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05/04/2006 | SUISSE | N°H.111/04

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 05 avril 2006, H.111/04


{T 7}H 111/04 Arrêt du 5 avril 2006IIIe Chambre MM. les Juges Ferrari, Président, Meyer et Seiler. Greffier : M. Piguet H.________, recourante, contre Caisse de compensation du canton de Fribourg, impasse de la Colline 1, 1762Givisiez, intimée Tribunal administratif du canton de Fribourg, Givisiez (Jugement du 22 avril 2004) Faits: A.La société anonyme E.________ SA (ci-après : la société) était affiliée entant qu'employeur auprès de la Caisse de compensation du canton de Fribourg(ci-après : la caisse). Sa faillite a été prononcée le 30 août 2002 et lesopérations de liquidatio

n ont été suspendues pour défaut d'actifs le 18février 2003.Le 1...

{T 7}H 111/04 Arrêt du 5 avril 2006IIIe Chambre MM. les Juges Ferrari, Président, Meyer et Seiler. Greffier : M. Piguet H.________, recourante, contre Caisse de compensation du canton de Fribourg, impasse de la Colline 1, 1762Givisiez, intimée Tribunal administratif du canton de Fribourg, Givisiez (Jugement du 22 avril 2004) Faits: A.La société anonyme E.________ SA (ci-après : la société) était affiliée entant qu'employeur auprès de la Caisse de compensation du canton de Fribourg(ci-après : la caisse). Sa faillite a été prononcée le 30 août 2002 et lesopérations de liquidation ont été suspendues pour défaut d'actifs le 18février 2003.Le 17 juin 2003, la caisse a adressé à H.________, inscrite au registre ducommerce du 6 mars 2001 au 6 février 2002 en qualité d'administratrice uniquede la société, une décision de réparation de dommage portant sur un montantde 38'137 fr. 60. Cette somme correspondait aux cotisations paritaires duessur les salaires déclarés par la société pour la période courant du mois dejanvier 2001 au mois d'août 2002.Saisie d'une opposition, la caisse l'a partiellement admise et réduit lemontant du dommage à 35'300 fr. 85. Elle a considéré qu'il n'y avait pas lieude tenir compte des cotisations paritaires dues pour la période courant dejanvier à août 2002, dès lors que H.________ avait démissionné de sa fonctiond'administratrice le 9 janvier 2002 (décision du 19 août 2003). B.Par jugement du 22 avril 2004, le Tribunal administratif du canton deFribourg a rejeté le recours formé par l'intéressée à l'encontre de ladécision sur opposition du 19 août 2003. C.H.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dontelle demande, sous suite de frais et dépens, l'annulation. A titre préalable,elle requiert également la suspension de la procédure jusqu'à droit connudans la procédure pénale ouverte à l'encontre de D.________, directeur de lasociété. Elle sollicite pour le surplus le bénéfice de l'assistancejudiciaire.La caisse conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral desassurances sociales a renoncé à se déterminer. Considérant en droit: 1.Aux termes de l'art. 6 al. 1 PCF, en corrélation avec les art. 40 et 135 OJ,le juge peut ordonner la suspension de la procédure pour des raisonsd'opportunité, notamment lorsque le jugement d'un autre litige peutinfluencer l'issue du procès.En l'occurrence, il n'y a pas lieu de donner suite à la requête de suspensionde la procédure présentée par la recourante. D'après les pièces versées audossier, la caisse intimée n'a notifié sa décision de réparation de dommagequ'à H.________; elle n'a en revanche nullement recherché D.________,directeur de la société. Aussi n'est-il pas nécessaire d'examiner le rôleéventuel qu'aurait pu avoir cette personne dans le préjudice subi parl'intimée, car le présent litige ne porte que sur la responsabilitépersonnelle de la recourante, et non sur celle de tiers. 2.La décision litigieuse n'ayant pas pour objet l'octroi ou le refus deprestations d'assurance, le Tribunal fédéral des assurances doit se borner àexaminer si les premiers juges ont violé le droit fédéral, y compris parl'excès ou par l'abus de leur pouvoir d'appréciation, ou si les faitspertinents ont été constatés d'une manière manifestement inexacte ouincomplète, ou s'ils sont été établis au mépris de règles essentielles deprocédure (art. 132 en corrélation avec les art. 104 let. a et b et 105 al. 2OJ). 