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24/04/2006 | SUISSE | N°2P.285/2005

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 24 avril 2006, 2P.285/2005


{T 1/2}2P.285/2005 /svc Arrêt du 24 avril 2006IIe Cour de droit public MM. et Mme les Juges Merkli, Président,Betschart, Wurzburger, Müller et Yersin.Greffier: M. Dubey. Caisse de pensions du personnel communalde Lausanne (CPCL), recourante, contre Administration cantonale des impôts du cantonde Vaud, route de Berne 46, 1014 Lausanne,Tribunal administratif du canton de Vaud,avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne. art. 8 et 9 Cst. (impôt complémentaire sur les immeubles pour les années1997, 1998 et 1999), recours de droit public contre l'arrêt duTribunal administratif du canton de Vau

ddu 31 août 2005. Faits: A.Conformément au décret du 17 ...

{T 1/2}2P.285/2005 /svc Arrêt du 24 avril 2006IIe Cour de droit public MM. et Mme les Juges Merkli, Président,Betschart, Wurzburger, Müller et Yersin.Greffier: M. Dubey. Caisse de pensions du personnel communalde Lausanne (CPCL), recourante, contre Administration cantonale des impôts du cantonde Vaud, route de Berne 46, 1014 Lausanne,Tribunal administratif du canton de Vaud,avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne. art. 8 et 9 Cst. (impôt complémentaire sur les immeubles pour les années1997, 1998 et 1999), recours de droit public contre l'arrêt duTribunal administratif du canton de Vauddu 31 août 2005. Faits: A.Conformément au décret du 17 novembre 1942 du Grand Conseil du canton deVaud, la Caisse de pensions du personnel communal de Lausanne (ci-après: laCaisse de pensions) est une institution de droit public possédant lapersonnalité morale. Selon ses statuts du 11 mars 1975 révisés pour ladernière fois le 4 avril 2000, elle assure la prévoyance vieillesse,invalidité et survivants du personnel de la Commune de Lausanne.Le 25 novembre 1997, l'Administration cantonale des impôts du canton de Vaud(ci-après: l'Administration des impôts) a notifié à la Caisse de pensions unedécision de taxation fixant l'impôt complémentaire sur les immeubles pour lespériodes fiscales 1995 et 1996. Par décision du 28 novembre 1997, elle luiréclamait le paiement d'un impôt de 462'545 fr. 60 pour 1995 et de 442'135fr. 60 pour 1996. Elle n'avait jamais été assujettie à cet impôt jusqu'alors.Le 9 décembre 1997, l'Administration des impôts a notifié à la Caisse depensions une décision de taxation fixant l'impôt complémentaire sur lesimmeubles pour la période fiscale 1997, lui réclamant le paiement d'un impôtde 453'076 fr. 60. Le 27 février 1998, la Caisse de pensions a demandél'exonération de l'impôt complémentaire. Le 11 mars 1998, l'Administrationdes impôts, ayant omis de taxer des immeubles sis à Prilly, a aggravél'assiette de l'impôt dû par la Caisse de pensions pour les périodes fiscales1995 à 1997. Le 12 juin 1998 toutefois, elle a déclaré renoncer au paiementde l'impôt complémentaire pour 1995 et 1996, mais a maintenu le bordereaud'impôt pour 1997.Le 14 décembre 1998, l'Administration des impôts a notifié à la Caisse depensions une décision de taxation fixant l'impôt complémentaire sur lesimmeubles pour la période fiscale 1998, lui réclamant par décision datée dulendemain le paiement d'un impôt de 491'220 fr. 10. B.Le 5 janvier 1999, la Caisse de pensions a déposé une réclamation, concluantà l'annulation de l'impôt complémentaire sur les immeubles pour les périodesfiscales 1997 et 1998.Avant de rendre une décision sur réclamation, l'Administration des impôts aadressé le 29 novembre 2004 à la Caisse de pensions une proposition derèglement de l'impôt complémentaire sur les immeubles des périodes fiscales1997, 1998 et 1999. Puis, par décision du 3 mars 2005, l'Administration desimpôts a déclaré irrecevable la réclamation dirigée contre la décision detaxation du 9 décembre 1997 pour la période fiscale 1997. Elle apartiellement admis la réclamation s'agissant de l'impôt de la périodefiscale 1998 et de celui de la période fiscale 1999, qui, selon ses dires,aurait été notifié à la Caisse de pensions le 23 novembre 1999, ce que démentcette dernière. L'impôt a été ramené à 473'080 fr. 60 pour les deux années1998 et 1999. C.Saisi par la Caisse de pensions d'un recours contre la décision surréclamation du 3 mars 2005, le Tribunal administratif du canton de Vaud l'apartiellement admis par