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03/07/2006 | SUISSE | N°4C.103/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 03 juillet 2006, 4C.103/2006


{T 0/2}4C.103/2006 /ech Arrêt du 3 juillet 2006Ire Cour civile MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Favre et Kiss.Greffière: Mme Godat Zimmermann. A. ________,demanderesse et recourante, représentée par Me Pascal Pétroz, contre B.________,défendeur et intimé, représenté par Me Corinne Nerfin. bail à loyer; colocataires; indemnité pour occupation illicite, recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre d'appel en matière de baux etloyers du canton de Genève du 6février 2006. Faits: A.Par contrat du 19 mars 2002, A.________ a remis à bail à B.________ etC.________ des loca

ux commerciaux à l'usage de bureaux, situés dans unimmeuble, à Gen...

{T 0/2}4C.103/2006 /ech Arrêt du 3 juillet 2006Ire Cour civile MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Favre et Kiss.Greffière: Mme Godat Zimmermann. A. ________,demanderesse et recourante, représentée par Me Pascal Pétroz, contre B.________,défendeur et intimé, représenté par Me Corinne Nerfin. bail à loyer; colocataires; indemnité pour occupation illicite, recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre d'appel en matière de baux etloyers du canton de Genève du 6février 2006. Faits: A.Par contrat du 19 mars 2002, A.________ a remis à bail à B.________ etC.________ des locaux commerciaux à l'usage de bureaux, situés dans unimmeuble, à Genève. Le loyer annuel était de 42'000 fr., charges noncomprises. A une date indéterminée, la bailleresse a mis les locataires en demeure delui verser plusieurs loyers échus. Faute de paiement dans le délai imparti,elle a résilié le bail pour le 31 janvier 2003, par avis officiel adressé àchacun des locataires. Le congé n'a pas été contesté. L'objet loué n'a pas été restitué à fin janvier 2003. C.________ occupaitalors seul les locaux. Le 14 mai 2003, la bailleresse a fait notifier à B.________ deuxcommandements de payer. L'un portait sur un montant de 3'650 fr.correspondant au loyer et charges de janvier 2003; l'autre, d'un montant de10'920 fr., représentait des indemnités pour occupation illicite du1erfévrier au 30 avril 2003. Le 12 février 2004, A.________ a introduit denouvelles poursuites contre B.________, pour un montant de 29'200 fr.correspondant aux indemnités pour occupation illicite du 1er mai au 31décembre 2003. B. ________ a formé opposition à chacun de ces commandements de payer. Selon la bailleresse, les locaux ont été définitivement libérés le 15 avril2004. B.Le 13 août 2003, A.________ a déposé une demande en paiement devant laCommission de conciliation en matière de baux et loyers. Ses conclusionstendaient à ce que B.________ soit condamné à lui verser les sommes de 3'650fr. avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2003 et de 21'900 fr. avec intérêtsà 5% dès le 2 mai 2003; la demanderesse concluait également à la mainlevéedes oppositions formées aux deux premiers commandements de payer. A la suite de l'échec de la conciliation, la demanderesse a introduit actiondevant le Tribunal des baux et loyers du canton de Genève.Le 8 avril 2004, A.________ a déposé une seconde demande en paiement devantla Commission de conciliation. Les parties n'étant pas parvenues à un accord,elle a derechef ouvert action devant le Tribunal, concluant au versement parB.________ de la somme de 30'774 fr.30 avec intérêts à 5% dès le 16 décembre2003 et à la mainlevée de l'opposition formée dans la troisième poursuite. Par jugement du 15 mars 2005, le Tribunal des baux et loyers a préalablementordonné la jonction des deux causes; il a débouté A.________ de toutes sesconclusions. Statuant le 6 février 2006 sur appel de la bailleresse, la Chambre d'appel enmatière de baux et loyers a confirmé le jugement de première instance. C.A.________ interjette un recours en réforme. Elle conclut à l'annulation del'arrêt attaqué et à la condamnation de B.