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14/06/2006 | SUISSE | N°U.81/05

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 14 juin 2006, U.81/05


Cause {T 7}U 81/05 Arrêt du 14 juin 2006IIIe Chambre MM. les Juges Ferrari, Président, Meyer et Lustenberger. Greffière : MmeGehring U.________, recourant, représenté par Me Hervé Bovet, avocat, rue deRomont33, 1701 Fribourg, contre Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1,6004 Lucerne, intimée Cour des assurances sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg,Givisiez (Jugement du 7 décembre 2004) Faits: A.A.a Sans formation professionnelle, U.________, né en 1950, a exercé dès lafin de sa scolarité obligatoire, le métier d'agriculteur s

ur le domainefamilial dont il a acquis la propriété en 1975....

Cause {T 7}U 81/05 Arrêt du 14 juin 2006IIIe Chambre MM. les Juges Ferrari, Président, Meyer et Lustenberger. Greffière : MmeGehring U.________, recourant, représenté par Me Hervé Bovet, avocat, rue deRomont33, 1701 Fribourg, contre Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1,6004 Lucerne, intimée Cour des assurances sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg,Givisiez (Jugement du 7 décembre 2004) Faits: A.A.a Sans formation professionnelle, U.________, né en 1950, a exercé dès lafin de sa scolarité obligatoire, le métier d'agriculteur sur le domainefamilial dont il a acquis la propriété en 1975. Depuis 1988, il a en outretravaillé en qualité d'aide-géomètre au service du Bureau techniqueX.________. A ce titre, il était assuré contre le risque d'accidents auprèsde la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA). Heurté augenou droit par le sabot d'une vache en date du 26 novembre 1999, U.________a subi une lésion dégénérative tri-compartimentale, une lésion méniscaleinterne avec kyste postéro-interne et une lésion du ligament croisépostérieur au niveau du genou droit, entraînant plusieurs périodesd'incapacité totale et partielle (50%) de travail dès le 27 novembresuivant. La CNA a pris en charge les frais de traitements médicaux ainsi qued'indemnités journalières. Opéré le 8 mai 2001, U.________ présente depuis lors un status sur rupture duligament croisé postérieur et status post-ostéotomie de valgisation du genoudroit, entraînant une capacité de travail nulle dans son ancien métier, maissusceptible d'amélioration dans une activité lucrative adaptée (rapports des19 novembre 2001 et 8 février 2002 du docteur S.________ [spécialiste FMH enchirurgie orthopédique]). Souffrant par ailleurs de gonalgies gauches,U.________ a subi, le 7février 2002, une arthroscopie avec résectionpartielle de la corne postérieure du ménisque interne en raison de lésionsdégénératives. A l'occasion de cette intervention, le docteur S.________ amis en évidence le développement d'une malacie fémoro-patellaire etfémoro-tibiale interne (rapport du 7 février 2002). Selon le médecind'arrondissement de la CNA (rapport du 22 février 2002 du docteurY.________), ces derniers troubles sont de nature purement dégénérative etn'engagent par conséquent pas la responsabilité de la CNA. En revanche, ledocteur Y.________ observe que U.________ présente les séquelles d'une lésiondu ligament croisé postérieur du genou droit sous forme d'une instabilitéantéro-postérieure modérée à grave. Ces troubles lui occasionnent desdifficultés à la marche sur terrain inégal, à la montée ainsi qu'à ladescente et son périmètre de déplacement sur sol plat ne s'étend pas au-delàde trois ou quatre km. La force pure et la capacité de préhension sontconservées, de sorte qu'il peut soulever des charges lourdes sans pouvoirtoutefois les déplacer sur de longues distances. La station assise n'étantpas tolérée plus d'une heure, l'exercice d'une activité lucrative adaptéedevra favoriser l'alternance des positions. Dans la mesure où le métierd'aide-géomètre s'effectue sur le terrain, il est incompatible avecl'atteinte subie au genou droit; en revanche, l'exercice d'une activitélucrative de type industriel, sur sol plat et moyennant une sollicitationalternée est raisonnablement exigible de l'assuré à 100%. A.b Par courrier du 26 février 2002, la CNA a communiqué à U.