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02/06/2006 | SUISSE | N°6P.85/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 02 juin 2006, 6P.85/2006


{T 0/2}6P.85/20066S.174/2006 /rod Arrêt du 2 juin 2006Cour de cassation pénale MM. les Juges Schneider, Président,Kolly et Karlen.Greffière: Mme Kistler. X. ________,recourant, représenté par Me Gilles Monnier, avocat, contre Ministère public du canton de Vaud, case postale, 1014 Lausanne,Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale, rte du Signal8, 1014 Lausanne. Procédure pénale, établissement arbitraire des faits(art. 9, art. 32 al. 1, 2 Cst. et art. 6 CEDH); escroquerie, notion d'astuce(art. 146 CP), recours de droit public et pourvoi en nullité contre l'arrêt

du Tribunalcantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pé...

{T 0/2}6P.85/20066S.174/2006 /rod Arrêt du 2 juin 2006Cour de cassation pénale MM. les Juges Schneider, Président,Kolly et Karlen.Greffière: Mme Kistler. X. ________,recourant, représenté par Me Gilles Monnier, avocat, contre Ministère public du canton de Vaud, case postale, 1014 Lausanne,Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale, rte du Signal8, 1014 Lausanne. Procédure pénale, établissement arbitraire des faits(art. 9, art. 32 al. 1, 2 Cst. et art. 6 CEDH); escroquerie, notion d'astuce(art. 146 CP), recours de droit public et pourvoi en nullité contre l'arrêt du Tribunalcantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale, du 30 décembre 2005. Faits: A.Par jugement du 28 octobre 2005, le Tribunal correctionnel del'arrondissement de Lausanne a condamné X.________, pour escroquerie etrupture de ban, à quatorze mois d'emprisonnement avec sursis pendant cinqans, sous déduction de la détention préventive. Il a révoqué le sursis que leTribunal de police de Genève lui avait accordé le 8 août 2002 et ordonnél'exécution de la peine de douze mois d'emprisonnement, sous déduction de ladétention préventive. Enfin, il a donné acte à Y.________ de ses réservesciviles à l'encontre de X.________ et ordonné la confiscation de diversobjets. Par arrêt du 30 décembre 2005, la Cour de cassation pénale du Tribunalcantonal du canton de Vaud a rejeté le recours formé par X.________. B.En résumé, l'arrêt cantonal repose sur les faits suivants: A Renens, entre la fin du mois d'août et le début du mois de septembre 2003,Y.________ a trouvé dans sa boîte aux lettres un papillon publicitaire luifaisant miroiter des gains importants et rapides. Il a appelé le numéro detéléphone indiqué et a rencontré peu après dans un établissement publicX.________ et un second individu (lequel s'appelait Z.________, aux dires deX.________). Ces derniers ont expliqué à Y.________ qu'ils étaient enpossession d'une quantité très importante de billets de banque américains,d'une valeur totale de cinq millions de dollars, qu'un diplomate irakienavait fait sortir du Libéria et qui avaient été enduits, par mesure desécurité, d'une peinture, que seul un produit à acquérir auprès del'ambassade des Etats-Unis, à Berne, permettrait d'enlever. Dans lestoilettes de l'établissement, ils se sont livrés à une démonstration devantY.________, nettoyant quelques coupures de 100 dollars américains. Ils luiont présenté encore divers documents portant des logos américains et lui ontproposé de s'associer à eux, lui demandant d'avancer la somme de 5'000 francspour acquérir les produits de nettoyage. Y. ________ a sollicité l'aide d'un ami, pour se procurer les 5'000 francs,qu'il a remis personnellement à X.________ et à Z.________, quelques joursaprès leur première rencontre. Quelques heures plus tard, l'un des deuxacolytes a annoncé à Y.________, par téléphone, que la quantité de produitqu'ils avaient pu acquérir était insuffisante pour nettoyer tous les billets.Ils se sont ensuite rendus chez Y.