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05/04/2006 | SUISSE | N°6S.442/2005

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 05 avril 2006, 6S.442/2005


{T 0/2}6S.442/2005 /svc Arrêt du 5 avril 2006Cour de cassation pénale MM. les Juges Schneider, Président,Wiprächtiger, Kolly, Karlen et Zünd.Greffière: Mme Bendani. A.________,recourant, représenté par Me Guérin de Werra, avocat, contre Ministère public du canton du Valais,Palais de Justice, case postale 2050, 1950 Sion 2. Homicide par négligence (art. 117 CP), pourvoi en nullité contre le jugement duTribunal cantonal du Valais, Cour pénale II,du 7 octobre 2005. Faits: A.Le 26 septembre 2000, la société G.________ a organisé des vols touristiquesen hélicoptères de quelques mi

nutes, style "baptêmes de l'air", dans larégion de Nendaz, pour u...

{T 0/2}6S.442/2005 /svc Arrêt du 5 avril 2006Cour de cassation pénale MM. les Juges Schneider, Président,Wiprächtiger, Kolly, Karlen et Zünd.Greffière: Mme Bendani. A.________,recourant, représenté par Me Guérin de Werra, avocat, contre Ministère public du canton du Valais,Palais de Justice, case postale 2050, 1950 Sion 2. Homicide par négligence (art. 117 CP), pourvoi en nullité contre le jugement duTribunal cantonal du Valais, Cour pénale II,du 7 octobre 2005. Faits: A.Le 26 septembre 2000, la société G.________ a organisé des vols touristiquesen hélicoptères de quelques minutes, style "baptêmes de l'air", dans larégion de Nendaz, pour un groupe d'environ 150 personnes. Le terrain defootball de Beuson, qui constitue une sorte de cul-de-sac imposant unatterrissage par le nord, a été choisi comme point de départ et d'arrivée deces vols, qui devaient débuter à 14 h. 15, avec initialement troishélicoptères. A.a Trois assistants de vol ont été envoyés à Beuson pour assurer ledéroulement au sol des vols passagers. Sur place, ils se sont organisés pourles rotations à venir. Ils ont convenu que l'un s'occuperait du Lama, dont laplace d'atterrissage se situait au sud-ouest, l'autre du Jet Ranger, ausud-est du terrain de football, le troisième étant chargé de préparer lesgroupes de passagers. Vers 14 h. 15, ils ont été avisés du retard destouristes. Autour de 15 h., la base de Sion les a informés de son intentiond'annuler les vols.Vers 15 h. 25, les premiers touristes sont cependant arrivés à Beuson. Dèsl'annonce de leur arrivée, le pilote B.________, préalablement informé decette mission par le chef-pilote C.________, a quitté la base de Sion auxcommandes d'un hélicoptère Lama. Sur place, il a immédiatement commencé lesvols et effectué cinq rotations seul. Vu le retard pris sur le programme destouristes, les rotations de six minutes ont été raccourcies à quatre minutes. A.b Alors qu'il rentrait de mission et avait atterri sur le tarmac de Sion,le pilote A.________ a reçu l'ordre de C.________ de rejoindre Beuson avec unJet Ranger pour y assurer le transport des touristes. Il s'est d'abord renduau bureau de la société G.________ pour prendre les renseignementsnécessaires sur la mission et est arrivé sur place vers 16 h.Les deux pilotes ont pris contact par radio pour définir le sens des voltes.Après une première rotation, A.________ a constaté que le circuit effectuéétait trop long au regard de la performance de son appareil, de sorte qu'il aentrepris un autre circuit, sans communiquer ce changement à B.________. Lespilotes décollaient et atterrissaient en alternance, en annonçant cesmanoeuvres et en cherchant un contact visuel. Ils ont ainsi effectué cinq ousix rotations. A.c Vers 16 h. 15, B.________ a été appelé sur un autre site. A.________ aalors effectué une ou deux rotations seul. A un moment donné, il a entendul'annonce de l'arrivée d'un nouvel appareil, une Alouette III pilotée parD.________, engagé sur les vols de Beuson dès la fin de sa missionprécédente. Après s'être annoncé arrivant dans deux minutes, ce pilote a poséson engin dans l'angle sud-ouest du terrain, à la place dévolue précédemmentau Lama piloté par B.