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27/04/2006 | SUISSE | N°1P.28/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 27 avril 2006, 1P.28/2006


{T 0/2}1P.28/2006 /col Arrêt du 27 avril 2006Ire Cour de droit public MM. les Juges Féraud, Président,Aemisegger et Fonjallaz.Greffier: M. Rittener. A. ________,recourant, représenté par Me Olivier Gabus, avocat,case postale, 2000 Neuchâtel, contre Ministère public du canton de Neuchâtel,rue du Pommier 3, case postale 2672, 2001 Neuchâtel 1,Cour de cassation pénale du Tribunal cantonaldu canton de Neuchâtel, case postale 3174,2001 Neuchâtel 1. procédure pénale, recours de droit public contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale duTribunal cantonal du canton de Neuchâtel du 1

3 décembre 2005. Faits: A.Par jugement du 18 novembre 2004, le T...

{T 0/2}1P.28/2006 /col Arrêt du 27 avril 2006Ire Cour de droit public MM. les Juges Féraud, Président,Aemisegger et Fonjallaz.Greffier: M. Rittener. A. ________,recourant, représenté par Me Olivier Gabus, avocat,case postale, 2000 Neuchâtel, contre Ministère public du canton de Neuchâtel,rue du Pommier 3, case postale 2672, 2001 Neuchâtel 1,Cour de cassation pénale du Tribunal cantonaldu canton de Neuchâtel, case postale 3174,2001 Neuchâtel 1. procédure pénale, recours de droit public contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale duTribunal cantonal du canton de Neuchâtel du 13 décembre 2005. Faits: A.Par jugement du 18 novembre 2004, le Tribunal de police du district deNeuchâtel a condamné A.________ à une amende de 940 fr. pour violation gravedes devoirs de prudence, excès de vitesse et désobéissance à la police. LeTribunal de police a retenu, en substance, les faits suivants:Le samedi 28 février 2004, A.________ circulait à une vitesse sensiblementsupérieure à 60 km/h, peu après la sortie d'autoroute de la Maladière(Neuchâtel), où se terminait un contrôle de police. Bien que ce contrôle fûtclairement signalé, A.________ n'a pas été capable de ralentir là où ilaurait dû le faire, obligeant deux agents de police à s'écarter pour ne pasêtre heurtés. Une fois son véhicule arrêté, il ne s'est pas montré coopératifet a refusé à plusieurs reprises de respecter les injonctions des agents,notamment celle de ne pas quitter son véhicule. B.A.________ a recouru contre ce jugement auprès de la Cour de cassation pénaledu Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel (ci-après: le Tribunal cantonal),qui l'a confirmé par arrêt du 13 décembre 2005. En substance, le Tribunalcantonal a considéré que le premier juge pouvait raisonnablement et sansarbitraire se forger l'intime conviction que A.________ circulait à unevitesse objectivement inadaptée aux circonstances. En effet, les témoignagesdes agents de police présents au moment des faits étaient concordants etpouvaient raisonnablement être préférés à la version présentée par A.________et son passager. De plus, les quelques nuances dans les déclarations desagents rendaient leurs témoignages plus crédibles, car "moins suspectsd'avoir été accordés". C.Agissant par la voie du recours de droit public, A.________ demande auTribunal fédéral d'annuler cet arrêt. Il invoque les art. 9 et 32 al. 1 Cst.ainsi que l'art. 6 par. 2 CEDH pour se plaindre d'arbitraire dans laconstatation et l'appréciation des faits et d'une violation du principe de laprésomption d'innocence. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recoursqui lui sont soumis (ATF 131 II 571 consid. 1 p. 573; 130 I 312 consid. 1 p.317 et les arrêts cités). 1.1 Le pourvoi en nullité à la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéraln'étant pas ouvert pour se plaindre d'une appréciation arbitraire des preuveset des constatations de fait qui en découlent (ATF 124 IV 81 consid. 2a p.83) ni pour invoquer une violation directe d'un droit constitutionnel ouconventionnel, tel que la maxime "in dubio pro reo" consacrée aux art. 32 al.1 Cst. et 6 par. 2 CEDH (ATF 121 IV 104 consid. 2b p. 107; 120 Ia 31 consid.2b p. 35 s.), la voie du recours de droit public est ouverte à cet égard(art. 84 al. 2 OJ). En revanche, elle ne l'est pas pour contester laqualification de faute grave au sens de l'art. 90 ch. 2 de la loi sur lacirculation routière du 19 décembre 1958 (LCR; RS 741.01) dans l'hypothèse oùles faits constitutifs d'infraction à l'art. 32 LCR seraient retenus, cettecritique pouvant être présentée par la voie du pourvoi en nullité; le moyenque le recourant soulève à cet égard est dès lors irrecevable. 1.2 Sauf exceptions, dont aucune n'est réalisée en l'espèce, des faits oumoyens de preuve nouveaux ne peuvent être produits à l'appui d'un recours dedroit public (ATF 118 Ia 369 consid. 