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19/04/2006 | SUISSE | N°2P.297/2005

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 19 avril 2006, 2P.297/2005


2P.297/2005/DAC/elo{T 0/2} Arrêt du 19 avril 2006IIe Cour de droit public MM. les Juges Merkli, Président,Hungerbühler et Wurzburger.Greffière: Mme Dupraz. W. ________, recourant, contre Chambre de surveillance des avocats valaisans, avenue de la Gare 39, 1951Sion,Tribunal cantonal du canton du Valais, Autorité cantonale de surveillance desavocats,Palais de Justice, 1950 Sion 2. Interdiction de plaider en cas de conflits d'intérêts,recours de droit public contre le jugement du Tribunal cantonal du canton duValais, Autorité de surveillance des avocats, du 12 septembre 2005. Faits: A.Les

avocats W.________, X.________, Y.________ et Z.______...

2P.297/2005/DAC/elo{T 0/2} Arrêt du 19 avril 2006IIe Cour de droit public MM. les Juges Merkli, Président,Hungerbühler et Wurzburger.Greffière: Mme Dupraz. W. ________, recourant, contre Chambre de surveillance des avocats valaisans, avenue de la Gare 39, 1951Sion,Tribunal cantonal du canton du Valais, Autorité cantonale de surveillance desavocats,Palais de Justice, 1950 Sion 2. Interdiction de plaider en cas de conflits d'intérêts,recours de droit public contre le jugement du Tribunal cantonal du canton duValais, Autorité de surveillance des avocats, du 12 septembre 2005. Faits: A.Les avocats W.________, X.________, Y.________ et Z.________ sont associés. En 1999, A.A.________ a demandé à l'avocat X.________ d'examinerl'opportunité d'ouvrir une action en modification du jugement du 9 juillet1985 prononçant son divorce (demande de réduction, voire de suppression de lacontribution d'entretien due à son ex-épouse). En 2000, A.A.________ a introduit une action en partage relative à lasuccession de B.A.________ à l'encontre de ses frère C.A.________ etD.A.________. Ce dernier a pris comme défenseur l'avocat W.________ et signé,en octobre 2000, une procuration avec pouvoir de substitution en faveur desquatre avocats associés précités. Compte tenu de ces faits dénoncés par A.A.________, la Chambre desurveillance des avocats valaisans (ci-après: la Chambre de surveillance) acondamné, par décision du 26 avril 2005, l'avocat W.________ à une amende de1'000 fr. (art. 17 al. 1 lettre c de la loi fédérale sur la libre circulationdes avocats [loi sur les avocats; LLCA; RS 935.61]). Elle l'a reconnucoupable de violation de l'art. 12 lettres a, b et c LLCA, pour avoir acceptéd'assumer la défense des intérêts de D.A.________ et persisté à lereprésenter dans le cadre de la procédure en partage susmentionnée devant leTribunal du district de Sion. B.Par jugement du 12 septembre 2005, le Tribunal cantonal du canton du Valais(ci-après: le Tribunal cantonal), agissant en tant qu'Autorité cantonale desurveillance des avocats, a rejeté le recours de W.________ contre ladécision prise le 26 avril 2005 par la Chambre de surveillance, dont il arepris l'argumentation. Le Tribunal cantonal a retenu en particulier qu'en1999, l'avocat X.________ avait recueilli des renseignements sur la situationfinancière de A.A.________. Or, dans une action en partage, il y avait enprincipe lieu d'examiner non seulement la situation financière de lasuccession, mais encore celle de ses membres. Dès lors, ni l'avocatX.________ ni l'un de ses associés ne pouvait défendre D.A.________ dansl'action en partage introduite par A.A.________. C.Agissant par la voie du recours de droit public, W.________ demande auTribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler le jugement duTribunal cantonal du 12 septembre 2005 et de renvoyer le dossier à cetteautorité pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il requiertdifférentes mesures d'instruction. Le Tribunal cantonal et la Chambre de surveillance ont renoncé à formuler desobservations sur le recours. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recoursqui lui sont soumis (ATF 131 I 153 consid. 1 p. 156; 131 II 58 consid. 1 p.60). Le recours de droit public étant subsidiaire (art. 84 al. 2 OJ), ilconvient en premier lieu d'examiner si le présent recours peut être traitécomme un recours de droit administratif. L'intitulé erroné du mémoire derecours ne saurait préjuger de la voie ouverte, ni porter préjudice aurecourant, pour autant que cette écriture remplisse les conditions formellesde la voie de droit en cause (ATF 126 II 506 consid. 1 p. 508/509). 1.1 Depuis l'entrée en vigueur de la loi sur les avocats, les mesuresdisciplinaires prévues par l'art. 17 al. 1 LLCA peuvent être attaquées par lavoie du recours de droit administratif (cf. ATF 130 II 270 consid. 1.2.2 p.273/274). Or, comme le constate l'autorité intimée, la présente cause estsoumise à la loi sur les avocats, dès lors que les effets du mandat queD.A.