3.Le litige porte sur la responsabilité de la recourante au sens de l'art. 52LAVS dans le préjudice subi par l'intimée en raison du non-paiement descotisations paritaires dues par la société pour l'année 2001. 3.1 La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances socialesdu 6 octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003,entraînant la modification de nombreuses dispositions légales dans le domainede l'AVS, notamment en ce qui concerne l'art. 52 LAVS. Le cas d'espèce restetoutefois régi, sur le plan matériel, par les dispositions en vigueurjusqu'au 31 décembre 2002, eu égard au principe selon lequel les règlesapplicables sont celles en vigueur au moment où les faits juridiquementdéterminants se sont produits (ATF 129 V 4 consid. 1.2 et les références; àpropos des délais pour demander la réparation du dommage, voir consid. 5 del'arrêt R. du 27 septembre 2005, H 53/05, prévu pour la publication dans leRecueil officiel).En revanche, les dispositions générales de procédure de la LPGA (art. 27 à 62LPGA) sont applicables au cas d'espèce (art. 52 al. 2 LAVS dans sa teneur envigueur depuis le 1er janvier 2003, art. 52 et 56 LPGA; cf. ATF 130 V 1). 3.2 Pour le reste, le jugement entrepris expose correctement les dispositionslégales et réglementaires, ainsi que les principes jurisprudentielsapplicables en matière de responsabilité de l'employeur et des organes decelui-ci, de sorte qu'il suffit d'y renvoyer. 4.4.1En tant qu'administratrice unique de la société faillie depuis le 6 mars2001, H.________ avait indiscutablement qualité d'organe typique de lasociété. D'après l'intéressée, on ne saurait toutefois lui reprocher unefaute ou une négligence grave dans le cas d'espèce. Son cahier des chargesprévoyait en effet qu'elle s'occupe de la gestion technique de la société, àl'exclusion du domaine financier, lequel était assumé par D.________,directeur et propriétaire économique de E.________ SA, et de la gestioncomptable, qui était gérée par une tierce personne. Malgré sa fonctionpurement technique, elle a néanmoins personnellement et de manière répétéerappelé D.________ à ses obligations sans que celui-ci ne réagisseconcrètement. Au vu des promesses que celui-ci lui faisait régulièrement,elle soutient avoir eu néanmoins des raisons objectives de penser que lescotisations dues aux assurances sociales seraient versées dans un délairaisonnable. 4.2 L'art. 716a al. 1 CO énumère les attributions intransmissibles etinaliénables des membres du conseil d'administration. En font partiel'exercice de la haute surveillance sur les personnes chargées de la gestion,pour s'assurer notamment qu'elles observent la loi, les règlements et lesinstructions données (ch. 5). Dans le cadre de l'exercice de cette hautesurveillance, l'administrateur répond de la cura in custodiendo (AdrianKammerer, Die unübertragbaren und unentziehbaren Kompetenzen desVerwaltungsrates, thèse Zurich 1997, p. 226). C'est ainsi qu'il a nonseulement le devoir d'assister aux séances du conseil d'administration, maiségalement l'obligation de se faire renseigner périodiquement sur la marchedes affaires (Kammerer, op. cit., p. 186). Il est tenu de prendre les mesuresappropriées lorsqu'il a connaissance ou aurait dû avoir connaissanced'irrégularités commises dans la gestion de la société (Böckli, SchweizerAktienrecht, 3ème éd., Zurich/Bâle/Genève 2004, p. 1535, 1555, notes 313,377; Forstmoser/Meier-Hayoz/Nobel, Schweizerisches Aktienrecht, Berne 1996, §30 note 49). Ce devoir de surveillance incombe à tous les membres du conseild'administration qui ne sont pas chargés de la gestion et non pas uniquementau président ou au vice-président (voir, par exemple, arrêt W. du 23 juin2003, H 217/02, résumé dans REAS 2003 p. 251). 