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27/04/2006 | SUISSE | N°I.42/05

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 27 avril 2006, I.42/05


Cause {T 7}I 42/05 Arrêt du 27 avril 2006IVe Chambre MM. les Juges Ursprung, Président, Schön et Frésard. Greffier : M. Wagner V.________, recourant, représenté par Me Christophe Schaffter, avocat, rue deFer 11, 2800 Delémont, contre Office de l'assurance-invalidité du canton du Jura, rue Bel-Air 3, 2350Saignelégier, intimé Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Chambre des assurances,Porrentruy (Jugement du 13 décembre 2004) Faits: A.A.a V.________, né le 2 mai 1955, a travaillé en qualité de manoeuvre du 1erjanvier 1990 au 31 août 1994 au service de l'entrepris

e R.________ SA. Dès le8 septembre 1994, il a oeuvré comme mano...

Cause {T 7}I 42/05 Arrêt du 27 avril 2006IVe Chambre MM. les Juges Ursprung, Président, Schön et Frésard. Greffier : M. Wagner V.________, recourant, représenté par Me Christophe Schaffter, avocat, rue deFer 11, 2800 Delémont, contre Office de l'assurance-invalidité du canton du Jura, rue Bel-Air 3, 2350Saignelégier, intimé Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Chambre des assurances,Porrentruy (Jugement du 13 décembre 2004) Faits: A.A.a V.________, né le 2 mai 1955, a travaillé en qualité de manoeuvre du 1erjanvier 1990 au 31 août 1994 au service de l'entreprise R.________ SA. Dès le8 septembre 1994, il a oeuvré comme manoeuvre dans le bâtiment pour le comptede la société de travail temporaire E.________. A partir du 4 novembre 1994,il a été en arrêt de maladie. Son employeur a résilié les rapports de travailpour le 31 janvier 1995.Le 18 janvier 1995, V.________ a présenté une demande de prestations del'assurance-invalidité. Dans un rapport médical du 13 février 1995, ledocteur B.________, spécialiste FMH en médecine générale à Delémont etmédecin traitant de l'assuré, a diagnostiqué une hernie discale L5/S1. Ilindiquait qu'un syndrome radiculaire avait fait l'objet d'un traitementconservateur en 1988, qu'une récidive était survenue depuis novembre 1994 etqu'une opération était prévue prochainement. Dans un rapport du 30 mai 1995,le docteur D.________, médecin de la Clinique de neurochirurgie de l'HôpitalX.________, a posé le diagnostic de status après opération d'une herniediscale L5/S1 à gauche, intervenue le 14 février 1995. Il recommandait unereconversion professionnelle dans une activité légère.Du 15 février 1995 au 27 novembre 1997, l'Office de l'assurance-invalidité ducanton du Jura a octroyé à V.________ des mesures de réadaptationprofessionnelle. Ainsi, entre le 21 août 1995 et le 2 juin 1996, celui-ci aeffectué un stage d'observation professionnelle auprès de l'entreprise demécanique W.________ SA. Le 16 juillet 1996, l'assuré a subi une nouvelleopération pour une récidive de la hernie discale L5/S1 gauche. Dès le 24janvier 1997, il a commencé un nouveau stage d'observation professionnelleauprès de S.________, avec un taux d'activité de 50 %. Ce stage a étépoursuivi jusqu'au 28 septembre 1997, en augmentant progressivement le tempsde travail jusqu'à 100 %. Jusqu'au 27 novembre 1997, V.________ a bénéficiéd'indemnités journalières versées par l'assurance-invalidité durant larecherche d'un emploi. A.b Le 28 novembre 1997, V.________ s'est inscrit à l'assurance-chômage. Il abénéficié d'indemnités de chômage.Le 10 mai 1999, V.________ a présenté une nouvelle demande de prestations del'assurance-invalidité, en requérant l'octroi de mesures médicales deréadaptation.L'office AI a demandé des renseignements au docteur B.________. Dans unrapport médical du 14 juin 1999, ce praticien a indiqué que le patientl'avait consulté à nouveau en janvier 1999 pour une récidive de douleurslombaires, qui s'étaient améliorées sous traitement anti-inflammatoire etavec du repos. Actuellement, celui-ci était apte à travailler dans uneprofession adaptée à son problème de dos.Dans un projet de décision du 3 août 1999, l'office AI a avisé l'assuré qu'iln'avait pas droit à des mesures médicales de l'assurance-invalidité, au motifque l'affection dont il était atteint ne l'empêchait pas de travaillernormalement et qu'elle ne nécessitait aucun traitement médical. Par décisiondu 26 août 1999, il a rejeté la demande du 10 mai 1999. V. ________ a contesté cette décision, en informant l'office AI que sademande du 10 mai 1999 tendait en réalité au versement d'une rente.Dans un nouveau projet de décision du 11 janvier 2000, l'office AI a constatéque l'état de santé de l'assuré ne l'empêchait pas d'exercer normalementl'activité lucrative dans laquelle il avait été réadapté en 1997, de sorteque V.