________. A.________ a atterri juste après lui, dansl'angle sud-est du terrain. D.________ a pris en charge six passagers, suivipar A.________, qui en a pris quatre. Les pilotes ont convenu par radio dusens des voltes, à savoir qu'ils montaient et descendaient à droite dans lesens du vol. A.________ a vu D.________ décoller en direction de Nendaz et adécollé 10 à 15 secondes après, en direction de Veysonnaz. A.d A.________ a entrepris la même rotation que précédemment, ens'approchant du terrain par le nord, puis en effectuant la même bouclequ'auparavant. Au cours de la dernière phase de vol, il a entendu à la radioson collègue s'annoncer en approche et s'est annoncé en final. Son approchefinale s'est effectuée par le nord-ouest, de manière à éviter le village deBeuson. D.________ s'est approché du terrain en effectuant un virage à gauchepuis à droite, ce qui a placé son appareil à gauche du Jet Ranger, endeuxième position. Vu leurs emplacements respectifs, les pilotes ne pouvaientà cet instant avoir un contact visuel. Quelques secondes plus tard,A.________ a entendu un bruit de turbine, suivi aussitôt d'une collision quil'a privé de son rotor de queue.A la suite de cette collision, l'Alouette III s'est écrasée au nord duterrain, en position inversée. Ses six occupants et le pilote sont décédés.Le Jet Ranger a effectué quelques rotations sur lui-même avant de heurter lesol sur son côté droit. Un passager a été tué et les autres occupants ont étéblessés. B.B.a Suite à cette collision, le Bureau d'enquêtes sur les accidentsd'aviation (BEAA) a établi un rapport le 19 octobre 2001 et retenu les causesd'accident suivantes:- des consignes de vol lacunaires;- une préparation insuffisante des opérations;- une vraisemblable mauvaise compréhension de la part du pilote de l'Alouette III des consignes transmises en vol;- l'éblouissement du pilote de l'Alouette III au cours de l'approche par le soleil;- l'angle mort pour le pilote du Jet Ranger créé en approche par la position relative des hélicoptères;- l'absence d'une personne au sol chargée de la surveillance directe des rotations et munie d'un transmetteur. Il a également préconisé la présence obligatoire d'un assistant au sol chargéexclusivement de la surveillance des aéronefs, afin de prévenir les risquesd'abordage. B.b Selon le rapport de la Commission fédérale sur les accidents d'aviation(CFAA) du 23 janvier 2003, l'accident est dû à une collision aériennerésultant de la prise en considération insuffisante par les pilotes de laséparation entre les hélicoptères et de la surveillance lacunaire de l'espaceaérien, de consignes de vol lacunaires respectivement pas claires entres lespilotes (circuits, séparations, points d'annonce, danger) et du défaut, auniveau de la société, d'une réglementation et d'une organisation claire pourla gestion de ce genre d'opérations. La CFAA a ajouté que l'éventueléblouissement du pilote de l'Alouette III par le soleil au cours del'approche, sa position dans un angle mort ainsi que le retard dans leprogramme et la précipitation qui en a résulté, ont contribué à la survenancede l'accident.Relevant que les vols style "baptêmes de l'air" étaient considérés par lesresponsables de la société G.________ comme des missions normales etrégulières, voire simples, la CFAA a souligné que celles-ci n'avaient pasfait l'objet d'un chapitre dans le manuel d'exploitation de l'entreprise etque la société concernée n'estimait pas nécessaire de procéder à ladésignation d'un chef des opérations sur place, les pilotes devant assumer demanière autonome la responsabilité pour la coordination et la sécurité. B.c A la suite de cet accident, la société G.________ a introduit ladisposition suivante dans son manuel d'exploitation:9.5.2 Vols passagers en campagne avec plusieurs hélicoptères9.5.2.1 Lorsque plusieurs hélicoptères sont affectés au transport depassagers sur une même place, un nombre suffisant d'assistants de vol seraprévu pour assurer l'embarquement et le débarquement et la sécurité autourdes hélicoptères. 