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19/04/2006 | SUISSE | N°P.13/05

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 19 avril 2006, P.13/05


Cause {T 7}P 13/05 Arrêt du 19 avril 2006IVe Chambre MM. et Mme les Juges Ursprung, Président, Widmer et Frésard. Greffière : MmeFretz M.________, recourante, représentée par Me Jean-Marie Agier, avocat, FSIH,place du Grand-Saint-Jean 1, 1003 Lausanne, contre Caisse cantonale vaudoise de compensation AVS, rue du Lac 37, 1815 Clarens,intimée Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne (Jugement du 24 juin 2004) Faits: A.M.________, née en 1964, de nationalité yougoslave, mariée et mère de deuxenfants nés en 1983 et 1987, est atteinte d'une dysplasie congénitale desdeux hanc

hes. Arrivée en Suisse le 15 août 1986, elle a subi une osté...

Cause {T 7}P 13/05 Arrêt du 19 avril 2006IVe Chambre MM. et Mme les Juges Ursprung, Président, Widmer et Frésard. Greffière : MmeFretz M.________, recourante, représentée par Me Jean-Marie Agier, avocat, FSIH,place du Grand-Saint-Jean 1, 1003 Lausanne, contre Caisse cantonale vaudoise de compensation AVS, rue du Lac 37, 1815 Clarens,intimée Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne (Jugement du 24 juin 2004) Faits: A.M.________, née en 1964, de nationalité yougoslave, mariée et mère de deuxenfants nés en 1983 et 1987, est atteinte d'une dysplasie congénitale desdeux hanches. Arrivée en Suisse le 15 août 1986, elle a subi une ostéotomiepéri-acétabulaire ainsi qu'une ostéotomie inter-trochantérienne devalgisation du fémur proximal le 23 juin 1989 à l'Hôpital X.________. Le 20septembre 1991, M.________ a subi une nouvelle intervention en vue d'extrairedu matériel d'ostéosynthèse. Le 30 septembre 1991, l'intéressée a déposé une demande tendant à l'octroid'une rente de l'assurance-invalidité. Sous la rubrique relative à l'activitéexercée jusqu'ici, elle a indiqué qu'elle était ménagère. Par décision du 22 septembre 1992, l'assurance-invalidité lui alloua, dès le1er août 1991, une rente extraordinaire simple (soumise à limites de revenu)fondée sur un taux d'invalidité de 70 %, assortie de deux rentesextraordinaires simples pour enfants. La rente extraordinaire perçue par l'assurée a été supprimée à la fin del'année 1996, en application des nouvelles dispositions légales introduitespar la 10ème révision de l'AVS, en vigueur depuis le 1er janvier 1997, etremplacée par des prestations complémentaires depuis cette date. Le droit à la rente fut maintenu à l'occasion de plusieurs révisionsintervenues entre 1994 et 1996. Le 12 janvier 1999, l'assurée a subi une arthroplastie totale de la hanchedroite en raison d'une coxarthrose avancée. Dans le courant de l'année 2000, une nouvelle révision du droit auxprestations fut entreprise. A cette occasion, l'assurée a indiqué qu'en bonnesanté, elle aurait travaillé à l'extérieur à 100 % dès le moment où sesenfants eussent été en âge de rester seuls à la maison. Afin d'évaluer lesrestrictions de l'assurée sur le plan professionnel et dans son ménage,l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après :l'office AI) a mandaté le docteur D.________, spécialiste FMH en chirurgieorthopédique. Dans son expertise du 24 septembre 2002, ce médecin a conclu àune capacité de travail réduite, comprise entre 66 1/3 et 75 %, dans desactivités de bureau, informatique, empaquetage d'objets légers ou encore desurveillance. L'office AI a ensuite informé la Caisse cantonale vaudoise de compensationAVS (ci-après : la CCVD) que l'assurée ne présentait plus un degréd'invalidité suffisant pour ouvrir droit à une rente (cf. lettre du 11février 2003). Par décision du 20 février 2003, confirmée sur opposition le24 juillet suivant, la CCVD a supprimé, avec effet au 28 février 2003, ledroit de l'assurée à des prestations complémentaires. B.M.________ a recouru contre cette décision devant le Tribunal des assurancesdu canton de Vaud. Statuant le 24 juin 2004, le Tribunal des assurances arejeté le recours et confirmé la décision attaquée. C.M.________ interjette un recours de droit administratif contre ce jugementdont elle demande la réforme en ce sens qu'elle a droit à des prestationscomplémentaires au-delà du 28 février 2003. A l'appui de son recours, elleproduit une attestation du docteur S.