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16/05/2006 | SUISSE | N°2P.341/2005

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 16 mai 2006, 2P.341/2005


{T 0/2}2P.341/2005 Arrêt du 16 mai 2006IIe Cour de droit public MM. les Juges Merkli, Président,Hungerbühler et Wurzburger.Greffière: Mme Dupraz. Association des Pharmacies du Canton de Genève, recourante,représentée par Me Hrant Hovagemyan, avocat, contre X.________ SA,représentée par Me Pascal Marti, avocat,Pharmacien cantonal du canton de Genève,avenue de Beau-Séjour 24, 1206 Genève,Tribunal administratif du canton de Genève,rue du Mont-Blanc 18, case postale 1956,1211 Genève 1. Qualité de partie en cas de dénonciation, recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal adm

inistratif du canton deGenève du 25 octobre 2005. Faits: A.Par c...

{T 0/2}2P.341/2005 Arrêt du 16 mai 2006IIe Cour de droit public MM. les Juges Merkli, Président,Hungerbühler et Wurzburger.Greffière: Mme Dupraz. Association des Pharmacies du Canton de Genève, recourante,représentée par Me Hrant Hovagemyan, avocat, contre X.________ SA,représentée par Me Pascal Marti, avocat,Pharmacien cantonal du canton de Genève,avenue de Beau-Séjour 24, 1206 Genève,Tribunal administratif du canton de Genève,rue du Mont-Blanc 18, case postale 1956,1211 Genève 1. Qualité de partie en cas de dénonciation, recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton deGenève du 25 octobre 2005. Faits: A.Par courrier du 27 janvier 2005, l'Association des Pharmacies du Canton deGenève (ci-après: l'Association) a dénoncé le groupe X.________ SA auPharmacien cantonal du canton de Genève (ci-après: le Pharmacien cantonal)pour publicité illégale, utilisation des termes "pharmacie de garde" (et, parla suite, "pharmacie de service") ainsi que collusion avec descaisses-maladie.Le 1er mars 2005, le Pharmacien cantonal a fait savoir à l'Association qu'iltraitait sa dénonciation, mais ne pouvait pas l'informer des décisions prisesen l'état puisqu'elle n'était pas partie à la procédure.Le 19 avril 2005, l'Association a adressé plusieurs requêtes au Pharmaciencantonal, en particulier celle d'être admise en qualité de partie à laprocédure en cours.Le 15 juin 2005, le Pharmacien cantonal a confirmé à l'Association qu'ellen'avait pas qualité de partie dans la procédure initiée par sa dénonciation. B.L'Association a recouru contre la décision du Pharmacien cantonal du 15 juin2005 auprès du Tribunal administratif du canton de Genève (ci-après: leTribunal administratif), qui l'a déboutée par arrêt du 25 octobre 2005. LeTribunal administratif a rappelé que le dénonciateur n'avait pas qualité departie dans une procédure dirigée contre la personne dont il avait critiquéles agissements. Pour avoir la qualité de partie, il fallait être affectédirectement dans ses droits ou obligations. Or, une dénonciation pouvait toutau plus aboutir à une sanction destinée à assurer la protection de l'intérêtpublic. C.Agissant par la voie du recours de droit public, l'Association demande auTribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt duTribunal administratif du 25 octobre 2005. La recourante invoque les art. 8,9 et 29 Cst. Elle se plaint d'arbitraire dans la constatation des faits etdans l'application du droit ainsi que de violation du droit d'être entendu etde déni de justice.Le Tribunal administratif a déclaré n'avoir aucune observation à formuler surle recours. Le Pharmacien cantonal conclut, sous suite de frais et dépens, aurejet du recours et à la confirmation de l'arrêt entrepris. X.________ SAconclut, sous suite de frais et dépens, au rejet du recours. D.Sur le plan civil, l'Association a agi contre X.________ SA pour concurrencedéloyale et elle a été déboutée en dernière instance par le Tribunal fédéral(arrêts 4C.363/2005 et 4P.285/2005 du 27 mars 2006). Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recoursqui lui sont soumis (ATF 131 I 153 consid. 1 p. 156). 1.1 L'acte confirmant la décision par laquelle une autorité de surveillancen'entre pas en matière sur une dénonciation qui lui est adressée, la rejetteou ne lui donne aucune suite, ne peut pas être attaqué par la voie du recoursde droit public (cf. ATF 129 II 297 consid. 2.1 p. 300; 121 I 42 consid. 2ap. 45, 87 consid. 