9.5.2.2 Pour chaque opération, un pilote responsable ainsi qu'un responsableau sol seront désignés. Ce dernier sera en contact radio avec leshélicoptères et aura pour tâche de donner des informations aux pilotes afind'éviter un risque d'abordage. 9.5.2.3 Avant chaque opération, un briefing dirigé par le pilote responsableen collaboration avec le responsable au sol réunira tous les pilotes engagésafin de définir le sens des décollages et des atterrissages, les voltes, cecien fonction de la météo, des obstacles et de la puissance des divershélicoptères engagés. En outre, le pilote responsable aura pour tâche lacoordination des vols. 9.5.2.4 L'espacement entre chaque décollage sera de 1,5 minutes au minimum. C.Par jugement du 10 décembre 2004, le juge des districts d'Hérens et Conthey acondamné le pilote du Jet Ranger A.________, pour homicides par négligence etentrave à la circulation publique, à cinq mois d'emprisonnement avec sursiset le chef-pilote d'Air Glacier SA C.________, pour homicides par négligence,à trois mois d'emprisonnement avec sursis. Il a acquitté E.________, chefd'exploitation de la société.Par jugement du 7 octobre 2005, la Cour pénale II du Tribunal cantonalvalaisan a réformé la décision de première instance en ce sens qu'elle acondamné A.________, pour homicide par négligence, à 2'000 francs d'amende eta acquitté C.________ et E.________. D.A.________ dépose un pourvoi en nullité au Tribunal fédéral pour violation del'art. 117 CP. Il conclut à l'annulation du jugement cantonal.Le Ministère public du canton du Valais n'a pas déposé de réponse dans ledélai imparti. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Le recourant conteste sa condamnation pour homicide par négligence (art. 117CP). Il nie avoir violé fautivement un devoir de diligence et met en causel'existence d'un lien de causalité entre une éventuelle négligence etl'accident survenu. 1.1 Aux termes de l'art. 117 CP, celui qui, par négligence, aura causé lamort d'une personne sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.L'homicide par négligence constitue une infraction de résultat, qui supposeen général une action. On admet cependant qu'une infraction de résultat peutégalement être réalisée lorsque l'auteur n'empêche pas le résultatdommageable de se produire, alors qu'il aurait pu le faire et qu'il avaitl'obligation juridique d'agir pour prévenir la lésion de l'intérêt protégé(délit d'omission improprement dit). Un délit d'omission improprement dit estréalisé lorsque la survenance du résultat que l'auteur s'est abstenud'empêcher constitue une infraction, que ce dernier aurait effectivement puéviter le résultat par son action et qu'en raison de sa situation juridiqueparticulière, il y était à ce point obligé que son omission apparaîtcomparable au fait de provoquer le résultat par un comportement actif (ATF117 IV 130 consid. 2a p. 132 s.).Une omission ne peut dès lors être reprochée à l'auteur que si ce dernieravait un devoir juridique d'agir découlant d'une position de garant (cf. ATF129 IV 119 consid. 2.2 p. 121 s.; 122 IV 17 consid. 2b/aa p. 20, 61 consid.2a/aa p. 63, 145 consid. 2 p. 146). Celle-ci peut notamment découler de laloi ou d'un contrat, voire d'une situation de fait, mais aussi du principe del'intervention, selon lequel celui qui crée une situation dangereuse pourautrui doit prendre toutes les mesures de protection commandées par lescirconstances pour éviter la survenance d'un dommage (ATF 127 IV 27 consid.2b p. 32; 120 IV 98 consid. 2c p. 106; 106 IV 278). 1.1.1 La Cour cantonale a fait grief au recourant de ne pas avoir convenupréalablement avec le second pilote d'un temps de séparation entre ledécollage de chaque aéronef, de ne pas avoir concerté son collègue surl'objet des annonces et le moment où elles devaient intervenir et endécollant immédiatement après le second appareil. Ce sont donc principalementdes omissions qui lui sont reprochées, à l'exception du fait d'avoir décollétrop rapidement, qui constitue un comportement actif. 