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18/05/2006 | SUISSE | N°C.160/03

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 18 mai 2006, C.160/03


Cause {T 7}C 160/03 Arrêt du 18 mai 2006Ire Chambre Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Meyer, Lustenberger, Borella etKernen. Greffière : Mme Moser-Szeless Secrétariat d'Etat à l'économie, Marché du travail et assurance-chômage,TCRV, Effingerstrasse 31, 3003 Berne, recourant, contre 1. B.________, 1975,2. Office cantonal de l'emploi, Groupe réclamations, rte de Meyrin 49,1211 Genève 28,intimés, Commission cantonale de recours en matière d'assurance-chômage, Genève (Jugement du 20 mars 2003) Faits: A.A.a B.________ travaillait depuis le 1er février 1999 en qualité d'ass

istanteau service de l'entreprise X.________. Durant son congé-...

Cause {T 7}C 160/03 Arrêt du 18 mai 2006Ire Chambre Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Meyer, Lustenberger, Borella etKernen. Greffière : Mme Moser-Szeless Secrétariat d'Etat à l'économie, Marché du travail et assurance-chômage,TCRV, Effingerstrasse 31, 3003 Berne, recourant, contre 1. B.________, 1975,2. Office cantonal de l'emploi, Groupe réclamations, rte de Meyrin 49,1211 Genève 28,intimés, Commission cantonale de recours en matière d'assurance-chômage, Genève (Jugement du 20 mars 2003) Faits: A.A.a B.________ travaillait depuis le 1er février 1999 en qualité d'assistanteau service de l'entreprise X.________. Durant son congé-maternité (du 15 décembre 2001 au 7 avril 2002), laprénommée a résilié son contrat de travail pour le 8 avril 2002, en indiquantà son employeur qu'elle entendait consacrer du temps à son fils et «trouverle mode d'organisation adéquat». Le 7 août suivant, elle s'est annoncée àl'assurance-chômage en précisant qu'elle était prête à travailler à 80%. Invitée par la Caisse cantonale genevoise de chômage (ci-après: la caisse) às'expliquer sur les motifs de la résiliation des rapports de travail,B.________ a exposé avoir cessé son activité pour s'occuper de son enfant«trop petit pour être laissé à une tierce personne». Par décision du 18 septembre 2002, la caisse a suspendu l'assurée dans sondroit aux indemnités de chômage pour une durée de 20 jours, au motif qu'elleétait sans travail par sa propre faute. Eu égard à la situation personnellede l'assurée qui a quitté son activité professionnelle pour s'occuper de sonnouveau-né, elle a retenu une faute de gravité moyenne à son encontre. A.b B.________ a déféré cette décision au Groupe réclamations de l'Officecantonal genevois de l'emploi (ci-après: l'OCE, groupe réclamations) qui apartiellement admis la réclamation en réduisant la suspension prononcée parla caisse à 16 jours (décision du 29 novembre 2002). En substance, l'OCE,groupe réclamations, a considéré que l'assurée avait pris en charge unepartie du dommage qu'elle avait causé à l'assurance-chômage en ne sollicitantdes indemnités qu'à partir du 7 août 2002, alors qu'elle avait dénoncé soncontrat de travail pour le 8 avril 2002 déjà; une suspension d'une durée de16 jours correspondant au minimum de la faute de gravité moyenne respectaitdès lors le principe de la proportionnalité. B.Saisi d'un recours du Secrétariat d'Etat à l'économie (ci-après: seco) contrecette décision, la Commission cantonale de recours en matièred'assurance-chômage du canton de Genève (aujourd'hui: Tribunal cantonal desassurances sociales, Genève) l'a rejeté par jugement du 20 mars 2003. C.Le seco interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont ilrequiert l'annulation, en concluant à la confirmation de la suspensionprononcée le 18 septembre 2002. B. ________ n'a pas répondu au recours. De son côté, la caisse conclut àl'admission du recours, tandis que l'OCE, groupe réclamations, en demande lerejet. D.Averti par le Tribunal fédéral des assurances qu'il pourrait être amené àannuler le jugement de la Commission cantonale genevoise de recours, ainsique la décision de la caisse, le seco s'est déterminé sur ce point et aconfirmé les conclusions de son recours. Considérant en droit: 1.La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales(LPGA) du 6 octobre 2000, entrée en vigueur au 1er janvier 2003 n'est pasapplicable au présent litige, dès lors que le juge des assurances socialesn'a pas à prendre en considération les modifications du droit ou de l'état defait postérieures à la date déterminante de la décision litigieuse du 18septembre 2002 (ATF 129 V 4 consid. 1.2 et les arrêts cités). 