arrêt du 31 août 2005, annulant la décision attaquéeen tant qu'elle concerne l'impôt complémentaire sur les immeubles de lapériode fiscale 1999. Il a considéré en substance que la décision de taxationde la période fiscale 1997 notifiée le 9 décembre 1997 était entrée en force.A défaut de motif de révision, l'aggravation, le 16 mars 1998, de cettetaxation avait été annulée à bon droit dans la décision sur réclamation. Ladécision de taxation de l'année 1999 n'était, quant à elle, jamais parvenue àson destinataire; faute de réclamation de la part de la Caisse de pensions,elle ne pouvait faire l'objet de la décision du 3 mars 2005. S'agissant del'impôt de la période fiscale 1998, l'impôt complémentaire sur les immeublesconstituait un impôt foncier au sens de l'art. 80 al. 3 de la loi sur laprévoyance professionnelle. Les dispositions légales vaudoises ne pouvaientêtre interprétées dans le sens d'une exonération de la Caisse de pensions.Malgré les analogies entre les situations de la Caisse de pensions de l'Etatde Vaud et de la Caisse intercommunale de pensions et celle de la Caisse depensions du personnel communal de Lausanne, il n'était pas insoutenabled'assimiler cette dernière à une caisse de pensions d'entreprise privée ou decollectivité publique ou encore à la Banque cantonale vaudoise. Il importaitpeu à cet égard que la différence entre la Caisse de pensions du personnelcommunal de Lausanne et la Caisse intercommunale de pensions soit ténue,puisque le résultat répondait à l'approche restrictive du législateurvaudois. D.Agissant par la voie du recours de droit public pour violation des art. 8 et9 Cst., la Caisse de pensions demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêtdu 31 août 2005 en tant qu'il concerne l'impôt complémentaire sur lesimmeubles des années 1997 et 1998.Le Tribunal administratif et l'Administration des impôts concluent au rejetdu recours.Par ordonnance du 19 octobre 2005, le Président de la IIe Cour de droitpublic a admis la requête d'effet suspensif de la Caisse de pensionss'agissant de la période fiscale 1998. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recoursqui lui sont soumis (ATF 131 I 57 consid. 1 p. 59). 1.1 Le recours de droit public au sens de l'art. 84 al. 1 lettre a OJ estconçu pour la protection des droits constitutionnels des citoyens contre desabus de la puissance publique. Selon une jurisprudence constante et bienétablie, l'Etat - cantons, communes ou leurs autorités, autres collectivitésou établissements de droit public - n'est en principe pas titulaire de cesdroits constitutionnels, qui existent précisément contre lui (ATF 125 I 173consid. 1b p. 175; 121 I 218 consid. 2a p. 219; 120 Ia 95 consid. 1a p. 96;119 Ia 214 consid. 1a p. 216; 113 Ia 232 consid. 2b p. 235; 109 Ia 173consid. 1 p. 174; 107 Ia 175 consid. 1a p. 178; 103 Ia 58 consid. 1 p. 59;103 Ia 63 consid. 2a; 99 Ia 110 consid. 1; 66 I 72 consid. 1 p. 74).La jurisprudence admet deux exceptions en faveur des communes: (1) Ellespeuvent se plaindre de la violation de leur autonomie ou d'une atteinte àleur existence ou à l'intégrité de leur territoire garanties par le droitcantonal ATF 124 I 223 consid. 1b p. 226; 122 I 279 consid. 8 p. 290; 121 I155 consid. 4 p. 159 et les arrêts cités). (2) Elles peuvent également seplaindre de la violation de droits constitutionnels lorsqu'ellesn'interviennent pas en tant que détentrices de la puissance publique, maisqu'elles agissent sur le plan du droit privé ou qu'elles sont atteintes dansleur sphère privée de façon identique ou analogue à un particulier,notammentquand elles agissent en leur qualité de propriétaires de biens du patrimoineadministratif ou financier, ou encore quand elles sont elles-mêmes débitricesde taxes ou d'impôts (cf. ATF 125 I 173 consid. 1b p. 175; 123 III 454consid. 2 p. 456; 121 I 218 consid. 2a p. 220; 120 Ia 95 consid. 1a p. 97;119 Ia 214 consid. 1a p. 216; 111 Ia 146 consid. 1b p. 148; 109 Ia 173consid. 2 p. 175; 107 Ia 175 consid. 1b p. 179; 104 Ia 381 consid. 1 p. 387;103 Ia 58 consid. 2b p. 62; 88 I 107; 79 I 327 consid. 1 p. 330).En principe réservées aux communes, voire aux corporations de droit public deniveau communal telles que les communes ecclésiastiques ("Kirchgemeinde"),les communes bourgeoisiales ("Bürgergemeinde") ou le cas échéant certainesassociations de communes, ces exceptions ont été étendues à de raresoccasions à d'autres corporations de droit public; des collectivités d'unautre niveau ou investies d'autres tâches ne peuvent pas l'invoquer (ATF 125II 177 consid. 