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19/06/2006 | SUISSE | N°U.101/06

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 19 juin 2006, U.101/06


Cause {T 7}U 101/06 Arrêt du 19 juin 2006IIIe Chambre MM. les Juges Ferrari, Président, Lustenberger et Seiler. Greffier : M.Pellegrini S.________, recourant, ayant élu domicile c/o Syndicat UNIA, chemin Surinam5, 1203 Genève, contre Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1,6004 Lucerne, intimée, Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève (Jugement du 9 janvier 2006) Faits: A.S. ________ travaillait en qualité de staffeur au service de l'entrepriseX.________ SA. A ce titre, il était assuré auprès de la Caisse nationalesuisse d'assurance en cas

d'accidents (CNA). Souffrant de douleurs à l'épaule, au g...

Cause {T 7}U 101/06 Arrêt du 19 juin 2006IIIe Chambre MM. les Juges Ferrari, Président, Lustenberger et Seiler. Greffier : M.Pellegrini S.________, recourant, ayant élu domicile c/o Syndicat UNIA, chemin Surinam5, 1203 Genève, contre Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1,6004 Lucerne, intimée, Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève (Jugement du 9 janvier 2006) Faits: A.S. ________ travaillait en qualité de staffeur au service de l'entrepriseX.________ SA. A ce titre, il était assuré auprès de la Caisse nationalesuisse d'assurance en cas d'accidents (CNA). Souffrant de douleurs à l'épaule, au genou et au pouce gauches, l'assuré ainterrompu son activité professionnelle à partir du 23 avril 2003 (cf.notamment certificats d'incapacité de travail établis par le docteurA.________ des 24 avril, 4 et 30 juin 2003 et 15 mars 2004). Le 1er maisuivant, le docteur A.________, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, apratiqué une arthroscopie du genou gauche après avoir diagnostiqué unedéchirure dégénérative du ménisque interne et une lésion chondrale grade 3-4condyle interne (rapport opératoire du 1er mai 2003). Le 10 juin 2003, cespécialiste a procédé à une nouvelle intervention chirurgicale en raisond'une lésion SLAP II (Supérieur Labrum Antéro Postérieur) de l'épaule gaucheet d'une arthrose trapézo-métacarpienne du pouce gauche (rapport opératoiredu 11 juin 2003). Le cas a été annoncé à la CNA (cf. déclaration d'accidentLAA du 4 juin 2003). Par décision du 6 février 2004, la CNA a nié à l'assuré le droit à touteprestation, dès lors que les troubles dont il souffrait ne répondaient pasaux critères d'accident, de lésions corporelles assimilées à un accident oude maladie professionnelle. Estimant que ses douleurs à l'épaule et au pouce gauche étaient liées à sonactivité professionnelle, S.________ s'est opposé à cette décision.L'assureur-accidents a dès lors soumis l'examen du cas au docteur G.________,chirurgien orthopédique et médecin d'arrondissement. De l'avis de cespécialiste, la lésion SLAP II de l'épaule gauche était d'originedégénérative et multi-factorielle. Quant à l'arthrose trapézo-métacarpiennedu pouce gauche, son étiologie était dégénérative. Aussi, a-t-il niél'existence d'une maladie professionnelle pour ces affections (rapport du 2juin 2004). Fondée sur cette appréciation, la CNA a rejeté l'oppositionformée par l'assuré par décision sur opposition du 15 juin 2004. B.L'assuré a déféré cette décision sur opposition au Tribunal cantonal desassurances sociales de la République et canton de Genève. En procédure, il anotamment produit divers extraits d'études scientifiques. Appelé à sedéterminer sur l'origine des troubles de l'épaule gauche, le docteurA.________ a expliqué que si le SLAP de degré I était en général dégénératif,le SLAP II avait une étiologie traumatique - notamment à la suite detractions du bras -. A son avis, cette affection pouvait être liée àl'activité professionnelle de l'intéressé (lettre du 15 décembre 2004). En vue d'élucider les divergences issues des avis médicaux des docteursG.________ et A.________, la juridiction cantonale a confié un mandatd'expertise à leurs confrères O.________, médecin chef au Service derhumatologie, médecine physique et réhabilitation de l'Hôpital Y.________ etB.________, spécialiste FMH en médecine du travail, médecin chef à l'InstitutZ.________. Aux termes de leurs investigations, ces médecins sont parvenus àla conclusion que les lésions de l'épaule et du pouce gauches n'avaient pasété causées de manière prépondérante par l'exercice de l'activitéprofessionnelle de l'assuré (rapport du 6 octobre 2005). A la lumière de cette expertise, les premiers juges ont rejeté le recoursformé par S.