2.Les premiers juges ont exposé correctement les règles relatives à lasuspension du droit à l'indemnité lorsque l'assuré est sans travail par sapropre faute (art. 30 al. 1 let. a LACI), la notion de chômage imputable àune propre faute de l'assuré (notamment, art. 44 al. 1 let. b OACI), ainsique la durée de la suspension en fonction du degré de la faute (art. 30 al. 3en relation avec l'art. 45 al. 3 OACI). Il suffit d'y renvoyer. Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, dans les cas desuspension pour le motif prévu à l'art. 44 al. 1 let. b, l'art. 45 al. 3 OACIne constitue qu'un principe dont l'administration et le juge des assurancespeuvent s'écarter lorsque les circonstances particulières du cas d'espèce lejustifient. Dans ce sens, le pouvoir d'appréciation de l'une et de l'autren'est pas limité à la durée minimum de suspension fixée pour les cas de fautegrave. Aussi bien l'administration que le juge ont la possibilité d'infligerune sanction moins sévère (RJJ 1999 p. 54; DTA 2000 n° 8 p. 42 consid. 2c). 3.3.1Se référant à plusieurs arrêts du Tribunal fédéral des assurances (DTA1992 n° 17 p. 151 consid. 2c, 1979 n° 24 p. 124 consid. 2; arrêt L. du 5juillet 2002, C 46/02, arrêt I. du 21 novembre 2001, C 48/01), la juridictioncantonale a retenu que l'instance inférieure avait à bon droit diminué ladurée de la suspension prononcée à l'égard de l'assurée. Selon elle, il yavait lieu de prendre en considération, dans le sens d'une réduction de lapénalité, le fait que B.________ avait pris en charge une partie du dommageentraîné, en attendant quatre mois suivant la cessation des rapports detravail avant de s'annoncer au chômage. En effet, le moment auquel unepersonne sollicite les prestations de chômage relèverait des circonstancespersonnelles de l'assuré qui doivent être examinées lors de l'appréciation dela faute et de la sanction qui en découle. 3.2 Sans critiquer le degré de la faute retenu par la juridiction cantonale,- qui à l'instar de la caisse l'a qualifiée de moyenne -, le seco conteste ladiminution de la durée de suspension du droit à l'indemnité. Il reproche auxpremiers juges d'avoir pris en compte le moment de l'inscription au chômage àtitre de circonstance personnelle justifiant la réduction de la durée de lasuspension, alors qu'il s'agit d'un fait déterminant pour la fixation dudroit à l'indemnité, mais non pour celle de la gravité de la faute. Selonlui, seules des circonstances liées à la cessation de l'activitéprofessionnelle doivent être examinées pour établir le degré de la faute. Lanotion de prise en charge d'une partie du dommage serait en revanche inconnuedans l'assurance-chômage, si bien que les arrêts du 5 juillet 2002 (C 46/02)et du 21 novembre 2001 (C 48/01) cités par la juridiction cantonale seraientcontraires à la volonté du législateur. 4.4.1Dans un arrêt récent R. du 28 décembre 2005 (C 73/03), le Tribunal fédéraldes assurances a rappelé que conformément aux termes de l'art. 30 al. 3 3èmephrase LACI, la gravité de la faute constitue en principe le seul critèrepour fixer la durée de la suspension du droit à l'indemnité de chômage.Aussi, est déterminant le comportement de l'assuré qui conduit à lasurvenance du chômage et, partant, du cas d'assurance, et non pas le laps detemps, dû au hasard, qui s'étend jusqu'au moment où l'assuré retrouve unemploi mettant fin au chômage (ATF 123 V 151 consid. 1c, 122 V 44 3c/aa, 112V 332 consid. 3c, DTA 1999 n° 32 p. 184). La durée effective du chômage et ledommage effectivement survenu ne sont pas pertinents, à la lumière de cettejurisprudence, pour déterminer la gravité de la faute et la durée de lasuspension du droit à l'indemnité de chômage. La Cour de céans a toutefois précisé qu'il y a lieu de tenir compte du faitqu'un assuré attende avant de s'annoncer au chômage et cherche du travailavec toute l'intensité requise, dès la résiliation du contrat et jusqu'aumoment de requérir les prestations du chômage. Par un tel comportement,l'assuré participe en effet à la diminution du dommage: la probabilité detrouver une nouvelle activité pendant une certaine période existe dans lamême mesure que si l'assuré bénéficiait de prestations de l'assurance aprèsla fin des rapports de travail et cherchait en même temps un nouveau poste;partant, le dommage que cause l'assuré par la résiliation des rapports detravail est vraisemblablement moins important lorsqu'il assume d'abordlui-même la perte de gain. Le comportement consistant à chercher du travailavec toute la diligence nécessaire après la résiliation du contrat detravail, tout en attendant avant de s'inscrire au chômage, doit donc êtrepris en considération à titre de facteur diminuant le dommage pour apprécierla gravité de la faute (arrêt R. précité, consid. 