3c p. 182; 113 Ia 200 consid. 1 p. 202; 113 Ia 232 consid. 2bp. 236; 110 Ia 197 consid. 1; 108 Ia 82 consid. 1a p. 84; 95 I 49 consid. 3p. 54 et les arrêts cités).En l'espèce, la recourante est une corporation de droit public de niveaucommunal jouissant de la personnalité morale, qui se défend contre uneapplication du droit cantonal l'assujettissant, à tort selon elle, à l'impôtcomplémentaire sur les immeubles. Dans ces conditions, elle a qualité pourdéposer un recours de droit public. 1.2 Au surplus, déposé en temps utile contre une décision finale prise endernière instance cantonale, qui ne peut être attaquée que par la voie durecours de droit public et qui touche la recourante dans ses intérêtsjuridiquement protégés, le présent recours est recevable au regard des art.84 ss OJ. 2.La recourante tient l'arrêt du Tribunal administratif pour arbitraire en cequ'il a confirmé l'irrecevabilité de la réclamation contre la décision detaxation du 9 décembre 1997 de la période fiscale 1997. En notifiant le 11mars 1998 une nouvelle décision de taxation pour la même période,l'Administration des impôts aurait créé l'apparence que la taxation du 9décembre 1997 n'était pas définitive et pouvait être remise en cause. 2.1 Une décision est arbitraire lorsqu'elle contredit clairement la situationde fait, lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clairet indiscuté, ou lorsqu'elle heurte d'une manière choquante le sentiment dela justice et de l'équité. A cet égard, le Tribunal fédéral ne s'écarte de lasolution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si elleapparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situationeffective, adoptée sans motifs objectifs ou en violation d'un droit certain.De plus, il ne suffit pas que les motifs de l'arrêt attaqué soientinsoutenables, encore faut-il que ce dernier soit arbitraire dans sonrésultat. Il n'y a en outre pas arbitraire du seul fait qu'une autre solutionque celle de l'autorité intimée paraît concevable, voire préférable (ATF 131I 217 consid. 2.1 p. 219; 57 consid. 2 p. 61 et la jurisprudence citée). 2.2 En l'espèce, la recourante ne conteste pas que, le 9 décembre 1997,l'Administration des impôts lui a notifié pour la période fiscale 1997 unedécision de taxation de l'impôt complémentaire sur les immeubles. L'art. 101al. 1 de la loi vaudoise du 26 novembre 1956 sur les impôts directs cantonaux(aLI/VD; encore applicable à la période fiscale en cause) prévoit que laréclamation s'exerce par un acte écrit et motivé, adressé à l'autorité detaxation dans les trente jours dès la notification de la décision attaquée.Les délais de réclamation et de recours étant des délais légaux, ils nepeuvent être ni prolongés ni suspendus. Tout au plus peuvent-ils, le caséchéant, lorsque le droit cantonal le prévoit, être restitués dans le respectdes conditions légales, ce dont ne se prévaut pas la recourante. Dans cesconditions, déposées en dehors du délai de 30 jours, qui courait dès lanotification, le 9 décembre 1997, de la décision de taxation litigieuse, lesréclamations des 27 février 1998 et 5 janvier 1999 étaient irrecevables. Unefois entrée en force, la taxation du 9 décembre 1997 liait aussil'Administration des impôts qui ne pouvait par conséquent modifierultérieurement sa décision en l'absence de motif de révision (art. 109 aLI).Enfin, comme la décision de taxation du 9 décembre 1997 était munie del'indication des voies de droit, le principe de protection de la bonne foin'a pas d'application ici.En confirmant l'irrecevabilité de la réclamation du 5 janvier 1999, leTribunal administratif n'est pas tombé dans l'arbitraire. 3.La recourante reproche au Tribunal administratif une violation du principe dela légalité. En refusant de lui reconnaître le droit à être exonérée del'impôt complémentaire sur les immeubles, le Tribunal administratif auraitinterprété de manière arbitraire le droit cantonal. 3.1 Appelé à revoir l'interprétation d'une norme sous l'angle restreint del'arbitraire, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue parl'autorité cantonale de dernière instance que si celle-ci apparaîtinsoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptéesans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En revanche, sil'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne s'avère pasdéraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la dispositionou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même siune autre solution - éventuellement plus judicieuse - paraît possible (ATF117 Ia 97 consid. 