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17/07/2006 | SUISSE | N°1A.310/2005

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 17 juillet 2006, 1A.310/2005


{T 0/2}
1A.310/2005 /svc

Arrêt du 17 juillet 2006
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Féraud, Président,
Aemisegger, Aeschlimann, Reeb et Fonjallaz.
Greffière: Mme Truttmann.

Conseil d'Etat de la République et canton de Neuchâtel, 2001 Neuchâtel 1,
recourant,

contre

les époux X.________,
intimés, représentés par Me Blaise Stucker, avocat,
Tribunal administratif de la République et canton
de Neuchâtel, case postale 3174, 2001 Neuchâtel 1.

aménagement du territoire, régime de compensation,

recours

de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal administratif de la
République et canton de Neuchâtel
du 25 octobre 2005.

Fai...

{T 0/2}
1A.310/2005 /svc

Arrêt du 17 juillet 2006
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Féraud, Président,
Aemisegger, Aeschlimann, Reeb et Fonjallaz.
Greffière: Mme Truttmann.

Conseil d'Etat de la République et canton de Neuchâtel, 2001 Neuchâtel 1,
recourant,

contre

les époux X.________,
intimés, représentés par Me Blaise Stucker, avocat,
Tribunal administratif de la République et canton
de Neuchâtel, case postale 3174, 2001 Neuchâtel 1.

aménagement du territoire, régime de compensation,

recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal administratif de la
République et canton de Neuchâtel
du 25 octobre 2005.

Faits:

A.
Le 21 mai 1999, les époux X.________ ont acquis un bien-fonds de 2'125 m2,
dont 155 sont occupés par une construction (habitation et garage), formant
l'article zzz du cadastre de la commune de Cortaillod. La vente a été conclue
au prix de 200 francs le m2.

Selon le plan d'aménagement de la commune de Cortaillod du 26septembre 1975,
cette parcelle était affectée à la zone d'utilisation différée. Un nouveau
plan d'aménagement et un nouveau règlement ont été adoptés par le Conseil
général le 29 septembre 1995. Suite à leur sanction par le Conseil d'Etat le
27 octobre 1999 et à leur publication dans la Feuille officielle le 10
novembre 1999, la parcelle a été classée en zone d'habitation à faible
densité 2.

Par décision de plus-value du 21 février 2003, le Département cantonal de la
gestion et du territoire (ci-après: le département cantonal) a fixé à 47'304
fr. 60 la contribution due par les époux X.________ à la suite du changement
d'affectation de leur parcelle.

Sur recours des époux X.________, le Tribunal administratif cantonal a annulé
cette décision pour défaut de motivation et a renvoyé la cause au département
cantonal pour instruction complémentaire et nouvelle décision.

B.
Par décision du 10 novembre 2004, le département cantonal a confirmé le
prélèvement d'une plus-value dont il a fixé le montant à 40'268 fr. 60, sur
la base du rapport de l'architecte qu'il avait mandaté. Les valeurs de
référence retenues par l'expert pour le terrain avant et après le changement
d'affectation, étaient respectivement de 3 francs le m2 (prix moyen du
terrain agricole) et de 200 francs le m2. Les époux X.________ ont recouru
contre cette décision auprès du Tribunal administratif cantonal. Ce dernier
l'a annulée, considérant que, quand bien même le changement d'affectation
procurait un avantage aux époux X.________, cela n'était pas suffisant pour
constituer un avantage majeur au sens de l'art. 34 al. 1 LCAT. La mise en
valeur du terrain dépendait en effet encore de l'adoption d'un plan de
quartier et de l'accord d'un ou de plusieurs voisins, voire d'une réunion
parcellaire par le biais d'une vente, ou d'un remembrement.

C.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, le Conseil d'Etat du
canton de Neuchâtel demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du Tribunal
administratif et de renvoyer l'affaire à cette juridiction pour nouvelle
décision au sens des considérants.

Le Tribunal administratif a renoncé à formuler des observations. Les époux
X.________ concluent au rejet du recours.

