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21/04/2006 | SUISSE | N°5C.19/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 21 avril 2006, 5C.19/2006


{T 0/2}5C.19/2006 /frs Arrêt du 21 avril 2006IIe Cour civile MM. et Mme les Juges Raselli, Président,Hohl et Marazzi.Greffier: M. Abrecht. X. ________,demandeur et recourant, représenté par Me MichelDe Palma, avocat, contre Y.________ Assurances,défenderesse et intimée, représentée par Me François Pfefferlé, avocat, contrat d'assurance, recours en réforme contre le jugement de la Cour civile II du Tribunalcantonal du canton du Valais du 2 décembre 2005. Faits: A.X. ________, né en 1959, a fait sa scolarité obligatoire et appris le métierde maçon au Portugal. Arrivé en Suisse e

n 1987, il a d'abord oeuvré commejardinier-concierge durant deux...

{T 0/2}5C.19/2006 /frs Arrêt du 21 avril 2006IIe Cour civile MM. et Mme les Juges Raselli, Président,Hohl et Marazzi.Greffier: M. Abrecht. X. ________,demandeur et recourant, représenté par Me MichelDe Palma, avocat, contre Y.________ Assurances,défenderesse et intimée, représentée par Me François Pfefferlé, avocat, contrat d'assurance, recours en réforme contre le jugement de la Cour civile II du Tribunalcantonal du canton du Valais du 2 décembre 2005. Faits: A.X. ________, né en 1959, a fait sa scolarité obligatoire et appris le métierde maçon au Portugal. Arrivé en Suisse en 1987, il a d'abord oeuvré commejardinier-concierge durant deux ans, puis comme maçon. Depuis 1990, il a enoutre assumé, conjointement avec son épouse, la conciergerie d'un immeuble. Se fondant sur la proposition d'assurance signée par X.________ le 22septembre 1990, Y.________ Assurance a établi le 18 décembre 1990 une policed'assurance. Aux termes de ce document, la durée du contrat est de 30 ans, du1er janvier 1991 au 1er janvier 2021, et la prime mensuelle s'élève à 134 fr.30. Les prestations convenues sont notamment un capital de 30'000 fr. en casd'invalidité, une indemnité journalière de 20 fr., une rente annuelle de9'000 fr. en cas d'incapacité de gagner par suite de maladie ou d'accident,ainsi que la libération du service des primes en cas d'incapacité de gagnertemporaire et d'invalidité permanente. Selon les conditions générales d'assurance (ci-après: CGA) applicables à cecontrat, lorsque par suite de maladie médicalement attestée ou d'accident,l'assuré est atteint d'une incapacité de gagner présumée permanente(invalide) d'au moins 66,66%, l'Assurance verse le capital invalidité etl'assuré est libéré du service des primes (art. 19 ch. 1 CGA). Il y aincapacité de gagner lorsque, par suite de maladie ou de déclin de sesfacultés mentales et physiques médicalement attestées, ou par suite d'unaccident, l'assuré n'est plus à même d'exercer sa profession ou une autreactivité lucrative correspondant à sa position sociale, à ses connaissanceset à ses aptitudes (art. 20 ch. 1 CGA). Lorsque l'incapacité de gagner del'assuré survient avant l'échéance de l'assurance principale et qu'elle aduré sans interruption pendant les 720 jours du délai d'attente, l'Assuranceverse une rente trimestrielle, payable à terme échu, au plus tard jusqu'àl'accomplissement de ses 65 ans (art. 27 ch. 1 let. a CGA). Une incapacité degagner d'au moins 40% donne droit à une demi-rente et d'au moins 66,66% à unerente entière (art. 27 ch. 2 let. a CGA). B.Le 8 février 1997, alors qu'il surveillait le garage de l'immeuble dont ilassumait la conciergerie, X.________ a glissé sur du verglas, ce qui aentraîné une torsion de son genou droit puis une chute. En raison de cetaccident, qui a provoqué une rupture du ligament croisé antérieur droit,l'Assurance lui a versé les indemnités journalières convenues jusqu'au 18mars 1999 et l'a libéré du paiement des primes. Le médecin mandaté par l'Office cantonal AI, le Dr A.________, a estimé dansson rapport du 14 septembre 2000 qu'un horaire à temps plein était exigiblede X.________ dans un travail adapté. Par décision du 30 octobre 2000,l'Office cantonal AI a arrêté l'invalidité de X.