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24/07/2006 | SUISSE | N°1P.45/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 24 juillet 2006, 1P.45/2006


{T 0/2}1P.45/2006 /col Arrêt du 24 juillet 2006Ire Cour de droit public MM. les Juges Féraud, Président,Aemisegger et Fonjallaz.Greffier: M. Rittener. A. ________,B.________,C.________,recourants, tous représentés par Me Gérard Brutsch, avocat, contre D.________,E.________,F.________,intimées,Département des constructions et des technologies de l'information du cantonde Genève,case postale 22, 1211 Genève 8,Tribunal administratif du canton de Genève,case postale 1956, 1211 Genève 1. permis de construire; remise en état des lieux; amendes administratives,recours de droit public con

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{T 0/2}1P.45/2006 /col Arrêt du 24 juillet 2006Ire Cour de droit public MM. les Juges Féraud, Président,Aemisegger et Fonjallaz.Greffier: M. Rittener. A. ________,B.________,C.________,recourants, tous représentés par Me Gérard Brutsch, avocat, contre D.________,E.________,F.________,intimées,Département des constructions et des technologies de l'information du cantonde Genève,case postale 22, 1211 Genève 8,Tribunal administratif du canton de Genève,case postale 1956, 1211 Genève 1. permis de construire; remise en état des lieux; amendes administratives,recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton deGenève du 29 novembre 2005. Faits: A.A. ________, B.________ et C.________ sont copropriétaires d'un immeubled'habitation sis rue des Maraîchers 46 (parcelle 486, feuille 29), sur leterritoire de la commune de Genève. Le 19 octobre 2000, le Département del'aménagement, de l'équipement et du logement du canton de Genève (appeléaujourd'hui Département des constructions et des technologies del'information, ci-après: le département) a délivré une autorisation deconstruire pour la transformation de cet immeuble (n°DD 96628-5).Le département a constaté des violations de l'autorisation s'agissant desloyers pratiqués dans l'immeuble, ce qui a donné lieu à une décision du 20janvier 2003, par laquelle les intéressés ont été sommés de réadapter lesloyers et de restituer le trop-perçu aux locataires, en application des art.44 de la Loi cantonale du 25 janvier 1996 sur les démolitions,transformations et rénovations de maisons d'habitation (ci-après: LDTR) et129 de la Loi cantonale du 14 avril 1988 sur les constructions et lesinstallations diverses (ci-après: LCI). A.________ a été condamné à uneamende de 60'000 fr. sur la base de l'art. 137 al. 1 et 3 LCI. Quant àB.________ et C.________, ils se sont vu infliger, sur la même base, uneamende de 20'000 fr. chacun. Par arrêt du 5 avril 2005, le Tribunaladministratif du canton de Genève a annulé l'amende infligée à A.________,pour le condamner à une amende globale de 60'000 fr. fondée sur les faitsprécités ainsi que sur des infractions à la LDTR commises en relation avecd'autres immeubles. Ces condamnations ont été confirmées par la Cour de céansdans ses arrêts 1P.307/2005 et 1P.309/2005 du 1er novembre 2005. B.Les 6 février et 10 septembre 2001, A.________, B.________ et C.________(ci-après: les co-propriétaires) ont déposé des demandes complémentairesayant notamment pour objet la réunion de plusieurs appartements aux 1er et3ème étages de l'immeuble précité. Le département a refusé de délivrer cesautorisations complémentaires. Le 21juin 2002, constatant que les travaux encours n'étaient pas conformes à l'autorisation de construire, le départementa invité les copropriétaires à déposer une requête complémentaire portantnotamment sur les modifications de la distribution des étages. Ceux-cis'étant exécutés, le département leur a fait savoir qu'il était prêt àdélivrer l'autorisation complémentaire, à condition qu'ils s'engagent parécrit à renoncer à la réunion des appartements des 1er et 3ème étages, cequ'ils ont fait par courrier du 20 mai 2003. Le 12 juin 2003, le départementa donc délivré l'autorisation complémentaire requise (n°DD 96628/4-5).Le 10 février 2005, ayant été informé du fait que les appartements des 1er et3ème étages avaient été réunis, le département a interpellé lescopropriétaires, qui n'ont pas répondu. F.________ et sa fille E.