________ a confié au recourant en octobre 2000 se sont prolongés au-delàde l'entrée en vigueur, le 1er juin 2002, de la loi sur les avocats. 1.2 Au surplus, le présent recours remplit les conditions de forme des art.97 ss OJ, de sorte qu'il est recevable en tant que recours de droitadministratif. Par conséquent, la voie du recours de droit public n'est pasouverte en l'espèce. 2.D'après l'art. 104 lettre a OJ, le recours de droit administratif peut êtreformé pour violation du droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoird'appréciation. Le Tribunal fédéral vérifie d'office l'application du droitfédéral, qui englobe notamment les droits constitutionnels des citoyens (ATF130 I 312 consid. 1.2 p. 318 et la jurisprudence citée), sans être lié parles motifs invoqués par les parties (art. 114 al. 1 in fine OJ). Commel'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.) fait partie des droitsconstitutionnels, le Tribunal fédéral peut aussi vérifier si le droitcantonal a été appliqué de manière arbitraire. Par ailleurs, lorsque lerecours est dirigé, comme en l'espèce, contre la décision d'une autoritéjudiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans cettedécision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ontété établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 104 lettre bet 105 al. 2 OJ). En outre, le Tribunal fédéral ne peut pas revoirl'opportunité du jugement entrepris, le droit fédéral ne prévoyant pas un telexamen en la matière (art. 104 lettre c ch. 3 OJ). 3.Le recourant demande la production de son dossier par la Chambre desurveillance et celle du dossier de la procédure successorale (dossier SIO C100 140). Selon l'art. 110 al. 1 et 2 OJ, si le Tribunal fédéral ordonne un échanged'écritures, il communique le recours à l'autorité qui a rendu la décisionattaquée et, le cas échéant, à d'autres parties ou intéressés; il impartit enmême temps un délai de réponse et invite l'autorité qui a rendu la décisionattaquée à lui communiquer le dossier dans ce délai. Le Tribunal cantonal et la Chambre de surveillance ont produit leurs dossiersen temps utile. Le dossier de la procédure successorale (dossier SIO C1 00140) fait partie des dossiers produits par l'autorité intimée. Lesréquisitions d'instruction du recourant sont dès lors sans objet. 4.4.1L'art. 12 LLCA dispose que l'avocat exerce sa profession avec soin etdiligence (lettre a) et qu'il exerce son activité professionnelle en touteindépendance, en son nom personnel et sous sa propre responsabilité (lettreb). Selon l'art. 12 lettre c LLCA, l'avocat doit éviter tout conflit entreles intérêts de son client et ceux des personnes avec lesquelles il est enrelation sur le plan professionnel ou privé. A ce titre, l'avocat a notammentle devoir d'éviter la double représentation, c'est-à-dire le cas où il seraitamené à défendre les intérêts opposés de deux parties à la fois (WalterFellmann, in Kommentar zum Anwaltsgesetz, éd. par Walter Fellmann et GaudenzG. Zindel, Zurich 2005, nos 96 ss ad art.12; Franz Werro/Anne-Catherine Hahn,Les conflits d'intérêts de l'avocat, in Droit suisse des avocats, Berne 1998,p. 231 ss, p. 243-246), car l'opposition entre les intérêts des deux clientsinterdit en pareil cas à l'avocat de respecter pleinement son obligation defidélité et son devoir de diligence (Jacques Matile, L'indépendance del'avocat, in L'avocat moderne, Mélanges publiés par l'ordre des avocatsvaudois à l'occasion de son centenaire, Bâle 1998, p. 207 ss, p. 210). Pourqu'il y ait conflit d'intérêts au sens de l'art. 12 lettre c LLCA, il suffitqu'existe la possibilité d'utiliser, consciemment ou non, dans un nouveaumandat les connaissances acquises antérieurement sous couvert du secretprofessionnel, dans l'exercice d'un premier mandat. Il faut éviter toutesituation potentiellement susceptible d'entraîner un tel conflit d'intérêts.En outre, l'incapacité de représentation affectant un avocat rejaillit surses associés (arrêt 2A.293/2003 du 9 mars 2004, consid. 4.2).4.2 Le recourant a violé l'art. 12 lettre c LLCA, car il y a un conflitd'intérêts entre le mandat que lui a confié D.A.________ en octobre 2000 etcelui que l'avocat X.________ avait reçu en 1999 de A.A.________. Compte tenude ce mandat de 1999, l'avocat X.________ n'aurait pas pu accepter dedéfendre les intérêts de D.A.________ dans l'action en partage ouverte parA.A.________ et cette incapacité de représentation s'étend au recourant quiest l'un des associés de l'avocat X.________. C'est donc à juste titre que leTribunal cantonal a confirmé en fait la mesure disciplinaire prise àl'encontre du recourant. 