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31/05/2006 | SUISSE | N°2A.35/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 31 mai 2006, 2A.35/2006


2A.35/2006/CFD/elo{T 0/2} Arrêt du 31 mai 2006IIe Cour de droit public MM. et Mme les Juges Merkli, Président,Wurzburger et Yersin.Greffière: Mme Charif Feller. A. X.________, recourant, contre Service de la population et des migrants du canton de Fribourg, LesPortes-de-Fribourg, routed'Englisberg 11, 1763 Granges-Paccot,Tribunal administratif du canton de Fribourg, Ière Cour administrative, laPrésidente,route André-Piller 21, case postale, 1762 Givisiez. regroupement familial; capacité d'ester en justice, recours de droit administratif contre la décision rendue le 1er décembre 2005pa

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2A.35/2006/CFD/elo{T 0/2} Arrêt du 31 mai 2006IIe Cour de droit public MM. et Mme les Juges Merkli, Président,Wurzburger et Yersin.Greffière: Mme Charif Feller. A. X.________, recourant, contre Service de la population et des migrants du canton de Fribourg, LesPortes-de-Fribourg, routed'Englisberg 11, 1763 Granges-Paccot,Tribunal administratif du canton de Fribourg, Ière Cour administrative, laPrésidente,route André-Piller 21, case postale, 1762 Givisiez. regroupement familial; capacité d'ester en justice, recours de droit administratif contre la décision rendue le 1er décembre 2005par la Présidente de la Ière Cour administrative du Tribunal administratif ducanton de Fribourg. Faits: A.A. X.________, ressortissant macédonien né en 1982, est entré en Suisse le1er juillet 1988 pour séjourner auprès de ses parents. Il a été mis aubénéfice d'une autorisation de séjour puis d'établissement et a été scolariséen milieu spécialisé. Le 24 juin 2003, la Justice de paix du IVème cercle duLac, à Nant, a institué une tutelle, au sens de l'art. 369 CCS, en faveur deA.X.________, à charge de la tutrice de le soutenir dans la gestion de sesaffaires, de régler ses dépenses et de l'aider dans les démarches de la viecourante et professionnelle. Le 2 juin 2004, A.X.________ a épousé enMacédoine B.________, ressortissante de ce pays née en 1980. Celle-ci adéposé, le 28 juillet 2004, une demande d'entrée et de séjour afin de vivreauprès de son époux. B.Le 14 juin 2005, le Service de la population et des migrants du canton deFribourg (ci-après: le Service de la population) a rejeté la demanded'autorisation d'entrée et de séjour déposée par B.X.________. Il aconsidéré, en substance, que la santé mentale de A.X.________ permettait dedouter de sa capacité à former une véritable commu- nauté de vie avec sonépouse. Le Service de la population n'a pas tranché la question del'existence d'un mariage de complaisance, mais a notamment constaté que, lorsde son audition, A.X.________ ignorait pratiquement tout de son épouse etqu'au regard de sa situation financière, l'entretien de sa famille n'étaitpas suffisamment assuré. Par décision du 1er décembre 2005, la Présidente de la Ière Couradministrative du Tribunal administratif du canton de Fribourg a déclaré lerecours formé le 14 juillet 2005 par A.X.________ contre la décision duService de la population manifestement irrecevable, au motif que la tutricede A.X.________ avait refusé de ratifier ledit recours. La Présidente de laIère Cour administrative a notamment retenu que le litige ne concernait pasune procédure de mariage ou une affaire impliquant des droits strictementpersonnels, au sens de l'art. 19 al. 2 CC, mais un simple refus de permis deséjour à un tiers, et que le recours nécessitait impérativement leconsentement du tuteur et des autorités de tutelle. C.Agissant par la voie du recours de droit administratif, A.X.________ demandeau Tribunal fédéral d'annuler la décision de la Présidente de la Ière Couradministrative. Il sollicite également le bénéfice de l'assistance judiciairegratuite. Le Tribunal administratif conclut au rejet du recours, en reprenant, pourl'essentiel, l'argumentation de la décision attaquée. Le Service de lapopulation se réfère à ses observations produites dans la procédure cantonaleainsi qu'aux considérants de la décision attaquée. L'Office fédéral desmigrations a renoncé à formuler des observations. D.Le Tribunal fédéral a renoncé à percevoir une avance de frais et a informé lerecourant qu'il statuerait ultérieurement sur sa demande d'assistancejudiciaire. