La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/07/2006 | SUISSE | N°1P.405/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 17 juillet 2006, 1P.405/2006


{T 0/2}1P.405/2006 /col Arrêt du 17 juillet 2006Ire Cour de droit public MM. les Juges Féraud, Président,Aemisegger et Fonjallaz.Greffière: Mme Truttmann. A. ________,recourante, représentée par Me Marcel-Henri Gard, avocat, contre Office du Juge d'instruction cantonal,Palais de Justice, 1950 Sion 2,Procureur général du canton du Valais,case postale 2282, 1950 Sion 2,Tribunal cantonal du canton du Valais,Chambre pénale, Palais de Justice, 1950 Sion 2. maintien en détention préventive, recours de droit public contre la décision de la Chambre pénale du Tribunalcantonal du canton du

Valais du31 mai 2006. Faits: A.A. ________, ressortissante b...

{T 0/2}1P.405/2006 /col Arrêt du 17 juillet 2006Ire Cour de droit public MM. les Juges Féraud, Président,Aemisegger et Fonjallaz.Greffière: Mme Truttmann. A. ________,recourante, représentée par Me Marcel-Henri Gard, avocat, contre Office du Juge d'instruction cantonal,Palais de Justice, 1950 Sion 2,Procureur général du canton du Valais,case postale 2282, 1950 Sion 2,Tribunal cantonal du canton du Valais,Chambre pénale, Palais de Justice, 1950 Sion 2. maintien en détention préventive, recours de droit public contre la décision de la Chambre pénale du Tribunalcantonal du canton du Valais du31 mai 2006. Faits: A.A. ________, ressortissante brésilienne, née en 1977 et domiciliée en Valais,a été arrêtée le 16 décembre 2005 suite aux révélations de sa soeurB.________. Cette dernière avait été interceptée le jour précédent àl'aéroport de Zurich en possession de plus de 1.4 kg de cocaïne d'un taux depureté supérieur à 70 %, alors qu'elle revenait du Brésil. B.________ aaffirmé que sa soeur, ainsi que l'ami de cette dernière, étaient impliquésdans l'organisation de cette opération.Une instruction pénale a été ouverte contre A.________ et son ami le 16décembre 2005 pour infraction à l'art. 19 ch. 2 LStup. Le lendemain,A.________ et son ami ont été placés en détention préventive. Cette dernièreétait motivée par les besoins de l'instruction en cours, à savoir pour lesempêcher de fuir, de commettre de nouvelles infractions, d'influencer lespersonnes appelées à être entendues au sujet des faits qui leur étaientreprochés, et de perturber les preuves.Une première requête de mise en liberté provisoire formée par A.________ aété rejetée par le Juge d'instruction du canton du Valais (ci-après: le Juged'instruction) par décision du 28février 2006. Ce dernier a retenu qu'ilexistait de graves soupçons quant à la participation de A.________ à untrafic de drogue bien organisé. Il a fait référence au fait que son ami avaitimporté de la drogue du Brésil en Suisse, en sa présence, en 2005; qu'elleavait elle-même mis en contact, au Brésil, son ami avec le trafiquant dedrogue qui lui avait remis la cocaïne; qu'elle ne pouvait donc prétendreignorer tout de ce transfert; qu'elle s'était rendue à Zurich avec son ami enrelation avec la livraison de la cocaïne; qu'elle avait envoyé au Paraguay lasomme de 4'000 fr., par l'intermédiaire de Western Union, alors qu'elle nepouvait ignorer que cet argent provenait du trafic de drogue. Enfin, il aretenu qu'elle servait d'intermédiaire s'agissant de l'importation de cocaïnepar sa soeur. En outre, le Juge d'instruction a souligné l'existence d'unfort risque de collusion, d'importantes investigations tant en Suisse qu'auBrésil étant en cours.Le 21 avril 2006, le Juge d'instruction a décerné une demande d'entraidejudiciaire internationale urgente au Brésil, en vue de l'exécution deperquisitions et séquestres, ainsi que de la mise en oeuvre de diversesauditions. B.Le 5 mai 2006, une nouvelle demande de mise en liberté a été rejetée par leJuge d'instruction. Se référant à sa décision du 28 février précédent,celui-ci a réaffirmé l'existence d'indices sérieux de culpabilité. Ausurplus, il a également considéré qu'il existait un risque de fuite et que lerisque accru de collusion subsistait. Par décision du 31 mai 2006, la Chambrepénale du Tribunal cantonal du canton du Valais (ci-après: le Tribunalcantonal) a confirmé ce refus de mise en liberté. C.Agissant par la voie du recours de droit public, A.________ demande auTribunal fédéral d'annuler la décision du Tribunal cantonal et d'ordonner samise en liberté immédiate. Elle fait valoir que sa détention n'a pas étéprolongée dans les 30 jours prévus par l'art. 75 ch. 2 CPP/VS. Elle se plaintégalement d'une violation du principe de la célérité, en invoquant l'art. 5ch. 3 CEDH. Enfin, elle conteste l'existence d'un risque de collusion, enfaisant référence à une appréciation arbitraire ainsi qu'à une inégalité detraitement. Elle cite l'art. 4 Cst. sur ce point. Elle requiert en outrel'assistance judiciaire.Le Juge d'instruction et le Tribunal cantonal se réfèrent à leurs décisions.Le Ministère public du canton du Valais n'a pas présenté d'observations. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Formé en temps utile contre une décision finale prise en dernière instancecantonale et qui touche la recourante dans ses intérêts juridiquementprotégés, le recours est recevable au regard des art. 84 ss OJ. Par exceptionà la nature cassatoire du recours de droit public, la conclusion de larecourante tendant à ce que le Tribunal fédéral mette fin à sa détentionpréventive est recevable (ATF 124 I 327 consid. 4b/aa p. 333). 2.Une mesure de détention préventive est compatible avec la libertépersonnelle, garantie par les art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH, pour autantqu'elle repose sur une base légale, qu'elle réponde à un intérêt public etqu'elle respecte le principe de la proportionnalité (art. 31 al. 1 et 36 al.1 à 3 Cst.; ATF 123 I 268 consid. 2c p. 270). S'agissant d'une restrictiongrave à la liberté personnelle, le Tribunal fédéral examine librement cesquestions, sous réserve toutefois de l'appréciation des preuves, revue sousl'angle de l'arbitraire (ATF 123 I 268 consid. 2d p.271).Selon l'art. 72 ch. 1 du Code de procédure pénale valaisan (CPP/VS), ladétention préventive peut être ordonnée lorsque le prévenu est fortementsoupçonné d'un crime ou d'un délit et que, compte tenu des circonstances, ilest sérieusement à craindre qu'il ne se dérobe à la procédure ou à lasanction attendue en prenant la fuite (let. a), qu'il ne compromette laprocédure en influençant des personnes, en brouillant des pistes ou enperturbant des preuves (let. b) ou qu'il ne commette de nouvelles infractionsgraves (let. c). 3.La recourante tient sa détention pour illégale. Elle estime que sa détentionaurait dû être prolongée dans les 30 jours suivant la décision de maintien endétention préventive du 28 février 2006, en application de l'art. 75 ch. 2CPP/VS. L'art. 5 par. 4 CEDH commanderait donc sa mise en liberté immédiate. 3.1 Selon l'art. 75 ch. 2 CPP/VS, si la détention a été décidée pour empêcherle prévenu d'entraver l'instruction, elle ne doit pas, en règle générale,dépasser 30 jours. Si le juge d'instruction estime nécessaire de laprolonger, il doit en donner une décision motivée au prévenu et à sondéfenseur. 3.2 Selon la jurisprudence, le non-respect de l'art. 5 par. 4 CEDH, quioblige l'autorité judiciaire saisie d'un recours contre une mesure dedétention à statuer à bref délai, n'entraîne pas à lui seul la libération duprévenu. Ce dernier n'aurait le droit d'être relaxé que si sa détentionn'apparaissait plus matériellement justifiée (ATF 116 Ia 60 consid. 3b p. 64;115 Ia 293 consid. 5g p. 308; 114 Ia 88 consid. 5d p.92/93; arrêt de laCourEDH du 28 octobre 2003 dans la cause Minjat contre Suisse, ch. 37 à 49,paru à la JAAC 2004 n° 171 p. 2166). Il en va de même lorsque l'autoritécompétente ordonne une prolongation de la détention après l'expiration dudélai imparti pour ce faire. La jurisprudence admet en pareil cas quel'autorité compétente décerne un nouveau mandat d'arrêt, même en l'absence defaits ou de besoins nouveaux de l'instruction (cf. ATF 109 Ia 320 consid. 3ep. 324).S'agissant en particulier de l'art. 75 CPP/VS, il a déjà été jugé que si lemagistrat compétent omet de prolonger la détention ou d'ordonnerl'élargissement du prévenu dans le délai de l'art. 75 ch. 2 CPP/VS,l'incarcération devient illégale. Une décision prise après l'expiration estdonc tardive et n'a pas pour effet de prolonger rétroactivement le titrejuridique de la détention, devenu caduc, et ne répare pas l'illégalité decette mesure. La détention reprend cependant un cours conforme au droit siles conditions et les formalités d'une nouvelle arrestation sont satisfaites(arrêt 1C.5/1999 du 23 octobre 2000 consid. 2b).En l'espèce, une éventuelle violation de l'art. 75 ch. 2 CPP/VS n'aurait doncpas entraîné à elle seule la libération de la recourante, au vu del'existence d'une décision de maintien en détention, laquelle peut êtreassimilée à un nouveau mandat d'arrêt (arrêt 1C.5/1999 du 23 octobre 2000consid. 2c; ATF 109 Ia 320 consid. 3e p. 324). Le grief n'est donc pas fondéet doit être rejeté. 