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18/07/2006 | SUISSE | N°2A.432/2005

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 18 juillet 2006, 2A.432/2005


{T 0/2}2A.432/2005 /fzc Arrêt du 18 juillet 2006IIe Cour de droit public MM. les Juges Merkli, Président,Betschart, Hungerbühler, Wurzburger et Müller.Greffier: M. Addy. X. ________ SA,recourante, représentée par Me Pierre-Yves Gunter, avocat, contre Office fédéral de la Communication,rue de l'Avenir 44, case postale, 2501 Bienne,Commission fédérale de la communication (Comcom), Marktgasse 9, 3003 Berne. mesures de surveillance et demande de modification relatives à une concessionde radiocommunication pour la boucle locale sans fil (WLL), recours de droit administratif contre la dé

cision de la Commission fédéralede la communication (Comcom...

{T 0/2}2A.432/2005 /fzc Arrêt du 18 juillet 2006IIe Cour de droit public MM. les Juges Merkli, Président,Betschart, Hungerbühler, Wurzburger et Müller.Greffier: M. Addy. X. ________ SA,recourante, représentée par Me Pierre-Yves Gunter, avocat, contre Office fédéral de la Communication,rue de l'Avenir 44, case postale, 2501 Bienne,Commission fédérale de la communication (Comcom), Marktgasse 9, 3003 Berne. mesures de surveillance et demande de modification relatives à une concessionde radiocommunication pour la boucle locale sans fil (WLL), recours de droit administratif contre la décision de la Commission fédéralede la communication (Comcom) du 3 juin 2005. Faits: A.Par un avis du 14 septembre 1999 (publié in: FF 1999 p. 6809), la Commissionfédérale de la Communication (ComCom) a lancé un appel d'offres public avecadjudication au plus offrant de 48 concessions de radiocommunication, d'unedurée de 10 ans, au moyen d'un système point à multipoint pour boucle localesans fil (ci-après désigné par l'acronyme WLL dérivé de l'anglais "WirelessLocal Loop"), dans les bandes de fréquences 3.4 GHz et 26 GHz. Ce systèmepermet de raccorder les usagers directement à un réseau de télécommunicationpar ondes hertziennes sans passer par le réseau fixe d'accès; il devait,selon les experts, représenter une alternative au dernier kilomètre deSwisscom et, de ce fait, stimuler la concurrence. X. ________ SA a remporté les lots 1A, 4D, 3A et 2B pour un prixd'adjudication de 44'458'527 fr. Par décision du 5 juin 2000, la ComCom lui aoctroyé la concession de radiocommunication WLL n° 25510.0280.1 valablejusqu'au 31 mai 2010. L'acte de concession, rédigé en allemand, contientnotamment les clauses suivantes: "2.2.3 Änderung der KonzessionDie Konzessionsbehörde kann einzelne Bestimmungen der Konzession vor Ablaufihrer Dauer veränderten tatsächlichen oder rechtlichen Verhältnissenanpassen, wenn die Änderung zur Wahrung wichtiger öffentlicher Interessennotwendig ist (Art. 10 Abs. 1 FMG).Bewirkt die Änderung der Konzession eine wesentliche Schmälerung derübertragenen Rechte, wird die Konzessionärin angemessen entschädigt (Art. 10Abs. 2 FMG). 2.2.4 Widerruf, Entzug und Verzicht auf die KonzessionDie Konzession kann vollständig oder teilweise widerrufen werden, wenn dieKonzessionärin der geltenden Gesetzgebung oder den Bestimmungen derKonzession zuwiderhandelt und deren Verpflichtungen nicht erfüllt (Art. 58Abs. 2 FMG) (...).Die Konzession kann ausserdem entzogen werden, wenn wesentlicheVoraussetzungen zu ihrer Erteilung nicht mehr erfüllt sind (Art. 58 Abs. 3FMG).Die Konzessionärin kann jederzeit auf ihre Konzession verzichten, ohneAnspruch auf vollständige oder teilweise Rückerstattung desSteigerungsbetrags.(...) 2.2.5 BetriebspflichtDie Konzessionärin ist verpflichtet, innerhalb eines Jahres nachKonzessionserteilung mindestens mit einer Basisstation den kommerziellenBetrieb aufzunehmen und aufrechtzuerhalten. 2.2.6 Angaben über den NetzausbauDie Konzessionärin ist verpflichtet, dem BAKOM monatlich die Inbetriebnahmeund Ausserbetriebnahme von Basis- und Teilnehmerstationen zu melden. DieMeldung umfasst Angaben zum Standort, den Sende- und Empfangsanlagen undderen Antennen. Die Meldung muss in den ersten fünf Arbeitstagen desFolgemonats erfolgen.(...)4.1.1 Konzessionsgebühren für Funkkonzessionen(...)Total der Konzessionsgebühren:CHF 44'458'527.00Dieser Beitrag wird von der Konzessionärin endgültig geschuldet. Eineteilweise Rückerstattung dieses Beitrags bei Einschränkung, Suspension,Widerruf, Entzug oder Verzicht auf die Konzession vor Ablauf ihrerGeltungsdauer ist nicht möglich." A la demande de X.________ SA, l'Office fédéral de la communication (OFCOM) aprécisé l'étendue de l'obligation d'exploiter prévue dans la clause 2.2.5précitée de l'acte de concession (lettre du 13 novembre 2000 et e-mail du 13février 2001). A la suite d'une inspection des installations menée le 27février 2003, l'OFCOM a constaté que le concessionnaire ne respectait pascette obligation, car il n'avait pas mis en service une station de basereliée au moins à deux stations terminales installées chez des clients. Pardécision du 30 mars 2004, la ComCom lui a retiré la concession surproposition de l'OFCOM. Il était reproché au concessionnaire, outre d'avoirenfreint l'obligation d'exploiter, de n'avoir pas annoncé la mise horsservice des stations terminales, en violation de l'obligation d'informerprévue à la clause précitée 2.2.6. X. ________ SA a recouru auprès du Tribunal fédéral contre la décisionprécitée de retrait de la concession. Durant l'échange d'écritures, la ComComa révoqué, par acte du 2 juillet 2004, la décision contestée, au motif quecelle-ci avait été prise en violation du droit d'être entendu duconcessionnaire. Informé de cette révocation, le Tribunal fédéral a considéréque le recours était devenu sans objet et a radié l'affaire du rôle (arrêt du21 juillet 2004 dans la cause 2A.289/2004). B.A la suite de deux nouvelles inspections des installations de X.