________ par jugement du 9 janvier 2006. C.Ce dernier interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dontil demande l'annulation en concluant à ce que l'assureur-accidents lui allouedes prestations en raison de sa maladie professionnelle. La CNA conclut au rejet du recours. Invitée à se déterminer en tantqu'intéressée, la Caisse-maladie suisse pour les industrie du bois et dubâtiment et branches annexes (CMBB) s'en est remise à justice. Quant àl'Office fédéral de la santé publique, il n'a pas présenté de déterminations. Considérant en droit: 1.Le litige porte sur le droit du recourant à des prestations del'assureur-accidents en raison d'une maladie professionnelle. 2.Le jugement entrepris expose correctement les dispositions légales et lesprincipes jurisprudentiels concernant en particulier la valeur probante desrapports médicaux, l'appréciation des expertises médicales judiciaires par lejuge ainsi que la notion de maladie professionnelle et l'exigence d'unerelation prépondérante entre l'atteinte à la santé et l'exercice d'uneactivité professionnelle, si bien qu'il suffit d'y renvoyer. 3.Se fondant sur l'expertise des docteurs O.________ et B.________ du 6 octobre2005, à laquelle ils ont reconnu pleine valeur probante, les premiers jugesont retenu que les lésions à l'épaule et au pouce gauches présentées par lerecourant n'étaient pas dues de manière prépondérante à son activitéprofessionnelle, si bien qu'ils ont nié à ces affections le caractère demaladie professionnelle. De son côté, le recourant reproche en substance à la juridiction cantonaled'avoir fondé son appréciation sur l'expertise judiciaire, les experts ayantassimilé à tort sa profession de staffeur à celle de peintre en bâtiment. Acet égard, il fait valoir que les charges à soulever dans l'exercice de cesprofessions ne sont pas comparables et que la tâche impliquant le maintiende matériaux au-dessus des épaules, nettement moins fréquente chez lespeintres en bâtiment, est propre à sa profession. Il se prévaut en outred'une expertise pratiquée par le docteur E.________ produite en procédurefédérale (rapport du 5février 2006). 4.4.1Dans le cadre de l'expertise, l'assuré a fourni aux docteurs O.________ etB.________ une description des tâches exercées dans la profession destaffeur. Après avoir examiné les pièces médicales du dossier, ces derniersont aussi procédé à une analyse de la littérature médicale. A titreliminaire, ces spécialistes ont expliqué n'avoir trouvé aucune étude relativeà la profession de staffeur tant dans la littérature spécifique à larhumatologie qu'à celle existant en matière de médecine du travail. Aussi, sesont-ils référés aux travaux publiés pour le métier de peintre en bâtiment,dès lors que cette profession implique, à l'instar de celle de l'intéressé,de travailler les bras levés. Si, comme le démontrent plusieurs études, ilexiste une prévalence augmentée de douleurs aux épaules dans de tellespositions, le lien de causalité ne saurait, toujours selon les experts, êtrequalifié de prépondérant. En effet, il ressort de la littérature médicaleconsultée que le trouble diagnostiqué ne se présente que deux à trois foisplus fréquemment chez les peintres en bâtiment que dans la population engénéral. En outre, sur le plan clinique, l'origine de cette atteinte étantmulti-factorielle, il convient de prendre en considération, en sus du métierexercé, l'âge, la constitution et notamment la tendance à développer del'arthrose. Les experts ont également relevé que les lésions SLAP II peuvent êtreexemptes de répercussion clinique ou être associées à la présence de troublesdégénératifs préexistants de l'épaule gauche tels que l'arthrosegléno-humérale ou une tendinite de la coiffe des rotateurs. Ils se sontréférés à l'étude de Kim (Kim TK et al. Clinical Features of the DifferentTypes of SLAP Lésions. Journal of Bone and Joint Surgery 2003 Jan; 85 (1):66-71), qui explique que pour les patients âgés de plus de quarante ans -comme le recourant - l'association des lésions de degré II à des pathologiesgléno-humérales est plus nette alors que pour les patients plus jeunes (moinsde 40 ans), ce genre de lésion est davantage associé à la présence d'unelésion bankart, soit une déchirure du labrum antérieur de la glène. En outre,d'après leur analyse de la littérature médicale, il n'existe pas de lien bienétabli entre une lésion SLAP II et une profession spécifique. Quant àl'affection du pouce gauche, aussi d'origine multi-factorielle, elle n'estpas due de manière prépondérante à l'exercice de sa profession. 