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06/06/2006 | SUISSE | N°4P.40/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 06 juin 2006, 4P.40/2006


4P.40/2006 /fzc{T 0/2} Arrêt du 6 juin 2006Ire Cour civile MM. et Mmes les Juges Corboz, président, Klett, Rottenberg Liatowitsch, Favreet Kiss.Greffière: Mme Cornaz. X. ________ et Y.________,recourants, tous les deux représentés par Me Philippe Conod, avocat, contre Z.________,intimée, représentée par Me Raymond Didisheim, avocat, Chambre des recours du Tribunal cantonal vaudois, Palais de justice del'Hermitage, route du Signal 8,1014 Lausanne. procédure civile; appréciation des preuves; droit d'être entendu, (recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre des recours du Tr

ibunalcantonal vaudois du 30 décembre 2005). Faits: A.En oc...

4P.40/2006 /fzc{T 0/2} Arrêt du 6 juin 2006Ire Cour civile MM. et Mmes les Juges Corboz, président, Klett, Rottenberg Liatowitsch, Favreet Kiss.Greffière: Mme Cornaz. X. ________ et Y.________,recourants, tous les deux représentés par Me Philippe Conod, avocat, contre Z.________,intimée, représentée par Me Raymond Didisheim, avocat, Chambre des recours du Tribunal cantonal vaudois, Palais de justice del'Hermitage, route du Signal 8,1014 Lausanne. procédure civile; appréciation des preuves; droit d'être entendu, (recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre des recours du Tribunalcantonal vaudois du 30 décembre 2005). Faits: A.En octobre 1997, A.________, exploitant d'un café-bar, a engagé Z.________ enqualité de cuisinière, à raison de cinq heures par jour, du lundi auvendredi, pour un salaire mensuel brut de 1'600 fr. A. ________ avait adhéré au contrat collectif d'assurance perte de gain liantl'assurance B.________ (ci-après: B.________) à la Fédération suisse descafetiers, restaurateurs, hôteliers Gastrosuisse (ci-après: Gastrosuisse). Apartir du 1er juin 1998, son personnel avait droit, dès le quatrième jourd'incapacité de travail, à une indemnité journalière perte de gain égale aux80 % du salaire AVS, pendant sept cent vingt jours sur une période de neufcents jours consécutifs. Z.________ était au bénéfice de cette assurance etpayait, en octobre et novembre 1998, une prime de 1,95 % de son salairemensuel brut, à l'époque de 1'850 fr. Selon l'art. 11 du contrat collectifsusmentionné, le contrat d'adhésion prenait fin à la date de la remise del'établissement à un tiers, sous réserve du droit de transfert dansl'assurance individuelle, au sens de l'art. 27 CGA. Le 18 novembre 1998, A.________ a vendu son fonds de commerce à X.________ etY.________, avec prise de possession le 15 janvier 1999, étant précisé queles acquéreurs ne reprenaient aucun passif du vendeur ni les obligationscontractées envers les fournisseurs de ce dernier. Le 23 novembre 1998, A.________ a confirmé à son employée la remise del'établissement et la fin de son emploi pour le 31 décembre 1998, avec lapossibilité, en cas d'accord, de continuer à travailler avec les repreneurs. Selon un certificat médical du 23 décembre 1998, Z.________ a été dansl'incapacité totale de travailler depuis le 16 décembre 1998 jusqu'au 6janvier 1999 inclus. L'incapacité de travail totale a par la suite perduré. Le 16 décembre 1998, X.________ et Y.________ ont engagé Z.________ commecuisinière à mi-temps, à dater de la réouverture du café-bar, le 1er février1999, moyennant une rémunération mensuelle de 1'900 fr. brut, sous déduction- notamment - de la participation de 1,95 % à la prime d'assurance indemnitéen cas de maladie.Le 31 décembre 1998, Z.________ a reçu de A.________ son salaire pour lapériode du 1er au 15 décembre 1998 et des indemnités journalières deB.________, au montant de 629 fr. 30, pour la période du 16au 31 décembre1998. Elle a ensuite reçu de l'assurance 1'505fr.30 pour la période du 1erau 31 janvier 1999. A la réouverture du café, au début du mois de février 1999, Z.________ atenté de reprendre son activité de cuisinière, ce qu'elle a fait jusqu'au 3février 1999. Dès le lendemain, elle ne s'est plus présentée sur son lieu detravail. Le 10 février 1999, les exploitants du café ont congédié Z.