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09/06/2006 | SUISSE | N°I.393/05

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 09 juin 2006, I.393/05


Cause {T 7}I 393/05 Arrêt du 9 juin 2006IIIe Chambre MM. les Juges Ferrari, Président, Meyer et Seiler. Greffière : Mme Berset Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenueGénéral-Guisan 8, 1800 Vevey, recourant, contre C.________, intimée Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne (Jugement du 16 décembre 2004) Faits: A.C. ________, née en 1946, a travaillé en qualité d'employée de pressing de1991 à 1999 à raison de 20 heures par semaine (l'horaire hebdomadaire normalde l'entreprise étant de 46 heures 40). Elle a résilié son contrat pour le 31décem

bre 1999. Après avoir bénéficié d'indemnités de chômage, elle a d...

Cause {T 7}I 393/05 Arrêt du 9 juin 2006IIIe Chambre MM. les Juges Ferrari, Président, Meyer et Seiler. Greffière : Mme Berset Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenueGénéral-Guisan 8, 1800 Vevey, recourant, contre C.________, intimée Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne (Jugement du 16 décembre 2004) Faits: A.C. ________, née en 1946, a travaillé en qualité d'employée de pressing de1991 à 1999 à raison de 20 heures par semaine (l'horaire hebdomadaire normalde l'entreprise étant de 46 heures 40). Elle a résilié son contrat pour le 31décembre 1999. Après avoir bénéficié d'indemnités de chômage, elle a déposé, le 5juin 2001,une demande de rente auprès de l'Office de l'assurance-invalidité pour lecanton de Vaud, en indiquant souffrir de douleurs musculaires. Dans le cadrede l'instruction administrative, divers renseignements d'ordre médical etéconomique ont été produits. Il ressort, en particulier, des conclusions duService médical régional de l'AI (SMR) que la capacité de travail deC.________ est totale dans son activité à mi-temps (rapport du 25 juillet2002). Par décision du 10 octobre 2002, l'office AI a rejeté la demande deprestations de l'intéressée. B.C.________ a recouru contre cette décision devant le Tribunal des assurancesdu canton de Vaud, en concluant à son annulation. A l'appui de sesconclusions, elle a produit deux rapports médicaux, l'un de la doctoresseT.________, spécialiste en rhumatologie/médecine interne (du 31 mars 2003) etl'autre du docteur H.________, spécialiste en psychiatrie/psychothérapie (du27 septembre 2003). Par jugement du 16 décembre 2004, la juridiction cantonale a admis lerecours. Elle a réformé la décision attaquée en octroyant à l'intéressée unedemi-rente d'invalidité dès le 1er novembre 2000. C.L'office AI interjette recours de droit administratif contre ce jugement,dont il requiert l'annulation, en concluant à la confirmation de la décisiondu 10 octobre 2002. C. ________ déclare s'en tenir aux conclusions du Tribunal des assurances ducanton de Vaud. Quant à l'Office fédéral des assurances sociales, il conclutà l'admission du recours. Considérant en droit: 1.Le litige porte sur le droit de l'intimée à une rente del'assurance-invalidité. 2.Les premiers juges ont exposé correctement les dispositions légales et lesprincipes jurisprudentiels applicables à la solution du litige, de sortequ'il suffit d'y renvoyer (consid. 1 à 4). 3.Se fondant, notamment, sur les rapports des docteurs H.________ etT.________, la juridiction cantonale a, d'une part, retenu que l'assuréesouffre de fibromyalgie, de lombosacralgies, d'obésité sévère, d'un diabètede type II, ainsi que d'un était dépressif et, d'autre part, fixé le taux deson incapacité de travail à 50 %. 3.1 Ainsi que l'expose l'OFAS, le rapport du docteur H.________, au demeurantsuccinct, ne répond pas aux exigences posées par la jurisprudence du Tribunalfédéral des assurances en matière de preuve. En particulier, l'anamnèse nefait pas état des plaintes de l'assurée et ne mentionne pas les avis médicauxantérieurs. Par ailleurs, les conclusions de ce médecin ne sont pas motivées.De plus, le docteur H.________ laisse entendre que l'assurée souffrepeut-être d'un état dépressif, simple possibilité qui ne satisfait pas aucritère de la vraisemblance prépondérante applicable dans le domaine desassurances sociales. 3.2 Du rapport de la doctoresse T.________, il ressort que la recourantesouffre principalement de fibromyalgie. Un travail de force n'est plusexigible de l'assurée. En revanche, une activité légère respectant les règlesd'ergonomie rachidienne peut être exigée, à un taux d'occupation de 50 %.Les capacités fonctionnelles de l'intéressée peuvent être augmentées par unenouvelle hygiène de vie (pratique régulière de la marche, régimes pour laproblématique articulaire et pour le diabète). Quant à la symptomatologiedouloureuse, elle peut être diminuée par la prise de médicaments (paracétamolou anti-inflammatoires en cas d'exacerbation, prise d'un tricyclique typeSurmontil en gouttes à débuter à petites doses). A la lecture de ces éléments médicaux, on doit convenir avec l'OFAS qu'aucuntraitement intensif et de longue durée n'a été entrepris selon les règles del'art pour remédier aux effets de la fibromyalgie. Pour ce premier motifdéjà, on peut douter que la fibromyalgie justifie à elle-seule le tauxd'incapacité de travail de 50% fixé par la doctoresse T.________. Enpareilles circonstances, conformément à la jurisprudence, il convientd'apprécier le caractère invalidant de la fibromyalgie de manière analogueaux troubles somatoformes douloureux. 