________, médecin-chef en chirurgieorthopédique à l'Hôpital X.________, du 5 avril 2005. La CCVD conclut au rejet du recours tandis que l'Office fédéral desassurances sociales a renoncé à se déterminer. Considérant en droit: 1.Le litige porte sur le droit de la recourante à des prestationscomplémentaires au-delà du 28 février 2003. 2.2.1La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales(LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003, entraînant desmodifications législatives notamment dans le droit de l'assurance-invalidité.Du point de vue temporel, sont en principe applicables les règles de droit envigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits etle juge se fonde en principe, pour apprécier une cause, sur l'état de faitréalisé à la date déterminante de la décision sur opposition litigieuse (incasu, le 24 juillet 2003) (ATF 129 V 4 consid. 1.2, 356 consid. 1, et lesarrêts cités). La LPGA est donc applicable. 2.2 Les dispositions de la novelle du 21 mars 2003 modifiant la LAI (4èmerévision) entrée en vigueur le 1er janvier 2004 (RO 2003 3852) ne sont pasapplicables (ATF 127 V 467 consid. 1). Dans la mesure où elles ont étémodifiées par la novelle, les dispositions ci-après sont donc citées dansleur version antérieure au 1er janvier 2004. 2.3 Selon l'art. 2c let. b LPC, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31décembre 2003, ont droit aux prestations au sens de l'art. 2 les invalidesqui pourraient prétendre à l'octroi d'une demi-rente ou d'une rente entièrede l'AI (let. a) s'ils avaient accompli la durée de cotisation minimalerequise à l'art. 29, 1er alinéa, LAVS, et remplissaient les conditionsd'assurance au sens de l'art. 6, 1er alinéa, LAI. On relèvera que cette règlea été modifiée en ce sens que depuis le 1er janvier 2004, ont droit auxprestations au sens de l'art. 2 les invalides qui ont droit à une rente del'AI (cf. art. 2c let. a LPC). 3.3.1Selon l'art. 28 al. 1 LAI, l'assuré a droit à une rente entière s'il estinvalide à 66 2/3 % au moins, à une demi-rente s'il est invalide à 50 % aumoins, ou à un quart de rente s'il est invalide à 40 % au moins; dans les caspénibles, l'assuré peut, d'après l'art. 28 al. 1bis LAI, prétendre unedemi-rente s'il est invalide à 40 % au moins. 3.1.1 Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être déterminé surla base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuréaurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'ilpourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigéede lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché dutravail équilibré (art. 16 LPGA). La comparaison des revenus s'effectue, enrègle ordinaire, en chiffrant aussi exactement que possible les montants deces deux revenus et en les confrontant l'un avec l'autre, la différencepermettant de calculer le taux d'invalidité (méthode générale de comparaisondes revenus; ATF 130 V 348 consid. 3.4, 128 V 30 consid. 1, 104 V 136 consid.2a et 2b). 3.1.2 Conformément à l'art. 5 al. 1 LAI en corrélation avec l'art. 8 al. 3LPGA, l'invalidité des assurés âgés de 20 ans révolus qui n'exerçaient pasd'activité lucrative avant d'être atteints dans leur santé physique oumentale et dont on ne saurait exiger qu'ils exercent une telle activité sontréputés invalides si l'atteinte les empêche d'accomplir leurs travauxhabituels. Pour évaluer l'invalidité de ces personnes - parmi lesquellesfigurent notamment les assurés travaillant dans le ménage - on cherche àétablir l'importance de cet empêchement (art. 27 RAI; méthode spécifiqued'évaluation de l'invalidité). 3.1.3 L'art. 27bis al. 1 RAI, prévoit que lorsque les assurés n'exercent uneactivité lucrative qu'à temps partiel ou apportent une collaboration nonrémunérée à l'entreprise de leur conjoint, l'invalidité pour cette part, estévaluée selon l'art. 16 LPGA. S'ils se consacrent en outre à leurs travauxhabituels, au sens de l'art. 8, al. 3, LPGA, l'invalidité est fixée selonl'art. 27 pour cette activité-là. Dans ce cas, il faudra déterminer la partrespective de l'activité lucrative ou de la collaboration apportée àl'entreprise du conjoint et celle de l'accomplissement des autres travauxhabituels et calculer le degré d'invalidité d'après le handicap dont lapersonne est affectée dans les deux domaines d'activité en question (méthodemixte d'évaluation de l'invalidité). 