________ SA,l'OFCOM a, le 17 décembre 2004, ouvert à l'encontre de cette société uneprocédure de surveillance au sens de l'art. 58 de la loi du 30 avril 1997 surles télécommunications (LTC; RS 784.10), pour violation des obligationsd'exploiter et d'informer prévues respectivement aux clauses 2.2.5 et 2.2.6de la concession. Le 13 janvier 2005, X.________ SA a saisi la ComCom d'une requête tendant àobtenir la modification des clauses précitées ainsi que de la clause 4.1.1fixant le montant de la redevance. Pour l'essentiel, elle faisait valoir queles clauses contestées n'étaient plus adaptées aux circonstances actuelles,en ce sens que le marché WLL ne s'était pas développé conformément auxprévisions faites lors de l'adjudication de la concession. Elle en déduisaitque cela constituait un changement imprévisible des faits imposant àl'autorité concédante d'assouplir les obligations d'exploiter et d'informerprévues dans la concession, et de lui rétrocéder un montant de 33'343'895fr., correspondant au 75% du prix d'adjudication, afin d'assurer l'équilibrefinancier de la concession et de rendre possible la poursuite de l'activitéconcédée. Après avoir joint, le 21 janvier 2005, la demande précitée en modification dela concession formée par X.________ SA avec la procédure de surveillanceouverte à l'encontre de cette société, l'OFCOM a fait savoir à celle-ci, le22 février suivant, qu'il envisageait de proposer à la ComCom de rejeter entous points sa requête et, à titre de mesure de surveillance, de constater laviolation des clauses 2.2.5 et 2.2.6 de la concession, avec sommation deremédier aux défaillances constatées dans un certain délai. En bref, l'OFCOMestimait que le fait que le marché ne se soit pas développé conformément auxattentes n'était pas une circonstance de nature à justifier une redéfinitiondes termes de la concession. Il ajoutait qu'un tel procédé était de pluscontraire au principe d'égalité (art. 8 Cst.), car certains concessionnairess'étaient déjà vu, au terme d'une procédure de surveillance, retirer leurconcession pour non-respect de l'obligation d'exploiter. Enfin, la concessionavait été octroyée par le biais d'une procédure d'adjudication au plusoffrant, si bien qu'une modification après coup du prix offert constituerait,toujours selon l'OFCOM, une atteinte aux principes d'objectivité, denon-discrimination et de transparence prévus à l'art. 24 al. 2 LTC. Dans une détermination du 22 mars 2005, X.________ SA a réfuté l'ensemble desarguments avancés par l'OFCOM et a conclu à l'admission de sa demande demodification, en particulier sur le point concernant le remboursement d'unepartie de la redevance, ainsi qu'à la constatation que les obligationsdécoulant de la concession étaient respectées et que des mesures desurveillance ne s'imposaient dès lors pas. Elle a requis l'édition denombreux documents destinés à démontrer soit que sa situation sedifférenciait des autres cas, évoqués par l'OFCOM, ayant donné lieu à desretraits de concession WLL, soit qu'un tel retrait ne se justifiait de toutefaçon pas à son égard, car la ComCom avait à sa disposition et dispose encorede suffisamment de fréquences non concédées pour satisfaire les éventuelsbesoins de concurrents intéressés par l'octroi d'une concession WLL. Au titredu respect de son droit d'être entendue, elle demandait préalablement que laComCom lui accorde "le droit de se déterminer ultérieurement par écrit sur laquestion de la modification de la Concession WLL lorsque le dossier lui(serait) transféré par l'OFCOM". Par décision du 3 juin 2005, la ComCom a rejeté la requête de déterminationécrite de X.________ SA ainsi que ses offres de preuves. Sur le fond, elle aentièrement suivi les propositions de l'OFCOM et a écarté les demandes demodification de la concession et de remboursement d'une partie de laredevance, en sommant le concessionnaire de se conformer d'ici au 30septembre 2005 aux obligations d'exploiter et d'informer découlant desclauses 2.2.5 et 2.2.6 de la concession et, dans le même délai, de lui faireparvenir un rapport circonstancié sur les dispositions prises pour remédieraux manquements constatés. C.Agissant par la voie du recours de droit administratif, X.________ SA demandeau Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler la décisionprécitée de la ComCom et de renvoyer le dossier à cette autorité pournouvelle décision au sens des considérants ou, subsidiairement, de modifierles points 2.2.5 et 4.1.1 de la concession, d'ordonner le remboursement de33'343'895 fr. à titre de réduction du montant de la redevance, et deconstater qu'aucune mesure de surveillance ne s'impose à son sujet. Plussubsidiairement, elle demande au Tribunal fédéral de lui accorder un délai detrois mois, dès la notification de son arrêt, pour fournir à l'OFCOM unrapport circonstancié sur les dispositions prises pour remédier auxmanquements constatés. A titre préalable, elle sollicite l'octroi de l'effetsuspensif à son recours et demande au Tribunal fédéral d'inviter la ComCom àproduire les documents dont elle avait vainement requis l'édition devantl'instance inférieure. Enfin, une fois ces documents versés au dossier, ellerequiert le droit de se déterminer une nouvelle fois par écrit. Elle seplaint de la violation de son droit d'être entendue et, à l'exception de laclause 2.2.6 de la concession ("Angaben über den Netzausbau") qu'elle neconteste plus au vu des précisions apportées par la ComCom à ce sujet, ellereprend, pour l'essentiel, les motifs précédemment développés, notamment ence qui concerne le droit à obtenir un "rééquilibrage économique" de laconcession. La ComCom a conclu au rejet aussi bien du recours que de la requête d'effetsuspensif. Par ordonnance du 25 août 2005, le Président de la IIe Cour de droit publicdu Tribunal fédéral a rejeté la requête d'effet suspensif. A la demande de X.