________ à 40% dès le 1er mai1999. Il a notamment considéré que, depuis janvier 1999 au plus tard, onpouvait attendre de l'intéressé qu'il exerce à plein temps une activitélégère et adaptée en qualité d'ouvrier d'usine (montage, emballage,assemblage de pièces légères). Par courriers des 3 et 28 novembre 2000, se fondant sur le dossier AI etretenant une incapacité de gagner de 40%, l'Assurance a, avec effet au 1ermai 1999, refusé de libérer le demandeur du service des primes mais a acceptéle principe de lui octroyer une demi-rente. Par la suite toutefois, elle aindiqué que si son assuré contestait le renvoi à l'appréciation de l'AI pourdéterminer son taux d'incapacité de gain, elle serait contrainte de seréserver le droit de revoir l'appréciation de ce taux selon l'instruction quiserait mise en oeuvre dans le cadre d'une procédure judiciaire, avec lerisque que le taux finalement reconnu selon les CGA soit inférieur à celuinécessaire pour l'octroi d'une demi-rente. En 2001, le médecin mandaté par l'assureur LAA, le Dr B.________, a estiméque dans une occupation adaptée comme un travail en position assise ou untravail de surveillance, X.________ pouvait travailler en plein et que, dansun travail léger et adapté de conciergerie, un patient motivé pouvait assumerune activité de 50%. Par décision du 15 octobre 2001, l'assureur LAA aaccordé à X.________ une rente mensuelle de 1'967 fr., ainsi qu'une indemnitépour atteinte à l'intégrité de 19'440 fr. C.Le 22 août 2002, X.________ a ouvert action contre l'Assurance, en concluantavec suite de frais et dépens au paiement d'une rente annuelle de 9'000 fr. àpartir du 9 février 1999, avec intérêt à 5% l'an dès cette date, au paiementd'un capital invalidité de 30'000 fr. avec intérêt à 5% l'an dès le 1ernovembre 2000 et à la libération du paiement des primes à partir du 1er mai1999. La défenderesse a conclu avec suite de frais et dépens au rejet de lademande. En cours d'instance, une expertise judiciaire a été mise en oeuvre et confiéeau Dr C.________, qui a déposé son rapport le 29 mars 2004. L'expert estarrivé à la conclusion que la capacité de X.________ dans son activité demaçon était proche de 0%. S'agissant de son activité de conciergerie, il aestimé qu'elle était exigible avec un taux approximatif de 40-50%. Enfin,dans une activité adaptée, l'expert a considéré la capacité de travail deX.________ comme entière. Compte tenu des limitations liées aux problèmes degenou, il a considéré que l'intéressé était susceptible de travailler commeouvrier d'usine (montage, emballage, assemblage de pièces légères),micro-soudure, micro-électronique, surveillance (parking, conciergerie),travail de bureau (ordinateur), voire de guichet, et qu'il n'y avait pasd'obstacle, d'un point de vue orthopédique, pour que le demandeur entame unenouvelle carrière professionnelle. D.Par jugement du 2 décembre 2002, la Cour civile II du Tribunal cantonal ducanton du Valais a rejeté la demande, avec suite de frais et dépens. Lamotivation de ce jugement est en substance la suivante:D.aLa LCA contient des règles spécifiques à l'assurance contre les dommages,d'une part, et à l'assurance de personnes, d'autre part. Pour ranger uneprestation donnée dans l'une ou l'autre de ces deux catégories, il faut sedemander si ladite prestation couvre un dommage concret ou si elle doit êtreeffectuée indépendamment de l'existence d'un préjudice effectif (ATF 119 II361 consid. 4). Dans l'assurance privée contre les accidents, l'indemnité convenue pour lecas d'invalidité est due, aux termes de l'art. 88 al. 1 LCA, lorsquel'accident a causé à l'assuré une diminution probablement permanente de sacapacité de travail. En cette matière, toute atteinte définitive àl'intégrité corporelle, qui diminue la capacité de travail, constitue uneinvalidité, sans qu'il soit nécessaire que l'assuré éprouve effectivement unpréjudice économique ensuite de l'accident. L'invalidité correspond donc àune incapacité de travail théorique et abstraite, établie pour la moyenne descas, indépendante de la profession de l'assuré et des circonstances du casconcret (RBA XV n° 96; RBA XIV n° 89). D.b Lorsque l'assuré est totalement incapable de continuer à pratiquer saprofession et lorsque la preuve n'a pas été apportée qu'il est capabled'exercer une autre activité correspondant à sa position sociale, à sesconnaissances et à ses aptitudes, selon les critères de l'incapacité detravail fixés par les CGA, l'assureur doit payer la prestation convenue (RBAXVII n° 36). Inversement, il n'y a pas incapacité de gain lorsque l'assuré nepeut plus exercer son