L'Office fédéral du développement territorial a conclu à l'admission du
recours. Il suggère de renvoyer la cause à la cour cantonale pour instruction
complémentaire et nouvelle décision, cette dernière n'ayant pas élucidé à
satisfaction de droit les préalables nécessaires à l'établissement du plan de
quartier. Les époux X.________ se sont déterminés sur les observations de
l'Office fédéral, tandis que le Conseil d'Etat et le Tribunal administratif y
ont renoncé.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 La décision de plus-value est une décision fondée, en tout cas
partiellement, sur le droit public fédéral, qui peut faire l'objet d'un
recours de droit administratif en vertu de l'art. 97 al. 1 OJ, en relation
avec l'art. 34 al. 1 LAT (ATF 131 II 571 consid. 1 p. 573 ss). L'art. 34 al.
2 LAT, en relation avec l'art. 103 let. c OJ, confère expressément aux
cantons la qualité pour recourir (ATF 131 II 571 consid. 1.4 p.577).

1.2 Le recours de droit administratif peut être formé pour violation du droit
fédéral, y compris l'abus ou l'excès du pouvoir d'appréciation (art. 104 let.
a OJ). Le Tribunal fédéral vérifie d'office l'application du droit fédéral,
sans être lié par les motifs invoqués par les parties (art. 114 al. 1 in fine
OJ). Lorsque, comme en l'espèce, le recours est dirigé contre la décision
d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits
constatés dans la décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou
incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de
procédure (art. 104 let. b et 105 al. 2 OJ).

2.
Le Conseil d'Etat affirme que l'affectation en zone d'habitation à faible
densité 2 constitue un avantage majeur. Il conteste que le potentiel
constructible de la parcelle ne puisse être réalisé que moyennant un accord
entre voisins ou une réunion parcellaire. Un regroupement des constructions
dans le cadre d'un plan de quartier serait suffisant. Le Tribunal
administratif n'aurait en outre pas examiné la possibilité pour la commune
d'élaborer elle-même le plan de quartier. La référence à la jurisprudence
applicable en matière d'expropriation matérielle ne serait pas appropriée; il
y aurait lieu de tenir compte de la situation concrète, en fonction du droit
cantonal.

2.1 Selon l'art. 33 de la loi cantonale sur l'aménagement du territoire
(ci-après: LCAT), les avantages et les inconvénients résultant de mesures
d'aménagement du territoire font l'objet d'une compensation s'ils sont
majeurs. L'augmentation de valeur d'un bien-fonds consécutive à son
affectation à la zone d'urbanisation (art. 47) ou à une zone spécifique (art.
53) est réputée avantage majeur constituant une plus-value (art. 34 al. 1
LCAT). Celle-ci est la différence présumée entre la valeur d'un bien-fonds
avant et après la mesure d'aménagement (art. 34 al. 2 LCAT). En cas de
plus-value, une contribution correspondant à 20 % de celle-ci est due à
l'Etat par le propriétaire du bien-fonds (art. 35 al. 1 LCAT). Le département
arrête le montant de la plus-value et celui de la contribution au moment où
la mesure d'aménagement entre en vigueur (art. 36 LCAT), c'est-à-dire au
moment de la publication de la sanction du plan par le Conseil d'Etat (art.
96a LCAT). Selon l'art. 37 LCAT, après consultation de la commune, le
département fixe le délai de perception en tenant compte des besoins en
terrains à bâtir et de la possibilité d'utiliser le bien-fonds (al. 1); la
perception peut être différée ou échelonnée à la demande d'un propriétaire
qui justifie de circonstances particulières (al. 2); elle intervient
cependant au plus tard lors de l'aliénation du bien-fonds (al. 3 ); l'art. 48
al. 4 est réservé (al. 4). Aux termes de cette dernière disposition, la
perception de la plus-value est différée aussi longtemps que dure
l'assimilation à la zone agricole ou viticole.

La présomption de l'art. 34 al. 1 LCAT est réfragable (arrêt du 24février
2003 paru à la RJN 2003 360 et les arrêts cités). La jurisprudence cantonale
a également posé que le caractère majeur de l'avantage procuré par la mesure
d'aménagement doit être apprécié au regard de la variation réelle et concrète
de la valeur de l'immeuble en cause et non dans l'abstrait. Est déterminante
la possibilité effective d'utiliser la parcelle pour la construction d'une
manière conforme à la zone dont elle fait désormais partie (ibid.). Il faut
tenir compte, équitablement, dans le cas concret, des avantages et
inconvénients majeurs tels qu'ils résultent de l'ensemble des circonstances
propres à la mesure d'aménagement considérée (arrêt du 17 février 1994 paru à
la RJN 1994 167). La doctrine et la jurisprudence ont en outre interprété
l'art. 34 al. 2 LCAT en ce sens que c'est la valeur objective du terrain qui
doit être prise en considération. Il s'agirait donc de procéder à
l'estimation du terrain en deux étapes, avant et après la mesure
d'aménagement, en ne s'appuyant que sur des critères objectifs. Dans les cas
où il y aurait vente, les estimations ne pourraient pas uniquement se baser
sur les prix effectivement payés, ni sur la valeur cadastrale (Francesco
Parrino, La contribution sur la plus-value dans le canton de Neuchâtel in
Mémoire ASPAN n° 57, Berne 1992, p. 39 ss, p. 46; arrêt du 24février 2003
paru à la RJN 2003 360).