________ SA, qui entendait notamment alléguer, comme faitnouveau, qu'elle avait trouvé deux clients commerciaux depuis le dépôt de sonrecours, le tribunal a organisé un second échange d'écritures, au termeduquel les parties ont maintenu leurs conclusions. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.1.1 En qualité d'autorité concédante (cf. art. 5 LTC), la ComCom estcompétente tant pour modifier la concession (cf. art. 10 LTC) que pourprendre des mesures de surveillance à l'égard du concessionnaire surproposition de l'OFCOM (cf. art. 58 al. 2 LTC; ATF 127 II 8). Ses décisionspeuvent, sous réserve d'exceptions non pertinentes en l'espèce (cf. art. 99al. 1 lettre d OJ; ATF 125 II 293), être attaquées par la voie du recours dedroit administratif au Tribunal fédéral (art. 61 al. 1 LTC). Dans cettemesure, déposé en temps utile et dans les formes prescrites par la loi (cf.art. 97 ss OJ), le présent recours est recevable. 1.2 Le recours de droit administratif peut être formé pour violation du droitfédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi quepour constatation inexacte ou incomplète de faits pertinents (art. 104 lettrea et b OJ). Du moment que la ComCom n'est pas une autorité judiciaire au sensde l'art. 105 al. 2 OJ, le Tribunal fédéral peut en principe revoir librementles constatations de fait de cette autorité (ATF 131 II 13 consid. 3.1-3.3 p.18 ss). Il s'impose toutefois une certaine retenue, notamment lorsqu'ils'agit d'interpréter et d'appliquer des notions juridiques indéterminées oude résoudre des questions d'ordre technique ou économique pour lesquelles laComCom dispose de connaissances spécialisées et d'un large pouvoird'appréciation (cf. ATF 131 II 13 consid. 3.4 p. 20). 2.Dans un premier moyen, la recourante invoque la violation de son droit d'êtreentendue. 2.1 D'une part, elle soutient qu'au "regard de la décision", les membres dela ComCom ont apparemment statué sur le seul vu des propositions de l'OFCOM,sans avoir pris connaissance de sa prise de position détaillée du 22 mars2005 et donc en violation de son droit d'être entendue. La ComCom réfutecette allégation, en affirmant que ses membres "ont pu consulter le dossieret ainsi se forger librement une opinion sur tous ses éléments, y compris lademande de modification (de la recourante) et sa détermination du 22 mars2005". Rien ne permet de mettre en cause cette allégation, d'autant que ladécision attaquée fait explicitement référence, en plusieurs endroits, à ladétermination précitée, par laquelle l'intéressée a eu tout loisir des'exprimer aussi bien sur les mesures de surveillance que l'OFCOM entendaitproposer à la ComCom que sur les motifs imposant, selon elle, de modifiercertaines conditions de la concession. Dès lors, la violation alléguée du droit d'être entendu est sur ce point malfondée. 2.2 La recourante fait ensuite valoir que la ComCom a également violé sondroit d'être entendue en ne produisant pas les documents dont elle avaitpourtant expressément requis l'édition à titre de moyens de preuve dans sadétermination du 22 mars 2005. Elle invite le Tribunal fédéral à ordonner laproduction de ces pièces. Pour sa part, la ComCom a expliqué qu'elle avaitrefusé de donner suite à la requête de la recourante, au motif que lespreuves sollicitées n'étaient pas nécessaires pour constater les faits àprouver ou que ceux-ci n'étaient pas pertinents pour statuer sur la cause ouencore que certaines données confidentielles devaient être protégées. C'est un fait avéré que, contrairement aux pronostics optimistes formuléslors de l'adjudication des concessions, le système WLL n'a pas eu de succèset a été un échec commercial pour tous les opérateurs qui se sont lancés dansce nouveau marché (cf., à ce sujet, les rapports annuels de la ComCom desannées 2001, 2002 et 2003). La ComCom pouvait dès lors considérer commeinutile de verser au dossier les données chiffrées des concurrents de larecourante, dans la mesure où ces pièces, au demeurant couvertes par lesecret des affaires, étaient destinées à prouver un tel fait. Elle étaitpareillement fondée à refuser de produire les dossiers concernant lesretraits de
concession prononcés à l'égard de concurrents de la recourante,car cette dernière n'a fait état d'aucun soupçon ou indice concret laissantsupposer l'existence d'une inégalité dans la gestion de son cas par rapportau traitement réservé à d'autres concessionnaires (cf. ATF 121 I 225 consid.2 p. 227 ss), sans compter qu'il y avait lieu, ici aussi, de sauvegarder lesecret des affaires des tiers concernés. Enfin, du moment que la recourante abien l'obligation d'utiliser les fréquences qui lui ont été concédées (sur cepoint, cf. infra consid. 3.3), la ComCom n'avait pas à prouver, par pièces,qu'elle avait besoin de ces fréquences pour les ré-octroyer à d'autresopérateurs; ce n'est en effet pas à la recourante qu'il appartient deconserver de telles fréquences si elle ne les utilise pas, mais à laConfédération qui dispose en la matière d'un monopole (cf. art. 22 al. 1 et25 LTC; message du 10 juin 1996 concernant la révision de la loi sur lestélécommunications [ci-après cité: Message], in: FF 1996 III, p. 1361 ss,1389/1390). Dans la mesure où les preuves proposées par la recourante n'étaient paspertinentes pour l'issue du litige, la ComCom pouvait refuser de lesadministrer, sans violer le droit d'être entendue de l'intéressée (cf. ATF131 I 153 consid. 3 p. 157/158; 130 II 425 consid. 2.1 p. 428 et les arrêtscités). Est, par voie de conséquence, pareillement infondée la requête de larecourante tendant à ce que le Tribunal fédéral ordonne lui-même laproduction des pièces litigieuses. 