinterventions chirurgicales. B.A la suite de ces faits, le Procureur général du canton de Genève a rendu, le15 novembre 2004, une ordonnance de condamnation par laquelle il est reprochéà Y.________ d'avoir été inattentif et d'avoir roulé à une vitesse inadaptéeaux conditions de circulation et de visibilité. C.Statuant le 18 novembre 2005 sur opposition à cette ordonnance, le Tribunalde police genevois a acquitté Y.________ de la prévention de lésionscorporelles par négligence. D.Par arrêt du 27 mars 2007, la Chambre pénale de la Cour de justice du cantonde Genève a déclaré irrecevable l'appel interjeté par X.________ contre cejugement. Considérant que X.________, qui s'était contenté de conclure à la réserve deses droits civils, sans prendre de conclusions chiffrées, n'expliquait paspour quel motif il avait choisi de procéder ainsi ni pourquoi il lui étaitimpossible de prendre des conclusions chiffrées, pour le moins partielles, laCour de justice a déclaré l'appel irrecevable. E.X.________ forme un pourvoi en nullité contre cet arrêt. Invoquant uneviolation de l'art. 8 al. 1 let. c LAVI et, subsidiairement, de l'art. 8 al.2 LAVI, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la causeà l'autorité cantonale. F.L'autorité cantonale s'est référée aux considérants de son arrêt et n'a pasformulé d'observations. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recoursqui lui sont soumis (ATF 126 IV 107 consid. 1 p. 109; 126 I 81 consid. 1 p.83 et les arrêts cités). 1.1 Conformément à l'art. 270 let. e ch. 2 PPF, la victime peut se pourvoiren nullité si elle peut faire valoir une violation des droits que lui accordela LAVI. Le recourant, qui a subi une atteinte à son intégrité corporelle est unevictime au sens de l'art. 2 al. 1 LAVI. Il se plaint d'une violation desdroits que lui confère l'art. 8 al. 1 let. c LAVI. Dans ce cadre, il aqualité pour se pourvoir en nullité conformément à l'art. 270 let. e ch. 2PPF. 1.2 Le pourvoi en nullité à la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral,qui revêt un caractère purement cassatoire (art. 277ter al. 1 PPF), ne peutêtre formé que pour violation du droit fédéral, à l'exception de la violationdirecte d'un droit de rang constitutionnel (art.269 PPF). La Cour decassation n'est pas liée par les motifs invoqués, mais elle ne peut allerau-delà des conclusions du recourant (art. 277bis PPF). Elle est en revancheliée par les constatations de fait de l'autorité cantonale, sous réserve dela rectification d'une inadvertance manifeste (art. 277bis al. 1 PPF). 2.Le recourant reproche à l'autorité cantonale d'avoir violé l'art. 8 LAVI enconsidérant qu'il n'était pas légitimé à porter la cause devant elle. 2.1 Conformément à l'art. 8 al. 1. let. c LAVI, la victime peut former contrele jugement les mêmes recours que le prévenu, si elle était déjà partie à laprocédure auparavant et dans la mesure où cette sentence touche sesprétentions civiles ou peut avoir des effets sur le jugement de cesdernières. Cette disposition doit être considérée comme une garantie minimaleofferte à la victime, la réglementation de la procédure pénale demeurant parailleurs de la compétence des cantons (ATF 119 IV 168 consid. 6c p. 173; FF1990 II 933; voir aussi Kolly, Zu den Verfahrensrechten der Opfer vonStraftaten (art. 8 OHG) im freiburgischen Strafprozess, RFJ 1994 p. 53;Corboz, Les droits procéduraux découlant de la LAVI, SJ 1996 p. 55). Dans lamesure où ceux-ci n'auraient pas adopté les dispositions permettant de mettreen ¿uvre ces garanties minimales, l'art. 8 LAVI serait directement applicable(voir Kolly, op. cit., p. 36 et les références citées; FF 1990 II 921). Dansces circonstances, l'autorité cantonale ne pouvait pas faire du droitcantonal une application plus restrictive que celle que la jurisprudence afaite de l'art. 8 al. 1. let. c LAVI, sous peine de violer cette dernièredisposition. Conformément à l'art. 8 al. 1 let. c LAVI, la victime peut former contre lejugement les mêmes recours que le prévenu, si elle était déjà partie à laprocédure auparavant et dans la mesure où cette sentence touche sesprétentions civiles ou peut avoir des effets sur le jugement de cesdernières. En l'espèce, le recourant a été directement touché dans son intégritécorporelle par l'infraction qu'il invoque, de sorte qu'il a la qualité devictime au sens de l'art. 2 LAVI. Il était donc légitimé, aux conditions del'art. 8 al. 1 let. c LAVI, à exercer les mêmes droits de recours quel'accusé. En tant que partie civile, il ne fait aucun doute qu'il était déjàpartie à la procédure avant l'arrêt attaqué. En outre, le jugement depremière instance, qui acquitte l'intimé de la prévention de lésionscorporelles par négligence, est de nature à influencer les prétentionsciviles qu'il pourrait déduire de l'infraction dénoncée. La jurisprudence exige que la victime ait pris des conclusions civiles sur lefond dans le cadre de la procédure pénale, pour autant que cela pouvaitraisonnablement être exigé d'elle (ATF 122 IV 139 consid. 1; 121 IV 207consid. 1a p. 210; 120 IV 44 consid. 4b p. 53). Lorsque le recours est dirigécontre une décision de classement ou de non-lieu, on ne saurait reprocher àla victime de ne pas avoir pris formellement de conclusions civiles, de sorteque sa qualité pour recourir est donnée même en l'absence de conclusionsciviles. En revanche, à défaut de conclusions formelles sur le plan civil, lerecourant doit pour le moins indiquer quelles prétentions civiles ilentendait faire valoir à l'égard de l'auteur de l'infraction. Toutefois, mêmeen l'absence d'indications à ce sujet, la qualité pour recourir est admiselorsque l'on peut directement et sans ambiguïté déduire de l'état de fait etnotamment de la nature de l'infraction quelles prétentions civiles la victimepourrait faire valoir (ATF 131 IV 195 consid. 