________, apportant avec eux une liassecensée contenir 500'000 dollars américains ainsi qu'une petite bouteille depoudre. Après avoir commencé à nettoyer les billets, ils ont subitement cesséleur activité, annonçant à Y.________ que 30'000 francs supplémentairesétaient nécessaires pour aller plus loin. Pour emporter sa confiance, ils ontaccompagné Y.________ à la banque, où ce dernier a pu changer sans problèmeles quelques billets déjà nettoyés. La liasse censée contenir les 500'000dollars américains a été remise à Y.________, à charge pour ce dernier detrouver les 30'000 francs qui leur permettraient d'acquérir la poudremanquante. Quelques jours plus tard, Y.________ a remis à X.________ et à Z.________ les30'000 francs, qu'il avait empruntés à un ami. Par la suite, ces derniersn'ont plus donné signe de vie à Y.________. Quant aux 30'000 francs, ilsn'ont jamais été retrouvés. C.Contre l'arrêt cantonal, X.________ dépose un recours de droit public et unpourvoi en nullité devant le Tribunal fédéral. Dans le recours de droitpublic, il se plaint que la cour cantonale serait tombée dans l'arbitraire,en établissant les faits sur la base exclusive des déclarations de la dupe(art. 9 Cst.). Dans le pourvoi, il conteste s'être rendu coupabled'escroquerie, en faisant valoir le défaut d'astuce (art. 146 CP). Dans lesdeux recours, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et sollicite enoutre l'assistance judiciaire et l'effet suspensif. Le Tribunal fédéral considère en droit: I. Recours de droit public 1.1.1 Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre unedécision cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens(art. 84 al. 1 let. a OJ). Il n'est en revanche pas ouvert pour se plaindred'une violation du droit fédéral, qui peut donner lieu à un pourvoi ennullité (art. 269 al. 1 PPF); un tel grief ne peut donc pas être invoqué dansle cadre d'un recours de droit public, qui est subsidiaire (art. 84 al. 2 OJ;art. 269 al. 2 PPF). 1.2 En vertu de l'art. 90 al. 1 lettre b OJ, l'acte de recours doit, à peined'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits constitutionnels oudes principes juridiques violés et préciser en quoi consiste la violation.Lorsqu'il est saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'adonc pas à vérifier de lui-même si l'arrêt entrepris est en tous pointsconforme au droit et à l'équité. Il n'examine que les griefs d'ordreconstitutionnel invoqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours. Lerecourant ne saurait se contenter de soulever de vagues griefs ou de renvoyeraux actes cantonaux (ATF 130 I 258 consid. 1.3 p. 261, 26 consid. 2.1 p. 31).En outre, dans un recours pour arbitraire fondé sur l'art. 9 Cst.,l'intéressé ne peut se contenter de critiquer l'arrêt attaqué comme il leferait dans une procédure d'appel où l'autorité de recours peut revoirlibrement l'application du droit. Il doit préciser en quoi cet arrêt seraitarbitraire, ne reposerait sur aucun motif sérieux et objectif, apparaîtraitinsoutenable ou heurterait gravement le sens de la justice (ATF 128 I 295consid. 7a p. 312; 125 I 492 consid. 1b p. 495 et la jurisprudence citée). 2.Invoquant les art. 6 § 3 let. d CEDH et l'art. 32 al. 2 Cst., le recourantreproche à la cour cantonale de l'avoir condamné sur la base des déclarationsde la dupe, alors qu'il n'avait jamais été confronté à cette dernière. 2.1 Aux termes de l'art. 6 § 3 let. d CEDH, tout accusé a le droitd'interroger ou de faire interroger les témoins à charge et d'obtenir lacitation et l'interrogatoire des témoins à décharge dans les mêmes conditionsque les témoins à charge. Ce droit découle aussi de l'art. 29 Cst. (cf. pourla jurisprudence relative à l'art. 4 aCst., ATF 125 I 127 consid. 6b p.132/133; 124 I 274 consid. 5b p. 284). Il est également garanti par l'art. 32al. 2 Cst. (ATF 129 I 151 consid. 