________ ne subissait aucune perte de gain et que sa demande devaitainsi être rejetée.Par lettre du 20 janvier 2000, l'assuré a contesté ce nouveau projet dedécision. Produisant une attestation médicale du docteur B.________ du 11janvier 2000, il informait l'office AI qu'il présentait une incapacité totalede travail depuis le 20 octobre 1999.Dans un rapport intermédiaire, le docteur B.________ a fait état d'uneaggravation des douleurs lombaires et de l'apparition de cervicalgiesconsécutives à une arthrose cervicale. Il était de l'avis qu'une expertisemédicale était indispensable.Sur requête du docteur M.________, médecin de l'office AI du canton du Jura,le docteur U.________, spécialiste FMH en médecine interne et rhumatologie, aeffectué une expertise rhumatologique. Dans un rapport du 10 avril 2000, cepraticien a posé les diagnostics de lombosciatalgie S1 gauche persistanteaprès deux cures de hernie discale en 1995 et 1996 et de «comportement-maladie » pathologique chez un assuré étranger présentant dessignes de maladaptation psycho-sociale. A la question de savoir si l'onpouvait raisonnablement attendre de l'assuré qu'il reprenne une activitélucrative adaptée, l'expert a répondu par l'affirmative, dans une professionlégère et non qualifiée, ne requérant pas le port de charges supérieures à 15kilos. Ainsi, dans tout type de travail identique à celui accompli auprès deS.________ en tant que manoeuvre non qualifié.Dans un nouveau projet de décision du 4 septembre 2000, l'office AI a aviséV.________ que sur la base des renseignements en sa possession, son état desanté ne l'empêchait pas d'exercer normalement l'activité lucrative danslaquelle il avait été réadapté en 1997 et qu'il n'y avait donc aucune pertede gain à retenir. Par décision du 25 septembre 2000, il a rejeté la demandedu 10 mai 1999, au motif que l'assuré n'avait aucun droit à une rented'invalidité. A.c Le 30 mai 2001, V.________ a présenté une nouvelle demande de prestationsde l'assurance-invalidité, en requérant l'allocation d'une rente.Par lettre du 6 juin 2001, l'office AI a invité l'assuré à fournir des faitsnouveaux qui pourraient motiver une réinstruction de son droit à une rente. V. ________ a produit un certificat médical du docteur B.________, du 20 juin2001. Dans un avis du 2 juillet 2001, le docteur M.________, constatant queles diagnostics étaient toujours identiques, en a conclu qu'il n'y avait pasd'élément médical objectif nouveau.Par décision du 3 septembre 2001, confirmant un projet de décision du 10 août2001, l'office AI a informé V.________ qu'aucun fait nouveau n'étaitintervenu depuis la décision de refus de rente du 25 septembre 2000 et que lanouvelle demande du 30 mai 2001 devait dès lors être rejetée. B.Par jugement du 8 avril 2002, la Chambre des assurances du Tribunal cantonalde la République et canton du Jura a admis le recours formé par V.________contre cette décision, annulé celle-ci et renvoyé le dossier à l'office AIpour complément d'instruction et nouvelle décision au sens des considérants.Elle a considéré que l'assuré, en produisant le certificat médical du docteurB.________ du 20 juin 2001, avait démontré de manière plausible au moins unemodification des faits déterminants pour le droit à la rente et qu'il étaitcontradictoire que l'office AI soit entré en matière sur la nouvelle demandedu 30 mai 2001 mais qu'il n'ait procédé à aucune mesure d'instruction, alorsqu'il avait l'obligation d'examiner la nouvelle demande sur le plan matérielsous tous les aspects. Ainsi, il appartenait à l'office AI de déterminer parune expertise complémentaire si, médicalement, le taux de capacité de travailde V.