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10/04/2006 | SUISSE | N°U.12/05

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 avril 2006, U.12/05


{T 7}U 12/05 Arrêt du 10 avril 2006IIIe Chambre MM. les Juges Ferrari, Président, Meyer et Lustenberger. Greffier : M.Berthoud T.________, recourante, représentée par Me Pierre Gabus, avocat, rue deCandolle 9, 1205 Genève, contre Allianz Suisse Société d'Assurances, avenue du Bouchet 2, 1209 Genève,intimée Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève (Jugement du 12 novembre 2004) Faits: A.T. ________, née en 1970, a travaillé en qualité d'employée de cuisine auservice de la société X.________. A ce titre, elle était assurée contre lesaccidents professionnels et non prof

essionnels auprès de l'Elvia Assurances.Le 11 septembre 1997, ell...

{T 7}U 12/05 Arrêt du 10 avril 2006IIIe Chambre MM. les Juges Ferrari, Président, Meyer et Lustenberger. Greffier : M.Berthoud T.________, recourante, représentée par Me Pierre Gabus, avocat, rue deCandolle 9, 1205 Genève, contre Allianz Suisse Société d'Assurances, avenue du Bouchet 2, 1209 Genève,intimée Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève (Jugement du 12 novembre 2004) Faits: A.T. ________, née en 1970, a travaillé en qualité d'employée de cuisine auservice de la société X.________. A ce titre, elle était assurée contre lesaccidents professionnels et non professionnels auprès de l'Elvia Assurances.Le 11 septembre 1997, elle a été renversée par un véhicule alors qu'elletraversait une route, ce qui a entraîné une fracture ouverte du pilon tibialdroit. Les suites de l'accident ont nécessité, notamment, une arthrodèsetibio-astragalienne droite. L'assureur-accidents a pris le cas en charge. Dans un rapport du 13 avril 2000, le docteur S.________ a fait état de lapersistance de douleurs résiduelles et indiqué que l'assurée ne pourrait pasreprendre sa profession d'employée de cuisine, dès lors que cette activitérequiert la station debout et le port de charges lourdes; il a préconisé unrecyclage professionnel. Par ailleurs, le docteur S.________ a signalé que lapatiente présentait une tendinopathie du sus-épineux de l'épaule gauche,avant de préciser, le 13 juillet 2000, qu'elle avait développé cetteaffection au cours des derniers mois. L'Elvia a confié un mandat d'expertise au docteur V.________, spécialiste enchirurgie orthopédique. Dans son rapport du 27 juin 2001, ce médecin aattesté que l'état somatique de la cheville droite était en relation decausalité naturelle certaine avec l'accident du 11 septembre 1997, cetévénement ayant entraîné une fracture ouverte du pilon tibial qui a abouti àune incongruence articulaire et à une arthrose secondaire ayant nécessité unearthrodèse. Il a précisé que l'assurée restait gênée et limitée au niveau decette cheville. Le docteur V.________ a aussi fait état d'un ressaut del'épaule gauche sur probable rétrécissement de l'espace sous-acromiald'origine « X ». A son avis, il était beaucoup plus difficile de se prononcerà ce sujet, car il n'existait aucune preuve au dossier d'une lésion avant le3 février 2000. De plus, l'examen pratiqué ce jour-là n'avait pas permisd'expliquer clairement la pathologie. A la demande du docteur V.________,l'assurée a subi une IRM de l'épaule gauche afin d'éclaircir cette question.Dans un rapport du 3 juillet 2002, ce médecin a estimé que l'IRM pratiquée le17 mai 2002 n'avait pas permis de fournir la preuve de séquelles d'une lésionaccidentelle liée à l'événement du 11 septembre 1997, si bien que le lien decausalité naturelle entre l'accident et les affections de l'épaule gauchen'était pas probable, mais seulement possible (pp. 2-3).Quant à la capacité de travail, le docteur V.________ a confirmé que l'étatde la cheville ne permettait plus l'exercice de l'ancienne profession d'aidede cuisine, probablement de façon définitive. En revanche, l'assurée restaiten mesure d'accomplir des tâches en position semi-assise, ne nécessitant pasle port de charges lourdes, à l'instar de petits travaux à l'établi ou desurveillance de machines, étant précisé que son niveau scolaire limitéempêchait un recyclage en tant qu'employée de bureau ou de commerce (rapportdu 27 juin 2001, p. 11). Dans de telles conditions, l'expert a estimé que lacapacité de travail serait de 50 % au moins, voire plus. Le 11 décembre 2001,il a précisé que la capacité de travail devrait être proche de 100 % àl'établi dans une usine d'horlogerie, à la condition que les pièces soientplacées devant l'assurée et qu'elle n'ait pas besoin de trop mobiliser sesépaules. Par décision du 22 janvier 2002 (recte : 2003), Allianz Société Suissed'Assurances (qui a succédé à l'Elvia) a mis fin au versement de sesprestations à compter du 1er avril 2003. Saisie d'une opposition, l'assureurl'a rejetée par décision du 3 septembre 2003. Quant à l'atteinte à l'intégrité résultant des séquelles à la chevilledroite, elle a été définitivement fixée à 30 % (cf. lettre d'Allianz du 22janvier 2003). B.T.