3.Sur le fond, la recourante exige tout d'abord la modification de la clause4.1.1 de la concession ("Konzessionsgebühren für Funkkonzessionen") et leremboursement d'une partie de la redevance. Elle fonde sa conclusion surl'art. 10 LTC, interprété à la lumière d'une décision de la ComCom du 25 juin2002 rendue dans le cadre d'une autre affaire (sur ce point, cf. infraconsid. 3.1 à 3.4). Elle invoque également la clausula rebus sic stantibus(cf. infra consid. 3.5) ainsi que la théorie du droit à l'équilibre financierde la concession (cf. infra consid. 3.6). Pour l'essentiel, elle fait valoirque, contrairement aux prévisions initiales "très enthousiastes etoptimistes" de l'ensemble des opérateurs télécoms et de la ComCom elle-même,le marché WLL n'a jamais "décollé" et que rien, à ce jour, ne permet depenser qu'il en ira différemment à l'avenir. 3.1 Applicable aux concessions de radiocommunication par le renvoi de l'art.27 LTC (cf. Peter R. Fischer/Oliver Sidler, Fernmelderecht, in: SBVR V/1, no260), l'art. 10 LTC est reproduit in extenso en allemand dans l'acte deconcession litigieux (clause 2.2.3 "Änderung der Konzession"). Il prévoit, àson alinéa premier, que l'autorité concédante peut modifier certainesdispositions de la concession avant l'expiration de sa durée de validité siles conditions de fait ou de droit ont changé et si la modification estnécessaire pour préserver des intérêts publics importants. Le second alinéade la disposition précise que le concessionnaire reçoit un dédommagementapproprié si la modification de la concession entraîne une réductionsubstantielle des droits concédés. Il est douteux que la norme précitée fasse obligation à la ComCom de modifierles dispositions d'une concession en cas de changement des conditions dedroit ou de fait. A teneur de sa lettre, elle revêt en effet plutôt lecaractère d'une norme potestative ("Kann-Vorschrift"), dont l'application nesemble pas s'imposer à l'administration, mais relever de son pouvoird'appréciation; cette interprétation est confirmée par les versions allemandeet italienne de la disposition; elle est également renforcée par le fait quel'application de celle-ci doit tendre "à préserver des intérêts publicsimportants" qui sont, avant tout, ceux des usagers (cf. LeilaRoussianos-Moayedi, Les concessions de services de télécommunication, thèse,Berne 2002, p. 135). Quoi qu'il en soit, il n'est pas besoin d'approfondirplus avant la question, car la recourante ne peut en toute hypothèse pasobtenir le remboursement de sa redevance au vu des circonstances. 3.2 La concession de radiocommunication litigieuse a été acquise au termed'une procédure d'appel d'offres public obéissant aux principes del'objectivité, de la non-discrimination et de la transparence (cf. art. 24al. 2, 2ème phrase LTC). C'est la procédure habituelle prévue pour l'octroide ce genre de concession lorsque les fréquences utilisées doivent servir àfournir des services de télécommunication et qu'il est à prévoir qu'iln'existera pas assez de fréquences disponibles pour satisfaire les intéressésprésents et futurs (cf. art. 24 al. 1 LTC; Roland Feuz/Bernhard Rütsche, Lesprocédures d'octroi des concessions, in: Le droit des télécommunications enmutation, Enseignement de 3e cycle de droit 1999, Fribourg 2001, p. 143 ss,152). L'adjudication s'est, par ailleurs, faite au plus offrant, paropposition à une adjudication selon certains critères (cf. art. 11 del'ordonnance du 31 octobre 2001 sur les services de télécommunication [OST;RS 784.101.1] édicté par le Conseil fédéral en vertu de la délégation decompétence figurant à l'art. 24 al. 2, première phrase LTC). Le montant del'adjudication, qui correspond, après déduction des émoluments, à laredevance (cf. art. 39 al. 3 LTC; clauses 4.1.1 et 4.1.3 de l'acte deconcession), a été payé en une fois, aussitôt après l'octroi de la concessionen juin 2000, conformément à l'art. 12 al. 2, 3ème phrase OST, dans sa teneuren vigueur - ici déterminante - jusqu'au 30 mars 2002 (RO 2001 2759, p.2762); cette prescription a été reprise mutatis mutandis à l'actuel art. 12al. 3, 3ème phrase OST. La clause 4.1.1 de l'acte de concession prévoit que le montant del'adjudication est irrévocable ("endgültig") et ne peut pas faire l'objetd'un remboursement partiel si la concession est restreinte, suspendue,révoquée, retirée ou restituée avant son échéance; cette clause est calquéesur la réglementation prévue pour les adjudications au plus offrant à l'art.12 al. 2, quatrième phrase aOST (RO 2001 2759, p. 2762), qui à la même teneurque l'actuel art. 12 al. 3 quatrième phrase OST, si ce n'est que le terme"partiel" a été purement et simplement supprimé dans la nouvelle version (RO2002 271). Sous le titre "Widerruf, Entzug und Verzicht auf die Konzession",la clause 2.2.4 de l'acte de concession rappelle qu'en vertu des art. 58al.2 et 3 LTC, la concession peut être totalement ou partiellement révoquéeen cas de violation du droit en vigueur voire retirée lorsque les conditionsessentielles à son octroi ne sont plus remplies; la clause précise égalementque le concessionnaire peut en tout temps renoncer à la concession, maisqu'il n'a alors droit à aucun remboursement du montant de l'adjudication. 