________ sonrefus de prendre en charge les suites de l'affection subie au genou gauche,celle-ci s'avérant de nature dégénérative et sans lien de causalité avecl'événement accidentel du 26 novembre 1999. En raison des troubles subis augenou droit, elle lui a par contre accordé une indemnité d'un montant de9'720fr. pour atteinte à l'intégrité physique de 10% (décision du 28février 2002). Le 26 novembre suivant, elle a décidé de mettre un terme, aveceffet au 31 janvier 2003, au paiement des indemnités journalières et desfrais médicaux. A compter du 1er février suivant, elle a en revanche misl'assuré au bénéfice d'une rente fondée sur un degré d'invalidité de 18%(décision du 3 janvier 2003 confirmée sur opposition le 18 juin suivant). A.c De son côté, l'Office AI du canton de Fribourg (ci-après: l'office AI) anié à U.________ le droit à une rente, considérant le degré d'invaliditéqu'il présente (35%), insuffisant pour ouvrir droit à la prestation(décision du 22 novembre 2002). En revanche, il a mis l'assuré au bénéficed'une aide au placement. B.Par jugement du 7 décembre 2004, le Tribunal administratif du canton deFribourg a très partiellement admis le recours formé par U.________ contre ladécision sur opposition de la CNA, lui reconnaissant un degré d'invalidité de20% calculé sur la base de revenus sans et avec invalidité de 4'943fr.90,respectivement 3'950fr., ce dernier correspondant au gain mensuel moyen decinq descriptions de poste de travail (ci-après: DPT) perçu pour un emploiexercé à plein temps. C.U.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dontil demande l'annulation en concluant, sous suite de dépens, à l'octroi d'unerente fondée sur un degré d'invalidité 57%. La CNA conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral de la santépublique a renoncé à se déterminer. Considérant en droit: 1.Le litige porte sur le droit du recourant à une rente, en particulier sur ledegré d'invalidité qu'il présente. 2.La juridiction cantonale a exposé correctement la règle légale (art. 18 LAA)et les principes jurisprudentiels relatifs au droit à cette prestation,singulièrement à la notion et à la détermination de l'invalidité; elle aégalement rappelé l'étendue des tâches du médecin lorsqu'il s'agit d'évaluerla capacité de travail d'un assuré (ATF 125 V 261 consid. 4 et lesréférences), ainsi que les conditions auxquelles la jurisprudence soumet lavaleur probante des rapports médicaux (ATF 125 V 352 consid. 3a et lesréférences). Sur ces points, il suffit donc de renvoyer aux considérants dujugement entrepris. On précisera que pour procéder à la comparaison desrevenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit(éventuel) à la rente; les revenus avec et sans invalidité doivent alors êtredéterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenussusceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où ladécision est rendue être prises en compte (ATF 129 V 222 consid. 4, 128 V 174consid. 4.1 et 4.2). Dans le cas particulier, la naissance du droit(éventuel) à une rente d'invalidité LAA se situe en 2003, date à partir delaquelle il n'y avait plus lieu d'attendre la mise en oeuvre de mesures deréadaptation de l'assurance-invalidité (art. 19 al. 1 LAA). 3.Dans un premier moyen, le recourant conteste le revenu d'invalide retenu parles premiers juges. Se prévalant de l'avis du docteur B.________ (spécialisteFMH en médecine interne, médecin traitant), il considère que la capacité detravail raisonnablement exigible de sa part dans une activité adaptée s'élèveà 90% au plus. Compte tenu de son âge, de son état de santé ainsi que du peude formation dont il a bénéficié, il réclame en outre un abattement de 10 %du revenu d'invalide lequel s'élèverait par conséquent à 3'199fr.50([3'950fr. x 90%] - 10%). 3.1 Dans deux rapports établis les 3 et 12 mai 2004, le docteur B.