________ à lui payer les montantsde 21'900 fr. avec intérêts à 5% dès le 2 mai 2003 et 30'774 fr.30 avecintérêts à 5% dès le 16 décembre 2003. Elle demande en outre la mainlevée desoppositions formées dans les trois poursuites susmentionnées. B. ________ a déposé un mémoire de réponse dans lequel il propose le rejet durecours. Il demande par ailleurs à être mis au bénéfice de l'assistancejudiciaire. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.1.1 Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions en paiement,et dirigé contre une décision finale rendue en dernière instance cantonalepar un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ) sur une contestation civile dontla valeur litigieuse dépasse le seuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ), le recoursest en principe recevable, puisqu'il a été déposé en temps utile (art. 54 al.1 OJ) et dans les formes requises (art.55OJ). 1.2 Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral (art. 43al. 1 OJ). Il ne permet en revanche pas d'invoquer la violation directe d'undroit de rang constitutionnel (art. 43 al. 1 2e phrase OJ), ni la violationdu droit cantonal (ATF 127 III 248 consid. 2c et les arrêts cités). Saisi d'un tel recours, le Tribunal fédéral conduit son raisonnementjuridique sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moinsque des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées,qu'il faille rectifier des constatations reposant sur une inadvertancemanifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou compléter les constatations de l'autoritécantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents,régulièrement allégués et clairement établis (art. 64 OJ; ATF 130 III 102consid. 2.2. p. 106, 136 consid. 1.4. p. 140; 127 III 248 consid. 2c). Dans la mesure où la partie recourante présente un état de fait qui s'écartede celui contenu dans la décision attaquée, sans se prévaloir avec précisionde l'une des exceptions qui viennent d'être rappelées, il n'est pas possibled'en tenir compte (ATF 127 III 248 consid. 2c). Il ne peut être présenté degriefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuvenouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). Le recours en réforme n'est donc pasouvert pour remettre en cause l'appréciation des preuves et les constatationsde fait qui en découlent (ATF 130 III 136 consid. 1.4 p. 140; 128 III 271consid. 2b/aa p. 277; 127 III 247 consid. 2c p. 252). 1.3 Au surplus, la juridiction de réforme ne peut aller au-delà desconclusions des parties; en revanche, elle n'est liée ni par les motifsdéveloppés dans les écritures (art. 63 al. 1 OJ; ATF 128 III 411 consid.3.2.2 p. 415), ni par l'argumentation juridique suivie par la cour cantonale(art. 63 al. 3 OJ; ATF 130 III 136 consid. 1.4 p. 140; 128 III 22 consid.2e/cc; 127 III 248 consid. 2c; 126 III 59 consid. 2a). 2.2.1Dans son recours, la bailleresse ne réclame plus au défendeur le loyer dejanvier 2003. Devant le Tribunal fédéral, le litige porte donc exclusivementsur la question de savoir si le défendeur doit à la demanderesse uneindemnité pour l'occupation illicite des locaux à partir du 1er février 2003. 2.2 Selon l'arrêt attaqué, il appartenait à la demanderesse de prouverl'existence d'un rapport de solidarité entre le défendeur et C.________. Or,la bailleresse n'a produit aucune pièce, ni formulé d'offre de preuve,tendant à démontrer qu'en l'absence de toute mention expresse dans lecontrat, le défendeur a eu un comportement révélant à l'évidence sa volontéde s'engager pour le tout, à l'égal de son colocataire. La cour cantonale endéduit que, selon toute vraisemblance, l'engagement du défendeur portaitexclusivement sur le paiement du loyer et des frais accessoires. Elle ajouteque, vu les circonstances particulières dans lesquelles le contrat a étéconclu, l'engagement solidaire du défendeur - pour autant qu'il ait existé entant que tel - ne s'étendait pas à une obligation de restitution sur laquelleil ne pouvait, dès le début du bail, avoir aucune emprise, faute d'avoirjamais occupé les locaux loués. 