________ aveceffet immédiat. Dans une lettre du 12 février 1999, ils ont confirmé lecongé, mais avec effet au 14 février 1999, et ont invité l'employée à leurfaire parvenir le certificat médical relatif à son arrêt maladie depuis le 4du mois. Postérieurement au 31 janvier 1999, la travailleuse n'a reçu aucun salaire niaucune indemnité pour perte de gain. Le 5 mars 1999, B.________ a exposé à Z.________ qu'elle avait été "reprise"par le nouveau tenancier du café dès le 1er février 1999, de sorte qu'elledevait faire valoir ses droits auprès de l'assurance maladie du nouvelemployeur. Le 15 mars 1999, l'employée a informé B.________ qu'elle voulait passer àl'assurance individuelle, conformément aux conditions générales du contratcollectif mentionné précédemment. Elle a réservé ses droits quant auprolongement du contrat d'assurance collective jusqu'à l'échéance du délai decongé étendu en raison de sa maladie, survenue avant le 31 décembre 1998.B.________ n'a pas répondu à cette demande. Simultanément, Z.________ a invité son nouvel employeur à lui communiquer lescoordonnées de l'assureur couvrant sa perte de gain dès le 1er février 1999,invoquant les art. 333 al. 1 et 336c CO. Le 7 avril 1999, les employeurs ont répondu que Z.________ avait"manifestement abandonné son travail", en se référant à une maladie quin'avait pas encore fait, deux mois plus tard, l'objet d'une attestationmédicale.En avril et en juin 1999, Z.________ a invité à nouveau les employeurs à luifaire parvenir les coordonnées de l'assurance maladie couvrant sa perte degain et a remis, le 12 avril 1999, le certificat médical du 23 décembre 1998. Le 22 juin 1999, les employeurs ont répondu qu'aucune assurance n'avait étécontractée, ajoutant, "à toutes fins utiles", que l'employée "entendaitconclure un nouveau contrat (...) alors qu'elle se trouvait déjà en congémaladie depuis la mi-décembre 1998". Le 10 décembre 1999, les employeurs ont confirmé la résolution du contrat"faite en son temps", soit le 12 février 1999, à l'échéance du 14février1999. Le 13 juillet 2000, Z.________ a été mise au bénéfice d'une rented'invalidité (AI) mensuelle de 1'122 fr. dès le 1er décembre 1999, étantprécisé que son incapacité de travail totale datait du 16 décembre 1998. Le 30 octobre 2000, le médecin, auteur du certificat médical du 23décembre1998, a écrit au mandataire de la travailleuse que son état de santé, àmi-décembre 1998, était incompatible avec la poursuite d'une activitélucrative, dont la reprise, au début février 1999, était illusoire. Latravailleuse avait été autorisée de faire un essai pour qu'elle puisse seconvaincre par elle-même de l'impossibilité d'une telle reprise d'activitéprofessionnelle, confirmée par l'évolution néfaste de son affection,entraînant des conséquences "catastrophiques" sur son état de santé. Plusprécisément, l'incapacité de travail totale existait en tout cas dès le 12décembre 1998, mais le début de l'arrêt de travail, fixé au 16 décembre 1998,avait été retenu parce que la travailleuse voulait donner à son employeur lapossibilité de s'organiser. B.Par demande du 7 septembre 1999 adressée à la Cour civile du Tribunalcantonal vaudois, Z.________ a conclu au paiement, par X.________, Y.________et B.________, d'une indemnité journalière de 50 fr. dès le 1er février 1999et aussi longtemps que durerait son incapacité totale de travail, au maximumpendant six cent septante-trois jours. Le 18 février 2000, les conclusions dirigées contre B.________ ont étéreportées devant le Tribunal cantonal des assurances, qui a rejeté la demandede la travailleuse le 13 mars 2002. Toutefois, le droit de Z.________ deréclamer des prestations d'assurance à B.________ était réservé, si ellen'obtenait pas entièrement gain de cause dans le cadre du litige l'opposant àX.________ et Y.________ et pour autant que les règles interdisant lasurindemnisation avec les rentes AI, des art. 28 et 29 let. a CGA, soientrespectées. X. ________ et Y.________ ont appelé en cause A.________, qui est tombé enfaillite le 17 décembre 2002 et qui a été déclaré hors de cause le11novembre 2003. Le 29 mai 2002, Z.________ a remplacé ses conclusions initiales en concluantà la condamnation solidaire de X.________ et Y.