4.Sur le fond, la recourante ne remet pas en cause la base légale sur laquellerepose la détention préventive et ne conteste pas l'existence de chargessuffisantes à son encontre. Elle nie cependant l'existence d'un risque decollusion. Elle dénonce également une violation du principe de la célérité,le Juge d'instruction ayant attendu plus de quatre mois pour décerner larequête d'entraide internationale au Brésil.Lorsque la décision attaquée se fonde sur plusieurs motivationsindépendantes, alternatives ou subsidiaires, toutes suffisantes, le recourantdoit, à peine d'irrecevabilité, démontrer que chacune d'entre elles viole sesdroits constitutionnels (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 132 I 13 consid. 3 p.17; ATF 119 Ia 13 consid. 2 et l'arrêt cité). Or l'arrêt cantonal est fondésur l'existence de risques de collusion et de fuite. La recourante necontestant que le premier de ces risques, son recours devrait en principeêtre considéré comme irrecevable. Il rend en tout cas inutile l'examen del'argumentation de la recourante relative à l'inexistence du risque decollusion. 5.La recourante dénonce cependant également une violation du principe decélérité garanti à l'art. 29 al. 1 Cst. et aux art. 5 par. 3 et 6 par. 1CEDH. Il convient de traiter ce grief, qui pourrait à lui seul, en casd'admission, conduire à l'élargissement de la recourante. 5.1 En vertu des art. 31 al. 3 Cst. et 5 par. 3 CEDH, le prévenu doit êtrelibéré lorsque la durée de son incarcération se rapproche de la peineprivative de liberté qui sera éventuellement prononcée. La recourante neprétend pas que tel serait le cas en l'occurrence au vu de l'infraction quilui est reprochée. L'incarcération peut toutefois aussi être disproportionnéeen cas de retard injustifié dans le cours de la procédure pénale (ATF 128 I149 consid. 2.2 p. 151; 125 I 60 consid. 3d p. 64; 124 I 208 consid. 6 p. 215et les arrêts cités). Le caractère raisonnable de la durée d'une procédurepénale s'apprécie selon les circonstances particulières de la cause, eu égardà la complexité de l'affaire, au comportement du requérant et à celui desautorités compétentes ainsi qu'à l'enjeu du litige pour le prévenu (ATF 124 I139 consid. 2c p. 142; 119 Ib 311 consid. 5b p. 325; 117 Ib 193 consid. 1c p.197). N'importe quel retard n'est pas suffisant pour justifierl'élargissement du prévenu. Il doit s'agir d'un manquement particulièrementgrave, faisant au surplus apparaître que l'autorité de poursuite n'est plusen mesure de conduire la procédure à chef dans un délai raisonnable. En casde retard de moindre gravité, des injonctions particulières peuvent êtredonnées, comme par exemple la fixation d'un délai de détention maximum; c'estau surplus au juge du fond qu'il appartient, le cas échéant par une réductionde peine, de tenir compte d'une violation de l'obligation de célérité (ATF128 I 149 consid. 2.2. p.151/152). 5.2 En l'occurrence, la complexité du dossier, l'importance présumée dutrafic, ainsi que les déclarations fluctuantes des prévenus, justifient denombreuses mesures d'investigation. Il ne ressort du dossier aucunrelâchement flagrant et répréhensible de la conduite de l'enquête. S'il estvrai que la requête d'entraide judiciaire internationale aurait probablementpu être décernée plus promptement, cette critique n'est pas de nature àremettre en question ce constat. Au demeurant, il est pris acte quel'exécution de la commission rogatoire devrait être menée à chef durantl'été. En l'état, il n'y a pas de motifs de considérer que les autoritésjudiciaires ne vont pas poursuivre l'enquête sans désemparer et clorel'instruction concernant la recourante à bref délai. Il s'ensuit que l'on nepeut pas reprocher aux autorités cantonales, dans les circonstancesactuelles, une violation du principe de la célérité. 6.Le recours doit par conséquent être rejeté dans la mesure où il estrecevable. Les conditions de l'art. 152 al. 1 OJ étant réunies, il convientde faire droit à la demande d'assistance judiciaire et de statuer sans frais.Me Marcel-Henri Gard est désigné comme avocat d'office de la recourante pourla présente procédure et une indemnité lui sera versée à titre d'honorairespar la Caisse du Tribunal fédéral (art. 152 al. 2 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours de droit public est rejeté dans la mesure où il est recevable. 2.La demande d'assistance judiciaire est admise. Me Marcel-Henri Gard estdésigné comme avocat d'office de la recourante et une indemnité de 1'000 fr.lui est versée à titre d'honoraires, à payer par la Caisse du Tribunalfédéral. 3.Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante, àl'Office du Juge d'instruction cantonal, ainsi qu'au Procureur général et àla Chambre pénale du Tribunal cantonal du canton du Valais. Lausanne, le 17 juillet 2006 Au nom de la Ire Cour de droit publicdu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.405/2006
Date de la décision : 17/07/2006
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-07-17;1p.405.2006 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award