5.Le recourant reproche au Tribunal cantonal d'avoir enfreint les règlesconsacrées par le code de procédure civile du canton du Valais du 24 mars1998 (ci-après: CPC/VS) en matière d'appréciation des preuves, plusprécisément l'art. 150 CPC/VS qui dispose que le juge apprécie les preuvesselon son intime conviction (al. 1) et prend en considé- ration l'attitudedes parties au cours du procès, notamment le refus de collaborer àl'administration des preuves (al. 2). Il fait ainsi valoir que l'autoritéintimée a commis arbitraire, en violation de l'art. 9 Cst., dans laconstatation des faits, voire dans l'appréciation des moyens de preuve à sadisposition. Il allègue aussi une violation de son droit d'être entendu,garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., dans la mesure où le Tribunal cantonal n'apas procédé à l'audition de A.A.________, alors qu'il l'avait requise. 5.1 Lorsque A.A.________ a consulté l'avocat X.________ en 1999 pourdéterminer s'il était opportun d'introduire une action en modification de sonjugement de divorce, il s'agissait certes de savoir si son ex-épouse vivaiten concubinage. Toutefois, même si cet élément était essentiel, la situationpersonnelle et financière de A.A.________ faisait partie du contexte danslequel l'avocat X.________ était appelé à donner un avis et on ne voit pasqu'il ait pu exécuter son mandat sans s'en préoccuper. En particulier, dansune lettre qu'il a adressée à A.A.________ le 10 février 1999, l'avocatX.________ s'est prononcé sur les chances de succès d'une action visant à"obtenir la suppression de la pension", sans aucune preuve que l'ex-femme deA.A.________ aurait refait sa vie avec un nouveau compagnon. On ne peut pasconcevoir qu'un avocat effectuant correctement son travail aurait pu émettreun avis de ce genre sans avoir demandé le moindre renseignement à son clientsur sa situation personnelle et financière. Dès lors, on ne saurait suivre lerecourant quand il prétend que le Tribunal cantonal a constaté les faits defaçon manifestement inexacte (arbitraire) sur ce point. Dans ces circonstances, on ne voit pas ce qu'aurait pu apporter l'audition deA.A.________, qui a lui-même dénoncé la violation de "l'obligation dedélicatesse" du recourant. Or, la jurisprudence admet que le droit d'êtreentendu n'empêche pas l'autorité de mettre un terme à l'instruction lorsqueles preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que,procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée despreuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernièresne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 130 II 425 consid. 2.1 p.429). Le Tribunal cantonal pouvait donc, sans violer le droit d'être entendudu recourant, s'abstenir de procéder à l'audition de A.A.________. Le griefde violation de l'art. 29 al. 2 Cst. n'est dès lors pas fondé. 5.2 Le recourant reproche aussi à l'autorité intimée d'avoir fait uneappréciation fausse (arbitraire) des faits établis, par méconnaissance depreuves pertinentes. C'est ainsi qu'elle avait estimé que la situationfinancière des membres de la succession en cause devrait, selon touteprobabilité, être examinée dans le cadre de l'action en partage introduitepar A.A.________, alors que cette procédure devait seulement élucider desquestions de technique juridique relatives à la validité de certains actes.En réalité, même si ces questions étaient essentielles, on ne pouvait pas,dans ladite procédure, faire abstraction de la situation personnelle etfinancière des parties en général et de A.A.________ en particulier. Ausurplus, le Tribunal cantonal n'avait pas à anticiper sur l'évolution del'action en partage précitée introduite auprès du Tribunal du district deSion. Dès lors, le moyen que le recourant tire de la prétendue inutilité deséléments relatifs à la situation personnelle et financière de A.A.________dans la procédure de l'action en partage ouverte par ce dernier doit êtreécarté. 5.3 Ainsi, on ne voit pas que le Tribunal cantonal ait fait une applicationarbitraire de l'art. 150 CPC/VS. Il n'a pas établi les faits de façonmanifestement inexacte et n'en a pas fait une appréciation critiquable. Audemeurant, il n'a pas violé le droit d'être entendu du recourant. 6.Vu ce qui précède, le présent recours de droit public, traité comme recoursde droit administratif, doit être rejeté. Succombant, le recourant doitsupporter les frais judiciaires (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ) et n'a pasdroit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant. 3.Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant, à la Chambre desurveillance des avocats valaisans et au Tribunal cantonal du canton duValais, Autorité cantonale de surveillance des avocats. Lausanne, le 19 avril 2006 Au nom de la IIe Cour de droit publicdu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.297/2005
Date de la décision : 19/04/2006
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-04-19;2p.297.2005 ?
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