3.Invoquant les art. 143 CO et 8 CC, la demanderesse fait valoir que ledéfendeur, auquel le fardeau de la preuve incombait, n'a apporté aucunélément permettant de démontrer que son engagement solidaire était limité aupaiement du loyer et des frais accessoires. 3.1 Le bail à loyer est conclu généralement entre deux cocontractants. Il sepeut toutefois que, d'un côté ou de l'autre, plusieurs personnes soientparties au contrat, en tant que cobailleresses ou colocataires. Il s'agitalors d'un bail commun; lorsqu'un tel contrat est conclu entre un bailleur etplusieurs colocataires, le terme utilisé est location commune ou colocation(Jacques Micheli, Les colocataires dans le bail commun, in 8e Séminaire surle droit du bail, Neuchâtel 1994, p. 3; Roger Weber, Der gemeinsameMietvertrag, thèse Zurich 1993, p. 88; Hans Schmid, Der gemeinsameMietvertrag, in SJZ 1991, p. 349). Si l'on se réfère à la définition du bailà loyer résultant de l'art. 253 CO, le contrat commun implique la cession del'usage d'une chose à plusieurs locataires. C'est dire qu'il n'y a pas bailcommun, mais reprise cumulative de dette - en général, simultanée (ThomasProbst, Commentaire romand, n. 7 ad Introduction aux art. 175-183 CO) -lorsqu'une personne s'engage, à côté du locataire, uniquement comme débitricesolidaire du loyer, en excluant d'occuper elle-même les locaux (Micheli, op.cit., p. 6; Schmid, op. cit., p. 349/350). Comme tout contrat, le bail commun s'interprète d'abord selon la volontécommune et réelle des parties (interprétation subjective). Si cette volonténe peut être établie en fait, le juge interprétera les déclarations et lescomportements des parties selon le principe de la confiance, en recherchantcomment une déclaration ou une attitude pouvait être comprise de bonne foi enfonction de l'ensemble des circonstances (interprétation objective; Weber,op. cit., p. 35/36; cf. ATF 131 III 606 consid. 4.1 p. 611; 131 V 27 consid.2.2 p. 29). Les circonstances déterminantes sont celles qui ont précédé ouaccompagné la manifestation de volonté (ATF 131 III 377 consid. 4.2 p. 382 etl'arrêt cité), à l'exclusion des événements postérieurs (Bernard Corboz, Lecontrat et le juge, in Le contrat dans tous ses états, Berne 2004,p.275/276). L'art. 8 CC répartit le fardeau de la preuve pour toutes les prétentionsfondées sur le droit fédéral et détermine, sur cette base, laquelle desparties doit assumer les conséquences de l'échec de la preuve (ATF 130 III321 consid. 3.1 p. 323; 127 III 519 consid. 2a p. 522; 126 III 189 consid.2b, 315 consid. 4a). On déduit également de l'art. 8 CC un droit à la preuveet à la contre-preuve (ATF 129 III 18 consid. 2.6 et les arrêts cités). Enparticulier, le juge enfreint cette disposition s'il tient pour exactes lesallégations non prouvées d'une partie, nonobstant leur contestation par lapartie adverse, ou s'il refuse toute administration de preuve sur des faitspertinents en droit (ATF 130 III 591 consid. 5.4 p. 601/602 et l'arrêt cité).Il viole également le droit fédéral s'il se contente de la simplevraisemblance d'un fait allégué lorsqu'il n'a pas pu acquérir une convictionquant à l'existence de ce fait (cf. ATF 118 II 235 consid. 3c et lesréférences). 3.2 En jugeant que l'engagement contractuel du défendeur était limité aupaiement du loyer et des charges, la cour cantonale a admis implicitement queles parties au procès n'étaient pas liées par un bail commun, mais par uncontrat de reprise cumulative de dette simultanée, même si elle n'a pasutilisé ce terme dans l'arrêt attaqué. Il convient par conséquent d'examinersi cette conclusion est conforme au droit fédéral. Sous la rubrique «locataire», le bail à loyer du 19 mars 2002 comprend le nomdu défendeur, suivi de celui de C.