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recoursdont il est saisi ( ATF 131 I 57 consid. 1 p. 59). La décision attaquée concerne la capacité d'ester en justice du recourant,qui bénéficie d'une autorisation d'établissement, dans une procédure relativeà l'autorisation d'entrée et de séjour de son épouse (cf. art. 100 al. 1 let.b ch. 3 OJ). Le recours de droit administratif étant en l'espèce recevable aufond, il l'est en principe aussi contre la décision d'irrecevabilitécantonale qui doit être traitée comme les décisions visées par l'art. 101let. a OJ (ATF 119 Ib 412 consid. 2a p. 414). Il convient toutefoisd'examiner au préalable si le recourant est capable d'ester en justice. 2.2.1La juridiction cantonale a retenu pour la procédure devant elle qu'enapplication des art. 19 al. 1, 407 et 421 ch. 8 CC, un pupille même capablede discernement devait disposer du consentement du tuteur et des autorités detutelle pour agir en justice. Comme ce consentement faisait défaut enl'espèce, le recours devait être déclaré irrecevable. 2.2 Le recourant invoque la violation des art. 19 al. 2 CC, 12 CEDH et 14Cst. Il soutient essentiellement que la décision cantonale d'irrecevabilitél'empêche d'exercer son droit au mariage. Le recourant est d'avis que leconsentement de sa tutrice au recours contre la décision refusant à sonépouse une autorisation d'entrée et de séjour en Suisse n'est pas nécessaire,puisque des droits strictement personnels sont en cause. 2.3 En ce qui concerne la présente procédure fédérale (Benoît Bovay,Procédure administrative, Berne 2000, p. 144 ss, 145; Pierre Moor, Droitadministratif, vol. II, Berne 2002, p. 57 ss, 58; voir pour la procédurecantonale: art. 12 du Code du 23 mai 1991 de procédure et de juridictionadministrative), l'art. 14 PCF, applicable par renvoi de l'art. 40 OJ,prévoit que toute personne est capable d'ester en justice dans la mesure oùelle a l'exercice des droits civils. Selon l'art. 17 CC, les personnesincapables de discernement, les mineurs et les interdits n'ont pas l'exercicedes droits civils. A teneur de l'art. 19 al. 1 CC, les interdits capables dediscernement peuvent s'obliger par leurs propres actes, lorsque leurreprésentant légal y consent. Ils n'ont pas besoin de ce consentementnotamment pour exercer des droits strictement personnels (art. 19 al. 2 CC;voir aussi André Grisel, Traité de droit administratif, vol. II, Neuchâtel1984, p. 840). En l'espèce, même si le recourant - interdit au sens de l'art. 369 CC - étaitcapable de discernement, il ne pourrait pas ester en justice sans leconsentement de sa tutrice, sauf pour la défense de ses droits strictementpersonnels. Par conséquent, il sied de déterminer si le recourant est capablede discernement et, le cas échéant, s'il fait valoir des droits éminemmentpersonnels. 2.4 Le discernement est défini à l'art. 16 CC comme la faculté d'agirraisonnablement. Il comporte deux éléments, l'un intellectuel, la capacitéd'apprécier le sens, l'opportunité et les effets d'un acte déterminé, l'autrevolontaire, la faculté d'agir librement en fonction de cette compréhensionraisonnable (ATF 124 III 5 consid. 1a p. 8; 117 II 231 consid. 2a p. 232). Lacapacité de discernement est relative: elle ne doit pas être appréciée dansl'abstrait, mais concrètement, par rapport à un acte déterminé, en fonctionde sa nature et de son importance, les facultés requises devant exister aumoment de l'acte (ATF 118 Ia 236 consid. 2b in fine p. 238; 117 II 231consid. 