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24/05/2006 | SUISSE | N°U.67/05

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 24 mai 2006, U.67/05


Cause {T 7}U 67/05 Arrêt du 24 mai 2006IIe Chambre Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Borella et Kernen. Greffier : M.Wagner W.________, recourant, contre ASSURA, assurance maladie et accident,Z.i. EnBudron A1, 1052 Le Mont-sur-Lausanne, intimée Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève (Jugement du 11 janvier 2005) Faits: A.W. ________ est assuré contre le risque d'accident auprès d'ASSURA, assurancemaladie et accident.Par lettre du 3 mai 2004, W.________ a informé ASSURA qu'il avait été victimele 15 avril 2004 d'un «accident masticatoire», survenu dans un restaura

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Cause {T 7}U 67/05 Arrêt du 24 mai 2006IIe Chambre Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Borella et Kernen. Greffier : M.Wagner W.________, recourant, contre ASSURA, assurance maladie et accident,Z.i. EnBudron A1, 1052 Le Mont-sur-Lausanne, intimée Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève (Jugement du 11 janvier 2005) Faits: A.W. ________ est assuré contre le risque d'accident auprès d'ASSURA, assurancemaladie et accident.Par lettre du 3 mai 2004, W.________ a informé ASSURA qu'il avait été victimele 15 avril 2004 d'un «accident masticatoire», survenu dans un restaurantde Provence lors de la consommation d'une tranche de lard contenant un petitéclat d'os.Le 6 mai 2004, ASSURA a avisé W.________ qu'elle refusait toutes prestations,au motif que l'événement du 15 avril 2004 n'était pas un accident, lacondition de la cause extérieure extraordinaire n'étant pas réalisée. Eneffet, il n'était pas extraordinaire de trouver un petit éclat d'os dans dulard.Par lettre du 13 mai 2004, W.________ a contesté le refus d'ASSURA. Ilapportait la précision suivante à la description de l'événement du 15avril2004 : «Il ne s'agissait pas d'une tranche de lard au sens d'oeufsaccompagnés de bacon, mais de très petites tranches de lard plus communémentappelés «lardons» inclus dans une tartiflette au reblochon et aux pommes deterre. Il était donc impossible pour moi de déceler visuellement la moindreanomalie dans ces lardons mêlés au fromage fondu et aux pommes de terrefondantes, comme ça aurait pu être le cas dans les oeufs au bacon». SelonW.________, le caractère extraordinaire du facteur extérieur devait ainsiêtre admis, étant donné la situation d'exception caractérisée par l'oubli ducuisinier de purger un aliment avant de l'avoir incorporé dans sapréparation.Par décision du 21 juin 2004, confirmée sur opposition le 12 juillet 2004,ASSURA a informé W.________ qu'elle maintenait son refus de prendre en chargeles frais de traitement de la lésion dentaire, étant donné que l'événement du15 avril 2004 n'était pas un accident, la condition de la cause extérieureextraordinaire n'étant pas remplie. B.W.________ a formé recours contre la décision sur opposition du 12juillet2004 devant le Tribunal cantonal des assurances sociales de la République etcanton de Genève. Une audience de comparution personnelle a eu lieu le 19 octobre 2004, aucours de laquelle W.________ a été entendu par la juridiction cantonale.La juge chargée de l'instruction du recours a demandé des renseignementscomplémentaires au docteur R.________, médecin-dentiste. Dans une lettre du10 décembre 2004, celui-ci a indiqué que la dent en question avait étésoignée et qu'elle avait subi un traitement radiculaire, c'est-à-dire qu'elleétait morte lorsqu'il l'avait couronnée, et qu'elle pouvait ainsi se casserfacilement en mastiquant un cartilage de lard.Par jugement du 11 janvier 2005, le Tribunal cantonal des assurances socialesa rejeté le recours. C.W.________ interjette un recours de droit administratif contre ce jugement,en concluant à l'annulation de celui-ci et à la prise en charge par ASSURA del'événement du 15 avril 2004, le Tribunal fédéral des assurances étant invitéà ordonner le remboursement de la facture du docteur R.________ du 26 mai2004 de 1'606 fr. 60.ASSURA conclut au rejet du recours. L'Office fédéral de la santé publique arenoncé à se déterminer. Considérant en droit: 1.Le litige porte sur le point de savoir si l'événement du 15 avril 2004 doitêtre qualifié d'accident, singulièrement si la condition de la causeextérieure extraordinaire est réalisée dans le cas particulier. 