5b p. 106, 292 consid. 3a p. 294 et les références citées;sur la notion d'arbitraire, cf. ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9 et lajurisprudence citée).La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre. Selon la jurisprudence,il n'y a lieu de déroger au sens littéral d'un texte clair par voied'interprétation que lorsque des raisons objectives permettent de penser quece texte ne restitue pas le sens véritable de la disposition en cause. Detels motifs peuvent découler des travaux préparatoires, du but et du sens dela disposition, ainsi que de la systématique de la loi. Si le texte n'est pasabsolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, ilconvient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en ladégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travauxpréparatoires, du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs surlesquelles elle repose ou encore de sa relation avec d'autres dispositionslégales (ATF 131 II 13 consid. 7.1 p. 31). 3.2 Le canton de Vaud perçoit sur les transferts entre vifs à titre onéreuxde la propriété d'un immeuble ou d'une part d'immeuble un droit de mutationde 2,2% en principe assis sur la valeur de l'immeuble transféré (art. 1, 2, 6et 10 de la loi du 27 février 1963 concernant les droits de mutation sur lestransferts immobiliers et l'impôt sur les successions et donations (LMSD/VD;RSVD 648.11). En 1930 déjà, le Grand Conseil vaudois constatait la créationde nombreuses sociétés, notamment immobilières, dans le but d'échapper audroit de mutation par le transfert de la totalité des actions en lieu etplace du transfert des immeubles (Bulletin des séances du Grand Conseil ducanton de Vaud; BGC automne 1930, p. 383). Pour y remédier, plutôt qued'assimiler au transfert des immeubles, le transfert de la totalité desactions, ou les actes qui, en fait et économiquement, produisent au regard dupouvoir de disposer des effets analogues, le législateur vaudois a choisi lasolution qui consiste à compléter par une taxe annuelle les droits demutation grevant la propriété foncière (BGC automne 1930, p. 384). Cesréflexions sont à l'origine des dispositions de la loi du 23 décembre 1930concernant l'imposition complémentaire des immeubles appartenant aux sociétéet fondations (aLICI/VD; Recueil des
lois 1930, p. 195 ss), puis des art. 67et 68 aLI/VD dès 1957 (Recueil des lois 1956, p. 359 ss), et enfin des art.128 et 129 de la loi du 4 juillet 2000 sur les impôts directs cantonaux dèsle 1er janvier 2001 (LI/VD; RSVD 642.11).Selon l'art. 67 aLI/VD, applicable aux périodes fiscales en cause, lespersonnes morales sont astreintes à un impôt complémentaire annuel de 1 $ del'estimation fiscale des immeubles dont elles sont propriétaires. Sontexceptés les immeubles ou parties d'immeubles qu'elles utilisent elles-mêmespour l'exploitation d'un commerce ou d'une industrie et les immeublesd'habitation à caractère social. L'impôt est dû par les personnes moralespropriétaires de l'immeuble au début de l'année, pour l'année civile entière.Selon l'art. 68 aLI/VD, en cas d'aliénation d'un immeuble ou d'une partied'immeuble entraînant le paiement d'un droit de mutation, l'impôtcomplémentaire est remboursé à l'aliénateur, mais au plus jusqu'à concurrencede quinze fois son montant annuel. En aucun cas la somme à rembourser nepourra excéder le montant du droit de mutation payé.Se fondant sur l'art. 74 aLI/VD, le Conseil d'Etat vaudois a édicté lerèglement d'application du 8 novembre 1957 sur l'imposition complémentairedes immeubles appartenant aux sociétés et fondations (aRègl.; Recueil deslois 1957, p. 220 s., modifié par arrêté du 7 juin 1966 [Recueil des lois1966, p. 193]). Selon l'art. 1er aRègl., applicable en l'espèce, l'impôtcomplémentaire s'applique aux immeubles appartenant, au 1er janvier del'année fiscale, aux sociétés anonymes, aux sociétés en commandite paractions, aux sociétés à responsabilité limitée, aux sociétés coopératives,aux associations, aux fondations ainsi qu'à toute personne morale de droitétranger assimilable à l'une des sociétés ou fondations précitées. Lerèglement du 2 décembre 2002 sur l'imposition complémentaire des immeublesappartenant aux sociétés et fondations (Règl.; RSVD 642.11.9.5) reprend pourl'essentiel les dispositions du règlement de 1957.De l'avis de la recourante les personnes morales de droit public, sontexonérées de l'impôt complémentaire sur les immeubles. Il convient parconséquent d'interpréter les dispositions légales applicables. 