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02/06/2006 | SUISSE | N°6A.35/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 02 juin 2006, 6A.35/2006


{T 0/2}6A.35/2006 /rod Arrêt du 2 juin 2006Cour de cassation pénale MM. les Juges Schneider, Président,Kolly et Zünd.Greffier: M. Oulevey. X. ________,recourant, représenté par Me Jean Lob, avocat, contre Commission de libération du canton de Vaud,p.a. Service pénitentiaire, rue Cité-Devant 14,1014 Lausanne,Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud, rte duSignal 8, 1014 Lausanne. Refus de la libération conditionnelle, recours de droit administratif contre l'arrêt de la Cour de cassation pénaledu Tribunal cantonal du canton de Vaud du 13 avril 2006. Faits: A.P

ar jugement du 21 octobre 2003, confirmé par la Cour de cass...

{T 0/2}6A.35/2006 /rod Arrêt du 2 juin 2006Cour de cassation pénale MM. les Juges Schneider, Président,Kolly et Zünd.Greffier: M. Oulevey. X. ________,recourant, représenté par Me Jean Lob, avocat, contre Commission de libération du canton de Vaud,p.a. Service pénitentiaire, rue Cité-Devant 14,1014 Lausanne,Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud, rte duSignal 8, 1014 Lausanne. Refus de la libération conditionnelle, recours de droit administratif contre l'arrêt de la Cour de cassation pénaledu Tribunal cantonal du canton de Vaud du 13 avril 2006. Faits: A.Par jugement du 21 octobre 2003, confirmé par la Cour de cassation pénale duTribunal cantonal vaudois le 19 janvier 2004, X.________ a été condamné, pourcontrainte sexuelle, viol et menaces commis sur la personne de sa fille, àquatre ans de réclusion ferme, sous déduction de soixante-sept jours dedétention préventive, et à quinze ans d'expulsion du territoire suisse avecsursis pendant cinq ans. Il purge actuellement sa peine d'emprisonnement, dont il a atteint les deuxtiers le 15 avril 2006. B.Dans un rapport du 25 novembre 2005, la Commission interdisciplinaireconsultative concernant les délinquants nécessitant une prise en chargepsychiatrique a informé le Service pénitentiaire du canton de Vaud que ledispositif psychothérapeutique intensif mis en place en juin 2005 pourcompléter le suivi psychiatrique de X.________ était resté sans effetthérapeutique. Au contraire, ces mesures avaient révélé le caractèreinauthentique et utilitaire de l'engagement de l'intéressé, qui persistait àcontester les faits pour lesquels il a été condamné. La dangerosité deX.________ et le risque de récidive restaient dès lors inchangés. Lacommission jugeait risqué d'élargir l'intéressé en l'état. Le 17 janvier 2006, le membre visiteur de la Commission de libération ducanton de Vaud a entendu X.________. Dans son compte-rendu à la commission delibération, il a relevé qu'il ne faisait aucun doute que le détenu pouvait seréinsérer professionnellement. Cependant, le membre visiteur a trouvéinquiétant le déni dans lequel X.________ se retranchait, ajoutant que larigidité dont ce détenu avait fait preuve pendant l'entretien, ainsi que safocalisation sur le factuel, avaient renforcé les inquiétudes qu'il y avaitlieu de nourrir à son sujet. Une telle attitude était, pour le membrevisiteur, le symptôme d'un évident risque de récidive. Seule la direction de l'établissement pénitentiaire où est détenu X.________a préavisé en faveur de la libération conditionnelle, en raison notamment dela bonne conduite et de la bonne intégration de l'intéressé. Par décision du 13 mars 2006, la Commission de libération du canton de Vaud,faisant sienne l'appréciation de la commission consultative, a refuséd'accorder la libération conditionnelle à X.________. Elle a considéré quecelui-ci présentait les mêmes traits de personnalité et qu'il se trouvaitdans le même état d'esprit que lors de l'expertise psychiatrique qui avaitprécédé son jugement, la démarche thérapeutique à laquelle il se soumettaiten prison restant sans effet sur ses travers. Sa dangerosité et le risque derécidive ne s'étaient dès lors pas réduits depuis le procès. Dans cesconditions, l'intérêt de la société à être protégée des agissementspréjudiciables de X.