La réglementation cantonale a été mise en place suite à l'entrée en vigueur,
le 1er janvier 1980, de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire
(LAT), dont l'art. 5 al. 1 prévoit que le droit cantonal doit établir un
régime de compensation permettant de tenir compte équitablement des avantages
et des inconvénients majeurs qui résultent des mesures d'aménagement. La
notion d'avantage majeur est une notion de droit fédéral. Il s'agit toutefois
d'une notion juridique indéterminée, de sorte qu'il faut laisser à la
juridiction cantonale une certaine latitude de jugement (cf. notamment Enrico
Riva, Commentaire LAT, art. 5 n. 84). Le caractère majeur de l'avantage
implique que les différences de valeur peu importantes ou insignifiantes ne
doivent pas être prises en considération (Dfjp/Ofat, Etude relative à la loi
fédérale sur l'aménagement du territoire, Berne 1981, art. 5 n. 6, p. 117).
La plus-value doit donc avoir un certain poids par rapport à la valeur
normale du bien-fonds (Message du Conseil fédéral concernant la LAT, FF 1972
I 1441, p. 1510). L'adverbe "équitablement", qui figure à l'art. 5 al. 1 LAT,
montre en outre que le prélèvement doit s'effectuer par rapport à l'ensemble
de la situation (FF 1972 I 1441, p. 1511). L'avantage majeur doit être
économique (Dfjp/Ofat, Recommandations concernant le régime de la
compensation des avantages résultant de mesures d'aménagement selon l'art. 5,
premier alinéa, de la LAT, novembre 1986, p. 8; Blaise Knapp, La compensation
selon l'art. 5 LAT in: Habitation, mars 1982, n.3 p. 13 ss, 17). En effet,
le seul critère possible pour déterminer l'avantage majeur est celui de
l'avantage pécuniaire que la mesure crée (Blaise Knapp, op.cit., p. 17).
S'agissant du calcul de la plus-value, les Recommandations prévoient qu'il y
a lieu de se fonder sur les valeurs vénales et non pas sur des valeurs
officielles ou comptables. Il faut en particulier que la valeur de
comparaison inférieure soit la valeur vénale au moment de la dernière
réalisation déterminante pour la contribution sur les avantages (p. 40; cf.
également Enrico Riva, op.cit., art. 5 n. 43).

2.2
2.2.1En l'espèce, avant l'entrée en vigueur du nouveau plan d'aménagement en
1999, la parcelle était classée en zone d'utilisation différée. L'art. 77 du
règlement d'urbanisme sanctionné par le Conseil d'Etat le 26 septembre 1975
n'en donnait qu'une définition sommaire. Il se contentait d'indiquer qu'il
s'agissait de terrains qui n'étaient pas attribués à une destination précise
et qui n'étaient pas réglementés. Le conseil communal se réservait de
proposer un statut définitif à chacun des secteurs réservés, quand il le
jugerait opportun, au fur et à mesure que les nécessités pourraient être
précisées. Le conseil communal devait proposer les règles de construction à
appliquer. Le nouveau règlement d'aménagement est cependant plus explicite:
"la zone d'utilisation différée est destinée à l'extension future de la
localité, si les intérêts de la commune justifient d'ouvrir ces terrains à la
construction, pour l'habitation, l'activité économique ou l'utilité publique"
(art. 14.2). La zone d'utilisation différée ne fait pas partie de la zone
d'urbanisation (art. 47 LCAT) et ne peut être ouverte à la construction qu'à
la suite d'une modification du plan d'aménagement (art. 52 LCAT). Avant toute
autorisation de construire, l'accomplissement d'une procédure complète de
planification est donc exigée.

