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02/05/2006 | SUISSE | N°H.193/05

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 02 mai 2006, H.193/05


Cause {T 7}
H 193/05

Arrêt du 2 mai 2006
Ire Chambre

Mmes et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Ferrari, Ursprung, Widmer et
Frésard. Greffier : M. Beauverd

C.________, avocat, recourant,

contre

Caisse interprofessionnelle AVS de la Fédération des Entreprises Romandes
Genève (FER CIAM 106.1), rue de St-Jean 98, 1201 Genève, intimée

Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève

(Jugement du 9 novembre 2005)

Faits:

A.
C. ________ exerce une activité professionnelle en tant qu'avocat et expertr>fiscal diplômé. Il n'occupe aucun salarié. Il est affilié à la Caisse
interprofessionnelle AVS de la Fédération des Entreprises...

Cause {T 7}
H 193/05

Arrêt du 2 mai 2006
Ire Chambre

Mmes et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Ferrari, Ursprung, Widmer et
Frésard. Greffier : M. Beauverd

C.________, avocat, recourant,

contre

Caisse interprofessionnelle AVS de la Fédération des Entreprises Romandes
Genève (FER CIAM 106.1), rue de St-Jean 98, 1201 Genève, intimée

Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève

(Jugement du 9 novembre 2005)

Faits:

A.
C. ________ exerce une activité professionnelle en tant qu'avocat et expert
fiscal diplômé. Il n'occupe aucun salarié. Il est affilié à la Caisse
interprofessionnelle AVS de la Fédération des Entreprises romandes (FER CIAM,
ci-après: la caisse de compensation). Par ailleurs, il est affilié à titre
facultatif, pour sa propre prévoyance professionnelle, à la Fondation de
Prévoyance en faveur des Membres de l'Ordre des Avocats de Genève et de leur
Personnel (FAVIA). Pour l'année 2003, il a versé à cette institution de
prévoyance des cotisations personnelles pour un montant de 45'259fr.20.

Par décision du 13 juillet 2005, la caisse de compensation a fixé à
42'834fr. (frais d'administration compris) le montant des cotisations
personnelles AVS/AI/APG, ainsi que les contributions aux régimes cantonaux
des allocations familiales et de l'assurance-maternité, dues par C.________
pour l'année 2003. Ce montant tenait compte d'une déduction de 22'629fr.60
correspondant à la moitié des cotisations personnelles versées par
l'intéressé à la fondation FAVIA.

L'assuré a formé opposition en concluant à la déduction de la totalité des
cotisations versées à cette institution de prévoyance. La caisse de
compensation a rejeté son opposition le 9 septembre 2005.

B.
Statuant le 9 novembre 2005, le Tribunal cantonal des assurances du canton de
Genève a rejeté le recours formé contre cette dernière décision par l'assuré.

C.
C.________ interjette un recours de droit administratif dans lequel il
conclut à l'annulation du jugement cantonal et demande au Tribunal fédéral
des assurances de dire que la totalité des cotisations qu'il a versées au
deuxième pilier sont déductibles de son revenu déterminant.

La caisse de compensation renonce à prendre position. Quant à l'Office
fédéral des assurances sociales (OFAS), il propose de rejeter le recours.

Considérant en droit:

1.
Selon l'art.128OJ, le Tribunal fédéral des assurances connaît en dernière
instance des recours de droit administratif contre des décisions au sens des
art.97, 98let.bàhet 98aOJ en matière d'assurances sociales. Quant à la
notion de décision pouvant faire l'objet d'un recours de droit administratif,
l'art.97OJ renvoie à l'art.5PA. Selon le premier alinéa de cette
disposition, sont considérées comme décisions les mesures prises par les
autorités dans des cas d'espèce, fondées sur le droit public fédéral (et qui
remplissent par ailleurs certaines conditions relatives à leur objet). Il
s'ensuit que le recours de droit administratif est irrecevable dans la mesure
où le litige a trait au régime des allocations familiales et de
l'assurance-maternité du droit cantonal (ATF124V146 consid.1 et la
référence).

2.
2.1Lorsqu'une personne de condition indépendante est également employeur
(c'est-à-dire lorsqu'elle emploie au moins une tierce personne en vertu d'un
contrat de travail), elle peut s'affilier, à titre facultatif, à
l'institution de prévoyance de son entreprise ou auprès de l'institution de
prévoyance dont elle relève à raison de sa profession (soit l'institution de
prévoyance de son association professionnelle), ou encore auprès de
l'institution supplétive (art. 4 et 44 LPP). Les indépendants qui n'occupent
pas de personnel peuvent s'affilier auprès de l'institution de prévoyance de
leur association professionnelle ou auprès de l'institution supplétive.