1a p. 90; 94 I 67/68) ni, avec certaines nuances, par celledu recours de droit administratif (cf. ATF 129 II 297 consid. 3.1 p. 302/303;arrêt 2A.447/2005 du 6 mars 2006 destiné à la publication, consid. 4).Toutefois, le recours de droit public est recevable sur le point limité desavoir si c'est à tort que la qualité de partie a été déniée au recourant(cf. ATF 121 I 42 consid. 2e p. 47; RDAT 2001 II n° 52 p. 203, 2P.308/2000,consid. 1b p. 204). Par conséquent, c'est dans cette mesure uniquement qu'ily a lieu d'entrer en matière sur le présent recours. 1.2 Selon l'art. 90 al. 1 lettre b OJ, l'acte de recours doit - sous peined'irrecevabilité - contenir un exposé des faits essentiels et un exposésuccinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés,précisant en quoi consiste la violation. Lorsqu'il est saisi d'un recours dedroit public, le Tribunal fédéral n'a donc pas à vérifier, de lui-même, sil'acte attaqué est en tout point conforme au droit et à l'équité; iln'examine que les moyens de nature constitutionnelle, invoqués etsuffisamment motivés dans l'acte de recours (ATF 130 I 26 consid. 2.1 p. 31,258 consid. 1.3 p. 261/262). En outre, dans un recours pour arbitraire, lerecourant ne peut pas se contenter de critiquer l'acte entrepris comme il leferait dans une procédure d'appel où l'autorité de recours peut revoirlibrement l'application du droit. II doit préciser en quoi l'acte attaquéserait arbitraire (ATF 128 I 295 consid. 7a p. 312).La recourante se plaint d'une violation de l'art. 8 Cst. sans toutefoisdévelopper d'argumentation tendant à démontrer que le principe de l'égalitéaurait été enfreint. Sur ce point, son recours n'est donc pas recevable auregard de l'art. 90 al. 1 lettre b OJ. 2.La recourante reproche au Tribunal administratif d'avoir violé son droitd'être entendue, en motivant insuffisamment l'arrêt attaqué. Elle se plaintque certains faits, importants selon elle, n'y aient pas été mentionnés. Elleconsidère que cela constitue aussi un déni de justice.Le moyen soulevé ne remplit pas les conditions strictes de l'art. 90 al. 1lettre b OJ, de sorte qu'il est irrecevable. Au demeurant, s'il avait étérecevable, il aurait dû être rejeté.En effet, le droit d'être entendu implique notamment pour l'autoritél'obligation de motiver sa décision (ATF 126 I 97 consid. 2b p. 102). Lamotivation d'une décision est cependant suffisante lorsque l'intéressé estmis en mesure d'en apprécier la portée et de la déférer à une instancesupérieure en pleine connaissance de cause. Il suffit que l'autoritémentionne au moins brièvement les motifs qui l'ont guidée et sur lesquelselle a fondé son prononcé. Elle peut ainsi se limiter aux points essentielspour la décision à rendre (ATF 130 II 530 consid. 4.3 p. 540; 129 I 232consid. 3.2 p. 236). Or, l'arrêt entrepris satisfait à ses exigences; il estparfaitement compréhensible et le Tribunal administratif n'avait pas à seprononcer sur les arguments soulevés qu'il n'estimait pas décisifs. 3.3.1La recourante se plaint que le Tribunal administratif ait fait uneapplication arbitraire des règles de procédure cantonale, en lui déniant laqualité de partie.On peut se demander si ce moyen respecte les conditions de motivation del'art. 90 al. 1 lettre b OJ. Cependant, cette question peut rester ouverte,car le grief n'est de toute façon pas fondé. 3.2 Une décision est arbitraire lorsqu'elle contredit clairement la situationde fait, qu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair etindiscuté ou qu'elle heurte d'une manière choquante le sentiment de lajustice et de l'équité. Il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une solutionautre que celle de l'autorité cantonale apparaît concevable, voirepréférable. A cet égard, et en particulier lorsqu'il est appelé à revoirl'interprétation d'une norme sous l'angle restreint de l'arbitraire, leTribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonalede dernière instance que si elle apparaît insoutenable, en contradictionmanifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs ou enviolation d'un droit certain. En outre, pour qu'une décision soit annulée, ilne suffit pas que sa motivation soit insoutenable; encore faut-il que cettedécision soit arbitraire dans son résultat (ATF 131 I 217 consid. 2.1 p. 219;129 I 8 consid. 2.1 p. 9). 