2a p. 232/233 et les références citées). Une personne n'est privée de discernement au sens de la loi que si sa facultéd'agir raisonnablement est altérée, en partie du moins, par l'une des causesénumérées à l'art. 16 CC, dont la maladie mentale et la faiblesse d'esprit, àsavoir des états anormaux suffisamment graves pour avoir effectivement altéréla faculté d'agir raisonnablement dans le cas particulier et le secteurd'activité considérés. La capacité de discernement est la règle; elle estprésumée d'après l'expérience générale de la vie. Partant, il incombe à celuiqui prétend qu'elle fait défaut de le prouver (ATF 118 Ia 236 consid. 2b p.238). Mais cette preuve n'est soumise à aucune prescription particulière; unevraisemblance prépondérante suffit (ATF 117 II 231 consid. 2b p. 234). 2.5 Il ressort du dossier que le recourant a été mis sous tutelle en juin2003. Dans ce contexte, il a été dépeint comme un être immature, infantile,fragile, fruste et nécessitant une prise en charge spécialisée. En outre, ila été constaté qu'il n'était pas seulement faible d'esprit, mais qu'ilsouffrait de troubles du comportement le rendant incapable de gérer sesaffaires et provoquant des accès d'agressivité dangereux pour la sécuritéd'autrui. S'agissant plus particulièrement des circonstances de son mariage,son audition par les autorités cantonales, en décembre 2004, a notammentrévélé qu'il n'était plus sûr si des témoins avaient été présents et qu'il arenvoyé sur ce point à son père. Le recourant a également déclaré qu'il étaittoujours accompagné pendant ses voyages, qu'il ignorait le nom desmédicaments qu'il prenait et le montant du salaire qu'il percevait. Parailleurs, la tutrice du recourant a indiqué qu'en raison de l'état mental deson pupille elle se serait opposée à son mariage s'il avait été célébré enSuisse. Enfin, le recourant ignorait pratiquement tout de son épouse (date denaissance, goûts, loisirs, intérêts communs, prénom des beaux-parents, etc.). Compte tenu de la jurisprudence (consid. 2.4 ci-avant), qui se satisfaitd'une grande vraisemblance sans poser des exigences trop sévères quant à lapreuve de l'incapacité de discernement (voir aussi arrêt C. 515/1986 du 21décembre 1987, consid. 2b, reproduit in: SJ 1988 p. 286), les élémentsretenus en l'espèce permettent de douter sérieusement de la capacité dediscernement du recourant en juillet 2005, lors du dépôt de son recoursdevant la juridiction cantonale, auquel sa tutrice n'avait du reste pasconsenti. Dès lors, ce motif, qui aurait suffi pour déclarer irrecevable lerecours formé devant le Tribunal administratif, conduit à considérer lerecours de droit adminis- tratif formé devant la Cour de céans en janvier2006 (cf. au sujet de la date déterminante ATF 103 Ia 369 consid. 1 p. 373;Walter Kälin, Das Verfahren der staatsrechtlichen Beschwerde, Berne 1994, p.217) comme irrecevable, la situation de fait ne s'étant de toute manière pasmodifiée jusqu'à présent. Comme le recourant n'avait pas la capacité de discernement au moment où il aagi, il n'y a plus lieu d'examiner s'il l'a fait pour défendre des droitsstrictement personnels (consid. 2.3 ci-avant; cf. ATF 116 II 385 consid. 4 p.287). Il sied cependant de relever que sont considérés comme des droitséminemment personnels les droits qui procèdent d'une autorisation de séjour(arrêt 2P.73/1996 du 2 avril 1996 consid. 2b et la référence citée, reproduitin RDAF 1997 I p. 159), singulièrement lorsqu'ils influent sur la vieconjugale. 3.Au vu de ce qui précède, le recours est irrecevable. L'ensemble descirconstances justifie de statuer sans frais, quand bien même la requêted'assistance judiciaire du recourant, qui succombe, doit être rejetée. Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est irrecevable. 2.La requête d'assistance judiciaire est rejetée. 3.Il n'est pas perçu de frais. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant, au Service de lapopulation et des migrants et à la Ière Cour administrative du Tribunaladministratif du canton de Fribourg, ainsi qu'à l'Office fédéral desmigrations. Lausanne, le 31 mai 2006 Au nom de la IIe Cour de droit publicdu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.35/2006
Date de la décision : 31/05/2006
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-05-31;2a.35.2006 ?
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