________ dans une activité adaptée s'était modifié et, partant, derecalculer le taux d'invalidité. Cas échéant, il y aurait lieu d'ordonner uneexpertise psychiatrique, attendu que l'assuré renouvelait ses demandes deprestations depuis plus de 6 ans et que la question de l'existence d'unesinistrose pouvait se poser, ainsi que cela ressortait de l'expertise dudocteur U.________ du 10 avril 2000. C.L'Office de l'assurance-invalidité du canton du Jura a confié une expertisepluridisciplinaire au Centre d'observation médical de l'assurance-invalidité(COMAI) de Lausanne. Dans un rapport du 1er mai 2003, les docteursP.________, médecin-chef adjoint, et C.________, chef de clinique adjoint,ont déposé leurs conclusions. Ils indiquaient que même dans une activitéadaptée - évitant des travaux lourds tels que le port de charges de plus de15 kg, ainsi que des travaux qui nécessitaient le maintien de positionsstatiques prolongées, des mouvements de flexion-extension et rotationrépétitive du rachis cervical et lombaire -, la capacité de travail nedépassait vraisemblablement pas un taux de l'ordre de 40 %.Le docteur M.________ a donné au docteur U.________ la possibilité des'exprimer sur les conclusions des médecins du COMAI, ce que ce praticien afait dans une prise de position du 13 mai 2003.Le 11 août 2003, l'office AI a avisé V.________ qu'il avait donné mandat auCentre d'observation professionnelle de l'assurance-invalidité (COPAI)d'Yverdon-les-Bains d'organiser un stage d'observation professionnelle, afind'examiner ses capacités de travail et les possibilités qui étaient lessiennes de reclassement professionnel. Un pré-examen a eu lieu le 1erseptembre 2003. Le stage a été effectué par l'assuré du 15 septembre au 10octobre 2003. Dans un rapport du 20 octobre 2003, la doctoresse O.________,en sa qualité de médecin-consultant, a déposé ses constatations et sesconclusions. Le COPAI a produit un rapport du 6 novembre 2003, en indiquantque dans une activité adaptée, telle qu'opérateur sur des machinespré-réglées et des travaux simples et répétitifs, la capacité actuelle detravail de V.________ devrait atteindre, après une période de remise encondition (compte tenu du fait qu'il n'avait pas retravaillé depuis 10 ans)des rendements de 70 % sur la journée entière.Contestant les conclusions du COPAI, V.________ a invité l'office AI àexaminer son droit à une rente d'invalidité, en s'en tenant aux conclusionsdes médecins du COMAI en ce qui concerne le taux de sa capacité résiduelle detravail.Par décision du 25 février 2004, l'office AI a constaté que les troublessomatoformes douloureux dont était atteint l'assuré n'étaient pasinvalidants, faute de comorbidité psychiatrique, et que selon les conclusionsdu COPAI, V.________ était à même de travailler à plein temps avec unrendement de 70 %. Etant donné que l'assuré, sans ses problèmes de santé,pourrait réaliser un revenu sans invalidité de 51'675 fr. et que le revenud'invalide devait être fixé à 33'046 fr. par année, celui-ci présentait uneinvalidité de 36 %, taux qui ne donnait pas droit à une rente.Produisant copie d'une prise de position du docteur B.________ du 23 février2004, V.________ a formé opposition contre cette décision.Par décision du 30 avril 2004, l'office AI a rejeté l'opposition. D.Par jugement du 13 décembre 2004, la Chambre des assurances du Tribunalcantonal de la République et canton du Jura a admis le recours formé parV.________ contre cette décision, alloué à celui-ci un quart de rented'invalidité dès le 1er mai 2001 et renvoyé le dossier à l'office AI pourcalcul de la rente au sens des considérants. E.V.________ interjette un recours de droit administratif contre ce jugement,en concluant, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de celui-ci et àl'octroi d'une rente entière d'invalidité sur la base de l'expertise du COMAIdu 1er mai 2003.La Chambre des assurances du Tribunal cantonal de la République et canton duJura conclut au rejet du recours dans la mesure où il est recevable. De soncôté, l'Office de l'assurance-invalidité du canton du Jura demande que lerecours soit rejeté et que le jugement attaqué du 13 décembre 2004 soitconfirmé. L'Office fédéral des assurances sociales n'a pas déposéd'observations. Considérant en droit: 1.Selon le dispositif du jugement attaqué, qui constitue l'objet du recours dedroit administratif, le recourant a droit à un quart de rente d'invaliditédès le 1er mai 2001. Le litige porte sur le point de savoir si celui-ciprésente des troubles limitant sa capacité de travail et de gain dans unemesure suffisante pour fonder un droit à une rente entière d'invalidité. 