3.3 L'art. 67 aLI/VD assujettit à l'impôt complémentaire sur les immeublesles personnes morales. Prise à la lettre, cette disposition vise l'ensembledes personnes morales du droit suisse. Ne comportant aucune dispositionaccordant une exonération subjective, elle vise par conséquent aussi lespersonnes morales de droit public. L'art. 1er aRègl. en revanche donne uneénumération exhaustive des personnes morales imposées qui ne comporte pas lespersonnes morales de droit public. En tant qu'ordonnance d'exécutioncependant, le règlement du 8 novembre 1957 ne saurait en principe l'emportersur l'art. 67 aLI/VD. Un règlement ou une ordonnance d'exécution ne peut eneffet poser des règles nouvelles qui restreindraient les droits desadministrés ou leur imposeraient des obligations, même si ces règles sontencore conformes au but de la loi (ATF 129 V 95 consid. 2.1 p. 97; 98 Ia 281consid. 5b/bb p. 287 et les références citées, André Grisel, Traité de droitadministratif, tome I, Neuchâtel 1984, p. 82 s.). Ils ne peuvent non pluscréer des exonérations non prévues par la loi en contradiction avec leprincipe de la généralité de l'impôt. Il s'ensuit que les personnes moralesde droit public devraient en principe être soumises à l'impôt complémentairesur les immeubles.Cette conclusion n'est néanmoins pas confirmée par l'examen des versionssuccessives des dispositions légales qui ont fixé depuis 1930 le cercle descontribuables à l'impôt complémentaire. Selon l'art. 1er de la loi du 23décembre 1930, "les sociétés anonymes, les sociétés en commandite paractions, les sociétés coopératives, les associations et, d'une manièregénérale, toutes les sociétés possédant la personnalité morale ainsi que lesfondations" étaient assujetties à l'impôt complémentaire. Cette énumérationn'a pas été reprise dans le projet de loi sur les impôts directs cantonauxde 1956 (BGC printemps 1956, p. 762, 800, 814, 1692 et 1698) sans que lestravaux du Grand Conseil ne permettent d'affirmer qu'en remplaçantl'énumération initiale par les termes "personnes morales" (art. 61septiesdevenu l'art. 67 aLI/VD), le législateur avait l'intention de modifier lecercle des personnes morales assujetties à l'impôt complémentaire. Elle a enrevanche été reprise à l'art. 1er aRègl. par arrêté du Conseil d'Etat du 7juin 1966. Lors de ses travaux relatifs à l'adaptation de la loi du 26novembre 1956 sur les impôts directs cantonaux (BGC printemps 1986, p. 451,467 et 477) à la loi fédérale du 25 juin 1982 sur la prévoyanceprofessionnelle vieillesse, survivants et invalidité (LPP; RS 831.40), leGrand Conseil n'a traité que de l'exonération des impôts directs et desimpôts sur les successions et donations, et n'a pas abordé le régime del'impôt complémentaire. Conformément à l'art. 80 al. 3 LPP, les institutionsde prévoyance n'ont été exonérées que de ces impôts et restent soumises àl'impôt sur les gains immobiliers, aux droits de mutation et à l'impôtfoncier communal. Dans ces conditions, l'interprétation historique ne permetpas de trancher la question de l'assujettissement des personnes morales dedroit public à l'impôt complémentaire, comme le constate le Tribunaladministratif. Sous l'angle systématique et téléologique, le décret du 17 novembre 1942accordant la personnalité morale à la Caisse de pensions du personnelcommunal de Lausanne (RSVD 831.471) ne contient aucune précision. Le décretdu 5 septembre 1923 reconnaissant comme personne morale la Caisseintercommunale de pensions (DCIP; RSVD 831.451) ainsi que la loi du 18 juin1984 sur la Caisse de pensions de l'Etat de Vaud (LCP/VD; RSVD 172.43)prévoient tous deux l'exemption de "tous les impôts cantonaux et communaux, àl'exception de l'impôt foncier communal, des droits de mutation et de l'impôtsur les gains immobiliers", l'impôt complémentaire n'étant pas mentionné. A s'en tenir aux buts de son introduction et à sa fonction, l'impôtcomplémentaire devrait logiquement suivre le sort des droits de mutation,puisqu'il