________,locataires des appartements réunis du 1er étage, ont expliqué au départementqu'elles avaient loués ces appartements contigus car il était possible de lesrendre accessibles entre eux, ce qui permettait à la fille de s'occuper de samère âgée. Elles précisaient en outre avoir signé deux contrats distincts etêtre tenues de remettre en état les lieux à la fin du bail. Les 15 avril et 8juillet 2005, le département a inspecté la construction et a constaté laréunion des appartements aux 1er et 3ème étages.Par décision du 18 juillet 2005, le département a ordonné aux copropriétairesle rétablissement de la configuration autorisée dans un délai de trois mois.En application des art. 137 LCI et 44 LDTR, il a en outre prononcé une amendeadministrative de 60'000 fr. à l'encontre des copropriétaires prisconjointement et solidairement. C.Les copropriétaires ont recouru contre cette décision devant le Tribunaladministratif du canton de Genève, qui a partiellement admis le recours pararrêt du 29 novembre 2005. En substance, le tribunal a considéré que lescopropriétaires avaient sciemment violé la LDTR et il a estimé que l'ordre deremise en état respectait le principe de la proportionnalité. Tenant comptedu fait que les intéressés avaient déjà été condamnés pour des infractionsrelatives à l'immeuble litigieux, le tribunal a appliqué les règles du codepénal sur le concours d'infractions (art. 68 CP). Il a donc annulé ladécision attaquée en tant qu'elle infligeait une amende de 60'000 fr. auxcopropriétaires. Constatant que la réunion illicite d'appartements au 3èmeétage était antérieure à la précédente condamnation, il a condamné B.________et C.________ à une peine complémentaire de 7'500 fr. chacun. A.________ayant déjà écopé de la peine maximale, le Tribunal administratif a considéréqu'il ne pouvait pas prononcer de peine complémentaire à son encontre. Quantà la réunion illicite du 1er étage, elle était postérieure à la précédentecondamnation, de sorte qu'une peine indépendante pouvait être prononcée; letribunal a donc condamné les trois copropriétaires, pris conjointement etsolidairement, à une amende de 45'000 fr. pour cette réunion. Il a confirméau surplus la décision attaquée en tant qu'elle ordonne la remise en état desappartements dans un délai de trois mois. D.Agissant par la voie du recours de droit public, A.________, B.________ etC.________ demandent au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt. Invoquantl'art. 9 Cst., ils reprochent à l'autorité attaquée d'avoir rendu unedécision arbitraire. Le Tribunal administratif, D.________, E.________ etF.________ ont renoncé à formuler des observations. Le département s'estdéterminé; il conclut au rejet du recours. E.Par ordonnance du 26 janvier 2006, le Président de la Ire Cour de droitpublic a accordé l'effet suspensif au recours. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recoursqui lui sont soumis (ATF 131 II 571 consid. 1 p. 573; 131 I 145 consid. 2 p.147, 153 consid. 1 p. 156 et les arrêts cités).Les amendes infligées aux recourants et l'ordre de remise en état reposentexclusivement sur le droit cantonal. Seul le recours de droit public pourviolation de droits constitutionnels des citoyens est ouvert, à l'exclusionde toute autre voie de droit auprès du Tribunal fédéral. Les recourants sontpersonnellement touchés par l'arrêt attaqué, qui confirme les amendesadministratives prononcées à leur encontre ainsi que l'ordre de rétablir laconfiguration autorisée; ils ont un intérêt personnel, actuel etjuridiquement protégé à ce que cet arrêt soit annulé et ont, partant, qualitépour recourir selon l'art. 88 OJ. Les autres conditions de recevabilité durecours de droit public sont par ailleurs réunies, de sorte qu'il y a lieud'entrer en matière. 2.2.1Invoquant l'art. 9 Cst., les recourants reprochent à l'autorité attaquéed'avoir fait preuve d'arbitraire en leur infligeant une sanction qui nereposerait sur aucun fondement. De plus, la constatation des faits serait encontradiction avec les éléments du dossier. Enfin, il serait "totalementarbitraire" d'ordonner la remise en état des appartements dans un délai detrois mois. Le Tribunal fédéral limitera son examen à l'arbitraire,conformément aux griefs articulés dans le recours de droit public (art. 90al. 1 let. b OJ; cf. ATF 130 I 258 consid. 1.3 p. 261, 26 consid. 2.1 p. 31;125 I 71 consid. 1c p. 76). 2.2 Selon la jurisprudence, l'arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst., nerésulte pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer enconsidération ou même qu'elle serait préférable; le Tribunal fédéral nes'écarte de la solution retenue en dernière instance cantonale que si elleest manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principejuridique clair et indiscuté ou si elle heurte de manière choquante lesentiment de la justice ou de l'équité. Il ne suffit pas que la motivation dela décision soit insoutenable; encore faut-il qu'elle soit arbitraire dansson résultat (ATF 132 I 13 consid. 5.1 p. 17; 131 I 217 consid. 2.1 p. 219,57 consid. 2 p. 61; 129 I 173 consid. 3.1 p. 178). En matière d'appréciationdes preuves, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte,sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision oulorsqu'elle tire des constatations insoutenables des éléments recueillis (ATF127 I 38 consid. 2a p. 41). 