1.1.2 Avec raison, le recourant ne conteste toutefois pas sa position degarant. En effet, la loi oblige tout commandant à prendre, dans les limitesdes prescriptions légales, des instructions données par l'exploitant del'aéronef et des règles reconnues de la navigation aérienne, toutes lesmesures propres à sauvegarder les intérêts des passagers qu'il transporte(cf. art. 6 al. 1 de l'ordonnance sur les droits et devoirs du commandantd'aéronef; RS 748.225.1). En vertu de cette disposition, le recourant étaitainsi garant de la sécurité de ses passagers.De plus, la société G.________ s'était engagée contractuellement à réaliserun baptême de l'air pour 150 personnes. Partant, le recourant, à l'instar desemployés de la société ayant participé à cette mission, avait l'obligation deveiller à la sécurité de tous ces touristes. 1.2 Le comportement de l'auteur n'est illicite que s'il a violé un devoir dediligence lui incombant. Pour déterminer concrètement les devoirs découlantde l'obligation de diligence, le juge peut se référer à des dispositionslégales ou réglementaires régissant l'activité en cause, à des règles émanantd'associations privées ou semi-publiques reconnues ou encore se fonder surles principes généraux de prudence (ATF 126 IV 13 consid. 7a/bb p. 16; 122 IV17 consid. 2b/aa p. 20). Un comportement viole le devoir de prudence lorsquel'auteur, au moment des faits, aurait pu, compte tenu de ses connaissances etde ses capacités, se rendre compte de la mise en danger d'autrui et qu'il asimultanément dépassé les limites du risque admissible (ATF 127 IV 34 consid.2a p. 38; 126 IV 13 consid. 7a/bb p. 16 s.). C'est donc en fonction de lasituation personnelle de l'auteur que l'on doit apprécier son devoir dediligence. Peu importe toutefois que l'auteur ait pu ou dû prévoir que leschoses se passeraient exactement comme elles ont eu lieu (ATF 115 IV 199consid. 5c p. 207). 1.2.1 L'art. 6 de l'ordonnance concernant les règles de l'air applicables auxaéronefs (ORA; RS 748.121.11) impose à tout pilote de ne pas conduire sonaéronef de façon négligente ou imprudente pouvant entraîner un risque pour lavie ou les biens de tiers. Le commandant est responsable de la conduite del'aéronef conformément aux dispositions légales, aux prescriptions contenuesdans les publications d'information aéronautique, aux règles reconnues de lanavigation aérienne et aux instructions de l'exploitant (art. 7 del'ordonnance sur les droits et les devoirs du commandant d'aéronef; RS748.225.1). Un aéronef ne doit pas être piloté si près d'un autre qu'ilpuisse en résulter un risque d'abordage (art. 14 al. 1 ORA). En matière devol à vue (cf. art. 38 ss ORA), la règle principale est voir et être vu.Lors d'un vol à vue, le pilote n'a recours, pour éviter les obstaclesaériens, qu'à son attention visuelle et aux indications qu'il transmet oureçoit par radio. Le risque d'abordage lors de tels vols à plusieurshélicoptères dans un même périmètre n'est donc pas négligeable. Le danger estparticulièrement important lors du décollage et de l'atterrissage, quiconstituent des manoeuvres difficiles qui accaparent une partie del'attention des pilotes. Conformément aux règles de prudence, il incombe dèslors aux commandants d'aéronef de prendre toutes les mesures utiles pourassurer la sécurité et minimiser les risques lors de ces opérations. 1.2.1.1 La prudence la plus élémentaire imposait tout d'abord aux pilotes deconvenir entre eux d'une procédure de vol et d'atterrissage et, plusparticulièrement, de s'entendre sur les points d'annonce. En ce qui concernece dernier élément, il ressort des constatations cantonales que les deuxpilotes n'avaient pas les mêmes habitudes en la matière et que leurs annoncesétaient dans tous les cas insuffisantes. En effet, le recourant s'estdirectement