3.1. p. 154). On entend par témoins àcharge tous les auteurs de déclarations susceptibles d'être prises enconsidération au détriment de l'accusé, quelle que soit la qualité de cespersonnes dans le procès; il s'agit donc aussi des plaignants ou autresparties à la cause (ATF 125 I 127 consid. 6a in fine p. 132). Les éléments depreuve doivent en principe être produits en présence de l'accusé lors d'uneaudience publique, en vue d'un débat contradictoire. Il est toutefoisadmissible de se référer aux dépositions recueillies avant les débats, durantla phase de l'enquête, si l'accusé a disposé d'une occasion adéquate etsuffisante de contester un témoignage à charge et d'en interroger ou faireinterroger l'auteur (ATF 125 I 127 consid. 6b p. 132; voir aussi ATF 129 I151 consid. 4.2 p. 157; 124 I 274 consid. 5b p. 284).Le droit du prévenu de faire poser des questions à un témoin à charge estabsolu lorsque la déposition de cette personne constitue une preuve décisive(ATF 129 I 151 consid. 3.1 in fine p. 154; 125 I 127 consid. 6c/dd p. 135).Lorsqu'il n'est plus possible de faire procéder à une audition contradictoireen raison du décès, de l'absence ou d'un empêchement durable du témoin, leTribunal fédéral a considéré que la déposition recueillie au cours del'enquête pourrait être prise en considération alors même que l'accusén'aurait pas eu l'occasion d'en faire interroger l'auteur, mais à conditionque la déposition soit soumise à un examen attentif, que l'accusé puisseprendre position à son sujet et que le verdict de culpabilité ne soit pasfondé sur cette seule preuve (ATF 124 I 274 consid. 5b p. 285/286). LeTribunal fédéral a parfois aussi envisagé que cette déposition puisse aboutirà une condamnation même sans être confirmée par une autre preuve (ATF 125 I127 consid. 6c/dd in fine p. 136; 105 Ia 396 consid. 3b p. 397). 2.2 En l'espèce, la cour cantonale n'a pas fondé son verdict de culpabilitésur les seules déclarations de la dupe. Différents éléments corroborent laversion présentée par cette dernière. Une empreinte digitale du recourant(lequel avait auparavant été dactyloscopié, en tant que requérant d'asile) aété retrouvée sur l'emballage de la liasse de billets remise à la dupe.Divers documents, en rapport avec les faits incriminés, ont été découvertslors de la perquisition dans la chambre du recourant, à savoir unephotographie de deux malles remplies de billets, un papier faisant référenceà des procédés chimiques de l'ambassade des Etats-Unis et différents papiersà entête de la Banque fédérale américaine. Enfin, ont été retrouvés dans leporte-monnaie du recourant l'adresse e-mail et le mot de passe d'une boîte àcourriels, qui contenait différents papiers portant des logos américainscomme ceux retrouvés dans la chambre du recourant. Confirmée par d'autresindices, la déposition de la dupe ne constitue donc pas une preuve décisive.Dans ces circonstances, il ne peut être reproché à la cour cantonale de nepas avoir procédé à une confrontation entre le recourant et la dupe, et ced'autant moins qu'au moment de l'audience, la dupe était devenue introuvable.Le grief soulevé doit donc être rejeté. 3.Le recourant s'en prend à l'établissement des faits, qu'il qualified'arbitraire (art. 9 Cst.).3.1 Selon la jurisprudence, l'arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst., nerésulte pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer enconsidération ou même qu'elle serait préférable. Une décision n'est annuléepour cause d'arbitraire que lorsqu'elle viole gravement une norme ou unprincipe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manièrechoquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral nes'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instanceque si elle apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec lasituation effective, adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droitcertain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquéesoient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dansson résultat (ATF 131 I 57 consid. 