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06/06/2006 | SUISSE | N°4C.97/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 06 juin 2006, 4C.97/2006


{T 0/2}4C.97/2006 /ech Arrêt du 6 juin 2006Ire Cour civile MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Favre et Kiss.Greffier: M. Ramelet. X. ________ SA,défenderesse et recourante, représentée par Me Patrick Blaser, contre A.________,demandeur et intimé, représenté par Me Philippe Juvet. licenciement abusif; bonus annuel, plan d'intéressement, recours en réforme contre l'arrêt de la Cour d'appel dela juridiction des prud'hommes du canton de Genève du 1er février 2006. Faits: A.A.a Par contrat de travail du 1er mai 1997, A.________ (le demandeur),ressortissant grec né en 1962, a étÃ

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{T 0/2}4C.97/2006 /ech Arrêt du 6 juin 2006Ire Cour civile MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Favre et Kiss.Greffier: M. Ramelet. X. ________ SA,défenderesse et recourante, représentée par Me Patrick Blaser, contre A.________,demandeur et intimé, représenté par Me Philippe Juvet. licenciement abusif; bonus annuel, plan d'intéressement, recours en réforme contre l'arrêt de la Cour d'appel dela juridiction des prud'hommes du canton de Genève du 1er février 2006. Faits: A.A.a Par contrat de travail du 1er mai 1997, A.________ (le demandeur),ressortissant grec né en 1962, a été engagé comme "Relationship Manager",i.e. gérant de fortune, par X.________ SA, succursale de Genève, (ladéfenderesse), filiale du groupe américain Y.________Corporation. Lesrapports de travail ont débuté le 1er septembre 1997. Le salaire de base dutravailleur, qui se montait initialement à 130'400 fr., plus 9'400 fr. defrais de représentation, s'est élevé à 160'400 fr. à partir du 1er mars 2001,sans compter les frais de représentation. Le contrat de travail prévoyait enparticulier que le demandeur était "eligible to participate" à un programmede bonus incitatif (Incentive Compensation Plan, ICP), comportant pour moitiéun "bonus structuré", pour l'autre un "bonus discrétionnaire". Audit contratétait joint un "Employee handbook", faisant office de conditions généralesd'emploi, lequel précisait, sous l'intitulé "Bonus/ Stock Option Plans", queles cadres pouvaient "participer à un programme de bonus ainsi qu'à unprogramme d'acquisition d'options sur actions, dépendant du résultat del'entreprise et de la performance individuelle". A. ________ a été incorporé au "Département Clientèle grecque" de ladéfenderesse. A.b Le 15 juin 1999, le demandeur s'est vu offrir aux conditions du "StockOption Plans" 4'500 options sur les actions de la société-mèreY.________Corporation. Ces options ne pouvaient être exercées que de façondifférée, soit à raison de tranches de 20 %, la première venant à maturité enjuin 2000, la deuxième en juin 2001, la troisième en juin 2002, la quatrièmeen juin 2003 et la cinquième en juin 2004. La défenderesse a déduit latotalité de l'impôt à la source dû en raison de l'octroi des options, par42'651 fr., du salaire du travailleur de décembre 1999, après lui avoiraccordé des avances sur salaires. Au titre de bonus ICP, le demandeur a encaissé 18'250 fr. en 1998, 29'065 fr.en 1999 et 34'000 fr. en 2000, sans qu'il soit distingué entre la partie dubonus qui était "structurée" et celle qui était "discrétionnaire". A.c Le 1er août 2000, la défenderesse, en prévision du départ à la retraitedu chef du département grec dans lequel travaillait le demandeur, a engagéB.________, né en 1958, qui a pris la direction de ce département à compterdu 1er avril 2001. Ce dernier a imprimé audit département un style "plusorienté vers la productivité des portefeuilles". Il a réparti la masse sousgestion laissée par son prédécesseur et un démissionnaire au profit de deuxgérants fraîchement engagés, rompant avec la pratique constante d'alors, cequi a provoqué un grand mécontentement. En août 2001, B.