________; il porte la signature de ces deuxpersonnes. En produisant ce contrat, la demanderesse a démontré la qualité delocataire du défendeur, qui se trouvait ainsi lié par toutes les obligationsdu bail. S'il entendait contester cette qualité, il appartenait au défendeurde prouver que la volonté réelle et commune des parties, lors de laconclusion du contrat, consistait uniquement en une reprise cumulative desdettes de loyer et des frais accessoires par lui-même, les partiesactuellement en procès ayant exclu qu'il s'engage comme locataire et qu'ilait la jouissance des locaux. Or, sur ce point, la cour cantonale a renverséle fardeau de la preuve puisqu'elle reproche précisément à la demanderesse den'avoir produit aucune pièce, ni formulé aucune offre de preuve tendant àdémontrer que le défendeur aurait eu un comportement révélant à l'évidence savolonté de s'engager pour le tout, à l'égal de son colocataire. Elle confondau surplus la question de la solidarité - la bailleresse peut-elle exiger dechaque colocataire l'exécution intégrale des obligations découlant du bail(cf. art. 144 al.1CO)? - et celle de la nature du lien contractuel entreles parties au procès. Après avoir constaté l'absence de preuves d'unengagement portant sur toutes les obligations du bail, la Chambre d'appelretient, uniquement sous l'angle de la vraisemblance, que la promessecontractuelle du défendeur était limitée au paiement du loyer et des charges,ce qui constitue derechef une violation de l'art. 8 CC. En conclusion, la cour cantonale a méconnu cette disposition en retenant unengagement réduit du défendeur, sous la forme d'une reprise cumulative desdettes liées au loyer et aux frais accessoires, correspondant à la volontéréelle et commune des parties. Il reste à examiner si l'interprétation de la Chambre d'appel peut êtreconfirmée en application du principe de la confiance. A la lecture du contratdu 19 mars 2002, rien ne permet de penser que le défendeur ne s'est pasengagé comme colocataire. Du reste, sous la rubrique «locataire», ledéfendeur apparaît en premier; de même, il a apposé son paraphe au-dessus decelui de C.________. S'agissant des circonstances qui ont entouré laconclusion du contrat, il n'est pas démontré que la demanderesse ou sonreprésentant savait, à ce moment-là, que le défendeur n'occuperait pas leslocaux loués. Quant au fait que le défendeur n'ait jamais utilisé lesditslocaux, il s'agit d'un élément postérieur à la conclusion du contrat, qui n'apas à être pris en considération dans le cadre d'une interprétationobjective. Au demeurant, il n'est pas non plus établi que la demanderesseétait au courant du fait que les locaux étaient exclusivement occupés parC.________. Sur la base de ces éléments, on ne saurait admettre que, selonles règles de la bonne foi, la bailleresse ou son représentant devaitcomprendre de l'attitude du défendeur que celui-ci s'engageait uniquement àtitre de reprenant des dettes de loyer et de charges, solidairement aux côtésde C.________. Dans ces conditions, la cour cantonale a erré en qualifiant implicitement lelien contractuel entre parties de reprise cumulative de dette et en niant,pour cette raison, toute obligation de restitution de la chose louée de lapart du défendeur. 4.La juridiction de réforme n'est pas liée par les considérants des jugesprécédents (cf. consid. 1.3 supra) et, le cas échéant, peut confirmer unarrêt cantonal par substitution de motifs. Il convient dès lors d'examinersi, en tant que colocataire, le défendeur est tenu, dans les circonstances del'espèce, de payer à la demanderesse une indemnité pour occupation illicite. A cet égard, la bailleresse se plaint d'une violation de l'art. 70 CO. A sonsens, le colocataire qui n'occupe pas illicitement les locaux répond de lafaute de son colocataire; par conséquent, il est débiteur solidaire del'indemnité pour occupation illicite de la chose. 4.1 A la fin du bail, le locataire est tenu de restituer la chose au bailleur(art. 267 al. 1 CO). S'il reste dans les lieux loués nonobstant l'expirationdu bail, il commet une faute contractuelle (ATF 121 III 408 consid. 4c p.413; 117 II 65 consid. 2b