4.4.1Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral des assurances a jugé que lafibromyalgie et le trouble somatoforme douloureux présentaient des pointscommuns, en ce que leurs manifestations cliniques étaient pour l'essentielsimilaires et qu'il n'existait pas de pathogenèse claire et fiable pouvantexpliquer l'origine des douleurs exprimées. Cela rendait la limitation de lacapacité de travail difficilement mesurable car l'on ne pouvait pas déduirel'existence d'une incapacité de travail du simple diagnostic posé. Enparticulier, un diagnostic de fibromyalgie ou de trouble somatoformedouloureux ne renseignait pas encore sur l'intensité des douleurs ressentiespar la personne concernée, ni sur leur évolution, ou le pronostic qu'onpouvait poser dans un cas concret. La Cour de céans a déduit de cescaractéristiques communes qu'en l'état actuel des connaissances, il sejustifiait, sous l'angle juridique, d'appliquer par analogie les principesdéveloppés par la jurisprudence en matière de troubles somatoformesdouloureux lorsqu'il s'agissait d'apprécier le caractère invalidant d'unefibromyalgie (arrêt S. du 8 février 2006, I 336/04, prévu pour la publicationdans le Recueil officiel, consid. 4.1).4.2 Aussi, convenait-il également en présence d'une fibromyalgie de poser laprésomption que cette affection ou ses effets pouvaient être surmontés par uneffort de volonté raisonnablement exigible (cf. ATF 131 V 50). De même qu'encas de troubles somatoformes douloureux, il y avait toutefois lieu dereconnaître l'existence de facteurs déterminés qui, par leur intensité etleur constance, rendaient la personne incapable de fournir cet effort devolonté. Ces critères permettant de fonder exceptionnellement un pronosticdéfavorable dans les cas de fibromyalgie étaient les suivants : la présenced'une comorbidité psychiatrique importante par sa gravité, son acuité et sadurée, un processus maladif s'étendant sur plusieurs années sans rémissiondurable (symptomatologie inchangée ou progressive), des affectionscorporelles chroniques, une perte d'intégration sociale dans toutes lesmanifestations de la vie et l'échec de traitements ambulatoires oustationnaires conformément aux règles de l'art (même avec différents types detraitement), cela en dépit de l'attitude coopérative de la personne assurée.En présence d'une comorbidité psychiatrique, il y avait également lieu detenir compte de l'existence d'un état psychique cristallisé résultant d'unprocessus défectueux de résolution du conflit, mais apportant un soulagementdu point de vue psychique (profit primaire tiré de la maladie, fuite dans lamaladie). Enfin, comme dans les cas de troubles somatoformes douloureux, ilconvenait de conclure à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droitaux prestations d'assurance, si les limitations liées à l'exercice d'uneactivité résultaient d'une exagération des symptômes ou d'une constellationsemblable (par exemple une discordance entre les douleurs décrites et lecomportement observé, l'allégation d'intenses douleurs dont lescaractéristiques demeuraient vagues, l'absence de demande de soins, degrandes divergences entre les informations fournies par le patient et cellesressortant de l'anamnèse, le fait que des plaintes très démonstrativeslaissaient insensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourds handicapsmalgré un environnement psychosocial intact) (arrêt S., précité, consid.4.2.1et 4.2.2).4.3 Par ailleurs, quand bien même le diagnostic de fibromyalgie était d'abordle fait d'un médecin rhumatologue, il convenait aussi d'exiger, en principe,comme en cas de troubles somatoformes douloureux, le concours d'un médecinspécialiste en psychiatrie, ce d'autant plus que les facteurspsychosomatiques avaient, selon l'opinion médicale dominante (cf. arrêt S.,précité, consid. 3.3), une influence décisive sur le développement de cetteatteinte à la santé. Une expertise interdisciplinaire tenant à la fois comptedes aspects rhumatologiques et psychiques apparaissait donc en principe lamesure d'instruction adéquate pour établir de manière objective si l'assuréprésentait un état douloureux d'une gravité telle - eu égard également auxcritères déterminants cités (supra consid. 4.1.2) - que la mise en valeur desa capacité de travail sur le marché de travail ne pouvait plus du tout ouseulement partiellement être exigible de sa part (arrêt S., précité, consid.4.3 et la référence). 5.Au regard des principes qui viennent d'être développés, on doit constater queni le rapport de la doctoresse T.________, ni ceux du médecin traitant (quin'est au demeurant pas rhumatologue) ne permettent de statuer à satisfactionde droit sur le caractère invalidant de la fibromyalgie présentée parl'intimée. Il convient par conséquent de renvoyer la cause à l'administrationpour qu'elle ordonne une expertise interdisciplinaire comprenant unrhumatologue et un psychiatre. Il appartiendra en particulier aux expertsdésignés de déterminer aussi objectivement que possible la capacité detravail de l'assurée à la lumière des présents considérants. Dans cettemesure, le recours est bien fondé. Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est admis en ce sens que le jugement du 16 décembre 2004 duTribunal des assurances du canton de Vaud ainsi que la décision du 10 octobre2002 de l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud sontannulés, la cause étant renvoyée audit office pour qu'il procède conformémentaux considérants. 2.Il n'est pas perçu de frais de justice. 3.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances ducanton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales. Lucerne, le 9 juin 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances Le Président de la IIIe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.393/05
Date de la décision : 09/06/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-06-09;i.393.05 ?
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