________ au paiement de 33'650fr. avec intérêt à 5 % l'an dès le 1erjanvier 2000, cette sommecorrespondant aux indemnités journalières auxquelles elle aurait eu droit sises employeurs l'avaient assurée. Par jugement du 1er février 2005, la Cour civile a condamné X.________ etY.________, solidairement, à payer à Z.________ 20'005 fr. sous déduction descotisations sociales, légales et conventionnelles, avec intérêt à 5 % l'andès le 1er janvier 2000. Elle a retenu en substance que A.________ avait transféré son entreprise, ausens de l'art. 333 CO, à X.________ et Y.________, le 15 janvier 1999. CommeZ.________ s'était trouvée en incapacité totale de travailler dès le 16décembre 1998, le délai de congé, donné le 23 décembre 1998, était suspendupendant la période de protection de nonante jours échéant le 15 mars 1999, etprolongé jusqu'au 31 mars 1999. Il s'ensuivait qu'à la date du transfert del'entreprise, les rapports de travail n'avaient pas encore pris fin etétaient donc passés automatiquement à X.________ et Y.________. Z.________ nes'était pas opposée au transfert, mais avait au contraire conclu avec lesrepreneurs, le 16décembre 1998, un nouveau contrat de travail valable dès le1erfévrier 1999, alors qu'elle se trouvait dans une incapacité de travailprovisoire, qui devait durer jusqu'au 6 janvier 1999. Vu le caractèreprovisoire de celle-ci, l'atteinte à la santé ne pouvait être considéréecomme un élément nécessaire du contrat, de sorte que les futurs employeurs nese trouvaient pas dans une situation d'erreur essentielle au moment de saconclusion, le 16décembre 1998. Il n'y avait pas davantage de dol,Z.________ ignorant, en décembre 1998, que son incapacité de travail seraitdurable et pensant qu'elle pouvait reprendre une activité de cuisinière dèsle 1er février 1999. Le contrat conclu entre les parties le 16 décembre 1998obligeait donc bel et bien X.________ et Y.________. Quoi qu'il en soit, lesrapports de travail étaient de toute manière passés à ceux-ci, avec tous lesdroits et obligations qui en découlaient, au jour du transfert del'entreprise de A.________. A ce moment-là, les repreneurs étaient devenusautomatiquement parties au contrat de travail, comme employeurs. Le 10février 1999, X.________ et Y.________ avaient résilié le contrat avec effetimmédiat, puis reporté au 14février 1999. Pour la cour cantonale, Z.________n'avait pas abandonné son poste, mais avait tenté de prendre son emploi le1er février 1999 avant d'observer qu'en raison de son incapacité de travailelle ne pouvait l'assumer pour cause de maladie. En outre, Z.________ignorait, au moment de la signature du contrat du 16décembre 1998, lecaractère durable de son incapacité de travail. Il s'ensuivait que lelicenciement immédiat qui lui avait été signifié n'était pas justifié. Parconséquent, l'employée avait droit à ce qu'elle aurait gagné si les rapportsde travail avaient pris fin à l'échéance du délai de congé. Dès lors queX.________ et Y.________, qui avaient passé un nouveau contrat de travailavec Z.________, avaient omis de conclure une assurance conférant à leuremployée la couverture prévue par la Convention collective nationale detravail pour les hôtels, restaurants et cafés (ci-après: la conventioncollective), ils devaient fournir eux-mêmes les prestations convenues. Ilseyait de relever que même si les parties n'avaient pas négocié un nouveaucontrat, X.________ et Y.________ auraient de toute manière été liés parl'ancien contrat, dont ils étaient devenus automatiquement parties au momentdu transfert de l'entreprise le 15janvier 1999. En définitive, lesemployeurs devaient payer à leur collaboratrice les montants que l'assurancelui aurait versés, pendant six cent septante-trois jours, jusqu'au 7décembre2000, sous imputation de la rente AI de 1'122 fr. brut par mois servie dès le1er décembre 1999, soit 19'815 fr. brut. De plus, X.________ et Y.________devaient acquitter le salaire des trois jours de février 1999, soit 190fr.,ce qui portait à 20'005 fr. le montant dû à Z.________, sous déduction descotisations sociales, légales et conventionnelles, avec intérêt à 5% l'andès le 1er janvier 2000. En temps utile, les employeurs ont saisi la Chambre des recours du Tribunalcantonal vaudois, en reprochant à la Cour civile l'appréciation arbitrairedes preuves quant au caractère provisoire de l'incapacité de travail deZ.