2.2.1La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du6 octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003, entraînantla modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine del'assurance-invalidité. La décision sur opposition litigieuse, du 30 avril2004, est postérieure à l'entrée en vigueur de la LPGA. Conformément auprincipe général de droit transitoire, selon lequel - même en cas dechangement des bases légales - les règles applicables sont celles en vigueurau moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits, il y alieu d'examiner le droit à une rente au regard de l'ancien droit pour lapériode jusqu'au 31 décembre 2002 et en fonction de la nouvelleréglementation légale après cette date (ATF 130 V 445 et les références; cf.aussi ATF 130 V 329).Pour les mêmes motifs, les dispositions de la novelle du 21 mars 2003modifiant la LAI (4ème révision), entrée en vigueur le 1er janvier 2004, sontapplicables. 2.2 Les définitions de l'incapacité de travail, l'incapacité de gain,l'invalidité, de la méthode de comparaison des revenus et de la révision (dela rente d'invalidité et d'autres prestations durables) contenues dans laLPGA correspondent aux notions précédentes dans l'assurance-invalidité tellesque développées à ce jour par la jurisprudence (ATF 130 V 343). 3.Pour rendre leurs conclusions, les experts du COMAI ont procédé à un examenclinique le 4 décembre 2002. Le 18 décembre 2002, ont eu lieu un consilium derhumatologie avec le docteur H.________ et un consilium de psychiatrie avecle docteur A.________, psychiatre, et Mme G.________, psychologue. Lesconclusions du rapport d'expertise ont été discutées dans le cadre d'uncolloque de synthèse multidisciplinaire le 15 janvier 2003 en présence dudocteur P.________, interniste, du docteur C.________, neurologue, et de MmeG.________. Dans leur rapport du 1er mai 2003, les docteurs P.________ etC.________ ont posé les diagnostics avec influence essentielle sur lacapacité de travail de trouble dépressif récurrent, épisode actuel moyen(F33.1), de syndrome douloureux somatoforme persistant (F45.4), de probableétat de stress post-traumatique (F43.1), de spondylarthrose cervicale et despondylarthrose lombaire et status post cure de hernie discale L5-S1. Ils ontégalement retenu la présence de symptômes correspondant au diagnostic decéphalées de tension, diagnostic qui selon eux est sans influence essentiellesur la capacité de travail. Dans leur appréciation globale du cas, lesexperts du COMAI ont considéré que dans une activité adaptée, la capacité detravail du recourant ne dépassait vraisemblablement pas un taux de l'ordre de40 %. Cette appréciation s'écartait de celle faite par les experts ayantprécédemment évalué l'assuré, lesquels ne semblaient absolument pas avoirintégré la dimension psychiatrique dans leur évaluation, l'un
- soit ledocteur U.________ - n'ayant retenu aucun diagnostic dans ce domaine, lesautres - à savoir les praticiens du service de rhumatologie de l'HôpitalY.________ - n'ayant reconnu qu'une dépression et ne l'ayant par ailleursévaluée que de façon peu détaillée, soit par le biais d'un simplequestionnaire standardisé. Cela permettait aux experts du COMAI d'avoir desdoutes quant au fait que cette dimension importante de leur évaluation aitété réellement prise en compte. 4.4.1Selon le recourant, les exigences de la jurisprudence la plus récente enmatière de syndromes somatoformes douloureux persistants sont réunies dans lecas particulier à la lecture des considérations objectives des spécialistesdu COMAI dans leur rapport du 1er mai 2003. 4.2 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintesphysiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaisonavec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un étatpsychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge parl'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assurépourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui estexigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 102 V165; VSI 2001 p. 224 consid. 