2 p. 61; 129 I 8 consid. 2.1 p. 9, 173consid. 3.1 p. 178). Lorsque le recourant - comme c'est le cas en l'espèce - s'en prend àl'appréciation des preuves et à l'établissement des faits, la décision n'estentachée d'arbitraire que si le juge ne prend pas en compte, sans raisonsérieuse, un moyen de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'il setrompe manifestement sur le sens et la portée d'un tel élément, ou encorelorsqu'il tire des déductions insoutenables à partir des éléments recueillis(ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9; 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 I 208 consid.4a p. 211). Lorsque l'autorité cantonale a forgé sa conviction quant auxfaits sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents, il nesuffit pas que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même chacun d'eux pris isolémentsoit à lui seul insuffisant. L'appréciation des preuves doit être examinéedans son ensemble. Il n'y a pas d'arbitraire si l'état de fait retenu pouvaitêtre déduit de manière soutenable du rapprochement de divers éléments ouindices. De même, il n'y a pas d'arbitraire du seul fait qu'un ou plusieursarguments corroboratifs soient fragiles, si la solution retenue peut êtrejustifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature àemporter la conviction. 3.2 En premier lieu, le recourant se plaint d'arbitraire, reprochant à lacour cantonale d'avoir retenu sa participation à l'escroquerie sur la baseexclusive des déclarations de la dupe, lesquelles devraient, selon lui, êtrefortement mises en doute au vu des faits qui lui sont reprochés. La déposition de la dupe est une preuve recevable au même titre que n'importequel autre témoignage. Par son argumentation, le recourant ne démontre pas enquoi les déclarations de la dupe seraient fausses, mais se borne à lescontester. Il est au demeurant inexact de prétendre que la cour cantonales'est fondée sur les seules déclarations de la dupe pour retenir laparticipation du recourant à l'escroquerie. Comme vu sous le consid. 2.2, unensemble d'éléments convergents (empreinte digitale du recourant, documentstrouvés dans la chambre du recourant, adresse e-mail et mot de passe)viennent confirmer la version de la dupe. Infondé, le grief soulevé doit êtrerejeté. 3.3 Le recourant reproche, en outre, à la cour cantonale d'avoir retenu qu'ilavait participé activement à l'escroquerie sur la base de l'empreinteretrouvée sur l'adhésif qui entourait l'emballage de la liasse censéecontenir 500'000 dollars américains. Il soutient qu'il n'a pas confectionnéle paquet, mais qu'il a simplement aidé Z.________, qu'il hébergeait chezlui, à finir de le fermer. Il ajoute que, s'il avait joué un rôle majeur dansl'infraction, les enquêteurs auraient dû trouver plus qu'une empreinte. La cour cantonale a déduit de l'empreinte sur l'emballage que le recourantavait participé à l'escroquerie. Cette conclusion n'a rien d'arbitraire. Ilest du reste sans importance - au regard des règles sur la participation -que le recourant ait confectionné lui-même l'emballage de la liasse censéecontenir 500'000 dollars ou que - comme il le prétend - il ait seulementapporté son aide à Z.________ pour fermer le paquet. Dans tous les cas, il aparticipé à la confection de celui-ci, en sachant de quoi il en retournait.Mal fondé, le grief soulevé doit être rejeté. 3.4 Le recourant fait valoir que la cour cantonale a retenu de manièrearbitraire que la ouate, la teinture d'iode, les gants, le talc et laphotographie de deux malles remplies de billets de banque permettaientd'asseoir la décision des premiers juges. Selon le recourant, ces objets,courants et anodins, n'auraient pas été mis en relation avec les faitsincriminés, de sorte que la cour cantonale serait tombée dans l'arbitraire enen tenant compte à sa charge. Quant aux documents à entête d'autoritésaméricaines, ils auraient appartenu à Z.________, qui les auraient laisséslors de son passage. Selon les déclarations de la dupe, elle aurait rencontré Z.________ et lerecourant (ce que ce dernier ne conteste pas), qui lui auraient expliquéposséder une très importante