4.3 En sa qualité d'organe de la société, possédant de surcroît le droit designature individuelle, il incombait à H.________, nonobstant le mode derépartition interne des taches au sein de la société, de s'assurerpersonnellement que les cotisations paritaires afférentes aux salaires versésfussent effectivement payées à la caisse de compensation, conformément auxprescriptions légales (art. 14 al. 1 LAVS en corrélation avec les art. 34 ssRAVS). En tant que la société ne s'est jamais acquittée du paiement descotisations sociales, la recourante n'a à l'évidence pas rempli ce devoir. Enexerçant un mandat d'administrateur sans en assumer la charge dans les faits,elle a tout simplement méconnu l'une des attributions intransmissibles etinaliénables que lui conférait l'art. 716a al. 1 CO et violé ainsi sonobligation de diligence (ATF 122 III 200 consid. 3b; RDAT 1993, I, p. 374consid. 6). C'est là une négligence, qui doit être qualifiée de grave auregard de l'art. 52 LAVS (ATF 112 V 3 consid. 2b), attendu qu'elle aurait dûse rendre compte qu'elle ne pouvait, dans le cadre de sa fonction, exercer desurveillance réelle sur les agissements de D.________ et qu'il lui étaitainsi impossible de remplir consciencieusement son mandat.La recourante ne saurait se libérer de sa responsabilité en se prévalant durôle subalterne qu'elle assumait au sein de la société et des appels réitéréslancés à l'intention de D.________ pour qu'il se conforme à ses obligations.La haute surveillance des personnes chargées de la gestion d'une sociétéanonyme ne saurait en effet se résumer à leur formuler des injonctions etcompter sur une réaction éventuelle de leur part, mais implique, en cas denécessité, l'intervention directe de l'administrateur. A cet égard, le faitque celui-ci n'est pas en mesure d'exercer ses fonctions, parce que lasociété est dirigée en fait par d'autres personnes, ou qu'il a accepté sonmandat à titre fiduciaire dans le seul but de permettre au conseild'administration de satisfaire aux exigences de l'art. 708 al. 1 CO, n'estpas un motif de suppression ou d'atténuation de la faute commise (Jean-François Egli, Aperçu de la jurisprudence récente du Tribunal fédéralrelative à la responsabilité des administrateurs de société anonyme, inPublication CEDIDAC 8, 1987, p. 32).La passivité de la recourante est, de surcroît, en relation de causaliténaturelle et adéquate avec le dommage subi par la caisse de compensation. Eneffet, si elle avait correctement exécuté son mandat, elle aurait veillé aupaiement des cotisations d'assurances sociales ou, à tout le moins, pris lesmesures qui s'imposaient. Si elle se trouvait, en raison de l'attitude dupropriétaire économique de la société, dans l'incapacité de prendre cesmesures ou même d'exercer son devoir de surveillance, elle devaitdémissionner de ses fonctions. Ne l'ayant pas fait, elle doit répondre dudommage qui en est résulté pour la caisse. 5.La recourante conteste également devoir répondre de l'ensemble du dommage quilui est imputé, dès lors que celui-ci porte en partie sur le non-paiement decotisations sociales relatives à des salaires qui n'ont pas été versés par lasociété. 5.15.1.1Le salaire déterminant pour la perception des cotisations comprend touterémunération pour un travail dépendant, fourni pour un temps déterminé ouindéterminé (art. 5 al. 2 LAVS). Font partie de ce salaire déterminant, pardéfinition, toutes les sommes touchées par le salarié, si leur versement estéconomiquement lié au contrat de travail; peu importe, à ce propos, que lesrapports de service soient maintenus ou aient été résiliés, que lesprestations soient versées en vertu d'une obligation ou à titre bénévole. Onconsidère donc comme revenu d'une activité salariée, soumis à cotisations,non seulement les rétributions versées pour un travail effectué, mais enprincipe toute indemnité ou prestation ayant une relation quelconque avec lesrapports de service, dans la mesure où ces prestations ne sont pas franchesde cotisations en vertu de prescriptions légales expressément formulées (ATF128 V 180 consid. 