________ l'emportait sur toute autre considération. Par arrêt du 13 avril 2006, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonaldu canton de Vaud a, sur recours de l'intéressé, confirmé cette décision.Elle a considéré que, sur le vu des rapports de la commission consultative etdu membre visiteur, la commission de libération n'avait pas abusé de sonpouvoir d'appréciation en refusant la libération conditionnelle à X.________. C.X.________ interjette un recours de droit administratif au Tribunal fédéralcontre ce dernier arrêt, dont il conclut à la réforme en ce sens que lalibération conditionnelle lui soit accordée. Il requiert également l'assistance judiciaire. Invitée à se déterminer, la cour cantonale s'est référée aux considérants deson arrêt. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.1.1L'octroi ou le refus de la libération conditionnelle constitue une décisiond'application des peines que le code pénal ne réserve pas au juge (art. 38ch. 1 al. 1 CP). Prononcé ou confirmé en dernière instance cantonale, il peutdès lors être attaqué par la voie du recours de droit administratif (cf. ATF124 I 231 consid. 1 a/aa p. 233; 122 IV 8 consid. 1a et les arrêts cités, 114IV 95 ss; Bernard Corboz, Le pourvoi en nullité à la Cour de cassation duTribunal fédéral, SJ 1991 p. 57 ss, 62). 1.2 Le recours de droit administratif peut être formé pour violation du droitfédéral, y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation (art. 104 let.a OJ). Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties,mais il n'est pas lié par les motifs invoqués, (art. 114 al. 1 OJ). Enrevanche, lorsque, comme en l'espèce, le recours est dirigé contre ladécision d'une autorité judiciaire, il est lié par les faits constatés dansla décision attaquée, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ous'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de la procédure (art.104 let. b et 105 al. 2 OJ). Le Tribunal fédéral dispose ainsi, sur lesquestions de fait, d'un pouvoir d'examen limité en quelque sorte àl'arbitraire (cf. Peter Karlen, Verwaltungsgerichtsbeschwerde, in:Prozessieren vor Bundesgericht, Thomas Geiser/Peter Münch [éditeurs], 2èmeéd., n. 3.61, p. 110 s). Il s'ensuit notamment que des pièces ne peuvent êtreproduites à l'appui d'un recours de droit administratif dirigé contre unedécision judiciaire que si leur absence du dossier cantonal constitue uneviolation de règles essentielles de la procédure (ATF 128 III 454 consid. 1p. 456 s. et les références). En l'espèce, la pièce que le recourant a annexée à son acte de recours, quin'est autre que l'original d'une lettre d'embauche dont une copie a déjà étéversée au dossier cantonal, est dès lors irrecevable. 2.En vertu de l'art. 38 ch. 1 al. 1 CP, l'octroi de la libérationconditionnelle suppose que le condamné ait purgé les deux tiers de sa peine,mais au moins trois mois en cas de condamnation à l'emprisonnement, que soncomportement pendant l'exécution de la peine ne s'oppose pas à sonélargissement et que l'on puisse prévoir qu'il se conduira bien en liberté.Dans le cas présent, il est acquis que le recourant a accompli les deux tiersde sa peine et que son comportement en détention ne prête pas à la critique.Est seul litigieux le pronostic à émettre sur sa conduite future. Lesautorités cantonales ont considéré que le déni dans lequel il persisterévélait l'absence de toute évolution personnelle et, partant, l'existenced'un risque de récidive excluant la libération conditionnelle. Mais il faitvaloir, quant à lui, qu'il présente toutes les garanties nécessaires contreune éventuelle récidive, dès lors qu'il a un emploi, que son amie exerce uneinfluence positive sur lui et que les actes pour lesquels il a été condamnéont été commis - "si tant est qu'ils l'aient été" - dans un contexteparticulier qui ne pourra pas se reproduire. 