quantité de billets de banque américains enduitsd'une peinture noire, que seul un produit à acquérir auprès de l'ambassadedes Etats-Unis permettrait d'enlever; pour accréditer leur histoire, les deuxindividus lui auraient présenté des documents portant des logos américains.Dès lors, les documents à entête d'autorités américaines retrouvés chez lerecourant - même s'ils appartenaient à Z.________ - confirment bien lesdéclarations de la dupe. Quant aux autres objets, on peut concéder aurecourant que l'état de fait cantonal ne les met pas explicitement enrelation avec les faits incriminés. La relation est toutefois implicite: lateinture d'iode, les gants, le talc et la ouate permettent de teindre desbillets en noir, et la photographie de deux malles remplies de billets debanque est propre à établir la possession d'une très grande quantité debillets américains. Dans ces circonstances, la cour cantonale n'est pastombée dans l'arbitraire en admettant que les objets et documents retrouvéschez le recourant corroboraient les déclarations de la dupe. Mal fondé, legrief soulevé doit être rejeté. 3.5 Le recourant reproche à la cour cantonale de lui avoir attribué latitularité de l'adresse e-mail (abarry1978@yahoo.com), qui contenait lesdocuments à l'entête de la Banque fédérale américaine. En admettant quel'adresse "abarry" se référait au surnom Barry, qui était justement le surnomdu recourant, la cour cantonale serait tombée dans l'arbitraire. Le recourantexplique qu'il n'a aucune connaissance informatique, qu'il est en outreétrange, si cette adresse était vraiment la sienne, que la police l'aitretrouvée sur un billet dans son porte-monnaie accompagnée du mot de passe etqu'enfin, il n'est pas né en 1978. Il n'est pas déterminant de savoir si le recourant est ou non titulaire del'adresse e-mail. Ce qui est décisif, c'est que le recourant avait dans sonporte-monnaie cette adresse et le mot de passe et qu'il avait donc accès àune boîte de courriels, qui contenait des documents pseudo-officielsaméricains, correspondant à ceux laissés par Z.________ dans la chambre durecourant. Comme le relève pour le surplus la cour cantonale, il n'y a pasbesoin de connaissances informatiques particulières pour utiliser de temps entemps une adresse e-mail; le recourant pouvait du reste aussi requérir l'aided'un tiers. En retenant que la découverte de l'adresse e-mail et du mot depasse dans son porte-monnaie était un indice supplémentaire de laparticipation du recourant à l'escroquerie, la cour cantonale n'a donc pasfait preuve d'arbitraire. Mal fondé, le grief soulevé doit être rejeté. 3.6 Enfin, le recourant nie avoir procédé à un nettoyage de billets à titredémonstratif devant la dupe, et conteste les déclarations de cette dernièreselon lesquelles les billets auraient été changés dans une banque.Il est vrai qu'aucun indice matériel ne vient confirmer les déclarations dela dupe sur ces deux points. De tels indices ne sont cependant pasnécessaires. Le recourant oublie en effet que la déposition de la dupeconstitue une preuve comme une autre, soumise à la libre appréciation dujuge. Or, en l'occurrence, la cour cantonale n'est pas tombée dansl'arbitraire, en retenant ces deux faits comme établis, étant donné queceux-ci sont crédibles et que la déposition de la dupe a été confirmée surles autres points. Le recourant ne démontre du reste pas l'arbitraire de cesconstatations, mais se borne à nier les faits. Mal fondé, le grief soulevédoit être écarté. 3.7 En résumé, le recourant connaissait Z.________ et l'a hébergé dans sachambre. Il était présent lors des rencontres avec la dupe et est allé audomicile de cette dernière. Il a aidé Z.