3c, 126 V 222 consid. 4a, 124 V 101 consid. 2 et lesréférences). Selon cette description du salaire déterminant, sont en principesoumis à l'obligation de payer les cotisations paritaires tous les revenusliés à des rapports de travail ou de service qui n'auraient pas été perçussans ses rapports. Est visé, sous réserve des exceptions prévues expressémentpar la loi ou l'ordonnance, le revenu (entier) en espèce ou en nature tiréen Suisse ou à l'étranger de l'exercice d'une activité lucrative dépendante,y compris les revenus accessoires. Inversement, l'obligation de payer descotisations ne concerne que les revenus qui ont été effectivement perçus parle travailleur (VSI 2001 p. 217 consid. 4a; RCC 1976 p. 410 consid. 2a). 5.1.2 La dette de cotisations prend naissance à la date à laquelle le salairedéterminant a été réalisé (ATF 115 V 163 consid. 4, 111 V 166 consid. 4a etles références; RCC 1989 p. 317 consid. 3c, 1985 p. 43 consid. 3a). D'aprèsles principes généraux de droit fiscal auxquels il convient de se référer paranalogie, le revenu est considéré comme réalisé lorsque le salarié peuteffectivement en disposer, c'est-à-dire lorsqu'un bien ou une prestation apassé en sa possession ou lorsqu'il a acquis un droit ferme à obtenir un bienou une prestation. En règle général, l'acquisition d'une prétention est déjàconsidérée comme un revenu dans la mesure où son exécution ne paraît pasincertaine. Ce n'est que si cette exécution paraît d'emblée peu probable quele moment de la perception réelle de la prestation est pris en considération(RDAF 2003 II 626 consid. 3.2.1 et les références; voir également WalterRyser/Bernard Rolli, Précis de droit fiscal suisse, 4e éd., 161 ss; XavierOberson, Droit fiscal suisse, 2 éd., n. 12, p. 80; Peter Locher, Kommentarzum DBG, 1ère partie, n. 18 ss ad art. 16; Jean-Marc Rivier, Droit fiscalsuisse, L'imposition du revenu et de la fortune, 2e éd., p. 326 ss; MarkusReich, in : Martin Zweifel/Peter Athanas, Kommentar zum schweizerischenSteuerrecht, I/2a, Bundesgesetz über die direkte Bundessteuer (DBG) Art 1-82,n. 33 ss ad. 16;En matière de responsabilité au sens de l'art. 52 LAVS, le revenu doit êtreconsidéré comme réalisé au moment du paiement, du virement au compte dechèque ou en banque du salaire. Si celui-ci n'est exceptionnellement pasversé mais est acquis par une inscription dans les livres comptables aucrédit du compte du salarié ou par compensation avec une contre-prestation,il y a lieu de présumer que le moment de la réalisation est identique à celuiauquel le montant a été porté au crédit ou compensé (ATFA 1957 p. 36 consid.2 et 125 consid. 2; Hans-Peter Käser, Unterstellung und Beitragswesen in derobligatorischen AHV, 2ème éd., Berne 1996, p. 112 ch. 4.9;Greber/Duc/Scartazzini, Commentaire des articles 1 à 16 de la loi fédéralesur l'assurance-vieillesse et survivants (LAVS), Bâle 1996, p. 156, n. 17 adart. 5). Demeurent réservés les cas où la preuve est rapportée quel'inscription correspond à une simple expectative. On se trouve dans un telcas de figure lorsque la situation financière de l'employeur au moment où lesalaire a été comptabilisé est très mauvaise et que le paiement des salairesportés en compte dépend de la situation ultérieure de l'entreprise (RCC 1976p. 88 consid. 2). L'opération consistant à porter au crédit du bénéficiaireune certaine somme doit ainsi être réalisable (Käser, op. cit., p. 113, n.4.9).5.2 Suivant une pratique constante (publiée à la SVR 1999 AHV n° 12 p. 33consid. 4a in fine), la Cour des assurances sociales du Tribunaladministratif du canton de Fribourg estime que la question de ladétermination du dommage subi par la caisse est indépendante de celle desavoir si l'employeur a effectivement versé ou non les salaires promis