3.3 Il résulte des normes légales et réglementaires précitées que larecourante ne peut demander le remboursement, même partiel, de sa redevance,en cas de restriction, suspension, révocation, retrait ou restitution de saconcession. A fortiori doit-il en aller ainsi lorsque, comme en l'espèce,aucune de ces hypothèses n'est réalisée et que l'intéressée continue à jouirpleinement de tous les droits attachés à la concession. Qu'elle n'exploitepas ou seulement dans une mesure limitée celle-ci en raison d'une conjonctureou d'autres circonstances passagèrement ou durablement défavorables n'ychange rien. Du reste, la non-utilisation pendant une période prolongée desdroits concédés peut précisément conduire au retrait de la concession sanscompensation financière pour violation d'une obligation essentielle duconcessionnaire, conformément aux art. 58 al. 3 LTC et 12 al. 3 OST, enrelation avec les clauses 2.2.5 et 4.1.1 in fine de l'acte de concession,ainsi qu'avec l'art. 21 de l'ordonnance du 6 octobre 1997 sur la gestion desfréquences et les concessions de radiocommunication (OGC; RS 784.102.1).Mais l'empêchement mis à obtenir le remboursement de la redevance découleégalement de la procédure d'appel d'offres public avec adjudication au plusoffrant utilisée pour l'octroi de la concession litigieuse. En effet, si lesopérateurs ayant emporté la mise pouvaient, après l'adjudication, obtenir leremboursement d'une partie du prix offert au motif qu'ils ne réalisentfinalement pas les gains initialement espérés, le processus d'enchères s'entrouverait complètement faussé et perdrait tout sens. Cela reviendrait àmodifier après coup et au cas par cas, en dehors de toute procédure, les prixd'adjudication, au mépris des garanties offertes par les principes detransparence et de non-discrimination; seraient, notamment, lésées par un telsystème, les entreprises qui, faute d'avoir pu ou voulu mettre un prixsuffisamment élevé lors des enchères en 2000, n'ont alors pas obtenu deconcession. Par ailleurs, un tel procédé se heurterait également au principed'égalité que le système de concurrence voulu par le législateur (cf. art.1er al. 2 lettre c et 23 al. 4 LTC; Message, p. 1374/1375) impose à l'Etat derespecter dans ses rapports avec les opérateurs; en effet, on ne voit guèrecomment cette exigence pourrait être remplie, en l'absence de procédure et decritères définissant clairement les modalités d'éventuelles restitutions deredevances, sans compter que certains concessionnaires ont, à ce jour, dûabandonner ou renoncer à leur activité, faute justement d'avoir pu larentabiliser. En définitive, il faut admettre qu'en participant aux enchères, la recourantea, en quelque sorte, fixé elle-même le prix de la concession, sur la basenotamment de son appréciation du potentiel économique du système WLL. Dèslors, si l'essor commercial ne répond finalement pas à ses attentes, elledoit seule en supporter les conséquences, de la même façon qu'elle seraitseule à pouvoir tirer profit des bénéfices qui auraient, cas échéant, dépasséses attentes. Peu importe, à cet égard, que ses prévisions optimistes eterronées fussent, à l'époque, partagées par de nombreux opérateurs etanalystes, y compris, selon ses allégations, par l'autorité concédante; seulcompte qu'elle était, à l'image de ses concurrents, la seule à pouvoirdécider, en dernière analyse, du prix qu'elle voulait offrir et des risqueséconomiques qu'elle était prête à prendre pour obtenir la concession. 3.4 La décision précitée de la ComCom du 25 juin 2002 que la recouranteinvoque pour établir son droit ne lui est d'aucun secours. Cette affaire concernait la modification d'une concession pourradiocommunication mobile de la 3ème génération (UMTS), dont l'octroi, enjanvier 2001, avait été assorti d'une charge imposant au concessionnaire uneobligation de desserte partielle du territoire d'ici fin 2002 (20% de lapopulation). La ComCom avait alors admis un changement déterminant desconditions de fait, parce que des problèmes techniques plus complexes queprévus étaient apparus et restaient à résoudre en juin 2002 et qu'il existaitalors un intérêt public important à ce que la concession soit modifiée, "afinqu'un réseau mûri, suffisamment testé sur le plan technique, conforme aumarché et adapté aux services (puisse être) établi et mis à disposition avecun équipement terminal capable de s'imposer sur le marché" (JAAC 2003 Ip.222 ss; Fischer/Sidler, op. cit., no 119). Le présent cas n'a donc que peu sinon rien à voir avec l'état de fait à labase de la décision dont se prévaut la recourante. On ne saurait, en toutcas, déduire de cette décision que des résultats économiques se situanten-deçà de prévisions optimistes faites lors d'un appel d'offres seraient denature à justifier la rétrocession de tout ou partie du prix d'adjudicationd'une concession. On ne voit du reste pas très bien à quels "intérêts publicsimportants", au sens de l'art. 10 al. 1 LTC, répondrait une tellerétrocession, d'autant que la recourante soutient que, non seulement lesystème WLL n'a pas connu d'essor jusqu'à ce jour, mais encore que cettetechnologie suscite peu d'engouement et qu'elle n'a dès lors guère de chancede se développer considérablement à l'avenir. Au surplus, l'art. 10 al. 2 LTCne prévoit un dédommagement qu'en cas de modification de la concessionentraînant une "modification substantielle des droits concédés", ce qui n'estpas le cas en l'occurrence, puisque la recourante continue, ainsi qu'on l'avu, à jouir pleinement de tous les droits attachés à la concession et qu'ellen'entend du reste pas renoncer à ceux-ci. 3.5 La recourante fonde également sa demande de remboursement sur la clausularebus sic stantibus (ci-après également citée clausula) que la terminologiefrançaise a consacrée sous le nom de théorie de l'imprévision. Cette institution juridique tirée du droit privé (cf. art. 2 CC) veut que,par exception à la règle pacta sunt servanda, la partie à un contrat àexécution différée - soit, en principe, un contrat de durée - peut se délierpartiellement ou totalement de ses obligations en cas de changement importantet imprévisible des circonstances ayant pour effet de créer une gravedisproportion entre sa prestation et la contre-prestation de l'autre partie,au point que le maintien du contrat apparaît abusif (cf. ATF 129 III 380consid. 2.2 p. 383; 127 III 300 consid.5b p. 304/305; 122 III 97 consid. 3ap. 98; 113 II 209 consid. 4a p.211; 107 II 343 p. 347/348; 101 II 17 consid.1a p. 19; 97 II 390 consid. 