________ à fermer l'emballage de laliasse censée contenir 500'000 dollars, retrouvé chez la dupe et sur lequel aété découvert une de ses empreintes. Les enquêteurs ont retrouvé dans sachambre différents documents en relation directe avec l'escroquerie. Lerecourant avait accès à la boîte informatique, qui contenait différentspapiers à entête de la Banque fédérale américaine, puisqu'il avait dans sonporte-monnaie l'adresse e-mail et le mot de passe. Sur la base de ces faits,il n'est pas insoutenable de retenir que le recourant a participé àl'escroquerie. Le grief d'arbitraire est donc infondé. Autre est la questionde savoir si, au vu de ces faits, le recourant doit être considéré commecoauteur ou seulement comme complice. Il s'agit-là d'une question de droitpénal fédéral, qui doit faire l'objet d'un pourvoi en nullité. 4.Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir violé la présomptiond'innocence. 4.1 La présomption d'innocence et le principe "in dubio pro reo", qui en estle corollaire, sont des garanties de rang constitutionnel, dont la violationne peut donc être invoquée que par la voie du recours de droit public (art.269 al. 2 PPF; ATF 120 Ia 31 consid. 2b p. 35/36 et 2e p. 38). Ellesconcernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves (ATF120 Ia 31 consid. 2c p. 36). En tant que règles sur le fardeau de la preuve,ces principes signifient, au stade du jugement, que le fardeau de la preuveincombe à l'accusation et que le doute doit profiter à l'accusé. Comme règlessur l'appréciation des preuves, ils sont violés lorsque le juge, qui s'estdéclaré convaincu, aurait dû éprouver des doutes quant à la culpabilité del'accusé au vu des éléments de preuve qui lui étaient soumis (ATF 124 IV 86consid. 2a p. 88; 120 Ia 31 consid. 2c p. 37). Le Tribunal fédéral examinelibrement si ces principes ont été violés en tant que règles sur le fardeaude la preuve, mais il n'examine que sous l'angle de l'arbitraire la questionde savoir si le juge aurait dû éprouver un doute, c'est-à-dire celle del'appréciation des preuves (ATF 124 IV 86 consid. 2a p. 88; 120 Ia 31 consid.2e p. 38). 4.2 Il est manifeste que la cour cantonale n'a pas renversé le fardeau de lapreuve et n'a pas retenu que le recourant avait participé à l'escroquerie aumotif qu'il n'aurait pas prouvé que cela était faux. Elle en a acquis laconviction au vu des preuves administrées. Le grief soulevé se confond dèslors avec celui d'appréciation des preuves, qui a été déclaré mal fondé. Legrief tiré de la violation de la présomption d'innocence doit donc êtrerejeté. 5.Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté. Comme le recours était d'emblée dépourvu de chances de succès, la requêted'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 152 al. 1 OJ). Le recourant,qui succombe, doit supporter les frais (art. 156 al. 1 OJ), qui sont fixés demanière réduite pour tenir compte de sa mauvaise situation financière. Vu l'issue de la cause, la requête d'effet suspensif n'a plus d'objet.II. Pourvoi en nullité 6.Saisi d'un pourvoi en nullité, le Tribunal fédéral contrôle l'application dudroit fédéral (art. 269 PPF) sur la base exclusive de l'état de faitdéfinitivement arrêté par l'autorité cantonale (cf. art. 277bis et 273 al. 1let. b PPF). Le raisonnement juridique doit se fonder sur les faits retenusdans la décision attaquée, dont le recourant ne peut s'écarter. Le Tribunalfédéral n'est pas lié par les motifs invoqués, mais il ne peut aller au-delàdes conclusions du recourant (art. 277bis PPF). Celles-ci, qui doivent êtreinterprétées à la lumière de leur motivation, circonscrivent les pointslitigieux (ATF 126 IV 65 consid. 1 p. 66). 7.Le recourant conteste s'être rendu coupable d'escroquerie, en faisant valoirl'absence d'astuce. 