ancien métier, mais peut exercer d'autres professionsen rapport avec sa position sociale, ses connaissances et ses aptitudes (RBAXVIIII n° 48). D.c En l'espèce, il appert à la lecture de l'art. 20 ch. 1 CGA que le degréd'incapacité de gagner de l'assuré découle uniquement de l'appréciation de sacapacité de travail et non du dommage économique qui pourrait en résulter.L'assuré doit en effet être hors d'état d'exercer sa profession ou une autreactivité lucrative correspondant à sa position sociale, à ses connaissanceset à ses aptitudes, mais une perte de gain ne constitue pas une condition dudroit aux prestations. La police d'assurance litigieuse couvrant le risqued'incapacité de gagner doit par conséquent être qualifiée d'assurance depersonnes, et c'est la notion d'invalidité médico-théorique, indépendante dela perte de gain effective, qui trouve application dans le cas d'espèce. D.d Selon les différents rapports médicaux déposés en cause, et enparticulier le rapport convaincant de l'expert judiciaire, le demandeursouffre depuis son accident du 8 février 1997 de problèmes récurrents augenou droit et n'est plus à même d'exercer sa profession de maçon. Enrevanche, toujours selon l'appréciation de l'expert judiciaire, dont il n'y apas lieu de s'écarter et qui est corroborée par les constatations émises parle Dr A.________ et le Dr B.________, le demandeur a une capacité de travailentière dans des activités adaptées telles que celles d'ouvrier d'usine(montage, emballage, assemblage de pièces légères), d'employé enmicro-soudure ou micro-électronique, de surveillance (parking, conciergerie),de bureau, voire de guichet. Il convient donc de déterminer si ces activités sont raisonnablementexigibles de la part du demandeur, eu égard aux trois critères énumérés parl'art. 20 ch. 1 CGA (position sociale, connaissances et aptitudes). D.e Le demandeur est âgé de 46 ans. Il est de langue maternelle portugaise,mais parle bien le français. Il a achevé sa scolarité obligatoire et a apprisle métier de maçon au Portugal. C'est un ouvrier consciencieux et fiable. Ila exercé plusieurs activités différentes depuis son arrivée en Suisse(jardinier durant deux ans, maçon durant huit ans, concierge dès 1990). Il aen outre suivi un cours de perfectionnement en 1992. Ainsi, vu notammentl'âge du demandeur, sa bonne intelligence et sa capacité d'adaptation, unereconversion professionnelle peut être exigée de sa part. À défaut demaîtriser l'informatique, le demandeur ne peut cependant pas effectuer untravail de bureau ou de guichet. En revanche, les autres activités proposéespar l'expert judiciaire correspondent aux connaissances et aptitudes dudemandeur. Il reste donc à examiner si ces activités correspondent à saposition sociale. D.f Le demandeur a travaillé en Suisse durant dix ans en qualité d'employé,soit toujours dans des postes subalternes. Il n'a jamais occupé de fonctionélevée hiérarchiquement ou autonome, le certificat de travail délivré par sondernier employeur ne faisant état que d'une activité de maçon. Il ne sauraitdès lors prétendre avoir les qualifications et les responsabilités d'uncontremaître ou d'un chef d'équipe, n'ayant jamais travaillé en ces qualités.Son salaire annuel net en 1996, treizième salaire compris, s'élevait à 53'326fr. (plus 4'604 fr. d'allocations familiales). D'après l'enquête suisse surla structure des salaires menée par l'Office fédéral de la statistique, lesalaire mensuel brut des hommes exerçant une activité simple et répétitivedans le secteur privé était de 4'268 fr. en 1998, de 4'437 fr. en 2000 et de4'540 fr. en 2002. Au regard du large éventail d'activités que recouvrent lessecteurs de la production et des services, on doit retenir qu'un certainnombre d'entre elles sont adaptées au handicap dont souffre le demandeur. Deplus, l'éventuelle différence de salaire entre son ancienne activité etcelles susceptibles d'entrer aujourd'hui en considération n'est passuffisamment significative pour considérer que son train de vie seraitnotablement diminué. Ainsi, contrairement à ce que soutient le demandeur,force est de considérer que son niveau social ne l'empêche pas d'exercer uneactivité lucrative en qualité d'ouvrier d'usine, d'employé en micro-soudureou micro-électronique ou de surveillance. D.g En définitive, il sied de retenir que