annoncé en final - sans préalablement s'annoncer en approche -,lorsqu'il se trouvait à moins de 30 secondes du terrain de football, alorsque le second pilote s'est en premier signalé en approche. Ce dernier terme,vague et insuffisant pour ce genre d'opérations, ne permettait pas de situerla position exacte de l'Alouette III. A l'inverse, le fait de s'annoncer enfinal seulement à quelques secondes de l'arrivée restreignaitconsidérablement les possibilités de réaction pour le cas où l'Alouette IIIse trouvait dans la zone du terrain de football. Ainsi, les commandantsauraient dû annoncer leur arrivée à un stade prédéfini, par exemple avantd'effectuer le virage destiné à se positionner pour l'atterrissage, s'assurerqu'un des pilotes avait l'autre en vue dans le cas où il se trouvait àproximité, puis seulement entamer l'atterrissage en s'annonçant en final.Dans ce sens, le témoin F.________, pilote professionnel, a expliqué que,lors de leur formation, les pilotes apprennent qu'il convient, alors que laplace d'atterrissage est encore éloignée et que l'on se trouve en vol opposéà la finale, de décrire la procédure d'approche. Il ressort également del'expertise de la CFAA que les pilotes auraient dû s'accorder par desconsignes de vol claires et notamment s'entendre sur les circuits, les pointsd'annonce et les dangers. L'expertise du BEAA fait également état deconsignes de vol lacunaires. 1.2.1.2 La prudence commandait ensuite aux pilotes de s'entendre sur laséparation entre les appareils et de décoller et atterrir en alternance,cette mesure étant propre à prévenir les risques d'abordage. Or, selon lesconstatations cantonales, le Jet Ranger a décollé 10 à 15 secondes après lepremier hélicoptère. Il est vrai, comme le soutient le recourant, que lesdeux machines n'avaient pas la même puissance et n'empruntaient pas le mêmeitinéraire et qu'il était donc théoriquement possible qu'une des machinespuisse rattraper l'autre. Il reste que la durée des voltes était déterminéeet qu'en observant un temps d'attente d'une à deux minutes entre chaquedécollage ou en alternant le décollage et l'atterrissage des deux appareils,il était pratiquement exclu que les deux machines se présentassent en mêmetemps à l'atterrissage et il aurait ainsi été possible de garder le contactvisuel, le pilote en phase d'approche s'assurant d'avoir l'autre hélicoptèreen vue avant d'entamer son atterrissage. Dans ce sens, les expertises ontrelevé que les pilotes avaient insuffisamment pris en considération laséparation entre les hélicoptères. De même, le témoin F.________ a observéqu'une séparation entre les engins constituait une mesure élémentaire deprudence et que les pilotes devaient toujours savoir où se trouvait leurvis-à-vis. 1.2.2 En définitive, le recourant a violé ses devoirs de prudence en ne seconcertant pas avec son collègue sur la procédure d'atterrissage, et plusparticulièrement sur les points d'annonce, et en ne respectant pas un tempsde séparation suffisant entre les deux engins. 1.3 Il y a violation fautive d'un devoir de prudence lorsque l'on peutreprocher à l'auteur, compte tenu de ses circonstances personnelles, den'avoir pas déployé l'attention et les efforts qu'on pouvait attendre de luipour se conformer à son devoir de prudence, autrement dit d'avoir fait preuved'un manque d'effort blâmable (ATF 122 IV 17 consid. 2b p. 19; 121 IV 207consid. 2a p. 211).Le recourant est titulaire d'une licence de pilote professionnel pourhélicoptères, établie le 27 mai 1992, et valable jusqu'au 19 mai 2001. Al'époque des faits, il totalisait à son actif 2273 heures de vol dont 850heures sur des Jet Ranger, travaillait pour la société G.________ depuis 1994et avait déjà réalisé des vols passagers à plusieurs hélicoptères. Il estdécrit par son supérieur comme un pilote très consciencieux et calme, soitcomme un bon pilote. Il exerce également la fonction de pilote d'épandage,qui est une activité pointue et plus complexe que le transport de passagers.Compte tenu de son expérience et du fait que les précédentes rotations faitesavec B.