6 p. 398). Le Tribunal fédéral n'exclut pas, surle principe, l'application par analogie de la clausula rebus sic stantibus àcertaines relations de droit public (cf. ATF 122 I 328 consid. 7b p.340/341; 103 Ia 31 consid. 3b p. 37; voir aussi ATF 131 II 306 consid. 4.3.2p. 324). Jusqu'ici, il ne s'est, toutefois, pas encore exprimé surl'applicabilité du principe au droit des concessions, au contraire de ladoctrine qui paraît acquise à cette idée (cf. Jacques Fournier, Vers unnouveau droit des concessions hydrauliques, thèse Fribourg 2002, p. 208;Tomas Poledna, Staatliche Bewilligungen und Konzessionen, Berne 1994, nos 173et 236; Pierre Moor, Droit administratif, vol. III, Berne 1992, p.131;Blaise Knapp, Précis de droit administratif, Bâle 1991, nos 1428 ss; MichelHanhardt, La concession de service public, Etude de droit fédéral et de droitvaudois, thèse Lausanne 1977, p. 153 ss). La question peut demeurer indécise. L'application de la clausula rebus sic stantibus suppose en effet que lechangement déterminant des circonstances survienne après la conclusion ducontrat (cf. ATF 101 II 17 consid. 1a p. 19; 97 II 390 consid. 6 p. 398) et,en principe, que l'obligation devenue trop onéreuse n'ait, à ce moment-là,pas déjà été exécutée (cf. Pierre Tercier, La «clausula rebus sic stantibus»en droit suisse des obligations, in: JdT 1999 I p.194 ss, 196; BrunoSchmidlin, Commentaire bernois, no 273 ad art. 18 CO; Jacques Bischoff,Vertragsrisiko und clausula rebus sic stantibus, thèse Zurich 1983, p. 219s.; Emile Georges Thilo, Clausula rebus sic stantibus, De la revision descontrats pour cause d'imprévision, in: JdT 1937, p. 66 ss, 76). C'est que desobligations de longue durée complètement ou partiellement exécutées nepeuvent, d'ordinaire, être modifiées (ou résiliées) qu'avec
effet ex nunc(cf. ATF 129 III 320 consid. 7.1.2 p. 328 s.). Or, dans le cas d'espèce, latotalité de la redevance a été payée en une fois, aussitôt après l'octroi dela concession en juin 2000, si bien que, pour ce motif déjà, la théorie del'imprévision n'est pas de nature à fonder la prétention de la recourante. Au demeurant, la clausula n'est applicable que si le changement déterminantdes circonstances peut être qualifié d'imprévisible, soit si les parties nepouvaient ou ne devaient pas déjà le prévoir lors de la conclusion ducontrat. Il s'ensuit notamment qu'un plaideur ne saurait tirer argument de laclausula pour demander l'invalidation ou la modification d'un contrat aumotif que de simples espérances ou spéculations ne se sont pas réalisées, caril pouvait et devait compter avec une telle éventualité, même s'il ne lasouhaitait pas (cf. 107 II 343 consid. 2 p. 347/348; ATF 69 II 139 consid. 4bp. 144; 59 II 372 consid. 4 p. 380 et les arrêts cités; Tercier, op. cit., p.209; Bischoff, op. cit., p. 213 ss). De la même manière, dans un contextevoisin parfois difficile à distinguer de la clausula (cf. Wolfgang Wiegand,Clausula rebus sic stantibus - Bemerkungen zu den Voraussetzungen ihrerAnwendung, in: Richterliche Rechtsfortbildung in Theorie und Praxis,Festschrift für Hans Peter Walter, Berne 2005, p. 443 ss, 447 ss), des faitsde nature spéculative, risqués ou incertains ne sont, en principe, passusceptibles de fonder une erreur essentielle au sens de l'art. 24 al. 1 CO(cf. ATF 117 II 218 p. 224; 109 II 105 p. 111; Bruno Schmidlin, Commentaireromand, Bâle 2003, nos 35 ss ad art. 23-24 CO). En l'espèce, la recourante voudrait voir un changement imprévisible descirconstances dans le fait que, contrairement aux attentes du marché auprintemps 2000, le système WLL ne s'est pas imposé comme une alternativesérieuse au dernier kilomètre de Swisscom et s'est révélé un écheccommercial. Elle relève qu'alors qu'elle tablait à l'époque sur un chiffred'affaires de 114.6 millions de francs pour l'exercice 2006 qui devait passerà 219.3 millions pour l'exercice 2010, elle n'escompte aujourd'hui, malgréses efforts, pas réaliser un chiffre d'affaires supérieur à 120'000 fr. Larecourante ne donne cependant aucune indication précise permettant decomprendre les raisons de cette profonde déconvenue commerciale, pas plusqu'elle ne fournit de détails concernant les prémisses sur lesquelles elleavait fondé ses mauvaises prévisions. Selon la ComCom, si celles-ci ne se"sont malheureusement pas confirmées (c'est) notamment en raison del'évolution de la conjoncture" (cf. rapport annuel 2002 de la ComCom). Au vu de ces éléments, il apparaît que, davantage qu'à un changementimprévisible des circonstances, l'on ait ici simplement affaire à desattentes ou des espoirs déçus en raison de prévisions économiques tropoptimistes qui se sont a posteriori révélées fausses. Or, de tellesprévisions recèlent, de manière intrinsèque, un caractère spéculatifrelativement marqué de nature à exclure, par principe, l'application de laclausula. Cette conclusion s'impose d'autant plus en l'espèce que le marchéportait sur une technologie nouvelle pour laquelle il ne pouvait, par laforce des choses, pas exister de projection sûre ou fiable quant au potentieléconomique du système WLL, faute de points de comparaison. Du reste, larecourante admet, du moins implicitement, que ses prévisions ne reposaientsur aucune base solide, les qualifiant de "très enthousiastes et optimistes",et soulignant qu'elles s'inscrivaient dans un marché "euphorique" (recours,p. 33 et 39). La ComCom a confirmé que le montant de plus de 580 millions defrancs atteint par les enchères en Suisse avait constitué une "surprisegénérale", notamment par comparaison à d'autres pays où, selon les moments,les concessions WLL ont été adjugées à des prix "très bas" et ont peurapporté, soit 99 millions de francs en Grande-Bretagne en novembre 2000 oudeux millions de francs en Autriche en janvier 2001 (cf. rapport annuel 2000de la ComCom, p.17). A ces circonstances qui plaident contre l'applicationde