________, en décembre 1998, quant à l'absence d'impossibilité de souscrireune assurance perte de gain pour l'employée et quant à l'abandon de poste du4 février 1999. La juridiction cantonale a rejeté ce recours, dans la mesureoù il était recevable, par arrêt du 30 décembre 2005. C.Parallèllement à un recours en réforme contre le jugement de la Cour civile,X.________ et Y.________ (les recourants) interjettent un recours de droitpublic au Tribunal fédéral contre l'arrêt de la Chambre des recours.Invoquant la violation de leur droit d'être entendus et l'arbitraire dansl'appréciation des preuves, ils concluent à l'annulation de la décisionentreprise, avec suite de frais et dépens. Z. ________ (l'intimée) propose le rejet du recours, sous suite de frais etdépens. Pour sa part, la cour cantonale se réfère aux considérants de sonarrêt. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Conformément à la règle de l'art. 57 al. 5 OJ, il convient en l'espèce detraiter le recours de droit public avant le recours en réforme. 2.2.1Exercé en temps utile (art. 89 al. 1 OJ), dans la forme prévue par la loi(art. 90 al. 1 OJ), pour violation de droits constitutionnels des citoyens(art. 84 al. 1 let. a OJ), contre une décision finale prise en dernièreinstance cantonale (art. 86 al. 1 OJ), par les recourants qui sontpersonnellement touchés par la décision attaquée (art. 88 OJ), le recours dedroit public soumis à l'examen du Tribunal fédéral est en principe recevable. 2.2 Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'examine que lesgriefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés dans l'actede recours (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 130 I 26 consid. 2.1 p. 31, 258consid. 1.3 p. 262). Il n'entre pas en matière sur les griefs insuffisammentmotivés ou sur les critiques purement appellatoires. La partie recourante nepeut se contenter de critiquer la décision attaquée comme elle le ferait dansune procédure d'appel où l'autorité de recours peut revoir librementl'application du droit (ATF 128 I 295 consid. 7a). L'art. 90 al. 1 let. b OJn'autorise pas l'auteur d'un recours de droit public à présenter sa propreversion des événements (ATF129 III 727 consid. 5.2.2). Par ailleurs, leTribunal fédéral se fonde sur l'état de fait tel qu'il a été retenu dansl'arrêt attaqué, à moins que la partie recourante n'établisse que l'autoritécantonale a constaté les faits de manière inexacte ou incomplète en violationde la Constitution fédérale (ATF 118 Ia 20 consid. 5a). 3.Les recourants font valoir, pour chacun des trois griefs déjà soulevés eninstance cantonale (cf. consid. B in fine), simultanément la violation dudroit d'être entendu et l'arbitraire dans l'appréciation des preuves. Il y alieu de commencer par examiner le mérite du premier de ces moyens. 3.1 S'agissant du caractère provisoire ou durable de l'incapacité de travailde l'intimée, les recourants se plaignent en réalité d'une appréciationarbitraire des preuves, voire d'une application arbitraire de l'art. 444 al.1 ch. 3 du code de procédure civile du canton de Vaud du 14décembre 1966(ci-après: CPC/VD),
et non pas de la violation de leur droit d'être entendus,dans la mesure où ils reconnaissent que la cour cantonale "a finalementstatué - bien que brièvement - sur ce moyen, au fond". Dès lors que lesrecourants admettent que les précédents juges se sont déterminés sur leursargumentations, bien qu'imparfaitement à leurs yeux, une violation du droitd'être entendu, au sens propre et restreint de cette notion (cf. ATF 129 II497 consid. 2.2 p. 504 s. et les arrêts cités) ne peut être retenue, alorsque la question d'une appréciation arbitraire des preuves, au sens de l'art.9Cst., ou d'un déni de justice matériel tombant sous le coup de la mêmedisposition constitutionnelle, peut être envisagée. De plus, même si les recourants ont indiqué que le Tribunal cantonal avaitstatué "brièvement" sur le moyen soulevé, ils n'ont pas davantage fait valoirla violation de leur droit d'être entendus, découlant de l'art. 29 al. 2Cst., sous l'angle de la prohibition de la motivation insuffisante, telle quela jurisprudence l'a précisée (cf. ATF 129 I 232 consid. 