________ a demandé à tous les gérants de son département decommuniquer à sa secrétaire la liste de leurs clients les plus importants,afin que X.________ Athènes puisse contacter directement lesdits clients - aunombre de 200 à 300 - sous plis postaux banalisés. Cette manière de fairetranchait avec celle de son prédécesseur, très à cheval en matière deconfidentialité. Le style de management de B.________ a entraîné le départ successif de troisgérants, la démission d'une assistante, le transfert interne d'une autre etle licenciement de deux secrétaires. Il a été retenu que B.________ se montrait particulièrement dur avec ledemandeur, qu'il discriminait dans l'attribution des portefeuilles et destâches à responsabilité, harcelait constamment et dont il souhaitait ledépart. En janvier 2002, A.________ s'est plaint oralement auprès de B.________ de larépartition inégale des portefeuilles et du fait qu'un gérant de fortune deX.________ Athènes se soit permis d'entrer en contact en Grèce avec un de sesclients. Ces entretiens se sont mal déroulés, à telle enseigne que lesprénommés n'ont plus communiqué que par courriels. B.________ s'est alors misà rédiger des mémos faisant état du travail insatisfaisant du demandeur,qu'il a glissés dans le dossier personnel du travailleur, à l'insu decelui-ci. Le 11 juillet 2002, A.________ a porté les difficultés qui l'opposaient àB.________ auprès du service de "Compliance", lequel a ouvert une enquêteinterne, qui a abouti à la conclusion que ce dernier était apte à gérer ledépartement dont il avait la charge. La défenderesse a également soumis à sonréviseur externe la question de la compatibilité avec le secret bancaire del'envoi d'une liste de clients à sa filiale à Athènes. Le réviseur, aprèsavoir consulté la Commission fédérale des banques, a blanchi B.________ dusoupçon de violation du secret bancaire, ce dont il a fait part à ladéfenderesse le 28août 2002.Par pli du 30 août 2002, la défenderesse, sous la plume de Z.________,supérieur direct de B.________, a licencié le demandeur pour la fin octobre2002, en le libérant immédiatement de son obligation de travailler. En raisond'une incapacité de travail de A.________ survenue durant le délai de congé,les rapports contractuels ont pris fin le 30 novembre 2002. Jusqu'à cettedate, le travailleur a touché son salaire de base. B.Le 3 décembre 2002, le demandeur a ouvert action contre la défenderessedevant la juridiction des prud'hommes genevoise et requis paiement de 80'200fr. à titre d'indemnité pour licenciement abusif, 50'000fr. pour atteinte àla personnalité, 50'000 fr. pour tort moral, 25'046 fr. à titre de bonus et196'662 fr.40 à titre de "compensation liée aux bonus". A l'audienced'introduction de la cause, le demandeur a réclamé que les susdites sommesportent intérêts à 5 % l'an dès le 30 août 2002. Par jugement du 10 novembre 2003, le Tribunal des prud'hommes a entièrementdébouté le demandeur. A. ________ a appelé de ce jugement devant la Cour d'appel de la juridictiondes prud'hommes du canton de Genève. Il a sollicité que la défenderesse soitcondamnée à lui payer 80'200 fr. comme indemnité de licenciement abusif et22'158 fr. à titre de quote-part du bonus 2002 pour la période du 1er janvierau 31 octobre 2002. Il a également conclu à ce que la défenderesse l'autoriseà exercer les 2'573,28 options "not vested au 31 octobre 2002","subsidiairement, (qu'elle lui verse) le montant correspondant à la valeur deces options au 31octobre 2002, soit Fr. 42'737,70 au minimum". Par arrêt du 1er février 2006, la Cour d'appel a annulé le jugement précitéet, statuant à nouveau, condamné la défenderesse à payer au demandeur lasomme brute de 22'587 fr.50, sous déduction des charges sociales, et la sommenette de 60'000 fr., le tout avec intérêts à 5% l'an dès le 3 décembre 2002.En substance, l'autorité cantonale a retenu qu'en se plaignant auprès deB.