4d p. 371 s., 20 consid. 5a p. 26; 118III 37 consid. 2a p. 39; 107 Ia 265 consid. 2a et les arrêts cités; WalterKälin, Das Verfahren des staatsrechtlichen Beschwerde, 2e éd., Berne 1994, p.369 ss). En l'occurrence, le grief fondé sur les art. 2 et 8 de la loi surles amendes d'ordre du 24 juin 1970 (LAO; RS 741.03) n'a pas été valablementsoulevé devant le Tribunal cantonal. En effet, s'il est vrai que le recouranta évoqué devant cette instance l'amende de 60 fr. qui lui a été infligée lorsdu contrôle de police litigieux, il s'est contenté de mentionner ce fait demanière générale, dans le cadre de sa démonstration sur l'appréciationarbitraire des preuves, sans développer à cet égard de moyen indépendant quifonderait ses conclusions. Ce grief est donc également irrecevable, fauted'épuisement des instances cantonales (art. 86 al.1 OJ). 1.3 Pour le surplus, la condamnation du recourant se trouve confirmée parl'arrêt attaqué, de sorte qu'il a qualité pour contester ce prononcé (art. 88OJ). Les autres conditions de recevabilité étant réunies, il convientd'entrer en matière sur le recours, dans la mesure de sa recevabilité. 2.Invoquant les art. 9 et 32 al. 1 Cst. ainsi que l'art. 6 par. 2 CEDH, lerecourant se plaint d'arbitraire dans la constatation et l'appréciation desfaits et d'une violation du principe de la présomption d'innocence. 2.1 Selon la jurisprudence, l'arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst., nerésulte pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer enconsidération ou même qu'elle serait préférable; le Tribunal fédéral nes'écarte de la solution retenue en dernière instance cantonale que si elleest manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principejuridique clair et indiscuté ou si elle heurte de manière choquante lesentiment de la justice ou de l'équité. Il ne suffit pas que la motivation dela décision soit insoutenable; encore faut-il qu'elle soit arbitraire dansson résultat (ATF 131 I 217 consid. 2.1 p. 219, 57 consid. 2 p. 61; 129 I 173consid. 3.1 p. 178; 128 I 273 consid. 2.1 p. 275). 2.1.1 L'appréciation des preuves est en particulier arbitraire lorsque lejuge de répression n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'unmoyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'unmoyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur labase des éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables (ATF 129I 8 consid. 2.1 p. 9). Il en va de même lorsqu'il retient unilatéralementcertaines preuves ou lorsqu'il rejette des conclusions pour défaut depreuves, alors même que l'existence du fait à prouver résulte des allégationset du comportement des parties (ATF 118 Ia 28 consid. 1b p. 30). Il ne suffitpas qu'une interprétation différente des preuves et des faits qui endécoulent paraisse également concevable pour que le Tribunal fédéralsubstitue sa propre appréciation des preuves à celle effectuée par l'autoritéde condamnation, qui dispose en cette matière d'une grande latitude. Enserait-il autrement, que le principe de la libre appréciation des preuves parle juge du fond serait violé (ATF 120 Ia 31 consid. 2d p. 37 s.).2.1.2 Lorsque, comme en l'espèce, l'autorité cantonale de recours avait, surles questions posées dans le recours de droit public, une cognition semblableà celle du Tribunal fédéral, ce dernier porte concrètement son examen surl'arbitraire du jugement de l'autorité inférieure, à la lumière des griefssoulevés dans l'acte de recours. Cependant, pour se conformer aux exigencesde l'art. 90 al. 1 let. b OJ, le recourant ne peut pas simplement reprendreles critiques qu'il a formulées en instance cantonale devant l'autorité decassation, mais il doit exposer pourquoi cette dernière aurait refusé à tortde qualifier d'arbitraire l'appréciation des preuves par l'autorité depremière instance. Le Tribunal fédéral se prononce librement sur cettequestion (ATF 125 I 492 consid. 1a/cc et 1b p. 495 et les arrêts cités). 2.2 La présomption d'innocence est garantie par l'art. 6 ch. 2 CEDH et parl'art. 32 al. 1 Cst., qui ont la même portée. Elle a pour corollaire leprincipe "in dubio pro reo", qui concerne tant le fardeau de la preuve quel'appréciation des preuves. En tant que règle de l'appréciation des preuves,ce principe, dont la violation n'est invoquée que sous cet angle par lerecourant, signifie que le juge ne peut se déclarer convaincu d'un état defait défavorable à l'accusé, lorsqu'une appréciation objective de l'ensembledes éléments de preuve laisse subsister un doute sérieux et insurmontablequant à l'existence de cet état de fait (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124IV 86 consid. 