3.2 p. 236 et lesarrêts cités). 3.2 Concernant l'impossibilité de souscrire une assurance perte de gain pourl'employée, en raison de son incapacité de travail durable existant au momentde la conclusion envisagée d'une police, les recourants se plaignentd'arbitraire dans l'application de l'art. 4 al. 2 CPC/VD, quant aux faitsnotoires, ainsi que dans l'appréciation des éléments sur la base desquels ilsont déclaré qu'il leur eût été impossible de souscrire une telle assurance.Bien que les recourants mentionnent la violation de leur droit d'êtreentendus, cet argument ne fait l'objet d'aucune motivation au sens de l'art.90 al. 1 let. b OJ (cf.consid. 2.2), de sorte qu'il n'y a pas lieu d'entreren matière sur ce point. 3.3 S'agissant du reproche d'abandon de poste, les recourants se plaignent dela violation de leur droit d'être entendus, par défaut de motivation quant aurejet d'éléments de preuve selon lesquels, à leur avis, l'intimée ne s'étaitplus présentée sur son lieu de travail dès le 4février 1999, sans eninformer ses employeurs ni obtenir de son médecin un certificat médical àleur intention. Malgré le caractère sommaire du consid. 4 de l'arrêt cantonal, on peutcomprendre de celui-là que les précédents juges ont tiré de la lettre deconfirmation de congé du 12 février 1999 que l'intimée était empêchée detravailler pour des raisons médicales, de sorte que le grief d'abandoninjustifié d'emploi, non invoqué au moment des faits, ne saurait être admis.Les indications succinctes de la cour cantonale donnent aux recourants - et àl'autorité de contrôle - le motif jugé déterminant par celle-là, d'une façonsuffisante pour que les recourants aient pu développer leur reproched'appréciation arbitraire des preuves dans la présente procédure, de mêmequ'ils ont pu faire valoir leur argumentation, quant à une fausse applicationde l'art. 337 al. 1 CO, dans le cadre du recours en réforme instruitparallèlement. Dans ces conditions, aucune violation de l'art. 29 al. 2 Cst.ne peut être constatée. 4.Il convient ensuite d'examiner le reproche d'appréciation arbitraire despreuves en regard des trois situations que les recourants ont invoquées à cetitre. 4.1 D'après la jurisprudence, une décision est arbitraire lorsqu'elle estmanifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principejuridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le sentiment dela justice et de l'équité (ATF 132 III 209 consid. 2.1; 131 I 57 consid. 2);il ne suffit pas qu'une autre solution paraisse concevable, voire préférable(ATF 132 III 209 consid. 2.1; 129 I 8 consid.2.1); pour que cette décisionsoit annulée, encore faut-il qu'elle se révèle arbitraire, non seulement dansses motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 132 III 209 consid. 2.1; 131 I217 consid. 2.1). Il appartient à la partie recourante de démontrer, par uneargumentation précise, en quoi la décision incriminée est arbitraire (ATF 130I 258 consid. 1.3 p. 262). Dans la mesure où l'arbitraire est invoqué en relation avec l'établissementdes faits, il convient de rappeler que le juge dispose d'un large pouvoirlorsqu'il apprécie les preuves (arrêt 4P.246/2005 du 20 mars 2006, consid.4.1; 4P.275/2005 du 8 février 2006, consid. 4.1). La partie recourante doitainsi expliquer dans quelle mesure le juge a abusé de son pouvoird'appréciation et, plus particulièrement, s'il a omis, sans aucune raisonsérieuse, de prendre en compte un élément de preuve propre à modifier ladécision attaquée, s'il s'est manifestement trompé sur son sens et sa portéeou encore si, en se fondant sur les éléments recueillis, il en a tiré desconstatations insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1; 127 I 38 consid. 2a p.41). Il ne suffit pas que la partie recourante invoque seulement quelquesmoyens de preuve dont elle souhaiterait qu'ils aient une portée différente decelle retenue dans l'arrêt attaqué. Le recours de droit public n'étant pas unappel, il n'appartient pas au Tribunal fédéral de substituer sa propreappréciation à celle de l'autorité cantonale (cf.ATF 128 I 295 consid. 7a),de sorte que la partie recourante ne peut discuter librement les faits et ledroit en présentant sa propre version des événements (cf.ATF 129 III 727consid. 