2.Est réputé accident toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire,portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui comprometla santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort (art. 4 LPGA;ATF 129 V 404 consid. 2.1, 122V232 consid. 1 et les références).Il résulte de la définition même de l'accident que le caractèreextraordinaire de l'atteinte ne concerne pas les effets du facteur extérieur,mais seulement ce facteur lui-même. Dès lors il importe peu que le facteurextérieur ait entraîné, le cas échéant, des conséquences graves ouinattendues. Le facteur extérieur est considéré comme extraordinairelorsqu'il excède, dans le cas particulier, le cadre des événements et dessituations que l'on peut, objectivement, qualifier de quotidiens oud'habituels (ATF129V404 consid.2.1, 122V233 consid.1, 121V38consid.1a ainsi que les références). 3.3.1Selon l'art. 61 let. c LPGA, le tribunal établit avec la collaboration desparties les faits déterminants pour la solution du litige; il administre lespreuves nécessaires et les apprécie librement.Dans le domaine des assurances sociales notamment, la procédure est régie parle principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la causedoivent être constatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pasabsolu. Sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer àl'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation desparties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigéd'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faitsinvoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquencesde l'absence de preuves (ATF 125 V 195 consid. 2 et les références; cf. ATF130 I 183 consid. 3.2).En ce qui concerne la preuve, le juge des assurances sociales fonde sadécision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, fauted'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plusvraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblanceprépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéréseulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de faitallégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui luiparaissent les plus probables (ATF 126V360 consid. 5b, 125 V 195 consid. 2et les références; cf. ATF 130 III 324 s. consid. 3.2 et 3.3). Aussin'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequell'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur del'assuré (ATF 126V322 consid. 5a). 3.2 En particulier, celui qui réclame des prestations del'assurance-accidents doit rendre plausible que les éléments d'un accidentsont réunis. S'il ne satisfait pas à cette exigence, en donnant desindications incomplètes, imprécises ou contradictoires, qui ne rendent pasvraisemblables l'existence d'un accident, l'assurance n'est pas tenue deprendre en charge le cas. S'il y a litige, il appartient au juge de dire siles diverses conditions de l'accident sont réalisées. Lorsque l'instructionne permet pas de tenir un accident pour établi ou du moins pourvraisemblable, il constatera l'absence de preuves ou d'indices pertinents et,par conséquent, l'inexistence juridique d'un accident (ATF 116 V 140 consid.4b et les références).De jurisprudence constante, le Tribunal fédéral des assurances considère quela simple présomption que le dommage dentaire se soit produit après avoirmordu sur un corps étranger dur ne suffit pas pour admettre l'existence d'unfacteur extérieur extraordinaire (RAMA 2004 n° U 515 p. 421 consid. 2.2[arrêt L. du 26 février 2004, U 64/02]; Turtè Baer, Die Zahnschädigung alsUnfall in der Sozialversicherung, SJZ 1992, p. 324 et les références). Cetteconclusion est valable non seulement lorsque la personne déclare avoir mordusur «un corps étranger» ou «quelque chose de dur», mais encorelorsqu'elle croit avoir identifié l'objet. Lorsque les indications de lapersonne assurée ne permettent pas de décrire de manière précise et détailléele «corpus delicti», l'autorité administrative (ou le juge, s'il y a eu unrecours) n'est en effet pas en mesure de porter un jugement fiable sur lanature du facteur en cause, et encore moins sur le caractère extraordinairede celui-ci (arrêts A. du 3 avril 2006 [U 202/05] et S. du 20 décembre 1999[U 200/99]). 