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05/04/2006 | SUISSE | N°6S.451/2005

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 05 avril 2006, 6S.451/2005


{T 0/2}6S.451/2005 /rod Arrêt du 5 avril 2006Cour de cassation pénale MM. les Juges Schneider, Président,Wiprächtiger et Kolly.Greffière: Mme Paquier-Boinay. X. ________,recourant, représenté par Me Paul Marville, avocat, contre C.________,intimé, représenté par Me Véronique Fontana, avocate,Ministère public du canton de Vaud, case postale, 1014 Lausanne. Homicide par négligence; fixation de la peine; sursis à l'exécution de lapeine, pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunalcantonal vaudois du 2 mai 2005. Faits: A.Le 16 février 2002 aux env

irons de minuit, Y.________, venant de Nyon,regagnait son domicile...

{T 0/2}6S.451/2005 /rod Arrêt du 5 avril 2006Cour de cassation pénale MM. les Juges Schneider, Président,Wiprächtiger et Kolly.Greffière: Mme Paquier-Boinay. X. ________,recourant, représenté par Me Paul Marville, avocat, contre C.________,intimé, représenté par Me Véronique Fontana, avocate,Ministère public du canton de Vaud, case postale, 1014 Lausanne. Homicide par négligence; fixation de la peine; sursis à l'exécution de lapeine, pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunalcantonal vaudois du 2 mai 2005. Faits: A.Le 16 février 2002 aux environs de minuit, Y.________, venant de Nyon,regagnait son domicile à Gimel en empruntant la route des Quatre-Communes,qui débouche sur la route de l'Etraz sur le territoire de la commune deMont-sur-Rolle. Parvenu à cette intersection, il a ralenti et, n'ayant vuaucun véhicule arriver sur sa gauche, s'est engagé sur la route de l'Etraz.Ayant l'intention d'emprunter le chemin des Revents, qui croise la route del'Etraz quelque 40 mètres après l'intersection entre celle-ci et la route desQuatre Communes, il a commencé à exécuter cette manoeuvre prématurément,franchissant une ligne de sécurité au lieu d'attendre d'être parvenu à lahauteur de la ligne discontinue permettant l'accès audit chemin. Au même moment, X.________ circulait à 102 km/h au volant de sa voiture entreBursins et la jonction autoroutière de Rolle. Il était accompagné deA.________, passager avant, et de B.________, qui avait pris place sur lesiège arrière droit du véhicule. Sur la route de l'Etraz, il est entré encollision avec le véhicule de Y.________ qu'il avait entrepris de dépasser,en se déplaçant sur la voie de présélection destinée aux usagers circulant ensens inverse, franchissant ainsi une ligne de sécurité. L'avant de la voiturede X.________, qui n'avait à aucun moment réduit sa vitesse, a heurté le côtégauche de l'automobile de Y.________. Le véhicule de X.________ a ensuiteheurté un mur de soutènement avant de s'immobiliser sur la route de l'Etraz.La voiture de Y.________ a dévié vers la droite de la route et terminé sacourse en contrebas, dans les vignes. B. ________, né en 1980, est décédé des suites de ses blessures. B.Par jugement du 5 novembre 2004, le Tribunal correctionnel del'arrondissement de La Côte a notamment libéré X.________ des préventions deconduite en état d'ébriété et de contravention à la loi fédérale sur lesstupéfiants. Il l'a en revanche reconnu coupable d'homicide par négligence etde violation grave des règles de la circulation routière et l'a condamné àcinq mois d'emprisonnement avec sursis pendant trois ans et à une amende de1'500 fr. avec délai d'épreuve et de radiation de même durée. Le tribunal aen outre statué sur les frais et dépens et alloué à C.________, le père deB.________, une indemnité de 20'000 fr. pour tort moral, lui donnant acte deses réserves civiles pour le surplus. Le Tribunal correctionnel a par ailleurs libéré Y.________ des préventionsd'homicide par négligence, de conduite en état d'ébriété et de contraventionà la loi fédérale sur les stupéfiants et l'a condamné, pour violation gravedes règles de la circulation, à la peine de cinq jours d'emprisonnement avecsursis pendant trois ans ainsi qu'à une amende de 500 fr. avec délaid'épreuve et de radiation de même durée. C.Par arrêt du 2 mai 2005, dont la motivation a été notifiée aux parties le 26octobre 2005, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois arejeté le recours formé par X.