5.2.2 in fine). Lorsque la partie recourante invoque une violation arbitraire du droitcantonal, elle doit indiquer avec précision quelle est la dispositioncantonale qui aurait été violée et l'examen se limite à cette question (ATF128 I 273 consid. 2.1 p. 275 s.). Le Tribunal fédéral ne revoit l'applicationdu droit cantonal que sous l'angle de l'arbitraire (ATF 131 I 217 consid.2.1; 128 I 177 consid. 2.1; 128 II 311 consid. 2.1).4.2 Les recourants se plaignent de ce que le Tribunal cantonal a déduit ducertificat médical du 23 décembre 1998 que l'incapacité de travail n'étaitque provisoire, la reprise du travail étant envisagée pour le 6 janvier 1999,alors que, par la suite, le 30 octobre 2000, le même médecin avait attestéqu'il était illusoire pour l'intimée de reprendre une activité de cuisinièreau début février 1999, ce qu'il avait signalé à cette dernière quelquessemaines avant le 22 avril 1999. Certes, il apparaît de ces divers documents versés à la procédure que, dès leprintemps 1999, le médecin traitant avait indiqué à sa cliente qu'elle nepourrait plus jamais travailler à 100% comme cuisinière, circonstance quis'est avérée par la suite, avec la reconnaissance de l'invalidité del'intéressée. Dans la mesure où le médecin avait laissé l'intimée tenter dereprendre son travail le 1er février 1999, pour qu'elle se convainque parelle-même de l'impossibilité d'accomplir une telle activité professionnelle,il faut s'interroger sérieusement sur la force probante du certificat médicaldu 23 décembre 1998, prévoyant une incapacité totale jusqu'au 6 janvierseulement. S'agissant toutefois d'examiner si l'intimée ne pouvait proposerses services à ses nouveaux employeurs à mi-décembre 1998 pour le 1er février1999, force est de constater que, sur la base de l'attestation médicalelitigieuse, l'intimée pouvait se croire apte à continuer d'exercer dans sabranche, puisque son arrêt de travail était limité au 6 janvier 1999. Ainsi,jusqu'à la reprise du travail le 1er février, et au vu des difficultésrencontrées à cette occasion, jusqu'au 3 février 1999, l'intimée pouvaitpenser que son affection n'était que temporaire, même si elle a été informée,quelques semaines avant le 22 avril 1999, qu'elle était définitivementincapable de pratiquer l'activité de cuisinière, pour des raisons de santé.Dans ces conditions, malgré un développement rapide de l'affection dontsouffrait la travailleuse, cette dernière pouvait croire, en décembre 1998 etjusqu'au début février 1999, que son incapacité n'était que momentanée, à lalecture du certificat du 23décembre 1998. Les considérations retenues parles précédents juges, s'avèrent soutenables, en particulier dans laperspective où se trouvait l'intimée, à mi-décembre 1998, lorsqu'elle a faitses offres d'emploi aux nouveaux exploitants du café-bar. Le griefd'appréciation arbitraire des preuves, au vu de la chronologie et descirconstances rappelées ci-dessus, doit en conséquence être écarté. 4.3 Les recourants ont ensuite estimé que la Chambre des recours avaitarbitrairement appliqué l'art. 4 al. 2 CPC/VD, en déniant au refussystématique des assurances perte de gain de prendre en charge des risquesdéjà concrétisés au moment de la conclusion d'une police la qualité de "faitsnotoires". Selon la jurisprudence, les faits notoires, qu'il n'est pas nécessaired'alléguer ni de prouver (cf. ATF 130 III 113 consid. 3.4 p. 121 et lesarrêts cités), sont ceux dont l'existence est certaine au point d'emporter laconviction du juge, qu'il s'agisse de faits connus de manière générale dupublic (allgemeine notorische Tatsachen) ou seulement du juge, par exempleparce que la preuve en a été rapportée dans d'autres procès (amtskundige odergerichtskundige Tatsachen), à charge pour ce dernier de le signaler auxparties pour garantir leur droit d'être entendues (Vogel/Spühler, Grundrissdes Zivilprozessrechts, 8e éd., Berne 2006, n. 17 p. 255; Hohl, Procédurecivile, tome I, Berne 2001, n. 945 p. 182 s.; Habscheid, SchweizerischesZivilprozess- und Gerichtsorganisationsrecht, 2e éd., Bâle 1990, n.636p.381). Dans le même sens, la jurisprudence et la doctrine cantonalesconsidèrent comme faits notoires les faits