les conséquences médicales qui sontliées à l'accident du 8 février 1997 et qui affectent le demandeur ne leprivent pas de la capacité d'exercer une autre activité lucrativecorrespondant à sa position sociale, à ses connaissances et à ses aptitudes.Le demandeur ne se trouvant ainsi pas dans une incapacité de gagner au sensde l'art. 20 ch. 1 CGA, son action doit être rejetée. E.Contre ce jugement, le demandeur interjette en parallèle un recours de droitpublic et un recours en réforme au Tribunal fédéral. Par le recours de droit public (5P.23/2006) ¿ qui tend à l'annulation dujugement attaqué ¿, le demandeur reproche à l'autorité cantonale d'avoir faitpreuve d'arbitraire dans la constatation des faits en considérant que lemétier de maçon entrait, s'agissant de l'enquête suisse sur la structure dessalaires, dans la catégorie des activités simples et répétitives. Par le recours en réforme (5C.19/2006) ¿ qui tend à la réforme du jugementattaqué dans le sens de l'admission des conclusions de la demande avec suitede frais et dépens des instances cantonales ¿, le demandeur fait grief à lacour cantonale, en se fondant sur l'enquête suisse sur la structure dessalaires, d'avoir considéré à tort que des activités telles que cellesd'ouvrier d'usine ou de concierge correspondaient à la position sociale d'unouvrier qualifié tel qu'un maçon. Des réponses aux recours n'ont pas été demandées. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.1.1 Aux termes de l'art. 57 al. 5 OJ, il est sursis en règle générale àl'arrêt sur le recours en réforme jusqu'à droit connu sur le recours de droitpublic. Cette disposition souffre toutefois des exceptions dans dessituations particulières, qui justifient l'examen préalable du recours enréforme (ATF 117 II 630 consid. 1a et les arrêts cités). En l'espèce, ilappert que la question soulevée par le demandeur dans ses deux recoursconnexes ¿ sous l'angle d'une constatation arbitraire des faits dans lerecours de droit public et d'une violation des principes d'interprétation descontrats dans le recours en réforme ¿ est celle de savoir si les activitésadaptées que le demandeur est à même d'exercer peuvent être considérées commecorrespondant à sa position sociale au sens de l'art. 20 ch. 1 CGA. Or commeon le verra, l'intégralité de l'argumentation du demandeur peut être prise enconsidération dans le cadre du recours en réforme, y compris dans la mesureoù elle se fonde sur des éléments de fait complémentaires que le demandeurtire de l'enquête suisse sur la structure des salaires (cf. consid. 3.2infra). Dans ces circonstances, il se justifie de traiter d'abord le recoursen réforme. 1.2 Le jugement attaqué tranche une contestation civile portant sur desdroits de nature pécuniaire dont la valeur dépasse largement 8'000 fr., ainsique la cour cantonale l'a constaté conformément à l'art. 51 al. 1 let. a OJ.Il constitue une décision
finale prise par le tribunal suprême du canton duValais et qui ne peut pas être l'objet d'un recours ordinaire de droitcantonal. Le recours en réforme, interjeté en temps utile, est donc recevableau regard des art. 46, 48 al. 1 et 54 al. 1 OJ. 2.2.1La loi fédérale sur le contrat d'assurance établit une distinctionbipartite de l'assurance, entre l'assurance contre les dommages (régie parles art. 48 à 72 LCA) d'une part, et l'assurance de personnes (qui relève desart. 73 à 96 LCA) d'autre part, sans toutefois définir ces deux notions(Christian Boll, Basler Kommentar, Bundesgesetz über denVersicherungsvertrag, 2001, n. 1 des remarques préliminaires à l'art. 48 LCA;Bernard Viret, Droit des assurances privées, 3e éd. 1991, p. 155).L'assurance de personnes est celle qui a pour objet une personne physique, etoù la prestation de l'assureur dépend généralement d'un événement qui atteintla personne de l'assuré, tel que maladie, accident, lésion corporelle,invalidité, décès (Viret, op. cit., p. 158; Moritz Kuhn/Pascal Montavon,Droit des assurances privées, 1994, p. 85; cf. Alfred Maurer, SchweizerischesPrivatversicherungs-recht, 3e éd. 1995, p. 168 et 271). L'assurance de personnes se caractérise, par rapport à l'assurance contre lesdommages, par sa nature non indemnitaire : elle est une promesse de capital,indépendante du montant effectif du préjudice subi par le preneur ou l'ayantdroit (Viret, op. cit., p. 153 et 158; Kuhn/Montavon, op. cit., p. 85 s.; ATF49 II 364 consid. 