2b et les références; cf. aussi ATF 127 V 298consid. 4c in fine). La reconnaissance de l'existence d'une atteinte à la santé psychique, soitaussi de troubles somatoformes douloureux persistants, suppose d'abord laprésence d'un diagnostic émanant d'un expert (psychiatre) et s'appuyant legeartis sur les critères d'un système de classification reconnu (ATF 130 V 398ss consid. 5.3 et consid. 6). Comme pour toutes les autres atteintes à lasanté psychique, le diagnostic de troubles somatoformes douloureuxpersistants ne constitue pas encore une base suffisante pour conclure à uneinvalidité. Au contraire, il existe une présomption que les troublessomatoformes douloureux ou leurs effets peuvent être surmontés par un effortde volonté raisonnablement exigible. Le caractère non exigible de laréintégration dans le processus de travail peut résulter de facteursdéterminés qui, par leur intensité et leur constance, rendent la personneincapable de fournir cet effort de volonté. Dans un tel cas, en effet,l'assuré ne dispose pas des ressources nécessaires pour vaincre ses douleurs.La question de savoir si ces circonstances exceptionnelles sont réunies doitêtre tranchée de cas en cas à la lumière de différents critères. Au premierplan figure la présence d'une comorbidité psychiatrique importante par sagravité, son acuité et sa durée. D'autres critères peuvent être déterminants.Ce sera le cas des affections corporelles chroniques, d'un processus maladifs'étendant sur plusieurs années sans rémission durable (symptomatologieinchangée ou progressive), d'une perte d'intégration sociale dans toutes lesmanifestations de la vie, d'un état psychique cristallisé, sans évolutionpossible au plan thérapeutique, résultant d'un processus défectueux derésolution du conflit, mais apportant un soulagement du point de vuepsychique (profit primaire tiré de la maladie, fuite dans la maladie), del'échec de traitements ambulatoires ou stationnaires conformes aux règles del'art (même avec différents types de traitement), cela en dépit de l'attitudecoopérative de la personne assurée (ATF 130 V 352). Plus ces critères semanifestent et imprègnent les constatations médicales, moins on admettral'exigibilité d'un effort de volonté (Meyer-Blaser, Der Rechtsbegriff derArbeitsunfähigkeit und seine Bedeutung in der Sozialversicherung, in: Schmerzund Arbeitsunfähigkeit, St. Gall 2003, p. 77).Si les limitations liées à l'exercice d'une activité résultent d'uneexagération des symptômes ou d'une constellation semblable, on conclura, enrègle ordinaire, à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droit à desprestations d'assurance. Au nombre des situations envisagées figurent ladiscordance entre les douleurs décrites et le comportement observé,l'allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues,l'absence de demande de soins, les grandes divergences entre les informationsfournies par le patient et celles ressortant de l'anamnèse, le fait que desplaintes très démonstratives laissent insensible l'expert, ainsi quel'allégation de lourds handicaps malgré un environnement psychosocial intact(voir Kopp/Willi/Klipstein, Im Graubereich zwischen Körper, Psyche undsozialen Schwierigkeiten, in: Schweizerische Medizinische Wochenschrift 1997,p. 1434, avec référence à une étude approfondie de Winckler et Foerster; voirsur l'ensemble du sujet ATF 131 V 49). 4.3 Les premiers juges ont nié que les critères consacrés par lajurisprudence, dont l'existence permet d'admettre le caractère non exigiblede la reprise du travail, soient réalisés dans le cas particulier. Aussiont-ils considéré que le taux de capacité de travail de 40 % retenu par lesexperts du COMAI n'était pas déterminant en raison du caractère noninvalidant des troubles psychiques présentés par le recourant. En revanche,s'agissant de ses problèmes somatiques, il y avait lieu d'admettre que dansun travail exigible tel que défini par les expertises du COMAI et du COPAI,celui-ci était apte à travailler avec un rendement de 60 %, taux retenu lorsde la consultation de rhumatologie du 18 décembre 2002 en ce qui concerne sacapacité de travail d'un point de vue rhumatologique. En effet, lors de sonstage au COPAI, l'assuré avait obtenu des rendements de l'ordre de 55 %, cequi infirmait les conclusions des experts du COMAI, lesquelles tenaientcompte de ses problèmes psychiques et somatiques.Cela est contesté par le recourant, qui s'en tient à la discussion globalemenée par les experts du COMAI dans leur rapport du 1er mai 2003 et au tauxde 40 % que ceux-ci ont retenu en ce qui concerne sa capacité résiduelle detravail. 