non particuliers à la cause,connus de chacun parce qu'ils résultent de l'expérience commune ou sont denotoriété générale et manifeste, comme par exemple le prononcé d'une faillitepubliée dans la FAO, mais pas la capacité de travail d'une personne atteintedans sa santé, ni le taux de change des monnaies étrangères (cf.Poudret/Haldy/Tappy, Procédure civile vaudoise, 3e éd., Lausanne 2002, n. 7ad art. 4 CPC/VD). Dans le cas présent, la cour cantonale a considéré que n'était pas notoire,au sens de l'art. 4 al. 2 CPC/VD, le fait que les compagnies d'assurancesperte de gain auraient refusé d'entrer en matière sur la passation d'uncontrat avec un travailleur déjà atteint d'une incapacité durable au momentde la conclusion de la police d'assurance. Certes, une telle situation peutentraîner l'exclusion du risque couvert, en raison d'une maladiepréexistante, au moment de l'admission d'une personne dans l'assurance (art.69 LAMal; ATF 127 III 235 consid. 2c p. 238 et les références citées). Ceprincipe est repris dans les dispositions pertinentes de la conventioncollective nationale de travail pour les hôtels, restaurants et cafés, qui neprévoient pas impérativement l'exclusion du risque couvert par une maladiepréexistante, mais offrent la possibilité à l'assureur de le faire. Aussi, enjugeant que les pratiques des assurances perte de gain, relativement àl'émission de réserve pour les employés d'une petite entreprise, n'étaientpas connues, et qu'une certaine marge de manoeuvre existait à cet égard dansla convention collective régissant les parties, le Tribunal cantonal n'a pasarbitrairement considéré qu'une pratique généralisée d'exclusion de ce risquen'était pas notoire. Quoique restrictive, l'interprétation de l'art. 4 al. 2CPC/VD par la cour cantonale demeure soutenable et échappe en conséquence augrief d'arbitraire. 4.4 Enfin, les recourants reprochent à celle-ci d'avoir arbitrairement omisde constater que l'intimée ne leur avait plus donné de nouvelles du 4 février1999 jusqu'à mi-mars 1999, cette circonstance constituant un abandond'emploi. Si la qualification juridique de cette situation - abandon d'emploi au sensde l'art. 337d CO ou absence excusable en raison de la maladie - relève del'application du droit fédéral et de la procédure introduite par le recoursen réforme parallèle, le fait que les précédents juges ont relevé quel'intimée s'était absentée pour cause de maladie repose sur l'appréciation dedeux pièces versées à la procédure. Dans la première, soit la lettre de congédu 10 février 1999, les recourants n'ont pas reproché à leur ancienneemployée l'abandon de poste. Dans la seconde, soit la confirmation de congédu 12 février 1999 à l'échéance du 14 février 1999, les recourants ont invitél'intimée à leur faire parvenir le certificat médical relatif à son arrêtmaladie depuis le 4février 1999. Dans ces conditions, vu l'énoncé de cesdeux documents, et le contexte général de la cause où l'état de santé del'intimée joue un rôle déterminant, il n'était pas arbitraire de retenir quel'absence de l'intimée, et son manque de réaction entre le 4 février et lami-mars 1999 étaient dus à l'état de santé de cette dernière. A cet égard, lerecours est également infondé, ce qui entraîne en définitive son rejet. 5.Comme la valeur litigieuse, selon les prétentions de l'intimée à l'ouverturede l'action (ATF 115 II 30 consid. 5b p. 41), dépasse 30'000fr., laprocédure n'est pas gratuite (art. 343 al. 2 et 3 CO). Compte tenu de l'issuedu litige, les frais et dépens seront mis à la charge des recourants,solidairement entre eux (art. 156 al. 1 et 7 ainsi que 159 al. 1 et 5 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge des recou-rants,solidairement entre eux. 3.Les recourants, débiteurs solidaires, verseront à l'intimée une indem-nité de2'500 fr. à titre de dépens. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des par-ties et à laChambre des recours du Tribunal cantonal vaudois. Lausanne, le 6 juin 2006 Au nom de la Ire Cour civiledu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.40/2006
Date de la décision : 06/06/2006
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-06-06;4p.40.2006 ?
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