3 p. 370). Ainsi, même dans le cas d'une assurance qui,comme celle contre les accidents, a pour objet une personne physique, on esten présence d'une assurance de personnes uniquement lorsque les parties aucontrat d'assurance n'ont subordonné la prestation de l'assureur ¿ dont ellesont fixé le montant lors de la conclusion du contrat ¿ qu'à la survenance del'événement assuré, sans égard à ses conséquences pécuniaires; on est enrevanche en présence d'une assurance contre les dommages lorsque les partiesau contrat d'assurance ont fait de la perte patrimoniale effective unecondition autonome du droit aux prestations (ATF 119 II 361 consid. 4;Kuhn/Montavon, op. cit., p. 85 s.).2.2 En l'espèce, la cour cantonale a fait une correcte application de cesprincipes en considérant que, comme le soutenait le demandeur, la policed'assurance litigieuse couvrant le risque d'incapacité de gagner devait êtrequalifiée d'assurance de personnes, les prestations convenues en casd'incapacité de gagner au sens de l'art. 20 ch. 1 CGA étant duesindépendamment d'une perte de gain effective (cf. lettre D.c supra). Cela nesignifie toutefois pas pour autant, contrairement à ce qu'a retenu la courcantonale (cf. lettre D.c in fine supra), que ce soit la notion d'invaliditémédico-théorique qui trouve application dans le cas d'espèce. En effet, s'il est usuel, dans le domaine de l'assurance privée contre lesaccidents, que les parties se référent à la notion d'invalidité médicale outhéorique ¿ correspondant à une incapacité de travail théorique et abstraite,établie pour la moyenne des cas, indépendante de la profession de l'assuré etdes circonstances du cas concret ¿, elles peuvent tout aussi bien stipulerque le degré d'invalidité déterminant s'appréciera en fonction de laprofession particulière qu'exerce l'assuré (RBA XV n° 96; RBA XIV n° 89). Ilest également loisible aux parties de définir l'invalidité, comme elles l'ontfait en l'espèce, par rapport à l'incapacité pour l'assuré d'exercer saprofession ou une autre activité lucrative correspondant à sa positionsociale, à ses connaissances et à ses aptitudes (cf. RBA XVIIII n° 48; RBAXVII n° 36 = plädoyer 2/1993 p. 65). C'est alors à l'assureur qu'ilappartient de prouver que l'assuré est capable d'exercer une autre activitélucrative correspondant à sa position sociale, à ses connaissances et à sesaptitudes (RBA XVII n° 36; Atilay Ileri, Basler Kommentar, Bundesgesetz überden Versicherungsvertrag, 2001, n. 30 ad art. 88 LCA). 2.3 En l'occurrence, il résulte des constatations de fait du jugementattaqué, qui lient le Tribunal fédéral en instance de réforme (art. 63 al. 2OJ), que le demandeur n'est plus à même d'exercer sa profession de maçon,mais qu'il a une capacité de travail entière dans des activités adaptéestelles que celles d'ouvrier d'usine (montage, emballage, assemblage de pièceslégères), d'employé en micro-soudure ou micro-électronique ou dans le domainede la surveillance (parking, conciergerie) (cf. lettre D.d supra). Ledemandeur ne conteste pas posséder les connaissances et aptitudes nécessairesà l'exercice de ces activités (cf. lettre D.e supra). Seule est litigieuse laquestion de savoir si celles-ci correspondent à sa position sociale (cf.lettre D.f supra), ce qu'il convient d'examiner ci-après à la lumière desgriefs soulevés par le demandeur. 3.3.1Le demandeur reproche à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 18 CO,ainsi que les principes généralement reconnus en matière d'interprétation descontrats d'assurance, en interprétant la notion d'"autre activité lucrativecorrespondant à sa position sociale" de l'art. 20 ch. 1 CGA en ce sens qu'uneactivité d'ouvrier d'usine correspondrait à la position sociale d'un ouvrierqualifié tel qu'un maçon. Selon le demandeur, on ne saurait admettre qu'ilest indifférent socialement pour quelqu'un comme lui d'exercer en tant quemaçon très qualifié ¿ et même prêt à passer chef d'équipe ¿ ou comme simpleouvrier d'usine. En admettant cela, l'autorité cantonale serait partie dupréjugé social que tous les emplois manuels appartiendraient à l'ensemblefourre-tout des professions à bas revenu, lesquelles ne se distingueraientpas réellement les unes des autres. Or comme cela résulte de l'exemple donnéà la page 