à sesemployés. Il faut en effet partir du principe que la couverture d'assuranceAVS est garantie à tout employé pour le salaire qui lui est dû et qui estdéclaré, même si l'employeur ne verse pas le traitement. Dans cettehypothèse, la caisse subit en effet un dommage du fait qu'elle maintient sesprestations tout en n'encaissant pas les cotisations correspondantes. Parailleurs, traiter plus favorablement un employeur qui n'aurait ni payé sesemployés ni versé ses cotisations qu'un autre employeur, qui en dépit de sesdifficultés de trésorerie, se serait néanmoins acquitté des salaires dus dansle respect des contrats de travail, aboutirait à un résultat inéquitable,voire choquant. Pour le premier en effet, on considérerait qu'il n'aurait pascausé de dommage à sa caisse, alors qu'en plus du défaut de cotisations, ilaurait encore violé ses engagements contractuels; pour le second, onretiendrait sa responsabilité nonobstant son mérite à avoir récompensé sesemployés pour leur travail. Au demeurant, cette solution inciterait lesemployeurs à ne verser ni salaires ni cotisations sociales, ce qui n'est bienévidemment pas admissible. 5.3 Le point de vue soutenu par la Cour des assurances sociales du Tribunaladministratif du canton de Fribourg ne saurait être suivi, dès lors qu'ils'écarte de la jurisprudence constante du Tribunal fédéral des assurances,d'après laquelle le jour de la réalisation du revenu déterminant marque celuide la naissance de la créance de cotisations. Ce n'est en effet qu'à partirde ce moment bien précis, moment où l'employeur doit d'ailleurs déduire dusalaire les cotisations dues (art. 14 al. 1 LAVS), que la créance decotisations devient exigible et que la caisse de compensation peut enprétendre le paiement. Aussi longtemps qu'un revenu n'a pas été réalisé ausens de la jurisprudence (consid. 5.1.2), la caisse ne dispose d'aucunecréance à l'égard de l'employeur; elle ne saurait par conséquent subir unpréjudice en raison de l'insolvabilité de l'employeur et se prévaloir à cetitre d'une créance en réparation du dommage envers les organes responsables.Contrairement à ce que soutient la juridiction cantonale, du moment où il n'ya pas de réalisation d'un revenu soumis à cotisations, la couvertured'assurance AVS n'est plus garantie (voir art. 29ter al. 2 let. a LAVS).L'existence pour l'employeur d'une obligation légale de payer des cotisations(Beitragspflicht; voir ATF 115 V 163 consid. 4b et les références) ou d'uneobligation contractuelle de verser un salaire ne créent à cet égard aucunefiction juridique qui irait à l'encontre du principe de la réalisation.On ne saurait par ailleurs tirer des parallèles entre la situation del'employeur, qui en dépit de ses difficultés de trésorerie, se seraitnéanmoins acquitté des salaires dus dans le respect du contrat de travail decelle d'un autre employeur qui n'aurait ni payé ses employés ni versé lescotisations paritaires. Dans la première hypothèse, le travailleur est eneffet fondé à admettre que le salaire versé par l'employeur représente lesalaire net qui lui est dû et que les déductions sociales ont été effectuéeset acquittées. En revanche, lorsqu'il n'est pas payé, le travailleur doitsupposer que ses droits futurs en matière d'assurances sociales ne sont pasnon plus garantis. La loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire etl'indemnité en cas d'insolvabilité (LACI) garantit toutefois aux personnesassurées une compensation convenable du manque à gagner provoqué parl'insolvabilité d'un employeur. En effet, lorsque des sûretés ne sont pasfournies au travailleur dans un délai convenable pour garantir sesprétentions contractuelles, l'insolvabilité de l'employeur constitue un motifde résiliation immédiate du contrat de travail (art. 337a CO) qui permet autravailleur, sans que l'on puisse lui imputer une faute quelconque (arrêt K.du 11 juillet 1986, C 34/86), de bénéficier de l'indemnité de chômage, surlaquelle sont déduites les cotisations légales aux assurances sociales (art.22a LACI et 35 sv. OACI). Le travailleur dispose par ailleurs d'une créancede salaire contre son employeur, qu'il peut, le cas échéant, faire valoir enjustice (art. 343 CO) ou dans le cadre d'une poursuite pour dettes. Selon lescirconstances, le travailleur peut également prétendre, aux conditionsrequises par la loi et la jurisprudence, une indemnité pour insolvabilité(art. 51 LACI), qui donne également lieu à un prélèvement à la source descotisations légales aux assurances sociales (art. 52 al. 2 LACI et 76 OACI). 