3.3 Selon la jurisprudence et la doctrine, le dénonciateur n'a en principepas la qualité de partie dans une procédure cantonale consécutive à unedénonciation, car une telle procédure tend à la sauvegarde de l'intérêtpublic et non à celle de l'intérêt privé du dénonciateur (cf. ATF 121 I 42consid. 2e p. 47; 106 Ia 237 consid. 2 p. 238; RDAT 2001 II n° 52 p. 203,2P.308/2000, consid. 2c p. 205; Alfred Kölz/Isabelle Häner,Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, 2ème éd., Zurich1998, n. 263, p. 95; Benoît Bovay, Procédure administrative, p. 129: PierreMoor, Droit administratif, vol. II, 2ème éd., Berne 2002, n. 5.2.2.2, p. 523;Gabriel Boinay, Le droit disciplinaire dans la fonction publique et dans lesprofessions libérales, particulièrement en Suisse romande, RJJ 1998 p. 1 ss,n° 186, p. 79/80). 3.4 L'interprétation que le Tribunal administratif a faite du droit cantonal,en particulier de l'art. 7 de la loi genevoise du 12 septembre 1985 sur laprocédure administrative, est conforme à la jurisprudence et à la doctrinerappelées ci-dessus (consid. 3.3) et échappe au grief d'arbitraire (cf. RDAT2001 II n° 52 p. 203, 2P.308/2000, consid. 2c p. 205).On relèvera, en particulier, que l'art. 24 al. 3 de la loi genevoise du 11mai 2001 sur l'exercice des professions de la santé, les établissementsmédicaux et diverses entreprises du domaine médical (LPS) prévoit que "lepharmacien est tenu d'assurer un service de garde dont les modalités sontdéterminées par le règlement d'exécution". Selon l'art. 24 al. 1 du règlementd'exécution du 25 juillet 2001 de la loi genevoise sur l'exercice desprofessions de la santé, les établissements médicaux et diverses entreprisesdu domaine médical, le service de garde est assuré selon un plan de rotationétabli par l'Association en accord avec le Pharmacien cantonal et soumis àl'approbation du Département genevois de l'action sociale et de la santé(ci-après: le Département). Ainsi, la responsabilité du bon exercice duservice de garde incombe au Département, et non pas à l'Association, dont lerôle se borne à proposer le plan de rotation. La présentation dudit plan nesuffit dès lors pas à conférer la qualité de partie à la recourante dans laprocédure cantonale consécutive à la dénonciation de certaines pratiques deX.________ SA. Au demeurant, cette dénonciation ne concerne pas le respect duplan de rotation, mais vise l'utilisation des termes "pharmacie de garde" ou"pharmacie de service".Le fait que la recourante ait notamment pour but de défendre les intérêtsprofessionnels, commerciaux et matériels de ses membres ne l'investit pas,sur le plan du droit administratif, d'une mission de surveillance générale durespect de la législation sur l'exercice des professions de la santé, tâchequi incombe à l'autorité administrative - plus particulièrement au Conseild'Etat genevois, par l'intermédiaire du Département (art. 4 LPS).Enfin, l'arrêt attaqué n'est pas arbitraire dans son résultat, car larecourante n'est pas privée de moyens d'action: pouvant procéder par la voiecivile ou par la voie pénale, elle a choisi la première.En conclusion, en limitant de manière stricte le rôle du dénonciateur dans laprocédure genevoise, le Tribunal administratif n'a pas violé le principe del'interdiction de l'arbitraire. 4.Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il estrecevable.Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 156 al.1, 153 et 153a OJ) et n'a pas droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ). X. ________ SA a droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ). Le Pharmaciencantonal n'a pas droit à des dépens (art. 159 al. 2 OJ, par analogie). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 2.Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge de la recourante. 3.La recourante versera à X.________ SA une indemnité de 3'000 fr. à titre dedépens. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, auPharmacien cantonal et au Tribunal administratif du canton de Genève. Lausanne, le 16 mai 2006 Au nom de la IIe Cour de droit publicdu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.341/2005
Date de la décision : 16/05/2006
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-05-16;2p.341.2005 ?
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