3.2 Tant lors de l'examen initial du droit à la rente qu'à l'occasion d'unerévision de celle-ci (art. 17 LPGA), il faut donc examiner sous l'angle desarticles 4 et 5 LAI (en corrélation avec l'art. 8 LPGA) quelle méthoded'évaluation de l'invalidité il convient d'appliquer. Le choix de l'une destrois méthodes considérées ci-dessus (méthode générale de comparaison desrevenus, méthode mixte, méthode spécifique; cf. consid. 3.1 supra) dépendradu statut du bénéficiaire potentiel de la rente: assuré exerçant une activitélucrative à temps complet, assuré exerçant une activité lucrative à tempspartiel, assuré non actif. On décidera que l'assuré appartient à l'une oul'autre de ces trois catégories en fonction de ce qu'il aurait fait - lescirconstances étant par ailleurs restées les mêmes - si l'atteinte à la santén'était pas survenue. En pratique, on tiendra compte de l'évolution de lasituation jusqu'au prononcé de la décision administrative litigieuse, enadmettant la reprise hypothétique d'une activité lucrative partielle oucomplète, si cette éventualité présente un degré de vraisemblanceprépondérante (ATF 125 V 150 consid. 2c, 117 V 194 consid. 3b et lesréférences). 4.Aux termes de l'art. 17 LPGA, si le taux d'invalidité du bénéficiaire de larente subit une modification notable, la rente est, d'office ou sur demande,révisée pour l'avenir, à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ouencore supprimée (al. 1). De même, toute prestation durable accordée en vertud'une décision entrée en force est, d'office ou sur demande, augmentée ouréduite en conséquence, ou encore supprimée si les circonstances dontdépendait son octroi changent notablement (al. 2). Une révision peut aussi sejustifier, le cas échéant, lorsqu'un autre mode d'évaluation de l'invaliditéest applicable. Ainsi, le Tribunal fédéral des assurances a maintes fois jugéque la méthode d'évaluation de l'invalidité valable à un moment donné nesaurait préjuger le futur statut juridique de l'assuré, mais qu'il pouvaitarriver que dans un cas d'espèce le critère de l'incapacité de gain (art. 28LAI) succède à celui de l'empêchement d'accomplir ses travaux habituels (art.5 al. 1 LAI) ou inversement (ATF 119 V 478 consid. 1b/aa, 113 V 275 consid.1a et les références). 5.En l'espèce, c'est selon la méthode spécifique que le degré d'invalidité dela recourante a été fixé à 70 % au moment de la décision initiale de rente(cf. rapport d'enquête économique pour les ménagères, du 11 mars 1992).Depuis lors, la situation de la recourante a notablement changé : àl'occasion de la révision de son droit à des prestations en 2000, elle aindiqué qu'elle aurait exercé à 100 % une activité lucrative.L'administration et les premiers juges ont considéré à juste titre que cechangement justifiait le choix d'une autre méthode d'évaluation del'invalidité - la méthode générale de comparaison des revenus - et, partant,une révision des prestations. Dès lors, la question de savoir si l'état desanté de la recourante s'est notablement modifié entre la décision initialede rente et la décision sur opposition litigieuse pouvait rester ouverte enl'espèce. Etant établi que le degré d'invalidité de la recourante doit être évaluéconformément à la méthode générale de comparaison des revenus, il reste àdéterminer si le taux de 25 % fixé par l'administration dans le cadre de laprésente révision est correct. 6.6.1Il ressort du rapport d'expertise du docteur D.________, du 24 septembre2002, que l'état de la hanche droite de la recourante est satisfaisant. Desdouleurs à la hanche gauche sont toutefois signalées. Compte tenu de son étatde santé, la recourante dispose d'une certaine capacité de travail dans uneactivité de préférence en position assise, alternant de temps à autre lespositions assise et debout, avec de courts déplacements au sein del'entreprise. L'assurée ne devrait par ailleurs pas porter de chargessupérieures à 5-7,5 kg. Malgré ces adaptations, une certaine limitationdevrait encore être reconnue en raison de la fatigabilité, de sorte que lacapacité de travail ne devrait ainsi pas excéder 66 1/3 - 75 %, soitl'équivalant d'une présence maximale d'environ six heures dans une activitéadaptée. A l'instar du docteur D.