________ contre ce jugement, qu'elle a confirméen ce qui le concerne, à l'exception de l'indemnité pour tort moral à lacharge de celui-ci, dont le montant a été porté à 35'000 fr. à la suite del'admission partielle du recours de C.________. L'autorité cantonale a estimé que le lien de causalité tant naturellequ'adéquate était réalisé entre les graves violations des règles de lacirculation commises par X.________ et le décès de B.________ et que ce lienn'était pas rompu par les fautes imputées à Y.________. S'agissant de la peine prononcée, les juges cantonaux ont considéré que vul'extrême gravité de la faute commise elle n'était pas excessive même euégard au jeune âge de l'intéressé, à son absence d'antécédents judiciaires,aux regrets qu'il a exprimés et au fait qu'il a cessé toute consommation dedrogue depuis l'accident. D.X.________ se pourvoit en nullité contre cet arrêt. Se prévalant de plusieursfacteurs propres à rompre le lien de causalité entre les fautes qu'il auraitéventuellement commises et le décès de la victime, il soutient qu'il doitêtre libéré du chef d'accusation d'homicide par négligence. A titresubsidiaire, il estime en outre que la peine qui lui a été infligée estexcessive et doit être réduite à un mois au maximum. Enfin, le recourant faitvaloir que la durée du délai d'épreuve assortissant le sursis procède d'uneviolation de l'art. 41 CP. Partant, il conclut, sous suite de frais etdépens, à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause àl'autorité cantonale pour qu'elle statue à nouveau. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Le recourant reproche en premier lieu à l'autorité cantonale de l'avoirreconnu coupable d'homicide par négligence alors que, selon lui, plusieursfacteurs liés à la manière de conduire de Y.________ étaient propres àinterrompre la relation de causalité adéquate. Conformément à l'art. 117 CP, "celui qui, par négligence, aura causé la mortd'une personne sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende". Il en résulteque la réalisation de cette infraction suppose la réunion de troisconditions: le décès d'une personne, une négligence et un lien de causalitéentre la négligence et la mort (ATF 122 IV 145 consid. 3 p. 147). 1.1 Un comportement est la cause naturelle d'un résultat s'il en constituel'une des conditions sine qua non. En l'espèce, il n'est pas contesté qu'ilexiste un tel lien de causalité entre les violations des règles decirculation commises par le recourant et le décès de la victime. 1.2 Il faut en outre que le rapport de causalité puisse être qualifiéd'adéquat, c'est-à-dire que, d'après le cours ordinaire des choses etl'expérience de la vie, le comportement de l'auteur ait été propre àentraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit (ATF 131 IV 145consid. 5.1 p. 147; 127 IV 34 consid. 2a p. 39). Il s'agit là d'une questionde droit que la Cour de cassation revoit librement (ATF 127 IV 62 consid. 2dp. 65; 126 IV 13 consid. 7a/bb p. 17 et les arrêts cités). La causalité adéquate suppose une prévisibilité objective: il faut sedemander si un tiers observateur neutre, voyant l'auteur agir dans lescirconstances où il agit, pourrait prédire que le comportement considéré auratrès vraisemblablement les conséquences qu'il a effectivement eues, quandbien même il ne pourrait prévoir le déroulement de la chaîne causale dans sesmoindres détails. L'acte doit être propre, selon une appréciation objective,à entraîner un tel résultat ou à en favoriser l'avènement, de telle sorte quela raison conduit naturellement à imputer le résultat à la commission del'acte (ATF 131 IV 145 consid. 5.1 p. 147s.). La causalité adéquate sera admise même si le comportement de l'auteur n'estpas la cause directe ou unique du résultat. Peu importe que le résultat soitdû à d'autres causes encore, notamment à l'état de la victime, à soncomportement ou à celui de tiers (ATF 131 IV 145 consid. 