2.2 En l'espèce, le recourant - qui n'occupe pas de salarié - est affilié à
titre facultatif auprès de l'institution de prévoyance des membres de l'ordre
des avocats (FAVIA). Le litige porte sur le point de savoir s'il peut déduire
de son revenu soumis à cotisation la totalité ou la moitié seulement des
contributions qu'il a versées à cette institution.

2.3 A ce propos, l'OFAS a édicté des directives selon lesquelles les
cotisations courantes ainsi que les rachats d'années de cotisation sont
déductibles en tant que versements personnels des indépendants à des
institutions de prévoyance professionnelle. Pour les indépendants, les
cotisations courantes sont déductibles dans la même proportion que la part
qu'ils prennent habituellement à leur charge pour leur propre personnel. Pour
les indépendants sans employés, par analogie avec l'art. 66 al. 1 LPP, la
moitié des cotisations courantes est déductible (ch. 1103 et 1104 des
directives de l'OFAS sur les cotisations des travailleurs indépendants et des
personnes sans activité lucrative [DIN] dans l'AVS, AI et APG).

2.4 Le recourant conteste la légalité de ces directives en tant qu'elles
limitent la possibilité, pour un indépendant qui n'occupe pas de salarié, de
déduire la moitié seulement des cotisations courantes qu'il verse au deuxième
pilier. Selon lui, cette restriction s'écarte du texte de l'art.9 al. 2 let.
e LAVS. Du moment que les employeurs peuvent déduire la totalité des
cotisations patronales, peu importe que celles-ci s'élèvent à la moitié, aux
deux tiers ou aux trois quarts de la cotisation globale. Il est arbitraire,
toujours selon le recourant, de fixer une limite de 50 pour cent.

3.
L'art. 9 LAVS (dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 1997),
relatif à la notion et à la détermination du revenu déterminant provenant
d'une activité indépendante, est ainsi libellé:
1.Le revenu provenant d'une activité indépendante comprend tout revenu du
travail autre que la rémunération pour un travail accompli dans une situation
dépendante.

2. Pour déterminer le revenu provenant d'une activité indépendante, on déduit
du revenu brut:
a.les frais généraux nécessaires à l'acquisition du revenu brut;
b.les amortissements et les réserves d'amortissement autorisés par l'usage
commercial et correspondant à la perte de valeur subie;
c.les pertes commerciales effectives qui ont été comptabilisées;
d.les sommes que l'exploitant verse, durant la période de calcul, à des fins
de bienfaisance en faveur de son personnel, s'il est établi que toute autre
utilisation ultérieure est exclue, ou pour des buts de pure utilité publique.
Sont exceptées les cotisations dues en vertu de l'art. 8 et celles qui sont
prévues par la loi fédérale du 19 juin 1959 sur l'assurance invalidité (LAI)
et par la loi fédérale du 25septembre 1952 sur le régime des allocations
pour perte de gain en faveur des personnes servant dans l'armée ou dans la
protection civile;
e.les versements personnels à des institutions de prévoyance professionnelle
dans la mesure où ils correspondent à la part habituellement prise en charge
par l'employeur;
f.l'intérêt du capital propre engagé dans l'entreprise. Le Conseil fédéral en
fixe le taux sur préavis de la Commission fédérale de l'assurance-vieillesse,
survivants et invalidité.
Le Conseil fédéral est autorisé à admettre, au besoin, d'autres déductions du
revenu brut, provenant de l'exercice d'une activité lucrative indépendante.

3. Le revenu provenant d'une activité indépendante et le capital propre
engagé dans l'entreprise sont déterminés par les autorités fiscales
cantonales et communiqués aux caisses de compensation.
Pour établir la nature et fixer l'importance des déductions admises selon
l'art. 9 al. 2, let. a à e, LAVS, les dispositions en matière d'impôt fédéral
direct sont déterminantes (art. 18 al. 1 RAVS).

4.
4.1Jusqu'à la fin de l'année 1996, la déduction -qui est ici en cause-
prévue à l'art. 9 al. 2 let. e LAVS était réglée à l'art. 18 al. 3 RAVS (en
vigueur jusqu'au 31 décembre 1996). Selon cette disposition, devaient être
déduits du revenu brut les versements personnels à des institutions de la
prévoyance professionnelle, dans la mesure où ils correspondent à la part
habituellement prise en charge par l'employeur; les autorités fiscales
cantonales établissent les déductions en application des dispositions en
matière d'impôt fédéral direct.