2.1Pour faire un pronostic sur le comportement futur d'un condamné, il fautprocéder à une appréciation globale, prenant en considération, d'une part,les antécédents et la personnalité de l'intéressé et, d'autre part, soncomportement, tant en général que dans le cadre de la commission des délitsqui sont à l'origine de sa condamnation (ATF 125 IV 113 consid. 2a p. 115).Il ne suffit pas que le comportement du condamné pendant sa détention nes'oppose pas à son élargissement. On peut même se demander si le comportementpendant l'exécution constitue vraiment un critère de décision indépendant ous'il n'est pas, selon les circonstances, un simple élément supplémentaired'appréciation pour établir le pronostic (ATF 119 IV 5 consid. 1a p. 7).Outre les antécédents, il faut également tenir compte de l'amendement ducondamné, ainsi que des conditions dans lesquelles il est à prévoir qu'ilvivra (ATF 119 IV 5 consid. 1b p. 8; 104 IV 281 consid. 2 p. 282). Par nature, le pronostic ne saurait être tout à fait sûr; force est de secontenter d'une certaine probabilité; un risque de récidive est inhérent àtoute libération, conditionnelle ou définitive (ATF 119 IV 5 consid. 1b p.7). Pour déterminer si l'on peut courir le risque de récidive, il faut nonseulement prendre en considération le degré de probabilité qu'une nouvelleinfraction soit commise mais également l'importance du bien qui serait alorsmenacé. Ainsi, le risque de récidive que l'on peut admettre est moindre sil'auteur s'en est pris à la vie ou à l'intégrité corporelle de ses victimesque s'il a commis, par exemple, des infractions contre le patrimoine (ATF 125IV 113 consid. 2a p. 116; ATF 124 IV 193 consid. 3 p. 195). 2.2 Pour émettre un pronostic, l'autorité cantonale dispose d'un largepouvoir d'appréciation, dont l'usage n'est sanctionné par le Tribunal fédéralqu'en cas d'excès ou d'abus, notamment si la décision entreprise repose surdes considérations étrangères au but de l'institution (ATF 119 IV 5 consid. 2p. 8 et la jurisprudence citée). Lorsque l'autorité s'est fondée sur uneconception juridique correcte de la libération conditionnelle, qu'elle a prisen considération l'ensemble des éléments pertinents, qu'elle a tiré de cesprémisses des conclusions raisonnables et qu'elle est parvenue à une solutionglobalement défendable, sa décision échappe à la censure, alors même quel'autorité de recours, si elle avait eu à trancher le cas en premièreinstance, eût peut-être été encline à adopter une autre solution (ATF 119 IV5 consid. 2 p. 9). 2.3 En persistant dans le déni, le recourant refuse de s'engagervéritablement dans les démarches psychothérapeutiques qui lui sont proposéespour s'amender, ce qui, de l'avis de la commission interdisciplinaireconsultative, est de nature à fonder la crainte d'une récidive. Lorsqu'il prétend que les actes retenus contre lui ont été commis dans descirconstances très particulières, qui ne sauraient se reproduire, lerecourant perd de vue un fait important, qui ressort du dossier et dont lacour de céans peut dès lors tenir compte bien que la cour cantonale ne l'aitpas relevé (art. 105 al. 2 OJ), savoir qu'il a été condamné le 27 mars 1990par le Tribunal de police du district de Vevey à vingt-et-un joursd'emprisonnement avec sursis pendant quatre ans pour s'être livré, le 24 août1989, à des attouchements sur deux fillettes âgées de dix et douze ans, qu'ilavait remarquées sur une place de jeu alors qu'il sortait du travail etcherchait une place de stationnement (décision de la commission de libérationdu 13 mars 2006, p. 3, et rapport d'expertise psychiatrique du 21 décembre2001, p. 5). Cet antécédent démontre que le recourant peut fort bien s'enprendre à des fillettes inconnues et passer à l'acte dans un lieu public,avant de rentrer chez lui. Le fait que, libéré conditionnellement, il vivraitavec son amie, sans présence d'une mineure à son domicile, ne constitue dèslors pas une garantie suffisante contre le risque de récidive. Dans ces circonstances, le pronostic défavorable émis par les autoritéscantonales quant à la conduite future du recourant ne résulte pas d'un abusdu pouvoir d'appréciation. Dans la mesure où il tend à faire valoir que lesconditions prévues à l'art. 38 ch. 1 al. 1 CP sont remplies, le recours estdonc mal fondé. 