1.1.1 et les arrêts cités). Lorsque la procédure a été menée jusqu'à un stade où il était possible deprendre des conclusions civiles, il faut examiner si l'absence de tellesconclusions s'explique par des motifs compréhensibles, faute de quoi lerecourant ne saurait bénéficier de l'art. 8 al. 1 let. c LAVI. Cela découlede la conception même de la LAVI, qui a en particulier pour but de permettreà la victime de faire valoir ses prétentions dans le cadre de la procédurepénale elle-même (FF 1990 II 921). En l'espèce, l'autorité cantonale reproche au recourant de n'avoir pas prisde conclusions chiffrées et de n'avoir pas expliqué pour quel motif il ne luiétait pas possible de prendre de telles conclusions, au moins partielles,quitte à demander la réserve de ses droits pour le surplus. Il ressort parailleurs des constatations de fait de l'arrêt attaqué qu'à l'audience dejugement devant le Tribunal de police, le recourant a expliqué qu'il devraitsubir une quatrième opération, qu'il était encore en incapacité de travailtotale et qu'une expertise était en cours pour déterminer ses perspectives derécupération et d'avenir s'agissant de son activité professionnelle. Iln'apparaît en revanche pas qu'il ait exposé sa situation actualisée devantl'autorité de recours ni même qu'il ait précisé qu'il n'était toujours pas enmesure de prendre des conclusions civiles. Le recourant lui même ne prétendpas qu'il aurait fourni de telles indications dans son mémoire de recours.Dans son pourvoi en nullité il soutient avoir précisé devant la Cour deJustice qu'il ne pouvait pas chiffrer ses conclusions civiles. L'autorité decéans ne saurait prendre en considération cette allégation, qui est encontradiction avec l'arrêt attaqué, duquel il ressort que le recourant n'a nisoutenu ni a fortiori démontré qu'il ne lui aurait en l'état pas été possiblede prendre des conclusions chiffrées (arrêt attaqué, p. 4). Une telleconstatation lie la Cour de cassation saisie d'un pourvoi en nullité et lerecourant, s'il entendait la remettre en question, devait le faire par lavoie du recours de droit public pour constatation arbitraire des faits. Dès lors, sur la base des faits retenus par l'autorité cantonale, force estde constater que le recourant, dans le cadre du recours qu'il a formé devantla Cour de justice, n'a pas exposé les motifs pour lesquels il s'abstenait deformuler des conclusions civiles alors que la procédure avait atteint unstade auquel il lui aurait été possible de le faire. Dans ces circonstances,c'est sans violer le droit fédéral que l'autorité cantonale a considéré qu'iln'était pas légitimé à recourir. 2.2 Le recourant reproche en outre, subsidiairement, à l'autorité cantonaled'avoir violé l'art. 8 al. 2 LAVI en omettant de l'informer de façon précisesur ses droits, en particulier dans le cadre de la procédure d'appel. Conformément à cette disposition, "les autorités informent la victime de sesdroits à tous les stades de la procédure". Cette disposition impose àl'autorité l'obligation d'indiquer les voies de recours (Kolly, op. cit.,p.54; Corboz, op. cit., p. 83 s.), ce qu'a fait le Tribunal de police, dontle jugement comporte la mention que "la partie civile peut appeler devant laChambre pénale de la Cour de justice du présent jugement dans la mesure où ilpeut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles". La règle de l'art. 8 al. 2 LAVI institue, pour un domaine spécifique, unrenversement de la présomption selon laquelle nul n'est censé ignorer la loi(Corboz, op. cit. , p. 83). On peut donc sérieusement douter que lerecourant, qui était assisté d'un mandataire, puisse invoquer cettedisposition, tant il est patent qu'un avocat ne saurait se prévaloir del'ignorance de telles règles de procédure. Par ailleurs, il ressort del'arrêt attaqué que devant l'autorité de première instance le recourant aexposé les motifs pour lesquels il n'était pas en mesure de prendre desconclusions civiles. Enfin, les développements du mandataire du recourant àl'appui de son pourvoi montrent suffisamment qu'il connaît les exigencesauxquelles la jurisprudence soumet la recevabilité d'un recours formé par lavictime. Il ne saurait dès lors se prévaloir de l'absence d'information à cepropos. Le pourvoi doit donc être rejeté. 3.Vu l'issue de la procédure, les frais de la cause doivent être mis à lacharge du recourant qui succombe (art. 278 al. 1 PPF). Enfin, il n'y a paslieu d'allouer d'indemnité à l'intimé qui n'est pas intervenu dans laprocédure devant la Cour de cassation. Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le pourvoi est rejeté. 2.Un émolument judiciaire de 1'000 fr. est mis à la charge du recourant. 3.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, auProcureur général et à la Chambre pénale de la Cour de justice du canton deGenève. Lausanne, le 4 août 2006 Au nom de la Cour de cassation pénaledu Tribunal fédéral suisse Le juge présidant: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6S.209/2006
Date de la décision : 04/08/2006
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-08-04;6s.209.2006 ?
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