4.2 Cette disposition, entrée en vigueur le 1er janvier 1987, partait du
constat que les cotisations réglementaires versées par l'employeur à des
institutions de prévoyance étaient exceptées du salaire déterminant (voir
l'art. 8 let. a RAVS). Il en allait différemment pour les personnes exerçant
une activité lucrative indépendante, qui avaient la possibilité de s'assurer
à titre facultatif conformément à la LPP: ces personnes devaient supporter
seules la charge de leurs cotisations personnelles au deuxième pilier. Ces
cotisations n'étaient pas considérées comme des dépenses autorisées par
l'usage commercial. Elles ne pouvaient donc pas être déduites du revenu
déterminant lors du calcul des cotisations AVS/AI/APG des indépendants. Le
principe de l'égalité de traitement entre salariés et indépendants exigeait
toutefois que de telles cotisations fussent reconnues dans l'AVS, au moins
partiellement, comme une dépense autorisée par l'usage commercial. Aussi
bien, le Conseil fédéral a-t-il décidé, par l'adoption de l'ancien art. 18
al. 3 RAVS, de permettre une déduction à ce titre. Si l'indépendant est en
même temps un employeur et s'il prend à sa charge, en cette qualité, une part
(par ex. 60pour cent) de la totalité des cotisations dues au deuxième pilier
par ses salariés, cet indépendant doit pouvoir déduire de son revenu brut,
dans la même mesure et au titre d'une dépense autorisée par l'usage
commercial, les cotisations qu'il a personnellement versées pour lui-même au
deuxième pilier. Pour les indépendants n'ayant pas de salariés à leur
service, qui s'assurent à titre facultatif, une telle comparaison n'est
toutefois pas possible. Dans de tels cas, il était équitable d'appliquer par
analogie l'art. 66 al. 1 LPP: la moitié de ses cotisations serait désormais
considérée comme une dépense commercialement justifiée et déductible (voir à
ce sujet RCC 1987 p. 5 s.; voir aussi ATF 129 V 296 consid. 3.2.2.1).
4.3 Par la suite (à partir du 1er janvier 1997), cette disposition
réglementaire a été intégrée dans la LAVS, mais uniquement pour des raisons
de clarté, afin que toutes les déductions du revenu d'une activité
indépendante admissibles soient énumérées dans la loi (message du 5 mars 1990
sur la 10ème révision de l'assurance-vieillesse et survivants [FF 1990 II 1,
p. 85]; cf. aussi VSI 1996 p. 23). La modification de l'art. 9 al. 2 let. e
LAVS proposée par le Conseil fédéral n'a donné lieu à aucune discussion lors
des débats parlementaires (BO 1991 CE 257 s., 1993 CN 251; cf. consid. 2.2.2
de l'arrêt W. du 13mai 2003, H 113/01, non publié dans l'ATF 129 V 293).

5.
5.1Selon l'art. 66 al. 1 LPP (voir aussi l'art. 331 al. 3 CO), la somme des
cotisations (contribution) de l'employeur doit être au moins égale à la somme
des cotisations de tous les salariés; la contribution de l'employeur ne peut
être fixée plus haut qu'avec son assentiment. En droit fiscal, cette
réglementation s'applique par analogie aux déductions des indépendants qui
n'occupent pas de personnel: 50pour cent des contributions versées par
l'indépendant au deuxième pilier représentent la «part employeur» et
50pour cent la «part employé». Le contribuable de condition indépendante
ne peut donc porter au débit de son compte de résultat que les versements qui
correspondent à la «part employeur» (Markus Reich/Marina Züger, in: Martin
Zweifel/Peter Athanas [éd.], Kommentar zum schweizerischen Steuerrecht, vol.
I/2a, ch. 50 ad art. 27; Wolfgang Maute/Martin Steiner/Adrian Rufener,
Steuern und Versicherungen, Überblick über die steuerliche Behandlung von
Versicherungen, 2ème éd., 1999, p.154 ad let. c et note de bas de page 199;
Peter Agner/Beat Jung/Gotthard Steinmann, Commentaire de la loi sur l'impôt
fédéral direct, traduit de l'allemand par Gladys Laffely Maillard et Jean
Lampert, Zurich 2001, note 16 ad art.33 LIFD; Hanspeter Käser, Unterstellung
und Beitragswesen in der obligatorischen AHV, 2ème éd., Berne 1996, p. 204,
ch. 8.13; arrêt du Tribunal fédéral Z. du 15 mars 2001 [2P.155/2000], publié
dans RDAF 2001 II p. 349, plus spécialement p.351 consid. 3a). Pour le
reste, les cotisations à l'institution de prévoyance professionnelle
constituent des déductions personnelles que peut faire valoir, à ce titre, la
personne exerçant une activité indépendante (art. 33 al. 1 let. d LIFD);
elles ne sauraient charger le compte de résultat (RDAF 2001, II p. 352
consid.3a; Agner/Jung/Steinmann, op. cit., ibidem; Reich/Züger, op. cit.,
ibidem; Käser, op. cit., ibidem).