4.4 Il y a lieu d'examiner le bien-fondé des conclusions des experts du COMAIà la lumière des critères consacrés par la jurisprudence (supra, consid.4.2), dont l'existence permet d'admettre le caractère non exigible de lareprise du travail. 4.4.1 D'un point de vue psychiatrique, le recourant présente des troublesthymiques avec de nombreux symptômes de la lignée dépressive, symptômes quisont corrélés avec l'appréciation psychiatrique clinique et permettent deretenir un diagnostic de trouble dépressif récurrent, l'épisode actuelpouvant être considéré comme moyen (rapport d'expertise du 1er mai 2003).Le diagnostic de trouble dépressif récurrent, épisode actuel moyen (F33.1),ne suffit pas à établir l'existence d'une comorbidité psychiatrique d'uneacuité et d'une durée importante au sens de la jurisprudence. En effet, selonla doctrine médicale (cf. notamment Dilling/ Mombour/Schmidt [éd.],Internationale Klassifikation psychischer Störungen, ICD-10 Kapitel V [F],4ème édition, p. 191), sur laquelle se fonde le Tribunal fédéral desassurances, les états dépressifs constituent des manifestations (réactives)d'accompagnement des troubles somatoformes douloureux, de sorte qu'un teldiagnostic ne saurait être reconnu comme constitutif d'une comorbiditépsychiatrique autonome des troubles somatoformes douloureux (ATF 130 V 358consid. 3.3.1 et la référence à Meyer-Blaser, op. cit., p. 81 et la note135). 4.4.2 Les autres critères consacrés par la jurisprudence, dont l'existencepermet d'admettre le caractère non exigible de la reprise du travail, ne sontpas non plus réalisés. En effet, on ne voit pas que le recourant réunit en sapersonne plusieurs de ces critères (ou du moins pas dans une mesure trèsmarquée) qui fondent un pronostic défavorable en ce qui concernel'exigibilité d'une reprise d'activité professionnelle.Dans leur rapport du 1er mai 2003, les experts du COMAI ont constaté que lesdouleurs du recourant avaient débuté à la fin des années 1980 par deslombalgies en relation avec une hernie discale L5-S1 compliquée par uneradiculopathie L5 gauche. Suite à plusieurs récidives dont l'une d'intensitémajeure à la fin de l'année 1994, une cure de hernie L5-S1 avait eu lieu audébut de l'année 1995. Les douleurs et sciatalgies avaient persisté depuislors, fluctuant, mais évoluant dans le sens d'une aggravation progressive,jusqu'à ce jour. Parmi les diagnostics avec influence essentielle sur lacapacité de travail, les experts du COMAI ont retenu non seulement unespondylarthrose lombaire, mais également une spondylarthrose cervicale. D'unautre côté, ils ont constaté qu'ils n'avaient pas d'éléments objectifs quileur permettent d'expliquer l'ensemble des plaintes douloureuses annoncées,en particulier en ce qui concerne leur intensité et l'ampleur de leur impact.Compte tenu de cette discordance, qui s'inscrit, toujours selon les experts,dans un contexte de désarroi avec sentiment de détresse, de difficultéspsychosociales et compte tenu du fait que les douleurs conféraient à l'assuréune certaine sollicitude de la part de son entourage, il est douteux que lecritère des affections corporelles chroniques soit réalisé.En ce qui concerne l'existence d'une perte d'intégration sociale dans toutesles manifestations de la vie, les premiers juges ont nié que cette conditionsoit remplie. Ils ont retenu que le recourant entretenait une bonne relationavec son épouse et ses enfants, qu'il effectuait une promenadequotidiennement, qu'il regardait la télévision, qu'il lisait le journal,qu'il écoutait de la musique et participait aux tâches ménagères. Lapertinence des constatations des premiers juges n'est pas remise en causedevant la Cour de céans.Enfin, on ne voit pas au dossier que chez le recourant, l'apparition dutrouble somatoforme douloureux résulterait d'une libération