4.24.2.1Le rapport circonstancié de ces experts, dont les conclusions sontconvaincantes, répond aux réquisits posés par la jurisprudence relative à lavaleur probante des documents médicaux (ATF 125 V 352 consid. 3a, 122 V 160consid. 1c et les références). 4.2.2 Les avis médicaux divergents émis par les docteurs A.________ etE.________ ne sont pas de nature à mettre sérieusement en doute l'analyse desexperts judiciaires. Dans sa lettre du 15 décembre 2004, le docteurA.________ a indiqué que les lésions SLAP II sont à son avis d'originetraumatique, à la suite notamment de tractions du bras. Cette affectionpourrait être due à la profession de l'intéressé, dès lors qu'il a exercé uneactivité extrêmement difficile durant toute sa vie. Quant à son confrèreE.________, il fonde son point de vue sur le fait que le travail de staffeurimpose des contraintes musculaires au niveau des épaules en raison notammentdes mouvements d'abduction et de projection, sur la considération qu'il n'apas connaissance d'un état antérieur relatif aux épaules chez l'expertisé etenfin que, selon la littérature médicale, la lésion SLAP II résulte d'untraumatisme par traction. 4.2.3 L'existence d'une cause unique est toutefois controversée, dès lorsque les experts judiciaires, s'appuyant sur la littérature médicale, ontrelevé qu'une lésion SLAP II est d'origine multi-factorielle et peut, enparticulier, être associée à la présence de troubles dégénératifspréexistants de l'épaule. Dans le cas d'espèce, cette appréciation apparaîtd'autant plus convaincante que l'assuré souffre d'arthrose à la colonnecervicale et lombaire ainsi qu'aux pouces et aux épaules. En outre,s'agissant d'un droitier, il y a tout lieu de penser que si cette affectionétait causée exclusivement ou de manière nettement prépondérante par lesmouvements d'abduction et de projection, l'épaule droite aurait présenté enpriorité une lésion de ce genre, ce qui n'est pas le cas. Au demeurant, le seul fait que l'intéressé souffre d'une telle affectionn'implique pas encore qu'elle soit causée exclusivement ou de manièrenettement prépondérante par l'exercice de sa profession. Les docteursA.________ et E.________ n'apportent aucun élément susceptible de prouver quece genre d'atteinte est quatre fois plus fréquent dans l'activité de staffeurque les cas enregistrés dans la population en général. Les experts O.________et B.________ ont d'ailleurs relevé, sans être contredit sur ce point, qu'iln'existe pas, dans la littérature médicale, de lien bien établi entre unelésion SLAP II et une profession spécifique. 5.Le recourant estime que les experts judiciaires ont assimilé à tort saprofession à celle de peintre en bâtiment. Il soutient à cet égard d'une partque les charges sont différentes, d'autre part que la tâche impliquant lemaintien de matériaux au-dessus des épaules, propre à sa profession, estnettement moins fréquente chez les peintres en bâtiment. Comme on l'a vu,c'est à la suite d'une description détaillée des tâches requises dans sonactivité que les experts - dont un spécialiste en médecine du travail, ledocteur B.________ - l'ont apparentée à celle de peintre en bâtiment,appréciation qui, dans cette mesure, n'apparaît pas critiquable. Au demeurant, à supposer que sa profession ne puisse être assimilée dans cecadre à celle de peintre en bâtiment, cela n'aurait pas d'incidence sur lasolution du litige, dès lors qu'il n'existe pas de base épidémiologique quipermettrait de considérer que la lésion SLAP II est quatre fois plusfréquente dans la profession de l'intéressé que les cas enregistrés dans lapopulation en général et que l'origine de cette atteinte estmulti-factorielle. 6.Cela étant, on doit nier, avec les instances précédentes, l'existence d'unlien de causalité qualifiée entre la profession exercée par le recourant etles affections dont il souffre. Mal fondé, le recours doit être rejeté. Le litige portant sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, laprocédure est gratuite (art. 134 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Il n'est pas perçu de frais de justice. 3.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Caisse-maladie suisse pourles industries du bois et du bâtiment et branches annexes (CMBB), Martigny,au Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton deGenève et à l'Office fédéral de la santé publique. Lucerne, le 19 juin 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances Le Président de la IIIe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.101/06
Date de la décision : 19/06/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-06-19;u.101.06 ?
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