5.2 Il est admis que la «part employé», en principe déductible en droit
fiscal comme déduction personnelle, ne l'est pas en droit de l'AVS: pour la
personne de condition indépendante n'occupant pas de salariés, la déduction
est admissible jusqu'à concurrence de 50 pour cent à l'instar de la déduction
autorisée en droit fiscal au titre de dépense admise par l'usage commercial.
Cette part de 50 pour cent est considérée comme la part habituellement prise
en charge par l'employeur au sens des art. 9 al. 2 let. e LAVS et 18 al. 3
aRAVS (ATF 129 V 298 consid. 3.2.2.4; Käser, op. cit., p. 204; Hans-Ulrich
Stauffer, Berufliche Vorsorge, Zurich 2005, p. 650 no 1748; Reto Böhi, Der
unterschiedliche Einkommensbegriff im Steuerrecht und im
Sozialversicherungsrecht und seine Auswirkungen auf die Beitragserhebung,
thèse Berne 2001, p. 276; Conférence des fonctionnaires fiscaux d'Etat,
Commission LPP, in: Prévoyance professionnelle et impôts, Cas d'application,
1992, cas no 37 [à propos de l'ancien art. 18 al. 3 RAVS]; Conférence suisse
des impôts, Prévoyance et impôts, Cas d'application de prévoyance
professionnelle et de prévoyance individuelle, cas no A.3.4.1 [à propos de
l'art. 9 al. 2 let. e LAVS]). Pour le surplus, la LAVS ne prévoit pas la
possibilité de déduire la «part employé» au titre de déduction personnelle
ou sociale.

6.
Il résulte de ce qui précède que les directives incriminées de l'OFAS,
contrairement à l'opinion du recourant, ne s'écartent pas du système légal.
La limite de 50pour cent est conforme au texte de l'art.9 al. 2 let.
e LAVS
qui prévoit une limite à la déduction autorisée. Elle correspond à la ratio
legis qui est de mettre sur un pied d'égalité, du point de vue de
l'assujettissement à l'AVS, les cotisations versées en faveur des salariés et
les cotisations personnelles de l'indépendant. Elle est conforme aussi à la
volonté, implicite tout au moins, du législateur, qui a repris sans
discussion la solution consacrée par l'ancien art. 18 al. 3 RAVS et les
motifs qui ont conduit à l'adoption de cette disposition réglementaire. Elle
correspond enfin à la solution du droit fiscal pour ce qui est des dépenses
autorisées par l'usage commercial (cf. art. 18 al. 1 RAVS).

7.
Il suit de là que le recours est mal fondé.

Le recourant, qui succombe, supportera les frais de justice (art. 156 al.1
OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Dans la mesure où il est recevable, le recours est rejeté.

2.
Les frais de justice, d'un montant de 600fr., sont mis à la charge du
recourant et sont compensés avec l'avance de frais qu'il a versée.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 2 mai 2006

Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la Ire Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : H.193/05
Date de la décision : 02/05/2006
Cour des assurances sociales

Analyses

Art. 4 al. 1, art. 9 al. 2 let. e LAVS; art. 18 al. 3 RAVS (en vigueurjusqu'au 31 décembre 1996); art. 66 al. 1 LPP: Calcul du revenu soumis àcotisations provenant d'une activité lucrative indépendante. Légalité d'une directive de l'Office fédéral des assurances sociales,selon laquelle les indépendants sans employés ne sont autorisés à déduire durevenu déterminant soumis à cotisations que la moitié des cotisationscourantes versées à l'institution de prévoyance à laquelle ils sont affiliésà titre facultatif. (consid. 6)


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-05-02;h.193.05 ?
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