du processus derésolution du conflit psychique (profit primaire tiré de la maladie). Aucundes médecins qui ont vu l'assuré n'évoque un état psychique cristallisé.D'autre part, les experts du COMAI ne font mention d'aucune source de conflitintra-psychique ni situation conflictuelle externe permettant d'expliquer ledéveloppement du syndrome douloureux et son aboutissement jusqu'à uneinterruption totale de toute activité lucrative.Il apparaît ainsi que le trouble somatoforme douloureux ne se manifeste pasavec une sévérité telle que, d'un point de vue objectif, seule une mise envaleur limitée de la capacité de travail du recourant puisse êtreraisonnablement exigée de lui. 4.5 Parmi les diagnostics avec influence essentielle sur la capacité detravail retenus par les experts du COMAI dans leur rapport du 1er mai 2003,le recourant présente une spondylarthrose lombaire et status post cure dehernie discale L5-S1 et une spondylarthrose cervicale. Dans leur évaluationglobale de sa capacité de travail, ils ont tenu compte de l'aspectrhumatologique, ce dont on ne saurait non plus faire abstraction.Etant donné que le taux de capacité de travail de 40 % retenu par les expertsdu COMAI n'est pas déterminant en raison du caractère non invalidant destroubles psychiques présentés par le recourant, il se justifie de se fondersur un taux de capacité de travail de 60 %. En effet, selon les conclusionsdu consilium de rhumatologie du 18 décembre 2002, la capacité de travail entant que manoeuvre est nulle pour tous les travaux lourds, les travauxnécessitant des maintiens de positions statiques prolongées sans possibilitéde varier la position, ainsi que des mouvements en porte-à-faux. Pour destravaux légers, respectant les conditions mentionnées ci-dessus, la capacitéde travail d'un point de vue rhumatologique est de 60 %.A ce propos, les premiers juges se sont référés avec raison à l'expertise duCOPAI. Ainsi que cela ressort du rapport de la doctoresse O.________ du 20octobre 2003, dans les activités qui conviennent le mieux à l'assuré, àsavoir des activités simples, répétitives et manuelles, des rendements de 55% ont pu être observés, rendements susceptibles d'atteindre rapidement 70 %,moyennant une période de reconditionnement progressif et d'encadrement.Avec les premiers juges, il y a lieu dès lors d'admettre que le recourant,dans une activité adaptée à son handicap, est apte à travailler avec unrendement de 60 %, en ce sens qu'il présente une capacité de travail de 60 %sur le plan somatique. 5.Il convient d'évaluer l'invalidité du recourant. 5.1 Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait puobtenir s'il n'était pas invalide (revenu sans invalidité) est comparé aveccelui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablementêtre exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, surun marché du travail équilibré (revenu d'invalide). C'est la méthodeordinaire de comparaison des revenus (jusqu'au 31 décembre 2002 : art. 28 al.2 LAI; du 1er janvier au 31 décembre 2003 : art. 1 al. 1 LAI en corrélationavec l'art. 16 LPGA; depuis le 1er janvier 2004 : art. 28 al. 2 LAI encorrélation avec l'art. 16 LPGA).La méthode générale de comparaison des revenus est applicable dans le casparticulier. Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de seplacer au moment de la naissance du droit à la rente; les revenus avec etsans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et lesmodifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rentesurvenues jusqu'au moment où la décision est rendue être prises en compte(ATF 129 V 222, 128 V 174). Dans le cas particulier, le moment de lanaissance du droit à la rente est nécessairement postérieur à la décision derefus de rente du 25 septembre 2000, laquelle est entrée en force. 5.2 Les premiers juges ont procédé à la comparaison des revenus en reprenantdans leur calcul les chiffres utilisés par l'office intimé, lesquels tiennentcompte de l'adaptation des revenus à l'évolution des salaires jusqu'en 2003et se fondent sur les indications de l'ancien employeur du recourant en cequi concerne le salaire hypothétique qui aurait été le sien en 2003.Ainsi, ils ont posé la présomption que le recourant aurait continuél'activité professionnelle qu'il exerçait avant la survenance de son atteinteà la santé auprès de la société de travail temporaire E.