________fait état d'une aggravation de l'état de santé du recourant entraînant uneincapacité de travail de 50% dans une activité adaptée. Or, le juge ne doit,en principe, tenir compte que des faits existant au moment où la décisionlitigieuse a été rendue (ATF121V366 consid.1b et les arrêts cités). Lesfaits survenus postérieurement à celle-ci ne devront dès lors être pris enconsidération que s'ils s'avèrent de nature à influencer l'appréciation aumoment où la décision attaquée a été rendue (ATF99V102 et les arrêtscités), ce qui n'est pas le cas en l'occurrence. Au regard de l'état de santédu recourant prévalant à l'époque de la décision sur opposition litigieuse,c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré, sur la base enparticulier du rapport du 22 février 2002 du docteur Y.________ - dont lavaleur valeur probante n'est ni contestée ni contestable (ATF125V352consid.3a, 122V160 consid.1c et les références) - que le recourantprésente une incapacité totale d'exercer les métiers d'aide-géomètre etd'agriculteur mais qu'il dispose en revanche d'une capacité entière detravail dans une activité lucrative adaptée à l'état de santé de son genoudroit. 3.2 Pour déterminer le revenu d'invalide, les premiers juges ont pris enconsidération un montant de 3'950fr. correspondant au gain mensuel moyen decinq DPT. Selon la jurisprudence récente (ATF 129 V 472), la détermination durevenu d'invalide sur la base des données salariales résultant des DPTsuppose, en sus de la production d'au moins cinq DPT, la communication dunombre total des postes de travail pouvant entrer en considération d'après letype de handicap, ainsi que du salaire le plus haut, du salaire le plus bas,et du salaire moyen du groupe auquel il est fait référence. En l'occurrence,trois des cinq DPT produits au dossier n'indiquent pas le nombre total deplaces de travail entrant en considération pour le handicap donné, de sortequ'il n'est pas possible d'en vérifier la représentativité. En l'absence de DPT recueillies conformément aux exigences posées par lajurisprudence, il convient de se fonder sur les salaires tels qu'ilsrésultent de l'Enquête suisse sur la structure des salaires, publiée parl'Office fédéral de la statistique (Enquête suisse sur la structure dessalaires [ESS]; ATF 126 V 76 consid. 3b/aa et bb). En l'occurrence, lesalaire de référence est celui auquel pouvaient prétendre en 2002 les hommeseffectuant des activités simples et répétitives dans le secteur privé (ESS2002, TA1, p. 43, niveau de qualification 4). Ce secteur offre un éventailsuffisamment varié d'activités non qualifiées pour qu'un certain nombred'entre elles soient immédiatement accessibles au recourant. Ce salairehypothétique mensuel s'élève à 4'557fr. par mois, part au 13ème salairecomprise. Il représente - compte tenu du fait que les salaires brutsstandardisés se basent sur un horaire de travail de quarante heures, soit unedurée hebdomadaire inférieure à celle prévalant dans les entreprises en 2002(41,7 heures [La Vie économique, 6/2004, p. 90, B 9.2]) - un revenud'invalide de 4'751fr. par mois (4'557fr. x 41,7 heures : 40 heures). Sousdéduction d'un abattement de 20% compte tenu de l'âge de l'assuré et deslimitations liées à son handicap (ATF 126 V 79), le revenu d'invalide s'élèveà 3'801fr. par mois. Adapté à l'évolution des salaires selon l'indice dessalaires nominaux pour les hommes de l'année 2003 (1,4%; La Vie économique,9-2005, p. 91, B10.2), il est porté à 3'854fr., soit 46'248fr. par année. 4.4.1S'agissant du revenu sans invalidité, le recourant considère qu'il doitêtre établi sur la base des gains réalisés en 1999 en qualité d'aide-géomètre(20'488fr.) et d'agriculteur (65'232fr. soit 57'744fr. [revenu net]7'488fr. [d'amortissements des véhicules et des immeubles]), augmentés de1,5% au titre du développement probable de l'exploitation agricole etindexés selon l'indice suisse des prix à la consommation pour l'année 2000,pour totaliser au final un montant de 89'127fr.90. 4.24.2.1Pour déterminer le revenu sans invalidité déterminant en l'espèce, lespremiers juges ont pris en considération le revenu moyen réalisé par lerecourant durant les années 1995 à 1999 en qualité de salarié (13'130fr. en1995; 11'479fr. en 1996; 11'167fr. en 1997; 14'404fr. en 1998; 20'488fr.en 1999) et d'indépendant (35'261fr. en 1995; 32'279fr. en 1996; 57'337fr.en 1997; 36'273fr. en 1998; 57'744fr. en 1999). Le fait que la juridictioncantonale se soit ainsi écartée de la règle selon laquelle le revenu sansinvalidité se déduit en principe du salaire réalisé en dernier lieu parl'assuré avant l'atteinte à la santé, en tenant compte de l'évolution dessalaires (ATF 129 V 474 consid. 