________, puis auprès du service de "Compliance" du traitementdiscriminatoire et vexatoire dont il faisait l'objet, le demandeur avait faitvaloir de bonne foi une prétention contractuelle, de sorte que sonlicenciement prononcé quelques semaines seulement après la saisine du"Compliance" était abusif au sens de l'art. 336 al. 1 let. d CO, ce quijustifiait l'octroi d'une indemnité de 40'000 fr. net représentant troissalaires mensuels de base.La cour cantonale a admis, en se référant à l'arrêt 4C.325/2002 du 24janvier2003, que les bonus ICP versés au demandeur depuis 1998 devaient êtreconsidérés comme des salaires variables, qui s'ajoutaient au salaire de base.Se fondant sur la moyenne des montants touchés à ce titre par le travailleuren 1998, 1999 et 2000 - qui ne faisaient pas le départ entre bonus"structuré" et bonus "discrétionnaire" -, elle a octroyé à celui-ci pourl'année 2002 une somme de 22'587 fr.50, compte tenu encore que le demandeurn'avait conclu à l'allocation d'un bonus que pour les dix premiers mois del'année en cause. S'agissant du plan d'options sur actions, les juges genevois ont déclaréliminairement que le travailleur, qui n'était plus employé de la défenderessedepuis la fin novembre 2002, ne remplissait plus les conditions pour exercerles 4e et 5e tranches de la dotation d'options de 1999. Ce pland'intéressement n'était pas un élément de salaire mais une rétributionspéciale comparable à une gratification. La Cour d'appel a posé que si ledemandeur n'avait pas été licencié en août 2002, il aurait su préserver sesrapports de travail avec la défenderesse jusqu'en automne 2003, ce qui luiaurait permis d'exercer la 4e tranche du plan d'options et de percevoirenviron 20'000 fr. En revanche, il n'en allait pas de même pour la 5e tranchedes options, lesquelles seraient venues à maturité en juin 2004. Faisantapplication de l'art. 156 CO, qui dispose que la condition (soit en l'espècele maintien des rapports de travail) dont l'avènement a été empêché au méprisdes règles de la bonne foi (in casu par le congé abusif donné par ladéfenderesse) est réputée réalisée, l'autorité cantonale a condamné cettedernière à payer au travailleur le montant net de 20'000 fr., soit cequ'aurait rapporté au demandeur la 4e tranche de ses options. C.La défenderesse exerce un recours en réforme au Tribunal fédéral contrel'arrêt cantonal. Elle conclut principalement à ce que le demandeur soitdébouté de toutes ses prétentions, le jugement de première instance étantconfirmé. Subsidiairement, elle requiert l'annulation de l'arrêt du 1erfévrier 2006, la cause étant renvoyée à la cour cantonale pour nouvel examen. L'intimé propose le rejet du recours. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions libératoires etdirigé contre un arrêt final rendu en dernière instance cantonale par untribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ) sur une contestation civile dont lavaleur litigieuse atteint le seuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ), le recours enréforme est en principe recevable, puisqu'il a été déposé en temps utile(art. 54 al. 1 OJ) dans les formes requises (art. 55 OJ). Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral (art. 43 al.1 OJ). Il ne permet en revanche pas d'invoquer la violation directe d'undroit de rang constitutionnel (art. 43 al. 1 2e phrase OJ) ou la violation dudroit cantonal (ATF 127 III 248 consid. 2c et les arrêts cités). Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire sonraisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décisionattaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aientété violées, qu'il y ait lieu de rectifier des constatations reposant sur uneinadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter lesconstatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu comptede faits pertinents, régulièrement allégués et clairement établis (art. 64OJ; ATF 130 III 102 consid. 