4.4.1Selon les premiers juges, la présence d'un éclat d'os, et non d'uncartilage, dans le plat en question n'est pas établie. Le recourant avaitémis une hypothèse, lors de l'événement, en raison de la douleur ressentie etdu fait qu'il pensait impossible qu'une dent se casse sur un cartilage. Maisla dent en cause avait été soignée, avait subi un traitement radiculaire etétait couronnée; elle pouvait se casser facilement en mastiquant un cartilagede lard, comme l'avait précisé le médecin-dentiste. De plus, un éclat decartilage ne se distingue pas d'un éclat d'os. Ainsi, les premiers juges ontretenu que le recourant n'avait pas apporté la preuve de la présence d'unfacteur extérieur extraordinaire, ni ne l'avait rendue vraisemblable, motifpour lequel le tribunal l'a débouté de sa demande. D'autre part, la présenced'un morceau de cartilage dans un petit lardon ne pouvait être qualifiéed'extraordinaire, même si l'on voulait faire une distinction entre lardonordinaire et lardon supérieur. 4.2 Le recourant fait grief à la juridiction cantonale d'avoir étendu lacontestation à la présence de cartilage. Il fait valoir que le procès-verbalde comparution personnelle du 19 octobre 2004 ne reflète pas complètement lavérité et qu'il est faux de lui faire dire que «je ne peux pas exclure qu'ils'agissait de cartilage».Dans sa lettre du 3 mai 2004, le recourant a déclaré qu'il avait été victimele 15 avril 2004 d'un «accident masticatoire», survenu dans un restaurantde Provence lors de la consommation d'une tranche de lard contenant un petitéclat d'os. Dans sa lettre du 13 mai 2004, celui-ci a précisé qu'il nes'agissait pas d'une tranche de lard au sens d'oeufs accompagnés de bacon,mais de très petites tranches de lard plus communément appelés «lardons»inclus dans une tartiflette au reblochon et aux pommes de terre. Lors de lacomparution personnelle du 19 octobre 2004, le recourant a déclaré que ce quilui avait fait dire qu'il s'agissait d'un petit bout d'os, c'était la douleurressentie et le petit éclat qu'il avait constaté après. L'hypothèse la plusvraisemblable pour lui est qu'il s'agissait d'un éclat d'os. Le recourantavait déclaré le 3 mai 2004 qu'il provenait de la tranche de lard, ce quiétait une supposition. Ce qui est sûr, c'est qu'il venait de la tartiflette.Il résulte de ces déclarations que ce qui a fait dire au recourant qu'ils'agissait d'un petit bout d'os, c'est la douleur ressentie et le petit éclatqu'il a constaté après. Cela n'est pas suffisant, toutefois, pour apporter lapreuve de l'existence d'un facteur extérieur extraordinaire. Les indicationsplus circonstanciées données après coup par le recourant devant la Cour decéans ne sont pas prouvées. Rien ne permet d'exclure que l'atteinte soit dueà un banal acte de mastication ou que l'objet mâché soit un morceau decartilage, lequel ne constitue pas un facteur extérieur extraordinaire (RAMA1992 n° U 144 p. 83 consid.2b), à l'inverse d'une esquille dans une saucisse(ATF 112V205 consid. 3b; RAMA 1992 n° U 144 p. 83 consid. 2b déjà cité) oud'un caillou dans un plat de riz (RAMA 1999 n° U 349 p. 478 consid. 3a). Lerecourant a lui-même admis qu'il ne pouvait pas exclure qu'il se soit agi decartilage. Cette déclaration du recourant, qui a été consignée dans leprocès-verbal de comparution personnelle du 19 octobre 2004 - au bas duquelcelui-ci a apposé sa signature sans en rectifier le contenu - est au bénéficed'une présomption de vraisemblance, que les affirmations du recourant devantla Cour de céans ne sont pas susceptibles de renverser.Compte tenu des circonstances, il est certes possible, mais nullement établini rendu vraisemblable que la lésion dentaire soit la conséquence d'unaccident au sens juridique du terme. Il appartient par conséquent à l'assuréde supporter les conséquences de l'absence de preuves de l'existence de faitsdont il entend déduire des droits. 5.Vu la nature du litige, la procédure est gratuite (art. 134 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Il n'est pas perçu de frais de justice. 3.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal desassurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Officefédéral de la santé publique. Lucerne, le 24 mai 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances La Présidente de la IIe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.67/05
Date de la décision : 24/05/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-05-24;u.67.05 ?
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