la clausula, s'ajoute le fait que les nouvelles technologies sont, parnature, un domaine en rapide évolution et en constante mutation, ce quiimplique une prise de risque importante de la part des acteurs économiquesopérant sur un tel marché avec, en contre-partie, des expectatives de profitssubstantiels en cas de succès commercial; d'ailleurs, il ressort des chiffresde "l'analyse de projet" du 1er juillet 2005 qu'elle a versée en cause, quela recourante escomptait initialement réaliser un bénéfice net cumulé de 239millions de francs à l'expiration de la concession en 2010 (pièce précitée,p. 8), soit un chiffre représentant plus de cinq fois le prix de laredevance. Dans ces conditions, force est d'admettre que l'intéressée savait ou devaitsavoir, lorsqu'elle a acquis la concession litigieuse par voie d'enchères,qu'elle se lançait dans une opération incertaine et même relativementrisquée. Elle ne pouvait pas exclure que ses attentes, fondées sur desprévisions pour le moins optimistes, risquaient d'être déçues. Elle devait aucontraire envisager que l'exploitation de la concession pourrait n'être pasrentable. Du reste, l'acte de concession prévoit expressément que leconcessionnaire peut à tout moment renoncer avant terme à la concession, maisqu'il n'a alors droit à aucun remboursement (clause 2.2.4 de l'acte deconcession). Or, il ne fait pas de doute que cette hypothèse vise de manièreimplicite en priorité la situation dans laquelle l'exploitation de laconcession est déficitaire. Dans la mesure où les parties ont envisagé etréglé les conséquences d'une telle éventualité, leur volonté doit dès lorss'appliquer et il n'y a, pour ce motif également, pas de place pour laclausula rebus sic stantibus (cf. ATF 127 III 300, consid. 5b p. 305 ss;Bénédict Winiger, Commentaire romand, Bâle 2003, nos 206-207 ad art. 18 CO;Fournier, op. cit., p. 214). 3.6 Empruntée au droit français, la théorie de l'équilibre financier que larecourante invoque également à l'appui de sa demande, repose sur l'idée quel'autorité concédante ne doit pas, par des prétentions économiquesexcessives, empêcher la mise en valeur optimale de la concession; il s'agitde ne pas rendre impossible ou difficile à l'excès la tâche duconcessionnaire qui doit pouvoir continuer à être remplie en toutecirconstance (principe de la continuité de l'activité concédée), car elles'exerce dans l'intérêt public (cf. Poledna, op. cit., nos 61 et 235 ss;Fournier, op. cit., p. 205; Moor, op. cit., p. 131; Hanhardt, op. cit., p.19, 121 et 151/152). Cette théorie ne concerne donc que les concessions ditesde service public (sur cette notion, cf. rapport du Conseil fédéral du 23juin 2004 «Le service public dans le domaine des infrastructures», in: FF2004 p. 4309 ss, p. 4318), soit celles par lesquelles l'Etat confie à unepersonne physique ou morale le soin de gérer une activité qu'il estime ne paspouvoir laisser à la seule initiative du secteur privé, qui pourrait s'endésintéresser ou la pratiquer à des prix prohibitifs (cf. Moor, p.120/121;Hanhardt, op. cit., p. 32; Roussianos-Moayedi, op. cit., p.85). Dans le cas particulier, la concession de radiocommunication litigieuse estde type plutôt régalienne (cf. Moor, op. cit., p. 120, 378 et 387), en cesens qu'elle vise un objectif fiscal et qu'elle tire sa principalejustification du fait que les biens concédés, soit les fréquenceshertziennes, sont en quantité limitée (cf. art. 22 al. 1 et 25 LTC; Message,p.1389/1390) et qu'il convient, en conséquence, de les gérer efficacement etde les attribuer de manière équitable et transparente (cf. art. 25 LTC). Dureste, les obligations incombant au concessionnaire qui poursuiventspécifiquement un but d'intérêt public ne sont ni très nombreuses ni trèsétendues; en particulier, l'obligation d'exploiter n'a qu'une portée et uncontenu relativement limités (sur cette obligation, cf. infra consid. 4) etle concessionnaire peut même y renoncer selon la clause 2.2.4 de l'acte deconcession, tandis qu'il n'y a pas de tarifs imposés ou de procédure decontrôle des prix pratiqués. Par contraste, la concession de serviceuniversel prévue aux art. 14 ss LTC fait l'objet d'un régime particulier quise rapproche d'une concession de service public au sens classique du terme(cf. Roussianos-Moayedi, op. cit., p. 196 ss, 202 ss): le concessionnaire yest en effet tenu à des obligations précises relativement contraignantesconcernant l'étendue des services qu'il doit assurer pendant la durée de laconcession (cf. art. 16 et 18 LTC; art. 19 OST), leur prix et leur qualité(cf. art. 17 LTC; Message, p.1386 ss; rapport du Conseil fédéral précité du23 juin 2004, p.4327ss); en contre-partie, il peut, à certaines conditions,recevoir une compensation financière pour les frais non couverts du serviceuniversel (cf. art. 19 et 38 LTC et 17 OST), afin qu'il ne subisse pas depertes à raison des prestations éventuellement non rentables qu'il se doit entout temps de fournir en vertu du principe de la continuité de l'activitéconcédée (cf. Roussianos-Moayedi, op. cit., p.249/250; rapport du Conseilfédéral précité du 23 juin 2004, p.4329). Ce n'est là rien d'autre qu'uneconcrétisation légale de la théorie de l'équilibre financier qui n'a pas soncorrespondant ou son équivalent pour la concession de radiocommunicationlitigieuse. Au demeurant, la théorie de l'équilibre financier suppose, en règle générale,que les conditions de la clausula rebus sic stantibus soient remplies (cf.Fournier, op. cit., p. 208 et 214; Moor, op. cit., p. 131; Hanhardt, op.cit., p. 153/154), ce qui, comme on l'a vu (cf. supra consid. 3.5), n'estjustement pas le cas en l'espèce. 3.7 En résumé, la modification du point 4.1.1 de la concession, commepréalable à un remboursement du prix de la redevance, est contraire à laréglementation applicable à la concession de radiocommunication litigieuse etne trouve de justification ni à l'art. 10 LTC, ni dans la clausula rebus sicstantibus, ni dans la théorie de l'équilibre financier. 