2.2, 136 consid.1.4). Dans la mesure où unepartie recourante présente un état de fait qui s'écarte de celui contenu dansla décision attaquée, sans se prévaloir avec précision de l'une desexceptions qui viennent d'être rappelées, il n'est pas possible d'en tenircompte (ATF 130 III 102consid. 2.2, 136 consid. 1.4). Il ne peut êtreprésenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyensde preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). Le recours n'est pas ouvertpour se plaindre de l'appréciation des preuves et des constatations de faitqui en découlent (ATF 130 III 102 consid. 2.2 in fine, 136 consid. 1.4; 129III 618 consid.3). Le Tribunal fédéral ne saurait aller au-delà des conclusions des parties, quine peuvent en prendre de nouvelles (art. 55 al. 1 let. b OJ), mais il n'estpas lié par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al. 1 OJ), ni parl'argumentation juridique retenue par la cour cantonale (art. 63 al. 3 OJ;ATF 130 III 136 consid. 1.4; 128 III 22 consid. 2e/cc in fine). 2.Invoquant une violation de l'art. 322d CO, la recourante reproche àl'autorité cantonale d'avoir qualifié d'élément de salaire, et non degratification, le bonus annuel encaissé par le demandeur de 1998 à 2001 etd'avoir admis que celui-ci avait un droit de nature contractuelle d'obtenirle bonus également pour l'année 2002, au prorata de la durée des rapportscontractuels. Dans un arrêt 4C.325/2002 du 24 janvier 2003 rendu dans une cause où ladéfenderesse était partie, le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasiond'examiner le programme de bonus ICP mis au point par la recourante. Il ajugé que la partie "structurée" du bonus avait le caractère d'un élément desalaire variable (cf. consid. 3 de l'arrêt susmentionné). Il suit de là quela cour cantonale s'est fondée à bon droit sur ce précédent pour reconnaîtreque, dans le cas présent aussi, le bonus ICP devait être assimilé à unsalaire variable, de sorte que le demandeur pouvait déduire une prétention deson contrat pour le toucher en 2002. Les arguments que la défenderesse présente contre cette opinion tombent àfaux. Elle fait principalement référence à l'ATF 129 III 276, qui avait qualifié,au consid. 2.1, les bonus versés à un employé de banque de gratifications.Mais les deux espèces ne sont pas comparables. Alors que dans le précédent enquestion il a été jugé que le versement de gratifications n'avait pas étéconvenu entre les parties, en particulier tacitement, il résulte in casu del'état de fait définitif (art. 63 al. 2 OJ) que le demandeur, à teneur de soncontrat et de l'"Employee handbook" qui y était joint, était "eligible" pourparticiper au plan de bonus incitatif (ICP). Or, dès 1998, la défenderesse aconsidéré que le demandeur était bien digne d'y participer puisqu'elle lui aversé un tel bonus chaque année. La recourante objecte que les fiches de salaire accompagnant le versement dubonus annuel contenaient une réserve soulignant le caractère purementdiscrétionnaire du bonus. Pourtant, dans la cause 4C.325/2002 déjà citée, oùle paiement du bonus de chaque année était opéré avec des réservessimilaires, le Tribunal fédéral a estimé, au consid. 3.3, que la réserve enquestion, d'après le principe de la confiance, ne portait pas sur leversement du bonus "structuré". Il en va de même dans le cas présent.Enfin, le fait que le bonus, en valeur, ne se montait en moyenne qu'à 20 % dela rémunération annuelle ne fait pas obstacle à son assimilation à un élémentdu salaire du travailleur. La juridiction fédérale a d'ailleurs posé que lebonus alloué qui dépasse régulièrement le salaire convenu perd son caractèreaccessoire, si bien qu'il ne s'agit plus d'une gratification (ATF 129 III 276consid. 2.1 p. 280; arrêt 4C.426/2005 du 28 février 2006 consid. 5.1). Dureste, dans l'affaire 4C.325/2002, les bonus progressifs alloués à ungestionnaire de fortune, qui étaient passés de 5'000 fr. à 90'000 fr. entre1990 et 1997, étaient largement inférieurs à son salaire annuel, lequel avaitatteint 225'000 fr. en 1998, ce qui n'avait pas empêché