________, le professeur G.________, médecin-chef enchirurgie orthopédique à l'Hôpital X.________, souligne que l'assurée esttrès satisfaite de l'état de sa hanche droite et qu'elle ne se plaint pas dedouleurs à cet endroit. Du côté gauche en revanche, elle éprouverait desdouleurs toujours plus importantes. Le professeur ne se prononce en revanchepas sur sa capacité de travail résiduelle. 6.2 Devant l'instance fédérale, la recourante a produit une attestation dudocteur S.________, du 5 avril 2005. Ce dernier, successeur du professeurG.________ à la clinique de chirurgie orthopédique de l'Hôpital X.________,atteste que l'assurée souffre de douleurs toujours persistantes à la hanchedroite ainsi que de douleurs croissantes à la hanche gauche en raison de lacoxarthrose, lesquelles entraîneraient une incapacité de travail de 66 2/3 %. L'attestation, au demeurant relativement sommaire, de ce spécialiste n'estcependant pas propre à mettre en doute les conclusions concordantes del'expert D.________ et du professeur G.________. Quoi qu'il en soit, dans lamesure où elle décrit l'état de santé de l'assurée en date du 5 avril 2005,soit postérieurement à la décision litigieuse, elle n'est pas déterminantepour l'issue du présent litige (cf. consid. 1). Sur le vu de ce qui précède, il convient d'examiner le degré d'invalidité dela recourante en se fondant sur l'appréciation du docteur D.________, lequela retenu une incapacité de travail comprise entre 66 1/3 et 75 %. 7.La juridiction cantonale n'a toutefois procédé à aucune évaluation du degréd'invalidité de la recourante. Elle s'est contentée de le fixer en reprenantsimplement le taux d'incapacité fonctionnelle reconnu par l'expertD.________. Elle a retenu le taux le plus faible de la fourchette donnée parl'expert, alors que la moyenne entre le taux le plus faible (25 %) et le tauxle plus élevé (34 %) eût été d'environ 30 %. On peut certes admettre dans certains cas, comme cela ressort implicitementdu jugement attaqué, que le degré d'invalidité se confonde avec celui del'incapacité de travail. Cela implique que la question d'une éventuelleréduction du revenu d'invalide ne se pose pas. Or, un abattement du revenud'invalide suppose la prise en compte d'un certain nombre de critères (cf.ATF 126 V 78 consid. 5) qui n'ont pas, non plus, fait l'objet d'un examen parles premiers juges.Il n'appartient cependant pas au Tribunal fédéral des assurances de statuerpour la première fois sur le degré d'invalidité de la recourante, en fixantles termes du calcul comparatif requis, ce d'autant moins que les parties nese sont pas prononcées sur cette question. Il convient dès lors d'inviter lespremiers juges à procéder à une comparaison des revenus de la recourante auxfins d'établir son degré d'invalidité et, par voie de conséquence, sonéventuel droit à des prestations complémentaires. Dans cette mesure, le recours se révèle bien fondé. 8.S'agissant
d'un litige qui concerne l'octroi ou le refus de prestationsd'assurance, la procédure est gratuite (art. 134 OJ). En outre, la recourantequi obtient gain de cause a droit à des dépens (art. 135 en corrélation avecl'art. 159 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est admis en ce sens que le jugement du Tribunal des assurances ducanton de Vaud, du 24 juin 2004, est annulé, la cause étant renvoyée àl'autorité judiciaire de première instance pour qu'elle statue à nouveau enprocédant conformément aux considérants. 2.Il n'est pas perçu de frais de justice. 3.La caisse cantonale vaudoise de compensation versera à la recourante la sommede 2'000 fr. à titre de dépens (y compris la taxe sur la valeur ajoutée) pourl'instance fédérale. 4.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances ducanton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales. Lucerne, le 19 avril 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances p. le Président de la IVe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.13/05
Date de la décision : 19/04/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-04-19;p.13.05 ?
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