L'art. 18 al. 2 LAT permet aux cantons de réglementer de telles zones, que
l'on nomme également zones de réserve (Piermarco Zen-Ruffinen/Christine
Guy-Ecabert, Aménagement du territoire, construction, expropriation, Berne
2001, n. 386, p. 174). Ces dernières ne sont pas considérées comme
constructibles (ATF 123 I 175 consid.3b/aa p. 183 et les arrêts cités).
Elles ne peuvent pas être établies au préjudice des zones à bâtir, agricoles
ou à protéger. Les terrains qui font partie de la zone à bâtir, à savoir les
terrains largement construits (art. 15 let. a LAT) et qui seront probablement
nécessaires à la construction dans les quinze ans à venir et qui seront
équipés dans ce laps de temps (art. 15 let. b LAT) ne doivent en effet pas
être attribués à une zone de réserve (ATF 123 I 175 consid. 3e/aa p. 188; ATF
116 Ia 328 consid. 3b p. 330 s.; ATF 115 Ia 333 consid. 4 p. 338; ATF 113 Ia
133 consid. 4e p. 461; ATF 112 Ia 155 consid. 2c et d p. 158 s.). Dans le cas
particulier, il n'apparaît cependant pas que l'affectation de la parcelle en
cause à la zone d'utilisation différée ait été contraire au droit fédéral.

2.2.2 Par l'adoption du nouveau plan d'aménagement, la parcelle a été classée
en zone d'habitation à faible densité 2, qui fait partie de la zone
d'urbanisation (art. 5.6.2 du règlement d'aménagement de la commune de
Cortaillod; ci-après: RA). Cette zone se caractérise par une prédominance de
l'habitat groupé (art. 10.6.1 al. 2 RA), mais elle est aussi destinée à
l'habitat individuel et aux maisons-terrasses (art. 10.6.3 RA). Afin
d'économiser le sol à bâtir, une certaine densification de l'urbanisation
doit y être recherchée, tout en préservant la qualité de l'habitation (art.
10.6.2 RA). La parcelle n° zzz fait également partie d'un périmètre de plan
de quartier (art. 19.1 RA), dont la réglementation, tout comme celle de la
zone d'habitation à faible densité 2 (art. 10.6.2 al. 4 RA), subordonne toute
construction à l'établissement d'un plan de quartier (art. 19.7 RA). Selon
l'art.19.4RA, le taux d'occupation du sol et la densité doivent être
calculés pour l'ensemble du plan de quartier, selon les règles applicables au
regroupement des constructions (art. 68 LCAT). Le plan de quartier peut être
élaboré par la commune ou par un ou plusieurs propriétaires, pour des
terrains d'une surface de 3'000 m2
au moins (art. 82 al. 1 LCAT). Il ne
s'agit pas d'une procédure complète de planification: le plan de quartier est
soumis à l'enquête publique, puis doit être adopté par le conseil communal.
Le conseil général n'a pas à se prononcer et il n'est pas prévu de procédure
cantonale de sanction (art. 102 ss LCAT).

2.3 Le Tribunal administratif a considéré que les intimés avaient bénéficié
d'un avantage, car la nouvelle affectation de la parcelle permettait de
construire selon une procédure moins restrictive que précédemment. Cet
avantage ne pouvait cependant pas être considéré comme majeur, les
possibilités de construire demeurant très aléatoires. Le Tribunal
administratif est toutefois parti de la prémisse que les intimés avaient
profité d'un avantage, sans analyser l'ensemble des circonstances (cf.
consid. 2.1). Perdant en particulier de vue que l'avantage doit être de
nature économique, il a omis d'examiner si la valeur du terrain avait en
l'espèce réellement subi une modification du fait de l'entrée en vigueur de
la mesure d'aménagement.

2.4 A titre préalable, il convient d'observer que le terrain en cause était
situé en zone d'utilisation différée et non en zone agricole. Quand bien même
la zone d'utilisation différée doit être qualifiée de zone inconstructible,
elle est néanmoins destinée tôt ou tard à la construction (cf. consid.
2.2.1), de sorte que le prix d'un terrain sis dans une telle zone ne
correspond pas nécessairement à celui d'un terrain en zone agricole. En
effet, le classement en zone d'utilisation différée peut, selon les cas,
avoir un effet sur le prix du terrain, parfois plus élevé que dans une zone
inconstructible "ordinaire" (arrêt non publié du Tribunal fédéral du 2
décembre 1997 1P.329/1997). C'est précisément le cas en l'espèce. Le
bien-fonds en cause jouxtait la zone d'urbanisation. Il était lui-même déjà
partiellement construit, de même que deux des parcelles avoisinantes. Au
surplus, la configuration du plan d'aménagement de la commune de Cortaillod
donnait raisonnablement à penser que la zone d'urbanisation s'étendrait en
premier lieu dans ce secteur. Les perspectives d'urbanisation étaient donc
élevées. Avec l'écoulement du temps, l'affectation en zone constructible
devenait d'ailleurs de plus en plus certaine, accroissant par là-même
graduellement la valeur de la parcelle.