le Tribunal fédérald'admettre que leur paiement avait un caractère obligatoire en faveur dutravailleur. Il n'y a pas trace d'une violation de l'art. 322d CO. 3.La recourante soutient que la Cour d'appel a enfreint l'art. 336 CO enconsidérant que le congé qu'elle a donné au demandeur était abusif. 3.1 Aux termes de l'art. 336 al. 1 let. d CO, le congé est abusif lorsqu'ilest donné par une partie parce que l'autre partie fait valoir de bonne foides prétentions résultant du contrat de travail. Cette disposition vise lecongé-représailles (Brunner/Bühler/Waeber, Commentaire du contrat de travail,3e éd., n. 7 ad art. 336 CO) et tend en particulier à empêcher que lelicenciement soit utilisé pour punir le salarié d'avoir fait valoir de bonnefoi des prétentions auprès de son employeur, peu important du reste qu'ellessoient réellement fondées (arrêt 4C.237/2005 du 27 octobre 2005 consid. 2.2et les nombreuses références). S'il n'est pas nécessaire que les prétentionsémises par le travailleur aient été seules à l'origine de la résiliation, ildoit s'agir néanmoins du motif déterminant. En d'autres termes, ce motif doitavoir essentiellement influencé la décision de l'employeur de licencier; ilfaut ainsi un rapport de causalité entre les prétentions émises et le congésignifié au salarié (arrêt 4C.27/1992 du 30 juin 1992 consid. 3a, in: SJ 1993p. 360). L'incidence respective des divers motifs de résiliation en concoursest une question qui relève de la causalité naturelle (ATF 130 III 699consid. 4.1 p. 702). Sous réserve des cas où le juge a ignoré cette exigenceou méconnu cette notion juridique, la causalité naturelle relève du fait, desorte qu'elle ne peut être revue dans le cadre d'un recours en réforme (ATF130 III 699 consid. 4.1 p.702 s.). Il en va de même des motifs de congéretenus (ATF 130 III 699 consid. 4.1 p. 702 in fine; consid. 3.2 non publiéde l'ATF 131 III 535). 3.2 La cour cantonale a acquis la conviction que la défenderesse avaitlicencié le demandeur pour deux motifs: d'une part, il s'était plaint àréitérées reprises auprès de son supérieur direct, puis auprès du service de"Compliance" à propos de la répartition prétendument discriminatoire desportefeuilles laissées par les gérants sortants et de l'hostilité constantedont il faisait l'objet; d'autre part, il avait suggéré que son supérieurdirect pouvait avoir enfreint le secret bancaire. Appréciant l'enchaînementdes événements, l'autorité cantonale a retenu que le demandeur, en s'élevantcontre le traitement vexatoire qui lui était réservé dans la banque, avaitémis de bonne foi une prétention contractuelle et qu'il était en outre fondéà mettre en doute la licéité de la transmission, décidée et exécutée parB.________, d'une liste de clients de la défenderesse à sa filiale sise dansla capitale hellène. Elle a admis qu'il y avait un lien de causalité entreles démarches entreprises de bonne foi par le demandeur et le congé qui lui aété signifié le 30 août 2002. La recourante fait valoir que B.________ avait pris la décision de se séparerdu demandeur le 3 juillet 2002, soit avant que celui-ci ne saisisse leservice de "Compliance". Cependant, il n'a pas été constaté que B.________ait communiqué une telle décision à l'intimé à la date invoquée. De toutemanière, il résulte des faits déterminants que le prénommé n'avait pasqualité pour prendre une décision de licenciement, à l'inverse de Z.________qui a congédié le travailleur après aboutissement de l'enquête interne menéepar le "Compliance" et sur le vu de l'avis du réviseur externe quant à laviolation par B.________ du secret bancaire. Lorsque la défenderesse prétend que les vrais motifs du licenciement dudemandeur ont trait à sa mauvaise intégration au sein du "DépartementClientèle grecque" et aux tensions qu'il y a provoquées, elle présente uneversion des faits de son cru. Or tant les motifs de congé retenus que leurincidence respective dans la décision de congé sont des questions soustraitesà la censure de la juridiction de réforme.Le moyen doit être rejeté dans la faible mesure de sa recevabilité. 