4.La recourante discute l'interprétation de l'obligation d'exploiter prévue àla clause 2.2.5. L'OFCOM a précisé la portée de cette obligation en ce sensque le concessionnaire est tenu, pendant toute la durée de la concession, derelier la station de base au moins à deux stations terminales installées chezdes clients (lettre du 13 novembre 2000 et e-mail du 13 février suivant). Selon la recourante, la clause litigieuse n'est pas rédigée clairement etprête à confusion, car elle ne prévoit l'obligation d'exploiter, à rigueur desa lettre, que "pour la période d'une année à compter de l'octroi de laconcession". Il s'agit là d'une mauvaise traduction de l'expression"innerhalb eines Jahres nach Konzessionerteilung" qui, dans le contexte,signifie clairement que c'est "dans le délai d'une année après l'octroi de laconcession" que le concessionnaire a l'obligation de commencer et depoursuivre une exploitation commerciale avec au moins une station de base.L'interprétation que propose la recourante n'aurait d'ailleurs aucun sens etfrise même la témérité si l'on se réfère au but de l'obligation litigieuse,qui est de garantir une gestion et une utilisation efficaces des fréquenceshertziennes concédées qui ne sont disponibles qu'en quantité limitée (cf.art. 23 al. 3 et 25 LTC). Quant au fait que la station de base doive êtrereliée au moins à deux stations terminales installées chez des clients pourremplir l'obligation d'exploiter, la recourante n'apporte aucun élémentpermettant de dire que cette exigence ne serait pas conforme à uneinterprétation raisonnable de la clause 2.2.5 selon le principe de laconfiance (cf. ATF 126 II 171 consid. 4c/bb, p. 182). Il n'y a dès lors pasde motif de s'écarter de cette interprétation, surtout s'agissant d'unequestion technique pour laquelle la Cour de céans s'impose une certaineretenue (cf. supra consid. 1.2). Pour le surplus, la recourante ne conteste pas qu'elle ait violé l'obligationd'exploiter telle que comprise par la ComCom (recours, p. 51 in fine). Ellesoutient toutefois que cette violation ne justifie pas la mesure desurveillance prise à son encontre au sens de l'art. 58 al. 2 LTC, par égardau principe de la proportionnalité. Cela étant, sauf à la supprimer ou à n'enpas tenir compte, l'obligation en question ne peut pas être réduite, tant lesexigences qu'elle pose sont minimales. Du reste, la recourante adopte uneargumentation qui tend, en fin de compte, précisément à être exonérée decette obligation, puisqu'elle soutient que celle-ci ne peut lui être imposéeaussi longtemps que la ComCom n'aura pas fait la preuve qu'elle a besoin desfréquences litigieuses pour les réattribuer à des tiers. L'intéressée perdcependant de vue que, si elle n'utilise pas la concession, elle ne sauraitmonopoliser les fréquences concédées, parce que le monopole et la gestion decelles-ci appartiennent, ainsi qu'on l'a vu (cf. supra consid. 2.2),exclusivement à la Confédération par l'intermédiaire de l'OFCOM et que, danscette perspective, il n'est pas déterminant, pour apprécier l'obligationd'exploiter, qu'il y ait possibilité voire nécessité de réattribuer à destiers les fréquences non utilisées. Au demeurant, dans sa réplique, larecourante précise qu'elle a trouvé des clients depuis le 30septembre 2005et qu'elle remplit dorénavant l'obligation d'exploiter, démontrant par là quecelle-ci peut être remplie et qu'il n'y a pas matière à la revoir. 5.La recourante ne conteste plus la validité et le contenu de l'obligationd'informer prévue à la clause 2.2.6, aux termes de laquelle elle est tenued'annoncer chaque mois les mises en service ou hors service de ses stationsde bases et des stations terminales. Tout en admettant qu'elle n'a pas avertil'OFCOM de la désactivation de deux stations terminales en violation de cetteobligation, elle fait cependant valoir que le principe de la proportionnalités'oppose à ce que ce manquement soit sanctionné par des mesures desurveillance. Cela étant, les mesures litigieuses prises à son encontre s'épuisent,s'agissant du manquement en question, dans la constatation de celui-ci etdans l'obligation de produire un rapport circonstancié sur les dispositionsprises pour y remédier à l'avenir. La recourante ne saurait dès lorssérieusement soutenir que de telles mesures sont disproportionnées, à moins,mais elle ne le fait à raison plus en procédure fédérale, de contester leprincipe même de l'obligation d'informer ou son contenu. 6.Enfin, dans une conclusion subsidiaire, la recourante demande au Tribunalfédéral de lui accorder un délai de trois mois, dès la notification de sonarrêt, pour fournir à la ComCom un rapport circonstancié sur les dispositionsprises pour remédier aux manquements constatés. Il n'appartient toutefois pasà la Cour de céans de prolonger le délai imparti à cet effet par l'autoritéintimée, d'autant moins que la requête d'effet suspensif a été rejetée. Larequête est manifestement infondée. 7.Il suit de ce qui précède
que le recours est en tous points mal fondé. Succombant, la recourante supportera les frais judiciaires (art. 156 al. 1 et7 OJ) et n'a pas droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Un émolument judiciaire de 40'000 fr. est mis à la charge de X.________ SA. 3.Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante, àl'Office fédéral de la Communication et à la Commission fédérale de lacommunication. Lausanne, le 18 juillet 2006 Au nom de la IIe Cour de droit publicdu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.432/2005
Date de la décision : 18/07/2006
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-07-18;2a.432.2005 ?
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