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22/06/2006 | SUISSE | N°5P.108/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 22 juin 2006, 5P.108/2006


{T 0/2}5P.108/2006 /frs Arrêt du 22 juin 2006IIe Cour civile MM. et Mme les Juges Raselli, Président,Escher et Marazzi.Greffier: M. Abrecht. Y. ________,recourante, représentée par Me Michel A. Bosshard, avocat, contre X.________,intimé, représenté par Me Cédric Duruz, avocat,Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case postale 3108,1211 Genève 3. art. 9 Cst. etc. (modification de la contribution à l'entretien d'un enfantmajeur), recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour dejustice du canton de Genève du 27 janvier 2006. Faits: A.Le 22

juin 2005, X.________ a saisi le Tribunal de première insta...

{T 0/2}5P.108/2006 /frs Arrêt du 22 juin 2006IIe Cour civile MM. et Mme les Juges Raselli, Président,Escher et Marazzi.Greffier: M. Abrecht. Y. ________,recourante, représentée par Me Michel A. Bosshard, avocat, contre X.________,intimé, représenté par Me Cédric Duruz, avocat,Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case postale 3108,1211 Genève 3. art. 9 Cst. etc. (modification de la contribution à l'entretien d'un enfantmajeur), recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour dejustice du canton de Genève du 27 janvier 2006. Faits: A.Le 22 juin 2005, X.________ a saisi le Tribunal de première instance ducanton de Genève d'une requête tendant à la modification de la contributiond'entretien due à sa fille Y.________, née le 6 mai 1985. Par jugement du 24 novembre 2005, notifié aux parties le 29 novembre 2005, leTribunal de première instance a modifié le jugement de divorce rendu le 6décembre 1990 entre dame X.________ et X.________, en supprimant dès le 6 mai2005 la contribution due par ce dernier à l'entretien de sa fille Y.________. B.Le 13 janvier 2006, Y.________ a déposé au greffe de la Cour de justice ducanton de Genève un appel contre ce jugement. Affirmant poursuivre des étudessérieuses et régulières, elle a conclu au maintien de la contributiond'entretien, telle que fixée par le jugement de divorce, et au déboutement deX.________ de toutes ses conclusions. La Chambre civile de la Cour de justicea déclaré l'appel irrecevable par arrêt du 27 janvier 2006, dont lamotivation est en substance la suivante:B.aAux termes de l'art. 365 LPC/GE (RSG E 3 05), applicable en vertu del'art. 366 LPC/GE, l'appel doit être interjeté dans un délai de 30 jours dèsla notification du jugement. L'art. 30 al. 1 let. c LPC/GE dispose que lesdélais fixés par cette loi ne courent pas du 18 décembre au 1er janvierinclusivement. Cette disposition ne s'applique toutefois pas, en vertu del'art. 30 al. 2 LPC/GE, aux conciliations, aux mesures provisionnelles, ycompris les séquestres, aux mesures protectrices de l'union conjugale, auxactions alimentaires, aux mesures préprovisoires et provisoires pendant laprocédure de divorce, à la procédure sommaire et à celle prévue pour lesévacuations ainsi qu'aux matières relevant de la loi fédérale sur lapoursuite pour dettes et la faillite. B.b En l'espèce, s'agissant d'une action alimentaire à laquelle la suspensiondes délais ne s'applique pas, force est de constater que l'appel n'a pas étédéposé dans le délai de 30 jours fixé par la loi. En effet, ce délai arrivaità échéance le 29 décembre 2005, et non le 13 janvier 2006 comme soutenu parY.________. L'appel doit dès lors être déclaré d'entrée de cause irrecevableen application de l'art. 306 LPC/GE. C.Agissant par la voie du recours de droit public, Y.________, qui sollicitel'octroi de l'assistance judiciaire pour la procédure devant le Tribunalfédéral, conclut avec suite de frais et dépens à l'annulation de cet arrêt.En bref, elle soutient que l'on ne serait pas en présence d'une actionalimentaire, comme la cour cantonale l'aurait retenu de manière arbitraire,mais d'une action en modification du jugement de divorce, soumise à lasuspension des délais pendant les féries judiciaires (cf. consid. 2.1 infra).L'intimé propose le rejet du recours. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Formé en temps utile (art. 89 al. 1 OJ) contre une décision finale (cf.art.87 OJ) prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 OJ), le recoursest recevable au regard de ces dispositions. Il l'est également du chef del'art. 84 al. 2 OJ, qui pose le principe de la subsidiarité absolue durecours de droit public. En effet, l'application du droit fédéral dans lesmotifs d'un jugement portant sur une question de droit cantonal ne peut pasêtre l'objet d'un recours en réforme, sauf si, sur la question déterminante,le législateur cantonal devait tenir compte de la loi fédérale (ATF 125 III461 consid. 2; 115 II 237 consid. 1c p. 241; 102 II 53 consid. 1 p. 54 et lajurisprudence mentionnée). Or en l'espèce, le droit fédéral - que l'autoritécantonale a appliqué à titre préjudiciel, dans le cadre de l'application dudroit de procédure cantonal, pour déterminer la nature juridique de l'actionintroduite - n'impose aucune exigence aux cantons en ce qui concerne lasoumission ou non des actions alimentaires à la suspension des délais pendantles féries fixées par la loi cantonale de procédure. Seul le recours de droitpublic est donc ouvert en l'espèce. 2.2.1La recourante reproche à la cour cantonale d'être tombée dans l'arbitraireen considérant l'action en modification du jugement de divorce introduite parl'intimé comme une action alimentaire, à laquelle la suspension des délais -notamment du délai d'appel de 30 jours - ne s'applique pas en vertu de l'art.30 al. 2 LPC/GE. Elle fait valoir que l'art. 134 CC, qui prévoit lapossibilité de demander la modification du jugement de divorce en cas defaits nouveaux, renvoie aux dispositions relatives aux effets de la filiationuniquement pour les conditions se rapportant à la modification de lacontribution d'entretien ou aux relations personnelles. L'art. 134 al. 2 CCne renverrait en revanche pas aux exigences procédurales (procédure simple etrapide) édictées par l'art. 280 al. 1 CC pour les litiges relatifs àl'obligation d'entretien. L'action introduite par l'intimé serait incontestablement une action enmodification du jugement de divorce selon l'art. 134 CC, de sorte qu'elleserait régie par le Chapitre VII du Titre XVI de la LPC/GE, intitulé"Divorce, séparation de corps et annulation du mariage (art.104 à 149 ducode civil)", et non par son Chapitre V, intitulé "Actions alimentaires (art.279, 291, 292, 328 et 329 du code civil)". En considérant que le litige quilui était soumis relevait de la procédure relative aux actions alimentaires,la cour cantonale aurait ainsi versé dans l'arbitraire. La position des jugescantonaux consistant à appliquer à une procédure en modification du jugementde divorce les dispositions procédurales concernant les actions alimentairesaurait d'ailleurs pour conséquence insoutenable, dans le cas d'une action enmodification du jugement de divorce qui tendrait tant à la modification de lacontribution d'entretien qu'à celle des relations personnelles, que le délaid'appel ne serait pas le même pour la partie du dispositif relative à lacontribution d'entretien que pour celle consacrée aux relations personnelles. 2.2 Il n'est pas contesté que, dans le cas d'une action alimentaire ouvertepar un enfant contre son père et sa mère, ou contre les deux ensemble, sur labase de l'art. 279 CC, les délais fixés par la LPC/GE courraient également,en vertu de l'art. 30 al. 2 LPC/GE, pendant les féries annuelles fixées parl'art. 30 al. 1 LPC/GE (cf. SJ 1999 I 332), tandis que dans le cas d'uneaction en modification du jugement de divorce tendant à la modification d'unecontribution d'entretien fondée sur l'art. 125 CC, les délais seraientsuspendus pendant les féries. Il n'est pas non plus contesté qu'en l'espèce,le litige sur le fond porte sur la modification de la contributiond'entretien fixée en faveur de la recourante dans le jugement de divorcerendu entre ses parents. Cela étant, l'issue du recours de droit publicdépend du point de savoir s'il est arbitraire de considérer le litige commerelevant des actions alimentaires visées par l'art. 30 al. 2 LPC/GE. 2.3 Selon l'art. 133 CC, le juge du divorce attribue l'autorité parentale àl'un des parents et fixe, d'après les dispositions régissant les effets de lafiliation, les relations personnelles entre l'enfant et l'autre parent ainsique la contribution d'entretien due par ce dernier. Dans le procès endivorce, le parent auquel l'autorité parentale est attribuée a la faculté dedemander en son propre nom, à la place de l'enfant mineur, la contributiond'entretien due à celui-ci (cf. art. 289 al. 1 CC), y compris pour la périodeallant au-delà de l'accès à la majorité (art. 133 al. 1, 2ephrase, CC; ATF129 III 55 consid. 