3.D'après la jurisprudence, lorsqu'un détenu, condamné à une peined'emprisonnement ou à une peine de réclusion de durée limitée, ne remplit pasles conditions posées par l'art. 38 ch. 1 al. 1 CP pour la libérationconditionnelle, il convient de rechercher, d'une part, si la dangerosité del'intéressé diminuera, resta inchangée ou augmentera en cas d'exécutioncomplète de la peine et, d'autre part, si la libération conditionnelle,assortie au besoin de règles de conduite et d'un patronage, ne favoriseraitpas mieux la resocialisation du condamné que l'exécution complète de lapeine. Si une telle libération paraît plus apte à prévenir la récidive, elledoit être préférée à l'exécution complète de la peine (ATF 124 IV 193 consid.4d/aa-bb p. 200 ss). Invoquant cette jurisprudence, le recourant, qui se déclare prêt à sesoumettre à un contrôle psychothérapeutique et au patronage, soutient que lasociété sera mieux protégée s'il est libéré avec l'obligation de respecterdes règles de conduite et de se soumettre au patronage que s'il est purementet simplement élargi à l'expiration de sa peine, le 15 août 2007. Selon lui,les autorités cantonales auraient dès lors dû lui accorder la libérationconditionnelle. Cette conclusion est à tout le moins prématurée. S'il paraît certes réalistede partir de l'idée que l'exécution du dernier tiers d'une peined'emprisonnement ou de réclusion de durée limitée n'apporterait, le plussouvent, aucun changement fondamental à la situation du condamné (cf. ATF 124IV 193 consid. 4d/aa p. 198/199), on ne saurait cependant nier d'emblée qu'unmaintien en détention au-delà des deux tiers de la peine soit de nature àfavoriser l'amendement. Lorsque, comme en l'espèce, le suivipsychothérapeutique nécessaire à l'amendement d'un condamné échoue en raisondu seul refus délibéré de celui-ci de s'engager réellement, et que le soldede la peine est encore long (plus d'une année dans le cas présent), rien nejustifie d'exclure la possibilité d'une évolution positive avant le terme dela peine. En pareille situation, il convient d'examiner dans quelle mesure laresocialisation du détenu serait compromise par l'exécution du dernier tiersde la peine, puis d'examiner si la possibilité d'une évolution favorablel'emporte sur cet inconvénient. Comme il ne ressort pas des constatations defait de la cour cantonale que la resocialisation du recourant serait rendueplus difficile par son maintien en détention et que celui-ci ne le prétendlui-même pas, les autorités cantonales n'ont pas abusé de leur pouvoird'appréciation en lui refusant en l'état la libération conditionnelle. Partant, le recours doit être rejeté. 4.Comme il est apparu d'emblée que le recours était mal fondé, la requêted'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 152 al. 1 OJ). Le recourant,qui succombe, supportera les frais de justice, arrêtés à 800 fr. (art. 153aal. 2 let. b OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.La requête d'assistance judiciaire du recourant est rejetée. 3.Un émolument judiciaire de 800 fr. est mis à la charge du recourant. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, à laCommission de libération du canton de Vaud et à la Cour de cassation pénaledu Tribunal cantonal du canton de Vaud. Lausanne, le 2 juin 2006 Au nom de la Cour de cassation pénaledu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6A.35/2006
Date de la décision : 02/06/2006
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-06-02;6a.35.2006 ?
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