________. Avecl'intimé, ils ont retenu à ce titre un revenu annuel sans invalidité de51'675 fr. (valeur 2003). Ce montant, qui n'est pas contesté, a été fixé parl'office AI sur la base des renseignements que lui a communiqués l'ancienemployeur de l'assuré, indiquant un salaire mensuel de 3'975 fr. (x 13).En ce qui concerne le revenu d'invalide du recourant, il est possible, enl'absence d'un revenu effectivement réalisé, d'évaluer le revenu d'invalideen se fondant sur les données salariales résultant des enquêtes sur lastructure des salaires (ESS) de l'Office fédéral de la statistique (ATF 126 V76 consid. 3b/aa et bb), comme l'ont fait l'intimé et les premiers juges. Onse réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en sefondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 124 V 323 consid.3b/bb; VSI 1999 p. 182). Compte tenu de l'activité de substitution dans
unemploi adapté - évitant des travaux lourds tels que le port de charges deplus de 15 kg, ainsi que des travaux qui nécessitent le maintien de positionsstatiques prolongées, des mouvements de flexion-extension et rotationrépétitive du rachis cervical et lombaire (rapport d'expertise du COMAI du1er mai 2003, rapport médical de la doctoresse O.________ du 20 octobre 2003)-, le salaire de référence est celui auquel peuvent prétendre les hommeseffectuant des activités simples et répétitives dans le secteur privé (RAMA2001 n° U 439 p. 347), à savoir 4'557 fr. par mois (tous secteurs confondus)- valeur en 2002 - part au 13ème salaire comprise (L'Enquête suisse sur lastructure des salaires 2002, p. 43, Tableau TA1, niveau de qualification 4),soit 54'684 fr. par année. Ce salaire hypothétique représente, compte tenu dufait que les salaires bruts standardisés se basent sur un horaire de travailde quarante heures, soit une durée hebdomadaire inférieure à la moyenneusuelle dans les entreprises en 2003 (41.7 heures, tous secteurs confondus;La Vie économique, 10-2005, p. 82, tabelle B9.2) un revenu annuel d'invalidede 57'0008 fr. (54'684 fr. x 41.7 : 40). Adapté à l'évolution des salaires del'année 2003 (1.4 %; La Vie économique, 10-2005, p. 83, tabelle B10.2), ils'élève à 57'806 fr. Le recourant ayant au moment déterminant une capacité detravail exigible de 60 % dans un emploi adapté à son état de santé, il y alieu de retenir un salaire annuel hypothétique de 34'684 fr. Avec l'intimé,les premiers juges ont admis une réduction de 20 %. Compte tenu d'unabattement de 20 %, le revenu annuel d'invalide évalué sur la base desstatistiques salariales est ainsi de 27'747 fr. (valeur 2003).Sur cette base, la comparaison des revenus ([51'675 - 27'747] x 100 : 51'675)donne une invalidité de 46 % (le taux de 46.30 % étant arrondi au pour centinférieur [ATF 130 V 122 s. consid. 3.2; SVR 2004 UV Nr. 12 p. 44).Ce taux ouvre droit à un quart de rente d'invalidité (art. 28 al. 1 LAI),sous réserve du cas pénible (art. 28 al. 1bis LAI dans sa version en vigueurjusqu'au 31 décembre 2003). Il incombera à l'intimé, auquel les premiersjuges ont renvoyé le dossier pour calcul de la rente, d'examiner cettequestion. 5.3 La comparaison des revenus effectuée par les premiers juges n'est pascritiquable, dans la mesure où les revenus avec et sans invalidité ont étédéterminés par rapport à un même moment, à savoir l'année 2003. 6.Le litige ayant pour objet l'octroi ou le refus de prestations d'assurance,la procédure est gratuite (art. 134 OJ). Le recourant, qui succombe, nesaurait prétendre une indemnité de dépens pour l'instance fédérale (art. 159al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Il n'est pas perçu de frais de justice. 3.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal de laRépublique et canton du Jura, Chambre des assurances, et à l'Office fédéraldes assurances sociales. Lucerne, le 27 avril 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances p. le Président de la IVe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.42/05
Date de la décision : 27/04/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-04-27;i.42.05 ?
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