Cette forte probabilité d'urbanisation s'est du reste concrétisée par
l'approbation d'un nouveau plan d'aménagement et de son règlement le 20
septembre 1995 par le Conseiller d'Etat en charge du Département de la
Gestion et du Territoire, et par leur adoption le 29septembre 1995 par le
Conseil d'Etat. Le plan et le règlement ont ensuite été mis à l'enquête
publique du 1er au 22 novembre 1995. Selon les informations qui ressortent du
dossier et qui n'ont pas été contredites, le classement en zone d'habitation
à faible densité 2 du quartier de Mont-Pitié, dans lequel se trouve la
parcelle des intimés, n'a fait l'objet d'aucune opposition. Dès le 22
novembre 1995, il existait donc une quasi-certitude que la parcelle des
intimés serait affectée à la zone de construction. N'étaient plus que
requises l'approbation et la sanction du plan par le Conseil d'Etat, dont il
est rappelé que le préavis avait été favorable.

Les intimés ont acquis leur parcelle le 21 mai 1999, soit seulement cinq mois
avant l'entrée en vigueur formelle de la mesure d'aménagement, qui est
elle-même intervenue plus de quatre ans après la fin de la procédure
communale. Pendant toute cette période, la valeur de la parcelle n'a cessé de
croître. Un prix de 200 francs le m2 a été payé, soit le prix pour un terrain
constructible (cf. consid. B). Il ne pouvait en effet en aller autrement,
puisque la procédure d'urbanisation était sur le point d'aboutir et que la
nouvelle mesure d'aménagement confinait à la certitude. Ainsi, quand bien
même le plan et le règlement n'avaient pas encore définitivement été
approuvés et sanctionnés par le Conseil d'Etat, il n'en demeurait pas moins
que la valeur objective du terrain était très proche de celle d'un terrain en
zone constructible. Il n'existe, dans ces circonstances, aucune raison de
s'écarter de la valeur vénale pour la détermination de la plus-value. Lors de
l'entrée en vigueur de la mesure d'aménagement, les intimés n'ont donc pas vu
leur situation se modifier de façon importante. Ils n'ont bénéficié d'aucun
avantage économique, puisqu'ils avaient, cinq mois plus tôt, payé le prix
d'un terrain constructible. Le prélèvement d'une contribution de plus-value
auprès des intimés est dès lors injustifié et contraire au principe de
l'équité qui sous-tend le système de compensation des avantages (Message du
Conseil fédéral concernant la LAT, FF 1978 I 1007, p. 1018).

2.5 L'issue du litige rend inutile l'examen des possibilités effectives de
construire la parcelle. Le recours de droit administratif doit donc être
rejeté au sens des considérants qui précèdent. L'intérêt pécuniaire du canton
étant en cause dans la présente procédure, il doit être astreint à payer un
émolument judiciaire (art. 153, 153a et 156 al. 1 et 2 OJ). Les intimés ont
droit à des dépens, à la charge de l'Etat de Neuchâtel (art. 159 al. 1 et 2
OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours de droit administratif est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge de l'Etat de
Neuchâtel.

3.
Une indemnité de 2'000 fr., à payer aux époux X.________ à titre de dépens,
est mise à la charge de l'Etat de Neuchâtel.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire des intimés, au
Conseil d'Etat et au Tribunal administratif de la République et canton de
Neuchâtel, ainsi qu'à l'Office fédéral du développement territorial.

Lausanne, le 17 juillet 2006

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1A.310/2005
Date de la décision : 17/07/2006
1re cour de droit public

Analyses

Régime de compensation des avantages majeurs résultant de mesuresd'aménagement du territoire; art. 5 al. 1 LAT. L'avantage majeur doit être de nature économique. Il doit s'apprécierselon l'ensemble des circonstances (consid. 2.1). Examen, au regard des données particulières du cas d'espèce, de l'avantagerésultant de l'affectation en zone d'habitation d'une parcelle précédemmentsise en zone d'utilisation différée (consid. 2.2-2.4).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-07-17;1a.310.2005 ?
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