________ a déféré la décision du 3 septembre 2003 au Tribunal cantonal desassurances sociales du canton de Genève en concluant principalement auversement d'une rente d'invalidité, subsidiairement à l'octroi d'indemnitésjournalières. Par jugement du 12 novembre 2004, la juridiction cantonale a rejeté lerecours. C.T.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dontelle demande l'annulation, avec suite de dépens. A titre préalable, ellerequiert la suspension de la procédure jusqu'à droit connu dans le litige quil'oppose à l'Office cantonal de l'assurance-invalidité du canton de Genève.Sur le fond, elle conclut principalement à l'allocation d'une rented'invalidité, subsidiairement au renvoi de la cause à la juridictioncantonale pour instruction complémentaire. L'intimée conclut au rejet du recours, avec suite de frais et dépens.L'Office fédéral de la santé publique a renoncé à se déterminer. Considérant en droit: 1.Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente d'invalidité. 2.Si l'assuré est invalide (art. 8 LPGA) à 10 % au moins par suite d'unaccident, il a droit à une rente d'invalidité (art. 18 al. 1 LAA). Estréputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie despossibilités de gain de l'assuré sur un marché du travail équilibré dans sondomaine d'activité, si cette diminution résulte d'une atteinte à sa santéphysique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements etles mesures de réadaptation exigibles (art. 7 LPGA). Est réputée invaliditél'incapacité de gain totale ou partielle qui est présumée permanente ou delongue durée (art. 8 al. 1 LPGA). Par ailleurs, le droit à des prestations découlant d'un accident assurésuppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel etl'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette exigence estremplie lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, ledommage ne se serait pas produit du tout, ou qu'il ne serait pas survenu dela même manière. Il n'est pas nécessaire, en revanche, que l'accident soit lacause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé; il faut et il suffit quel'événement dommageable, associé éventuellement à d'autres facteurs, aitprovoqué l'atteinte à la santé physique ou psychique de l'assuré,c'est-à-dire qu'il se présente comme la condition sine qua non de celle-ci.Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par unrapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administrationou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur desrenseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant àla règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement àl'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsquel'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommageparaît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans lecas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assurédoit être nié (ATF 129 V 181 consid. 3.1, 406 consid. 4.3.1, 119 V 337consid. 1, 118 V 289 consid. 1b et les références). 3.La recourante demande préalablement qu'il soit sursis au jugement jusqu'àdroit connu en matière d'AI. Ainsi qu'on va le voir au consid. 4 ci-après, l'assureur-accidents ne répondpas de l'entier des affections somatiques dont souffre la recourante, si bienqu'il ne serait pas lié par la décision que l'AI pourrait rendre sur le tauxd'invalidité (cf. ATF 131 V 362, 126 V 288). Pour ce seul motif, la requêtede suspension de la procédure apparaît infondée et doit être rejetée. 4.La recourante souffre d'une tendinopathie du sus-épineux de l'épaule gauche.A ce sujet, l'expert V.________ a clairement indiqué que les examenspratiqués n'avaient pas permis d'admettre l'existence d'un rapport decausalité naturelle au moins probable entre l'accident de 1997 et cetteaffection, d'autant que la recourante ne s'était plainte de douleurs àl'épaule que deux ans et demi après l'accident (cf. rapport du 3 juillet2002). Dans ces conditions, le rapport de causalité naturelle n'est ni établini suffisamment vraisemblable au degré requis par la jurisprudence (cf. ATF126 V 360 consid. 5b et les références), si bien que l'intimée ne répond pasdes suites de cette affection physique. La recourante présente des séquelles à la cheville droite qui sontincontestablement en relation de causalité naturelle (cf. rapport du docteurV.________ du 27 juin 2001) et adéquate (cf. ATF 117 V 365 en bas) avecl'événement accidentel du 11 septembre 1997, pour les suites duquel l'intiméea alloué ses prestations. S'il est établi que l'état de la cheville droite nepermet plus à la recourante d'exercer son ancienne profession d'employée decuisine, cela ne signifie pas pour autant, comme elle le soutient, qu'elleest invalide. En effet, dans son rapport du 11 décembre 2001, le docteurV.