________ s'étaient effectuées en alternance, de manière à n'avoirchaque fois qu'un seul hélicoptère sur le stade, le recourant pouvait serendre compte de l'utilité de mettre au point une procédure d'atterrissage etd'espacer correctement les vols afin de pouvoir atterrir en alternance, cequi était au demeurant tout à fait possible, chaque volte durant quatreminutes. Ses manquements doivent dès lors être qualifiés de fautifs. 1.4 Pour qu'il y ait homicide par négligence, il faut encore un rapport decausalité entre la violation fautive des devoirs de prudence et le décès.Dans le cas d'un délit d'omission improprement dit, la question de lacausalité ne se présente pas de la même manière que si l'infraction derésultat était réalisée par commission. Il faut plutôt procéder par hypothèseet se demander si l'accomplissement de l'action omise aurait, avec unevraisemblance confinant à la certitude ou, du moins, avec une hautevraisemblance, évité la survenance du résultat (ATF 118 IV 130 consid. 6a p.141; 116 IV 182 consid. 4 p. 185). L'examen de la causalité adéquate consisteà se demander si l'acte qui a été omis aurait évité le résultat selon unenchaînement normal et prévisible des événements (ATF 117 IV 130 consid. 2ap. 133 s.).Selon la jurisprudence, il faut, pour l'analyse des conséquences de l'actesupposé, appliquer les concepts généraux des causalités naturelle et adéquate(ATF 117 IV 130 consid. 2a p. 133). L'existence d'un rapport de causaliténaturelle constitue une question de fait soustraite au contrôle de l'autoritéde céans. En revanche, la méconnaissance du concept même de la causaliténaturelle ainsi que l'existence d'un rapport de causalité adéquateconstituent des questions de droit que la Cour de cassation peut revoirlibrement (ATF 117 IV 130 consid. 2a p. 133 s.). Dans le cas d'un délitd'omission improprement dit, il est souvent difficile de distinguer lacausalité naturelle de l'adéquate, puisque, dans les deux cas, il fautprocéder par hypothèse et émettre un jugement de valeur (cf. ATF 115 II 440consid. 5a p. 447 ss). Les notions de causalité, et par conséquent lesquestions de fait et de droit se chevauchent ainsi étroitement (cf. ATF 118IV 130 consid. 6a p. 141; 116 IV 306 consid. 2a p. 310; 81 IV 85 consid. 6 p.90). 1.4.1 La Cour cantonale a nié l'existence d'un lien de causalité entrel'absence de concertation des pilotes et l'accident. Elle a estimé que lefait que les deux pilotes n'avaient pas convenu d'un point d'annonce neparaissait pas être à l'origine de l'accident et que l'absence deconcertation avant et pendant le vol ne constituait pas la cause immédiate del'accident. Elle a relevé que les appareils étaient vraisemblablement, au vudes annonces respectives faites par les pilotes, suffisamment espacés pouratterrir l'un après l'autre, sans que l'un des pilotes ai dû stopper sonhélicoptère, et que A.________ ne pouvait pas prévoir que D.________adopterait une conduite insolite à l'approche de la phase d'atterrissage.Cette motivation est critiquable. D'une part, elle méconnaît le concept mêmede la causalité tant naturelle qu'adéquate. En effet, s'agissant de cettenotion, il suffit de se demander si l'accomplissement de l'acte omis par lerecourant aurait évité la survenance de l'accident. Il n'est toutefois pasnécessaire qu'il s'agisse de la cause unique ou immédiate du résultat (cf.ATF 125 IV 195 consid. 2b p. 197; 116 IV 306 consid. a p.310); plusieurscauses peuvent concourir à produire le résultat; il peut y avoir unenchaînement d'événements et l'acte ou l'omission reproché à l'auteur peutégalement être très antérieur à la survenance du résultat (B. Corboz, Lesinfractions en droit suisse, vol. I, ad art. 117 CP n° 36). D'autre part,elle perd de vue que la faute de la victime n'interrompt le lien de causalitéadéquate que si elle constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ouapparaît si extraordinaire que l'on ne pouvait s'y attendre. De plus,l'imprévisibilité d'un acte concurrent ne suffit pas en soi à interrompre lerapport de causalité adéquate. Encore faut-il que cet acte ait une importancetelle qu'il s'impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate del'événement considéré, reléguant à l'arrière-plan tous les autres facteursqui ont contribué à l'amener et notamment le comportement de l'auteur (ATF127 IV 62 consid. 