3.3 et 3.4; voir aussil'arrêt B. du 29 décembre 2005, C 128/04, publié au SVR 2006 ALV n° 5 p. 15,qui confirme la possibilité de tenir compte de l'inscription reportée del'assuré en tant que facteur atténuant). 4.2 La prise en considération, dans l'appréciation de la gravité de la faute,du comportement de l'assuré à titre de facteur diminuant le dommage supposeque l'assurance-chômage aurait subi un dommage (supplémentaire) si l'assuréavait sollicité des indemnités sans attendre avant de s'inscrire. En d'autrestermes, pour considérer qu'un assuré a pris en charge une partie du dommageoccasionné à l'assurance-chômage en ne s'annonçant pas immédiatement après larésiliation des rapports de travail, il faut encore qu'il ait pu prétendre àdes indemnités de chômage s'il s'était annoncé tout de suite. En l'occurrence, il ressort des déclarations de l'assurée à l'administration,ainsi que de son recours contre la décision litigieuse, qu'elle a renoncé àpoursuivre son activité professionnelle au terme de son congé maternité afinde se consacrer personnellement à son enfant en bas âge, estimant qu'il étaittrop petit pour être confié à une tierce personne. Elle a précisé parailleurs qu'elle n'a commencé à chercher du travail qu'au moment où son filsétait suffisamment grand pour être laissé à la garde d'une personne deconfiance, au début du mois d'août 2002. Aussi ne s'était-elle inscrite auchômage qu'à partir «du moment où [elle] s'estimai[t] plaçable». Au vu de ces éléments, on constate que B.________ n'était pas disposée àaccepter un travail jusqu'au moment où elle a demandé des prestations del'assurance-chômage. Elle n'était ainsi pas apte au placement, du moins dupoint de vue subjectif (sur la notion de disposition à accepter un travail,voir ATF 123 V 216 consid. 216; Nussbaumer, Arbeitslosenversicherung in:Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, n° 218sv.), pendant près de quatre mois suivant la fin de son congé maternité, desorte qu'elle n'aurait pas eu droit à des indemnités de chômage, les eût-elledemandées (cf. art. 8 al. 1 let. f et 15 al. 1 LACI). Partant, on ne voit pasde quel dommage l'assurée aurait assumé une partie en ne s'inscrivant auchômage qu'après un délai d'attente de plusieurs mois. Cette circonstance nepouvait donc justifier, en tant que telle, la réduction de la durée desuspension de 20 à 16 jours. 5.Cela étant, la suspension du droit à l'indemnité de chômage prévue à l'art.30 al. 1 let. a LACI suppose que l'assuré s'est trouvé sans travail par sapropre faute. Selon l'art. 44 al. 1 let. b OACI, est notamment réputé sanstravail par sa propre faute, l'assuré qui a résilié lui-même le contrat detravail, sans s'être préalablement assuré d'un autre emploi, sauf s'il nepouvait être exigé de lui qu'il conservât son ancien emploi. Contrairement à ce qu'ont retenu la caisse et la juridiction cantonale, on nesaurait reprocher à l'intimée d'avoir adopté un comportement fautif au sensde ces dispositions. B.________ a résilié son contrat de travail pendant soncongé-maternité avec effet à la fin de celui-ci (le 8 avril 2002) aprèsqu'elle a rencontré des difficultés imprévisibles en rapport avec le sevragede son fils (cf. réclamation du 16 octobre 2002). Elle s'est alors renduecompte que les soins prodigués à son fils requéraient davantage de tempsqu'elle n'avait prévu, ce qui l'empêchait (dans l'immédiat) de reprendre sonactivité professionnelle. Aussi, au moment de résilier les rapports detravail, son activité ne convenait-elle plus à sa situation personnelle, sibien que son travail n'était pas réputé convenable au sens de l'art. 16 al. 2let. c LACI et on ne pouvait exiger d'elle qu'elle le conservât. Enconséquence, il n'y avait pas lieu de prononcer une suspension du droit àl'indemnité à l'encontre de l'intimée. 6.Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté et les décisions del'administration et des autorités cantonales doivent être annulées. Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Le jugement de la Commission cantonale de recours en matièred'assurance-chômage du canton de Genève du 20 mars 2003, la décision del'Office cantonal de l'emploi, Groupe réclamations, du 29 novembre 2002,ainsi que la décision de la Caisse cantonale genevoise de chômage du 18septembre 2002 sont annulés. 3.Il n'est pas perçu de frais de justice. 4.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances ducanton de Genève et à la Caisse cantonale genevoise de chômage. Lucerne, le 18 mai 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances La Présidente de la Ire Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.160/03
Date de la décision : 18/05/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-05-18;c.160.03 ?
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