7.1 Sur le plan objectif, l'escroquerie réprimée par l'art. 146 CP suppose enparticulier que l'auteur ait usé de tromperie et que celle-ci ait étéastucieuse. L'astuce au sens de cette disposition est réalisée lorsquel'auteur recourt à un édifice de mensonges, à des manoeuvres frauduleuses ouà une mise en scène, mais aussi lorsqu'il donne simplement de faussesinformations, si leur vérification n'est pas possible, ne l'est quedifficilement ou ne peut raisonnablement être exigée, de même que si l'auteurdissuade la dupe de vérifier ou prévoit, en fonction des circonstances,qu'elle renoncera à le faire en raison d'un rapport de confiance particulier(ATF 122 II 422 consid. 3a p. 426/427; 122 IV 246 consid. 3a p. 247/248 etles arrêts cités). Il y a notamment manoeuvre frauduleuse lorsque l'auteurfait usage de titres falsifiés ou obtenus sans droit ou de documentsmensongers (ATF 128 IV 18 consid. 3a p. 20; 122 IV 197 consid. 3d p. 205; 116IV 23 consid. 2c p. 25). L'astuce n'est toutefois pas réalisée si la dupe pouvait se protéger avec unminimum d'attention ou éviter l'erreur avec le minimum de prudence que l'onpouvait attendre d'elle. Il n'est pas nécessaire, pour qu'il y aitescroquerie, que la dupe ait fait preuve de la plus grande diligence etqu'elle ait recouru à toutes les mesures de prudence possibles. La questionn'est donc pas de savoir si elle a fait tout ce qu'elle pouvait pour éviterd'être trompée (ATF 128 IV 18 consid. 3a p. 20; 122 IV 246 consid. 3a p.247/248). L'astuce n'est exclue que lorsque la dupe est coresponsable dudommage parce qu'elle n'a pas observé les mesures de prudence élémentairesqui s'imposaient (ATF 128 IV 18 consid. 3a p. 20; 126 IV 165 consid. 2a p.171; 119 IV 28 consid. 3f p. 38). Pour apprécier si l'auteur a usé d'astuce et si la dupe a omis de prendre desmesures de prudence élémentaires, il ne suffit pas de se demander comment unepersonne raisonnable et expérimentée aurait réagi à la tromperie. Il faut, aucontraire, prendre en considération la situation particulière de la dupe,telle que l'auteur la connaît et l'exploite, par exemple une faiblessed'esprit, l'inexpérience ou la sénilité, mais aussi un état de dépendance,d'infériorité ou de détresse faisant que la dupe n'est guère en mesure de seméfier de l'auteur. L'exploitation de semblables situations constitueprécisément l'une des caractéristiques de l'astuce (ATF 128 IV 18 consid. 3ap. 21). Le principe de coresponsabilité doit amener les victimes potentielles à fairepreuve d'un minimum de prudence. Il s'agit d'une mesure de prévention ducrime, la concrétisation d'un programme de politique criminelle (cf. UrsulaCassani, Der Begriff der arglistigen Täuschung als kriminalpolitischeHerausforderung, in RPS 117/1999 p. 174). Ce principe, bien trop souventinvoqué à tort et à travers par les accusés, ne saurait dans cette mesureêtre utilisé pour nier trop aisément le caractère astucieux de la tromperie,en particulier lorsque l'auteur recherche systématiquement des victimesquelque peu naïves (ATF 128 IV 18 consid. 3a p. 21). 7.2 En l'espèce, les deux acolytes ont recouru à une mise en scène élaborée,comportant la présentation de faux documents et l'échafaudage de mensonges.Ils ont raconté à la dupe qu'un diplomate irakien avait sorti du Liberia unequantité très importante de billets de banque américains, d'une valeur totalede cinq millions de dollars, qu'il avait enduits, par mesure de sécurité,d'une peinture, que seul un produit à acquérir auprès de l'ambassade desEtats-Unis permettrait d'enlever. Cette histoire entourait l'opération denettoyage de billets d'un certain secret, tout en lui conférant un caractèrequasi officiel, ce qui devait dissuader la dupe de poser des questionscomplémentaires. Les deux escrocs ont montré à la dupe divers documentsportant des logos américains et se sont présentés comme banquiers pour donnerune plus grande vraisemblance à leur histoire. Afin d'établir l'efficacité duproduit, ils ont fait une démonstration à deux