p. 68). En conséquence, le bailleur peut luiréclamer une indemnité pour occupation illicite des locaux, laquellecorrespond en principe au montant du loyer (arrêt 4C.183/1996 du 22 novembre1996, consid. 3c). La restitution de la chose louée est une obligation indivisible, au sens del'art. 70 CO (arrêt 4C.17/2004 du 2 juin 2004, consid. 4.3; Fabienne Hohl,Commentaire romand, n. 3 ad art. 70 CO; Alain Thévenaz, La prétenduesolidarité des colocataires lorsque la chose louée n'est pas restituée àl'échéance du bail, in JdT 2001 I p. 379; Higi, Zürcher Kommentar, n. 116 adVorbemerkungen zu Art. 253-274g OR; Weber, op.cit., p. 212). Lorsqu'uneprestation indivisible est due par plusieurs débiteurs, chacun d'eux est tenude l'acquitter pour le tout (art. 70 al.2CO), de sorte que le créancierpeut l'exiger de n'importe lequel des débiteurs (Hohl, op. cit., n. 8 ad art.70 CO). Même si le terme «solidarité» n'est pas utilisé dans la loi,l'indivisibilité produit des effets identiques à ceux de la solidarité(Gauch/Schluep/Schmid/Rey, Schweizerisches Obligationenrecht, AllgemeinerTeil, tome II, 8e éd., n. 3897, p. 319; Ingeborg Schwenzer, SchweizerischesObligationenrecht, Allgemeiner Teil, 3e éd., p. 473; Hohl, op. cit., n. 8 adart. 70 CO; Thévenaz, op. cit., p. 379). La solidarité ne fonde pas automatiquement une responsabilité pour le dommagecausé par la faute d'un codébiteur (Weber, op. cit., p. 61). En effet, saufstipulation contraire, l'un des débiteurs solidaires ne peut aggraver par sonfait personnel la position des autres (art. 146CO). Ainsi, un débiteur nepeut pas convenir avec le créancier d'étendre les devoirs de ses coobligés oumodifier les conditions de leurs obligations respectives. Si l'un descodébiteurs est en demeure, il en supportera seul les conséquences. De même,si l'obligation devient impossible en raison de la faute d'un codébiteur, cedernier en répondra seul en vertu de l'art. 97 CO (Isabelle Romy, Commentaireromand, n. 1 à 3 ad art. 146 CO; Anton K. Schnyder, Basler Kommentar, 3e éd.,n. 2 ad art. 146 CO; Eugen Bucher, Schweizerisches Obligationenrecht,Allgemeiner Teil, 2e éd., p. 494/495). En cas de pluralité de débiteurs d'uneobligation indivisible, Engel envisage l'hypothèse où la prestation estpossible pour l'un des codébiteurs et impossible pour l'autre: si seul lepremier est en faute, l'autre est libéré (Traité des obligations en droitsuisse, 2e éd., p. 831; cf. également Thévenaz, op. cit., p. 379). Dans tous ces cas, l'application de l'art. 101 CO est toutefois réservée;aucune libération n'interviendra si les codébiteurs sont les auxiliaires lesuns des autres pour l'exécution de la prestation (Romy, op. cit., n. 3 adart. 146 CO; Schnyder, op. cit., n. 2 ad art. 146 CO; Engel, op. cit., p.831; Thévenaz, op. cit., p. 379; Weber, op. cit., p. 61; Bucher, op. cit.,note de pied 43, p. 495). 4.2 En l'espèce, aucune faute contractuelle ne peut être reprochée audéfendeur. La faute a été commise par son colocataire, qui est resté dans lesbureaux loués après la fin du bail, contre la volonté de la bailleresse. Ausurplus, la restitution de la chose louée est impossible pour le défendeur,qui n'a jamais occupé les locaux. Conformément aux principes rappelésci-dessus en relation avec l'art. 146 CO, le défendeur est libéré del'obligation de restitution et n'aurait donc pas à payer à la bailleresse uneindemnité pour occupation illicite. La question se pose toutefois de savoir si le colocataire qui n'a pasrestitué la chose doit être considéré comme l'auxiliaire du défendeur, auquelcas ce dernier répondrait du dommage sur la base de l'art. 101 al. 1 CO. Lanotion d'auxiliaire s'interprète de manière large; elle s'applique nonseulement à celui qui est soumis à l'autorité de la partie ou de sonmandataire, mais encore à toute personne qui, même sans être dans unerelation juridique suivie avec la partie ou son mandataire, lui prête sonconcours. Pour que l'art. 101 CO soit applicable, il suffit que l'auxiliaireait agi au su et avec le consentement - même tacite - du débiteur. Un lien desubordination n'est pas nécessaire (arrêt 4C.343/2003 du 13 octobre 2004,consid. 