4.Dans son dernier grief, la recourante invoque une violation des art. 42 al.2, 152, 156 et 336a CO. A l'en croire, la Cour d'appel aurait transgressétoutes ces dispositions en octroyant 20'000 fr. à l'intimé, du fait que, s'iln'avait pas été congédié abusivement en 2002, il aurait préservé sesrelations de travail jusqu'en automne 2003, ce qui lui aurait permisd'exercer la 4e tranche de ses options.La défenderesse expose que le raisonnement de la cour cantonale est vicié, dumoment que le demandeur n'aurait pas été licencié abusivement. Comme on vientde le voir, les juges cantonaux n'ont en rien violé le droit fédéral enretenant que le congé avait été donné de manière abusive. C'est en réalité ladéduction de la recourante, reposant sur une prémisse erronée, qui défie lalogique. La défenderesse, changeant son fusil d'épaule, déclare que même si le congédevait être considéré comme abusif, la protection du travailleur résultantdes dispositions impératives du droit du travail tombe lorsque l'employé, enparticipant à un plan d'intéressement, agit principalement comme uninvestisseur cherchant à réaliser un gain en capital. La recourante faitréférence aux ATF 131 III 615 consid. 4 et 130 III 495 consid. 4.2.2. En pureperte. En effet, l'autorité cantonale n'a pas fait application des normesimpératives du droit du travail, mais a jugé que les modalités du pland'intéressement comportaient une condition suspensive selon laquelle lebénéficiaire devait être encore au service de la défenderesse pour exercer latranche d'options venue à maturité. Elle a admis que la recourante avaitfrauduleusement empêché l'avènement de cette condition en licenciantabusivement le travailleur, de sorte que la fiction de l'art. 156 CO devaitentrer en jeu. La recourante ne s'en prend aucunement à cette argumentation. Les auteurs qui se sont penchés récemment sur cette problématique appuientla thèse de la Cour d'appel (cf. Dominique Portmann, Mitarbeiterbeteiligung:Mitarbeiteraktien und Mitarbeiteroptionen im schweizerischen Arbeitsrecht,Bern 2005, p. 205 ss, not. p. 213; Thomas Koller , Die miet- undarbeitsrechtliche Rechtsprechung des Bundesgerichts im Jahr 2004, ZBJV 2005,p. 309 ss, spéc. p. 334). Le Tribunal fédéral n'a pas encore tranché laquestion. Il a toutefois reconnu la possibilité pour le travailleur deréclamer à son ancien employeur la réparation intégrale du préjudice qu'il asubi en raison de la résiliation anticipée des rapports de travail, dans lamesure où l'employeur, en violant fautivement le contrat de travail, avaitdonné à l'employé un juste motif de résiliation (ATF 130 III 495 consid.4.2.4 p.502). Cela doit valoir d'autant plus si l'employeur, comme enl'occurrence, met fin abusivement aux rapports de travail.Partant, la Cour d'appel n'a pas transgressé le droit fédéral en allouant audemandeur une indemnité de 20'000 fr. sur la base des art. 42 al.2, 152 et156 CO. 5.Le recours doit donc être rejeté. Comme la valeur litigieuse, déterminée par les prétentions de la demanderesseà l'ouverture de l'action (ATF 115 II 30 consid. 5b p. 41), dépasse 30'000fr., la procédure n'est pas gratuite (art. 343 al. 2 et 3CO). A considérer l'issue de la querelle, les frais et dépens seront mis à lacharge de la défenderesse, qui succombe (art. 156 al. 1 et 159 al.1OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Un émolument judiciaire de 4'500 fr. est mis à la charge de la défenderesse. 3.La défenderesse versera au demandeur une indemnité de 5'500 fr. à titre dedépens. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à laCour d'appel de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève. Lausanne, le 6 juin 2006 Au nom de la Ire Cour civiledu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.97/2006
Date de la décision : 06/06/2006
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-06-06;4c.97.2006 ?
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