________ avait indiqué que la recourante pourrait travailler à 100 % enqualité d'ouvrière dans une usine d'horlogerie, sans difficulté malgré l'étatde sa cheville, ce que l'intéressée ne conteste au demeurant pas. Dès lors, l'invalidité doit être évaluée au regard des revenus qu'uneactivité adaptée au handicap de la recourante peut lui procurer. 5.Pour procéder à la comparaison des revenus (art. 16 LPGA), il convient de seplacer au moment de la naissance possible du droit à la rente (en avril 2003): les revenus avec et sans invalidité sont déterminés par rapport à un mêmemoment; les modifications de ces revenus, susceptibles d'influencer le droità la rente, survenues jusqu'au moment où la décision est rendue, sontégalement prises en compte (ATF 128 V 174). En 1997, la recourante réalisait un revenu annuel de 41'600 fr. (13 x 3'200fr.). Elle ne bénéficiait pas de gratification. Ce montant doit être adaptésuivant l'indice des salaires nominaux qui est passé de 105,3 points en 1997à 115,3 points en 2003 pour les femmes. Le revenu sans invalidité s'élèveainsi à 45'550 fr. D'après la jurisprudence (ATF 124 V 321), le revenu avec invalidité doit êtrearrêté à la lumière des statistiques salariales ressortant de l'enquêtesuisse sur la structure des salaires publiée par l'Office fédéral de lastatistique. Selon la table TA1 relative à l'année 2002 (p. 43), il fautainsi partir d'un gain déterminant, toutes activités confondues dans lesecteur privé, de 3'820 fr. par mois (valeur standardisée) pour des travauxsimples et répétitifs (niveau 4) exercés par une femme. Ce salaire mensuelhypothétique de 3'820 fr. doit être adapté à l'évolution des salaires pourl'année 2003 (+ 1,4 %; Annuaire statistique 2005, p. 216, T3.4.3.1), soit3'873 fr. Comme il se base sur une durée hebdomadaire de travail de 40heures, inférieure à la moyenne usuelle dans les entreprises, il y a lieu del'ajuster à 41,7 heures par semaine (Annuaire statistique 2005, p. 205,T3.2.3.5), soit un salaire mensuel de 4'038 fr., ou annuel de 48'457 fr. Il convient ensuite d'appliquer un facteur de réduction au gain annuelstatistique de 48'457 fr., conformément à la jurisprudence (cf. ATF 126 V75). Compte tenu des circonstances personnelles et professionnelles du casparticulier, un abattement de 10 % paraît approprié, si bien que le gaind'invalide se monte à 43'611 fr. La comparaison des revenus aboutit à undegré d'invalidité de 4 % (43'611/ 45'550), inférieur au seuil de 10 %ouvrant droit à la rente de l'assurance-accidents (art. 18 al. 1 LAA). Que le revenu d'invalide ainsi déterminé repose sur le salaire mensuel brut(valeur centrale) pour des activités simples et répétitives du secteur privé,toutes branches économiques confondues, ne permet pas de conclure que lasituation effective de la recourante n'a pas été convenablement instruite.Dans la mesure où le montant de 4'038 fr. retenu comme revenu d'invalidereprésente le salaire mensuel brut (valeur centrale) pour des postes detravail qui ne requièrent pas de qualifications professionnellesparticulières, force est d'admettre que la plupart de ces emplois sont,abstraction faite des limitations physiques éprouvées par la recourante,conformes aux aptitudes de celle-ci. Par ailleurs, au regard du largeéventail d'activités simples et répétitives que recouvrent les secteurs de laproduction et des services, on doit également convenir qu'un nombresignificatif de ces activités sont légères et permettent l'alternance despositions et sont donc adaptées au handicap de la recourante. Enfin, contrairement à ce que soutient la recourante, il n'est pascontradictoire d'admettre que la diminution de l'atteinte à l'intégritéphysique qu'elle a subie, d'un taux de 30 %, puisse entraîner une perte degain sans rapport avec la première. En effet, les risques assurés sontdistincts. Il s'ensuit que le recours est mal fondé. 6.L'intimée, qui obtient gain de cause, a conclu à l'allocation d'une indemnitéde dépens. Elle ne saurait toutefois y prétendre, attendu qu'elle a agi enqualité d'organisme chargé de tâches de droit public (art. 159 al. 2 OJ infine; ATF 128 V 133 consid. 5b, 126 V 150 consid. 4a, 118 V 169 consid. 7 etles références). Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Il n'est pas perçu de frais de justice. 3.Il n'est pas alloué de dépens. 4.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal desassurances sociales du canton de Genève et à l'Office fédéral de la santépublique. Lucerne, le 10 avril 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances Le Président de la IIIe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.12/05
Date de la décision : 10/04/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-04-10;u.12.05 ?
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