3.1.3 et 3.1.4 et les références citées). Si, conformément au renvoi de l'art. 133 al. 1 CC, l'étendue de lacontribution d'entretien est fixée d'après les dispositions régissant ledroit de la filiation (art. 276 ss CC), la décision sur ce point n'en est pasmoins rendue dans le jugement de divorce, s'agissant d'un effet accessoire decelui-ci. Elle n'est pas soumise à la procédure simple et rapide à laquelleles cantons sont tenus, en vertu de l'art.280 al. 1 CC, de soumettre leslitiges relatifs à l'obligation d'entretien qui font l'objet d'une actionindépendante (cf. Breitschmid, Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch I, 2e éd.2002, n. 2 ad art. 280 CC). Il ne viendrait certainement à l'idée de personnede soumettre le litige portant sur cet effet accessoire du divorce à desrègles procédurales différentes de celles applicables au procès en divorce,de telle manière que les délais fixés par la loi cantonale de procédureseraient ou non suspendus pendant les féries annuelles selon la nature desdiverses questions litigieuses dans le procès en divorce. Pour ce qui est de la modification de la contribution d'entretien en faveurde l'enfant fixée dans le jugement de divorce, l'art. 134 al. 2 CC prévoitque les conditions de cette modification sont définies par les dispositionsrelatives aux effets de la filiation (art. 286 al. 2 CC). En revanche, laprocédure est régie par les règles applicables à la modification du jugementde divorce (cf. Leuenberger, Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch I, 2e éd.2002, n. 9 ad art. 134 CC). 2.4 En l'occurrence, le litige soumis à l'autorité cantonale porte sur lamodification, en ce qui concerne la contribution d'entretien due par l'intiméà la recourante, du jugement de divorce rendu le 6 décembre 1990 entre lesparents de la recourante. Il relève ainsi du Chapitre VII du Titre XVI de laLPC/GE, intitulé "Divorce, séparation de corps et annulation du mariage (art.104 à 149 du code civil)", et non de son Chapitre V, intitulé "Actionsalimentaires (art. 279, 291, 292, 328 et 329 du code civil)". Il n'est doncpas soutenable de considérer, comme l'a fait l'autorité cantonale, que l'onse trouve en présence d'une action alimentaire, à laquelle la suspension desdélais ne s'applique pas en vertu de l'art. 30 al. 2 LPC/GE. Ainsi que lerelève de manière pertinente la recourante, un tel raisonnement auraitd'ailleurs pour conséquence absurde, dans le cas d'une action en modificationdu jugement de divorce tendant à la fois à la modification de la contributiond'entretien et à celle des relations personnelles, que les délais fixés parla loi cantonale de procédure, et notamment le délai d'appel, seraient ou nonsuspendus pendant les féries annuelles selon la nature des diverses questionslitigieuses. 3.Il résulte de ce qui précède que le recours, fondé, doit être admis, l'arrêtattaqué annulé et l'intimé, qui succombe, condamné aux frais et dépens (art.156 al. 1 et 159 al. 1 OJ), ce qui rend sans objet la demande d'assistancejudiciaire présentée par la recourante. Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est admis et l'arrêt attaqué est annulé. 2.Sont mis à la charge de l'intimé:2.1un émolument judiciaire de 2'000 fr.;2.2une indemnité de 2'000 fr. à verser à la recourante à titre de dépens. 3.La demande d'assistance judiciaire de la recourante est sans objet. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à laChambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. Lausanne, le 22 juin 2006 Au nom de la IIe Cour civiledu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.108/2006
Date de la décision : 22/06/2006
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-06-22;5p.108.2006 ?
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