4.1) n'est pas critiquable en regard desvariations importantes subies par les gains précités. Le revenu ainsi établiest d'autant moins critiquable que l'horaire accompli au service du Bureautechnique X.________, respectivement la rémunération en résultant, ne sontpas fixes mais déterminés au gré des besoins de l'employeur. 4.2.2 En qualité de salarié, le recourant a ainsi perçu de 1995 à 1999 unrevenu annuel moyen de 14'134fr., soit 15'149fr., après indexation àl'évolution des salaires en 2003 (1.3% en 2000, 2.5% en 2001, 1,8% en 2002et 1.4% en 2003 [La Vie économique, 6/2004, tableau B 10.2, p. 91]), non pas2000 comme indiqué par le recourant (cf. consid. 2 supra). 4.2.3 Selon les avis de taxation fiscale établis pour la période précitée, ila en outre réalisé un revenu agricole annuel moyen de 43'779fr.Contrairement à l'avis du recourant, ce montant ne saurait être augmenté desvaleurs d'amortissement. En tant qu'imputations comptables des sommesnécessaires au maintien en état du capital qui se déprécie dans le temps,celles-ci constituent, pour un indépendant, des charges d'exploitation del'entreprise et non pas un revenu comme prétendu par l'intéressé. Selon la jurisprudence, lors de la détermination du revenu sans invaliditéd'un agriculteur indépendant, sur la base du revenu imposable des précédentesannées, il y a lieu de faire une adaptation non seulement au renchérissementmais également au développement réel du revenu (RCC 1990 p. 544 consid. 3c).Adapté à l'indice des salaires réels chez les hommes en 2003, il résulte unrevenu agricole annuel moyen de fr. 45'013fr. (- 0.4% en 2000, 1.5% en2001, 1% en 2002 et 0.7% en 2003 [Evolution des salaires en 2004, T2.2.93,p.38]). Indexé selon l'indice suisse des prix à la consommation pour l'année2003, celui-ci s'élève à 48'246fr. (1.3% en 2000, 2.5% en 2001, 1,8% en2002 et 1.4% en 2003 [La Vie économique, 6/2004, tableau B 10.2, p. 91]). 5.Après comparaison du revenu d'invalide (46'248fr.) avec celui sansinvalidité (63'395fr.), il résulte une perte de gain de 17'147fr.correspondant à un degré d'invalidité de 27%. 6.Cela étant, c'est à juste titre que la CNA et les premiers juges se sontécartés du degré d'invalidité retenu par l'office AI, l'état de santédéterminant la capacité de travail du recourant n'étant pas identique dansles deux branches (à propos de la coordination du degré d'invalidité entreles assurances sociales voir ATF 126 V 293 sv. consid. 2d). 7.Sur le vu de ce qui précède, le recours se révèle partiellement bien fondé. 8.8.1Vu la nature du litige, il n'y a pas lieu de percevoir de frais de justice(art. 134 OJ). 8.2 Représenté par un avocat, le recourant, qui obtient partiellement gain decause, a droit à une indemnité de dépens réduite au regard de l'issue dulitige (art. 159 al. 1 en relation avec l'art. 135 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est partiellement admis. Le jugement du Tribunal administratif ducanton de Fribourg du 7 décembre 2004 ainsi que la décision
sur opposition dela CNA du 18 juin 2003 sont réformés en ce sens que le recourant a droit dèsle 1er février 2003 à une rente fondée sur un degré d'invalidité de 27%; lacause est retournée à la CNA pour qu'elle fixe le montant de celle-ci. 2.Il n'est pas perçu de frais de justice. 3.La CNA versera au recourant la somme de 1'500fr. à titre de dépens (ycompris la taxe sur la valeur ajoutée) pour l'instance fédérale. 4.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Cour des assurancessociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg et à l'Officefédéral de la santé publique. Lucerne, le 14 juin 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances Le Président de la IIIe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.81/05
Date de la décision : 14/06/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-06-14;u.81.05 ?
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