5.4 Dans la mesure où la juridiction cantonale s'est fondée sur uneconception juridique erronée, elle n'a pas établi les faits utiles à larésolution du cas. Il convient par conséquent de les constater d'office.Le 8 février 2002, E.________ SA a remis à la caisse deux déclarations desalaires pour les années 2001 et 2002, desquelles il ressort expressémentqu'une partie des rémunérations déclarées n'ont pas été payées par lasociété. D'après le contrôle d'employeur de la société réalisé par la caisseauprès de l'Office cantonal des faillites, il n'existerait aucun documentcomptable relatif à la société (rapport du 26 mars 2003). On peut dès lorsécarter l'hypothèse que les salaires auraient été acquis par l'inscription deceux-ci dans les livres comptables, sans qu'il soit nécessaire d'examiner siles montants qui auraient été portés au crédit des employés étaientréalisables. Dans ces circonstances, il convient de constater que le montantdu dommage réclamé doit être réduit de la somme des salaires qui, certes, ontété déclarés, mais n'ont pas été effectivement versés. Il s'ensuit que lejugement entrepris doit être annulé et la cause renvoyée à l'administrationpour qu'elle calcule à nouveau, conformément à la jurisprudence, le montantdes cotisations litigieuses (y compris les intérêts moratoires et les fraisde gestion). 6.6.1La procédure n'est pas gratuite (art. 134 OJ a contrario; VSI 2003 p. 166consid. 1). Ni la recourante, ni la caisse intimée n'obtiennent entièrementgain de cause, de sorte que les frais judiciaires peuvent être répartis parmoitié entre eux (art. 156 al. 3 en corrélation avec l'art. 135 OJ). 6.2 Invitée à verser une avance de frais, la recourante a demandé àbénéficier de l'assistance judiciaire pour la procédure fédérale. Selon laloi (art. 152 OJ) et la jurisprudence, les conditions d'octroi del'assistance judiciaire gratuite sont en principe remplies si les conclusionsne paraissent pas vouées à l'échec, si le requérant est dans le besoin et sil'assistance d'un avocat est nécessaire ou du moins indiquée (ATF 125 V 202consid. 4a, 372 consid. 5b et les références). En l'occurrence, la demanded'assistance judiciaire tend à la dispense des frais et la recourante remplitles conditions pour pouvoir en bénéficier. Son attention est attirée sur lefait que si elle devient ultérieurement en mesure de rembourser la caisse dutribunal, elle est tenu de le faire (art. 152 al. 3 en liaison avec l'art.135 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est partiellement admis et le jugement de la Cour des assurancessociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg du 22 avril 2004ainsi que la décision sur opposition de la Caisse de compensation du cantonde Fribourg du 19 août 2003 sont annulés; l'affaire est renvoyée à la caisseprécitée pour qu'elle fixe le montant du dommage conformément auxconsidérants. 2.Les frais de justice, d'un montant de 3'000 fr., sont mis pour moitié à lacharge de la caisse de compensation et pour moitié à la charge de larecourante. 3.La demande d'assistance judiciaire est admise; la caisse du tribunalsupportera provisoirement, au titre des frais de justice couverts parl'assistance judiciaire, un montant de 1'500 fr. en faveur de la recourante. 4.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Cour des assurancessociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg et à l'Officefédéral des assurances sociales. Lucerne, le 5 avril 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances Le Président de la IIIe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : H.111/04
Date de la décision : 05/04/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-04-05;h.111.04 ?
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