3.En l'espèce, les recourants se plaignent d'abord du fait que les amendes quileur ont été infligées ne reposeraient sur aucun fondement. Le départementn'aurait fait aucune mention de leur rôle dans la réunion des appartements,de leur responsabilité, des actes constitutifs d'infractions qui pourraientêtre retenus à leur encontre ni de la faute ou de la négligence susceptiblede leur être reprochée. Quant au Tribunal administratif, il aurait omisd'examiner quelle était leur faute.La décision du département du 18 juillet 2005 indique expressément qu'il estfait grief aux recourants d'avoir procédé sans autorisation aux travaux deréunion d'appartements et précise que le montant de l'amende tient compte dela gravité objective et subjective de l'infraction constatée ainsi que dumépris affiché par les recourants à l'égard d'une législation qu'ilsconnaissent par ailleurs très bien. De même, il ressort des considérants del'arrêt attaqué que le Tribunal administratif a reconnu les recourantscoupables d'avoir procédé à des réunions illicites d'appartements aux 1er et3ème étages et de les avoir présentés comme des appartements communicants àleurs locataires, sur lesquelles ils ne sauraient reporter leurresponsabilité. De plus, le tribunal a retenu que les recourants savaientpertinemment qu'en agissant ainsi ils violaient la LDTR et la LCI, dès lorsque leurs demandes d'autorisations complémentaires portant sur les réunionslitigieuses avaient été rejetées et qu'ils s'étaient engagés par écrit à nepas procéder à de tels travaux. Enfin, il a relevé que les recourants étaientmultirécidivistes et qu'ils affichaient un mépris de la loi inadmissible. Ilest évident que la condamnation des recourants repose sur les élémentssusmentionnés, si bien qu'on ne saurait reprocher aux autorités attaquéesd'avoir prononcé des peines dénuées de tout fondement. La décision querelléen'est donc en tout cas pas arbitraire à cet égard. 4.Les recourants allèguent en outre que la constatation des faits ne correspondpas aux pièces figurant au dossier, desquelles il ressortirait que ce sontles locataires elles-mêmes qui ont procédé à la réunion des appartements. Seréférant aux contrats de bail signés par D.________ ainsi qu'à la lettreadressée par celle-ci au Tribunal administratif le 10 novembre 2005, lesrecourants affirment que c'est elle qui a entrepris les travaux de réuniondes appartements situés au 3ème étage. Or, rien de tel ne ressort de cesdocuments, si ce n'est un passage de la lettre précitée dans lequelD.________ expose que "la solution de relier ces appartements était facile"et qu'à son départ l'ouverture dans le mur serait refermée. Ce n'est àl'évidence pas suffisant pour en déduire que les travaux ont été réalisés parcette locataire, ce d'autant moins que les demandes d'autorisationscomplémentaires déposées par les recourants démontrent qu'ils avaientl'intention de procéder à des réunions d'appartements. Il en va de même en cequi concerne les appartements du 1er étage, étant précisé que F.________ etE.________ ont déclaré, dans leur courrier du 2 novembre 2005 au Tribunaladministratif, que ces appartements étaient communicants lorsqu'elles les ontvisités avant de les prendre en location. Ainsi, les recourants n'établissentpas que l'autorité attaquée aurait négligé de prendre en considération, sansraison valable, un élément déterminant susceptible de modifier la décision.Au demeurant, ils se bornent à présenter leur propre appréciation despreuves, sans démontrer en quoi les constatations du Tribunal administratifseraient insoutenables. Ces critiques doivent donc être rejetées. 5.Dans un dernier moyen, les recourants se plaignent du fait que l'ordre deremise en état des appartements serait arbitraire. Selon eux, cette décisionserait insoutenable en raison du fait qu'elle ne serait pas opposable auxlocataires des appartements concernés, ce qui rendrait son exécutionimpossible. Pour procéder aux travaux de remise en état, ils seraient eneffet contraints d'agir contre les locataires en vertu des dispositionslégales régissant le contrat de bail. Les recourants ne démontrent cependantpas en quoi l'exécution de la décision querellée serait effectivementimpossible pour des motifs d'ordre procédural ou en raison du droit du bail.Dans ces conditions, l'ordre de remise en état ne saurait être qualifiéd'arbitraire au sens de la jurisprudence précitée, de sorte que ce grief doitlui aussi être rejeté. 6.Il s'ensuit que le recours de droit public doit être rejeté. Les recourants,qui succombent, doivent supporter les frais de la présente procédure (art.153, 153a et 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'octroyer des dépens audépartement, ni aux intimées qui ne se sont pas déterminées (art. 159 al. 1OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Un émolument judiciaire de 3000 fr. est mis à la charge des recourants. 3.Il n'est pas alloué de dépens. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties, au Département desconstructions et des technologies de l'information et au Tribunaladministratif du canton de Genève. Lausanne, le 24 juillet 2006 Au nom de la Ire Cour de droit publicdu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.45/2006
Date de la décision : 24/07/2006
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-07-24;1p.45.2006 ?
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