21 de "L'enquête suisse sur la structure des salaires 2002,Résultats commentés et tableaux" (Office fédéral de la statistique, Neuchâtel2004, 86 pages), un maçon se retrouve classé dans les activités de laconstruction avec un niveau d'exigences nécessitant en général desconnaissances professionnelles spécialisées. La profession de maçon nepourrait donc pas être mise sur un pied d'égalité avec l'activité d'ouvrierd'usine, qui doit quant à elle être rangée parmi les activités simples etrépétitives. Elle le pourrait d'autant moins que, selon l'enquête suisse surla structure des salaires précitée, le salaire mensuel brut d'un hommeexerçant une activité qui exige des connaissances professionnellesspécialisées (niveau de qualification 3), tel qu'un maçon, dépasserait deplus de 1'000 fr. celui d'un homme exerçant des activités simples etrépétitives (niveau de qualification 4), comme un ouvrier d'usine [recours enréforme (act. 2), p. 17-23]. 3.2 La publication précitée de l'Office fédéral de la statistique ¿ qui estau demeurant couramment utilisée par le Tribunal fédéral des assurances pourarrêter le revenu avec invalidité (cf. ATF 126 V 75 consid. 3b/bb) ¿ peutêtre prise en considération en vertu de l'art. 64 al. 2 OJ, dès lors que lacour cantonale l'a notamment prise pour base de son jugement (cf. lettre D.fsupra). Il ressort de cette publication d'une part qu'un maçon se retrouveclassé dans les activités de la construction avec un niveau d'exigencesnécessitant en général des connaissances professionnelles spécialisées, etd'autre part que le salaire mensuel brut correspondant à cette classificationest supérieur de quelque 500 fr. à celui d'un ouvrier exerçant des activitéssimples et répétitives (5'284 fr. au lieu de 4'765 fr. en 2002 selon letableau TA1). 3.3 Sur le vu des constatations de fait du jugement attaqué, dont ledemandeur ne saurait s'écarter (art. 55 al. 1 let. c et 63 al. 2 OJ), il estloin d'être certain que le demandeur doive être classé au niveau dequalification 3 plutôt qu'au niveau de qualification 4, entre lesquels ladifférence de salaire n'est d'ailleurs que de l'ordre de 10%. Cela dit, il nesuffit pas qu'une activité nécessite des qualifications un peu moindres ousoit un peu moins bien rémunérée pour que l'on puisse affirmer qu'elle necorrespond plus à la position sociale de l'assuré. Si, au regard du critèrede la position sociale, l'on ne saurait par exemple exiger d'un médecin de 55ans ayant son propre cabinet qu'il vende des journaux dans un kiosque ouqu'il travaille comme veilleur de nuit (Ileri, op. cit., n. 30 ad art. 88LCA), il n'apparaît pas que les activités proposées par l'expert judiciaire ¿parmi lesquelles figure celle de concierge, que le demandeur exerçait déjà àtitre accessoire avant son accident ¿ puissent être considérées, même sielles sont un peu moins bien rémunérées, comme ne correspondant plus à laposition sociale d'un homme qui travaillait comme maçon salarié dans unefonction subalterne. 3.4 Partant, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en considérantque les activités d'ouvrier d'usine, d'employé en micro-soudure oumicro-électronique ou de surveillance, que le demandeur est à même d'exercer,constituent des activités correspondant à sa position sociale au sens del'art. 20 ch. 1 CGA. 4.Il résulte de ce qui précède que le recours, mal fondé, doit être rejeté. Ledemandeur, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 156 al. 1OJ). Il n'y a en revanche pas lieu d'allouer de dépens, puisque ladéfenderesse n'a pas été invitée à répondre au recours et n'a en conséquencepas assumé de frais en relation avec la procédure devant le Tribunal fédéral(art. 159 al. 1 et 2 OJ; Poudret/Sandoz-Monod, Commentaire de la loi fédéraled'organisation judiciaire, vol. V, 1992, n. 2 ad art. 159 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Un émolument judiciaire de 6'000 fr. est mis à la charge du demandeur. 3.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à laCour civile II du Tribunal cantonal du canton du Valais. Lausanne, le 21 avril 2006 Au nom de la IIe Cour civiledu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5C.19/2006
Date de la décision : 21/04/2006
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-04-21;5c.19.2006 ?
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