2a p. 88; 120 Ia 31 consid. 2c p. 37). Le Tribunal fédéral nerevoit les constatations de fait et l'appréciation des preuves que sousl'angle restreint de l'arbitraire (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 I 208consid. 4 p. 211; 120 Ia 31 consid. 2d p. 37/38). Il examine en revanchelibrement la question de savoir si, sur la base du résultat d'uneappréciation non arbitraire des preuves, le juge aurait dû éprouver un doutesérieux et insurmontable quant à la culpabilité de l'accusé; dans cet examen,il s'impose toutefois une certaine retenue, le juge du fait, en vertu duprincipe de l'immédiateté, étant mieux à même de résoudre la question (cf.arrêts non publiés 1P.454/2005 du 9 novembre 2005, consid. 2.1; 1P.428/2003du 8 avril 2004, consid. 4.2, et 1P.587/2003 du 29 janvier 2004, consid.7.2). 3.En l'occurrence, le Tribunal cantonal a considéré que le premier juge n'avaitpas fait preuve d'arbitraire, ni excédé son pouvoir d'appréciation, enretenant que le recourant circulait à une vitesse inadaptée. 3.1 Le recourant reproche au Tribunal cantonal d'avoir omis de tenir comptede l'existence d'un doute au sujet de la vitesse, qui ressortirait decontradictions dans les déclarations des policiers entendus en qualité detémoins. A l'appui de ce grief, il cite les déclarations suivantes: certainsagents auraient dit avoir "entendu une voiture arriver à vive allure" ou "àrégime élevé", alors que d'autres auraient affirmé avoir vu "la voitureforcer le passage" ou "avoir vu arriver une voiture à vive allure et ne pass'arrêter". On ne voit pas en quoi ces déclarations seraient contradictoires;au contraire, les exemples cités par le recourant vont tous dans le même senset peuvent raisonnablement conduire à la conclusion que ce dernier arrivaitprès du contrôle de police à une vitesse trop élevée. Par ailleurs, rien nepermet d'affirmer que le "climat de tension" dans lequel se serait déroulé lecontrôle de police ôterait manifestement toute crédibilité aux déclarationsdes agents. Le recourant n'explique pas non plus pourquoi il seraitinsoutenable de privilégier le témoignage des agents de police présents surles lieux à celui de son passager. Dans ces conditions, le premier juge n'apas fait preuve d'arbitraire en fondant son appréciation sur les déclarationsdes agents de police présents au moment des faits. 3.2 Il importe peu que l'excès de vitesse commis par le recourant repose surdes estimations, dès lors que celles-ci sont crédibles et concordantes etqu'elles permettent de conclure que la vitesse était objectivement inadaptéeaux circonstances. A cet égard, l'appréciation du premier juge est d'autantmoins insoutenable qu'il a "accueilli [ces estimations] avec prudence". Il ya également lieu de constater avec l'autorité attaquée que le caractèreinadapté de la vitesse ressort aussi du fait que deux agents ont failli êtrerenversés, ce que le recourant ne conteste pas devant le Tribunal fédéral.Quant à l'argumentation selon laquelle les signaux annonçant le contrôle depolice ne pouvaient que l'amener à adapter sa vitesse, elle a déjà étéprésentée devant le Tribunal cantonal et le recourant ne démontre pas en quoielle aurait été écartée de manière arbitraire; elle est au demeurantinsuffisamment motivée au regard des exigences tirées de l'art. 90 al. 1 let.b OJ et est, partant, irrecevable. 3.3 Dans ces circonstances, c'est à juste titre que le Tribunal cantonal aconsidéré que le premier juge n'avait pas usé de son large pouvoird'appréciation des preuves de manière arbitraire. Dès lors qu'au terme decette appréciation des preuves exempte d'arbitraire il ne subsiste pas dedoute sérieux et irréductible quant à la culpabilité du recourant, le grieftiré de la violation de la présomption d'innocence doit être rejeté. 4.Il s'ensuit que le recours de droit public doit être rejeté, dans la mesureoù il est recevable. Le recourant, qui succombe, doit supporter les frais dela présente procédure (art. 153, 153a et 156 al. 1 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 2.Un émolument judiciaire de 2000 fr. est mis à la charge du recourant. 3.Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, auMinistère public et à la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal ducanton de Neuchâtel. Lausanne, le 27 avril 2006 Au nom de la Ire Cour de droit publicdu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.28/2006
Date de la décision : 27/04/2006
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-04-27;1p.28.2006 ?
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