5.2 p. 148; voirégalement Graven, L'infraction pénale punissable, 2e éd., Berne 1995, p. 92et les références citées). Il n'y aura rupture du lien de causalité adéquate, l'enchaînement des faitsperdant alors sa portée juridique, que si une autre cause concomitante, parexemple une force naturelle, le comportement de la victime ou d'un tiers,constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît siextraordinaire que l'on ne pouvait pas s'y attendre. L'imprévisibilité d'unacte concurrent ne suffit pas en soi à interrompre le rapport de causalitéadéquate. Il faut encore que cet acte ait une importance telle qu'il s'imposecomme la cause la plus probable et la plus immédiate de l'événementconsidéré, reléguant à l'arrière-plan tous les autres facteurs qui ontcontribué à l'amener, et notamment le comportement de l'auteur (ATF 131 IV145 consid. 5.2 p. 148; 122 IV 17 consid. 2c/bb p. 23 et les arrêts cités). 1.3 En l'espèce, le recourant, qui circulait à une vitesse excessive, aeffectué une man¿uvre de dépassement en franchissant une ligne de sécurité.Il a ainsi adopté un comportement éminemment dangereux, propre à fonder unlien de causalité avec le décès de la victime. Ce point n'est d'ailleurs pascontesté par le recourant, qui soutient uniquement que ce lien a été rompupar les fautes commises par Y.________. Il ressort des constatations de l'arrêt cantonal que Y.________, qui s'estengagé sur la route empruntée par le recourant après avoir ralenti et s'êtreassuré qu'aucun véhicule n'arrivait sur sa gauche, s'est mis en présélection,en franchissant une ligne de sécurité, quelques dizaines de mètres avant deparvenir à hauteur de la ligne discontinue. Il a effectué cette man¿uvre sansenclencher son clignotant et sans regarder dans son rétroviseur, étant occupéà surveiller la circulation qui arrivait en sens inverse. Un tel comportementconstitue certes une lourde faute, qui a d'ailleurs été sanctionnée puisqueY.________ a été reconnu coupable de violation grave des règles de lacirculation. Toutefois, notamment eu égard au fait qu'il venait de s'assurerqu'aucun véhicule n'arrivait au moment où il s'engageait sur la route, saman¿uvre ne revêt pas un caractère suffisamment extraordinaire etimprévisible pour que l'on doive considérer qu'elle relègue à l'arrière-planl'attitude du recourant qui, circulant à une vitesse excessive, n'a en rienréduit son allure, préférant effectuer un dépassement en franchissant uneligne de sécurité à un endroit où il connaissait par ailleurs l'existenced'un embranchement sur la gauche. C'est donc sans violer le droit fédéral que l'autorité cantonale a considéréqu'il existait un lien de causalité adéquate entre la faute imputée aurecourant et le décès de la victime. 2.Le recourant reproche en outre à l'autorité cantonale de lui avoir infligéune peine excessivement sévère. Soutenant que l'intensité de la violation desrègles de la circulation routière commise par Y.________ atténue fortement sapropre culpabilité, le recourant estime que sa peine doit être réduite à unmois au maximum. 2.1 Pour fixer la peine, le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation.Un pourvoi en nullité portant sur la quotité de la peine ne peut donc êtreadmis que si la sanction a été fixée en dehors du cadre légal, si elle estfondée sur des critères étrangers à l'art. 63 CP, si les élémentsd'appréciation prévus par cette disposition n'ont pas été pris en compte ouenfin si la peine apparaît exagérément sévère ou clémente au point que l'ondoive parler d'un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 129 IV 6 consid. 6.1 p.21; 127 IV 101 consid. 2c p. 104; 124 IV 286 consid. 4a p. 295 et les arrêtscités). La gravité de la faute est le critère essentiel à prendre en considérationdans la fixation de la peine et le juge doit l'évaluer en fonction de tousles éléments pertinents, notamment ceux qui ont trait à l'acte lui-même, àsavoir le résultat de l'activité illicite, le mode d'exécution, l'intensitéde la volonté délictuelle et les mobiles, et ceux qui concernent l'auteur,soit les antécédents, la situation personnelle et le comportement aprèsl'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 129 IV 6 consid. 6.1 p. 20;127 IV 101 consid. 2a p. 103; 122 IV 241 consid. 1a p. 243; 118 IV 21 consid.2b p. 24 s.; 117 IV 112 consid. 1; 116 IV 288 consid. 