doit les remplacer en partie et peut être remboursé au moinspartiellement en cas de perception de ces derniers. Dans cette hypothèsetoutefois, la Caisse de pensions de l'Etat de Vaud et la Caisseintercommunale de pensions devraient y être assujetties, ce qui n'est pas lecas, l'impôt complémentaire étant apparemment compris dans les impôts dontces institutions sont exemptées. Il résulte de ce qui précède que la législation vaudoise apparaît incohérenteet que son interprétation ne permet pas de trancher la question del'exonération de la recourante de l'impôt complémentaire sur les immeubles.Cela n'est toutefois pas nécessaire, car le recours doit être admis pour unautre motif. 4.En effet, la recourante se plaint également de la violation du droit àl'égalité de l'art. 8 Cst., la Caisse de pensions de l'Etat de Vaud et laCaisse intercommunale de pensions étant, contrairement à elle, exonérées del'impôt complémentaire sur les immeubles. 4.1 Une décision viole le principe de l'égalité de traitement lorsqu'elleétablit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motifraisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu'elleomet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances,c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manièreidentique et ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente. Ilfaut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à unesituation de fait importante (ATF 131 V 107 consid. 3.4.2 p. 114; 129 I 113consid. 5.1 p. 125; 127 V 448 consid. 3b p. 454; 125 I 1 consid. 2b/aa p. 4et la jurisprudence citée). 4.2 En l'espèce, le Tribunal administratif a constaté que "la situation de laCaisse de pensions de l'Etat de Vaud, et plus encore celle de la Caisseintercommunale de pensions, présentait des analogies suffisamment importantesavec celles de la Caisse de pensions du personnel communal de Lausanne".Cette constatation de fait devait suffire à sceller le sort du recours déposédevant lui. Il s'agit en effet de trois personnes morales de droit public,dont le but similaire est d'assurer le personnel respectivement du canton etdes communes, confrontées à un impôt complémentaire sur les immeubles perçutant par le canton que par les communes (art. 1er al. 1 lettre h de la loivaudoise du 5 décembre 1956 sur les impôts communaux; RSVD 650.11). Dans cesconditions, il n'y avait aucun motif qui justifiait l'exonération des seulesCaisse de pensions de l'Etat de Vaud et Caisse intercommunale de pensions.C'est en vain que le Tribunal administratif a tenté de comparer la recouranteaux institutions de prévoyance revêtant la forme de personne morale de droitprivé, qu'elle n'a pas, ou encore à la Banque cantonale vaudoise, dont lesactivités commerciales sont par nature différentes des siennes. Il nes'agissait pas de s'en tenir à l'approche - restrictive - du législateur,mais bien de constater sous l'angle du droit à l'égalité, que les troiscaisses de pensions devaient être soumises à un régime identique, soitd'exonération de cet impôt, vu le traitement réservé aux Caisses précitées. 5.Les considérants qui précèdent conduisent à l'admission partielle du recourset à l'annulation de l'arrêt du 31 août 2005 du Tribunal administratif entant qu'il porte sur l'impôt complémentaire de l'année 1998.Les frais judiciaires sont mis à la charge de l'Administration cantonale desimpôts qui succombe et qui défend un intérêt pécuniaire (art. 156 al. 1 et156 al. 2 a contrario en relation avec les art. 153 et 153a OJ). Larecourante ayant obtenu gain de cause sans le concours d'un mandataireprofessionnel n'a pas droit à des dépens (art. 160 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est partiellement admis et l'arrêt du Tribunal administratif ducanton de Vaud du 31 août 2005 est annulé en tant qu'il porte sur l'impôtcomplémentaire de l'année 1998. Pour le surplus, il est rejeté. 2.Un émolument judiciaire de 10'000 fr. est mis à la charge du canton de Vaud. 3.Le présent arrêt est communiqué en copie à la recourante, à l'Administrationcantonale des impôts et au Tribunal administratif du canton de Vaud. Lausanne, le 24 avril 2006 Au nom de la IIe Cour de droit publicdu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.285/2005
Date de la décision : 24/04/2006
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-04-24;2p.285.2005 ?
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