4.1 et les références). Le Tribunal fédéral a ainsi reconnu que lesous-locataire était l'auxiliaire du locataire quant à l'obligation derestituer la chose louée à la fin du bail et qu'il répondait donc envers lebailleur du dommage résultant de la violation de cette obligation (ATF 117 II65 consid. 2b p. 67). On doit admettre qu'il en va de même en cas de bailcommun, chaque colocataire étant l'auxiliaire de son cosignataire (dans cesens, Weber, op. cit., p. 61 et p. 214). En signant ensemble un bail, chacundes colocataires ne peut en effet exercer les droits découlant du contratqu'avec le consentement implicite de l'autre. En l'occurrence, il importe peuque le défendeur n'ait jamais usé de son droit à la jouissance des locaux. Cequi est déterminant, c'est que le colocataire C.________ a occupé les bureauxen cause avec l'approbation tacite du défendeur. Il s'ensuit que le colocataire récalcitrant doit être considéré commel'auxiliaire du défendeur et que la bailleresse peut ainsi réclamer aucolocataire non fautif une indemnité pour l'occupation illicite des locaux.En refusant toute prétention à ce titre à la demanderesse, la cour cantonalea dès lors violé le droit fédéral. 4.3 A ce stade, la cour de céans n'est pas en mesure de fixer le montantexact de l'indemnité pour occupation illicite due par le défendeur. En effet,selon l'arrêt attaqué, la date du 15 avril 2004 à laquelle les locaux ont étéfinalement libérés ne résulte que des déclarations de la bailleresse; ellen'a donc pas fait l'objet d'une appréciation des preuves. Par ailleurs, ledossier ne permet pas en l'état de compléter les faits sur ce point. Enconséquence, il se justifie d'annuler l'arrêt cantonal et de renvoyer lacause à la Chambre d'appel afin qu'elle fixe le montant de l'indemnité pouroccupation illicite due par le défendeur. 5.Dans sa réponse, le défendeur demande l'assistance judiciaire. Son salairemensuel net équivaut à l'addition de la part du loyer à sa charge, des impôtset du minimum vital. Par ailleurs, son épouse est sans emploi. Dans cesconditions, il convient d'admettre que le défendeur est dans le besoin ausens de l'art. 152 al. 1 OJ. Il sera mis au bénéfice de l'assistancejudiciaire. Même si la cause est renvoyée à la cour cantonale, la demanderesse obtientgain de cause sur le principe, seul le montant exact de sa prétention devantencore être fixé par la cour cantonale. Par conséquent, les frais judiciairesseront supportés par le défendeur, qui succombe (art. 156 al. 1 OJ). Commecelui-ci bénéficie de l'assistance judiciaire, les frais judiciaires et leshonoraires de son mandataire seront pris en charge par la caisse du Tribunalfédéral (art. 152 al. 1 et 2 OJ), sous réserve d'un remboursement ultérieur(art. 152 al. 3 OJ). Par ailleurs, le défendeur versera des dépens à lademanderesse (art. 159 al.1OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.La demande d'assistance judiciaire du défendeur est admise et Me CorinneNerfin est désignée comme avocate d'office du défendeur. 2.Le recours est admis, l'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée àla cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 3.Un émolument judiciaire de 2'500 fr. est mis à la charge du défendeur. Lesfrais judiciaires mis à la charge du défendeur sont supportés par la caissedu Tribunal fédéral, sous réserve de l'application de l'art. 152 al. 3 OJ. 4.Le défendeur versera à la demanderesse une indemnité de 3'000 fr. à titre dedépens. 5.La caisse du Tribunal fédéral versera à Me Corinne Nerfin la somme de 3'000fr. à titre d'honoraires d'avocat d'office. 6.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à laChambre d'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève. Lausanne, le 3 juillet 2006 Au nom de la Ire Cour civiledu Tribunal fédéral suisse Le Président: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.103/2006
Date de la décision : 03/07/2006
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-07-03;4c.103.2006 ?
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