reprises à la dupe, nettoyantdevant elle quelques coupures de 100 dollars américains. Pour vaincre lesdernières résistances de la dupe, ils l'ont accompagnée au guichet d'unebanque où elle a pu changer sans problèmes les quelques billets déjà nettoyéset lui ont laissé la liasse censée contenir les 500'000 dollars en attendantqu'elle trouve les 30'000 francs. Pour le recourant, l'histoire à laquelle la dupe a cru seraitinvraisemblable. Selon lui, le fait que les deux escrocs se sont présentéscomme étant des banquiers aurait dû amener la dupe à se poser des questions.Il serait en effet peu courant que des banquiers proposent de réaliser desopérations avec des billets de banque en s'adressant à des inconnus. On peutconcéder au recourant que l'histoire racontée à la dupe présente desinvraisemblances. Une coresponsabilité de la dupe ne peut cependant entrer enconsidération en l'espèce. Par leurs manoeuvres diverses, les deux escrocsont su en effet attiser la convoitise de la dupe, notamment en nettoyantdevant elle des billets américains, tout en endormant ses soupçons avec unehistoire de diplomate irakien et d'ambassade des Etats-unis, la dissuadantainsi de poser des questions. Le fait de se présenter comme banquiers devaitdonner plus de crédibilité à leur histoire, et constitue donc un élémentsupplémentaire de la stratégie adoptée par les deux escrocs. Le recourant soutient que la dupe, qui n'a pas déposé plainte immédiatement,se doutait depuis le début que l'opération n'était pas nette et qu'elle s'enétait accommodée, de sorte qu'elle ne mériterait pas la protection du droitpénal. La cour cantonale semble admettre que la dupe s'est probablementrendue compte, à un moment ou un autre, que l'opération dans laquelle elles'était aventurée n'était pas très nette. Savoir ce que la dupe savaitexactement et à quel moment est une question de fait, que la cour de céans nepeut revoir (art. 277bis et 273 al. 1 PPF). Dans tous les cas, cela ne changerien au fait que les deux acolytes ont amené la dupe par une tromperieastucieuse à leur verser 35'000 francs et que ce comportement est illicite.Selon la jurisprudence et la doctrine majoritaire, l'escroquerie doit eneffet également être retenue en cas d'affaire illicite ou immorale (ATF 117IV 139 consid. 3 d/dd p. 149 s.; 111 IV 55 consid. 2 et 3, p. 57 ss;Stratenwerth/Jenny, Schweizerisches Strafrecht, Besonderer Teil I: StraftatengegenIndivdualinteressen, 6e éd., Berne 2003, § 15, n. 46). Au vu de l'ensemble des éléments décrits ci-dessus, la cour cantonale aretenu à juste titre que la tromperie était astucieuse. Les griefs soulevésdoivent donc être rejetés. 8.Le pourvoi doit ainsi être rejeté, sans qu'il soit nécessaire de traiter lesgriefs liés à la révocation du précédent sursis et aux prétentions civiles,dont l'admission dépendait de la libération du chef d'accusationd'escroquerie. Comme le pourvoi était d'emblée dépourvu de chances de succès, l'assistancejudiciaire doit être refusée (art. 152 al. 1 OJ). Le recourant, qui succombe,sera condamné aux frais (art. 278 al. 1 PPF), dont le montant sera toutefoisarrêté en tenant compte de sa situation financière. Vu l'issue du pourvoi, la requête d'effet suspensif devient sans objet. Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours de droit public est rejeté. 2.Le pourvoi est rejeté. 3.Les requêtes d'assistance judiciaire sont rejetées. 4.Un émolument judiciaire de 1'600 francs est mis à la charge du recourant. 5.Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, auMinistère public du canton de Vaud et au Tribunal cantonal
vaudois, Cour decassation pénale. Lausanne, le 2 juin 2006 Au nom de la Cour de cassation pénaledu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6P.85/2006
Date de la décision : 02/06/2006
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-06-02;6p.85.2006 ?
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