2d p. 65; 126 IV 13 consid. 7a/bb p. 17; 122 IV 17 consid.2c/bb p. 23; 121 IV 207 consid. 2a p. 213). 1.4.2 La Cour cantonale a, en revanche, admis l'existence d'un lien decausalité entre le décollage immédiat du recourant après le premier appareilet l'accident. Cette appréciation est conforme au droit fédéral. 1.4.2.1 En effet, si les pilotes s'étaient entendus sur un temps deséparation raisonnable entre les engins, l'abordage aurait été évité demanière hautement vraisemblable, ce qui est confirmé par les expertises (cf.supra consid. B). Le recourant ne pouvait l'ignorer, un tel résultat étantprévisible au regard notamment de l'espace aérien restreint dans lequelévoluaient les hélicoptères, de la durée des rotations effectuées et de laconfiguration des lieux. Par ailleurs, le recourant était arrivé sur placeavant D.________ et avait effectué des voltes en alternance avec B.________,ce qui en principe aurait dû lui permettre d'analyser les dangers del'opération. De plus, l'Alouette III ayant décollé en première position etétant un engin plus puissant et rapide que le Jet Ranger, le recourant devaitimaginer que son collègue risquait de se présenter à l'atterrissage avant ouen même temps que lui. Au regard de ces éléments, la violation fautive de cedevoir de prudence par le recourant était propre, d'après le cours ordinairedes choses et l'expérience générale de la vie, à provoquer l'accident telqu'il est survenu. 1.4.2.2 Au vu des difficultés de la mission et en qualité de responsable del'exécution sûre et réglementaire des vols, C.________ aurait dû désigner unpilote responsable sur place de la coordination des vols ou prévoir unassistant au sol chargé de la surveillance aérienne et en contact radio avecles pilotes, ce qu'il n'a pas fait (cf. arrêt 6S.448/2005 du Tribunalfédéral). D.________, aux commandes de l'Alouette III, a effectué unedernière manoeuvre en S, croisant à deux reprises la trajectoire de l'autrehélicoptère, pour casser sa vitesse et réduire son altitude. De plus, aprèsavoir entendu l'annonce de son collègue, il aurait dû immédiatements'enquérir de la position de ce dernier et attendre tant qu'il n'avait paslocalisé celle-ci. Selon un principe général de l'aviation, la machine laplus puissante doit céder la priorité à la machine la moins puissante, soiten l'occurrence le Jet Ranger piloté par le recourant.Ces fautes, reprochées à C.________ et D.________, ne sont pas à ce pointextraordinaires ou imprévisibles qu'elles pourraient reléguer à l'arrièreplan celle qu'a commise le recourant en décollant immédiatement après lepremier appareil. Il n'y a donc pas d'interruption du lien de causalité entrele comportement du recourant et l'accident. 2.Sur le vu de ce qui précède, la condamnation du recourant pour homicide parnégligence ne viole pas le droit fédéral. Le recourant, qui succombe,supportera les frais (art. 278 al. 1 PPF). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le pourvoi est rejeté. 2.Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant. 3.Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, auMinistère public du canton du Valais et au Tribunal cantonal du Valais, Courpénale II, ainsi qu'au Ministère public de la Confédération. Lausanne, le 5 avril 2006 Au nom de la Cour de cassation pénaledu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6S.442/2005
Date de la décision : 05/04/2006
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-04-05;6s.442.2005 ?
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