2a). Concernant lasituation personnelle de l'auteur, le juge doit prendre en compte savulnérabilité face à la peine, soit son état de santé et son âge, sesobligations familiales, sa situation professionnelle, les risques derécidive, etc. (ATF 102 IV 231 consid. 3 p. 233; 96 IV 155 consid. 3 p. 179). 2.2 Prenant en considération le jeune âge du recourant, qui avait 22 ans aumoment des faits, son absence d'antécédents judiciaires, les excuses et lesregrets qu'il a exprimés ainsi que le fait qu'il a cessé de consommer desstupéfiants depuis l'accident, l'autorité cantonale s'est fondée sur descritères pertinents. Toutefois, ces éléments favorables ne compensent quepartiellement la grave faute commise par le recourant, de sorte que l'on nesaurait considérer que l'autorité cantonale a abusé du large pouvoird'appréciation dont elle disposait en infligeant au recourant une peine de 5mois d'emprisonnement, et ce même compte tenu des fautes imputées àY.________, qui s'ajoutent aux siennes sans toutefois en atténuer la gravité. 3.Le recourant soutient enfin que l'autorité cantonale a violé l'art. 41 ch. 1CP en assortissant le sursis d'un délai d'épreuve excessivement long. Aux termes de l'art. 41 ch. 1 al. 3 CP, "en suspendant l'exécution de lapeine, le juge impartira au condamné un délai d'épreuve de deux à cinq ans".Dans le cadre ainsi fixé par la loi, la durée du délai d'épreuve est àdéterminer en fonction des circonstances du cas, en particulier selon lapersonnalité et le caractère du condamné, ainsi que du risque de récidive.Plus celui-ci est important plus long doit être le délai d'épreuve et lapression qu'il exerce sur le condamné pour qu'il renonce à commettre denouvelles infractions (ATF 95 IV 121 consid. 1). La durée doit êtredéterminée de manière à offrir la plus grande probabilité que le condamné nerécidivera pas (Schneider, Basler Kommentar I, art. 41 n. 131 et lesréférences citées). Dans ce contexte également, les autorités cantonalesdisposent d'un large pouvoir d'appréciation et, dans la mesure où ellesrespectent la cadre légal, le Tribunal fédéral ne considère que le droitfédéral a été violé que lorsque le juge a abusé de ce pouvoir d'appréciation(ATF 95 IV 121 consid. 1). En l'espèce, l'autorité cantonale a relevé que le recourant, en tant queconducteur encore peu expérimenté, a adopté un comportement totalementirresponsable, prenant des risques inconsidérés et parfaitement inutiles etqu'il existait un certain risque de récidive. Dans ces circonstances, on nesaurait considérer qu'elle a abusé de son pouvoir d'appréciation en estimantqu'un délai d'épreuve d'une durée certes supérieure au minimum imposé par laloi, mais qui demeure néanmoins plus proche de celui-ci que du maximum prévupar le législateur, était nécessaire à une prise de conscience de la gravitéde son comportement suffisante pour limiter assez largement le risque derécidive. Ce grief est également mal fondé, de sorte que le pourvoi doit êtrerejeté. 4.Vu l'issue de la procédure, les frais de la cause doivent être mis à lacharge du recourant qui succombe (art. 278 al. 1 PPF). Il n'y a pas lieud'allouer d'indemnité à l'intimé qui n'est pas intervenu dans la procéduredevant la Cour de cassation. Enfin, conformément à l'art. 10 al. 1 PCF, applicable par renvoi de l'art. 40OJ, le présent arrêt
est notifié au mandataire du recourant, toutefois, commela procuration produite exclut expressément l'élection de domicile en l'étudedu mandataire, une copie de l'arrêt est adressée à bien plaire au recourantpersonnellement. Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le pourvoi est rejeté. 2.Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant. 3.Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant et à son mandataire, àla mandataire de l'intimé, à la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonalet au Ministère public du canton de Vaud. Lausanne, le 5 avril 2006 Au nom de la Cour de cassation pénaledu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6S.451/2005
Date de la décision : 05/04/2006
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-04-05;6s.451.2005 ?
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