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03/04/2006 | SUISSE | N°I.652/04

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 03 avril 2006, I.652/04


{T 7}I 652/04 Arrêt du 3 avril 2006IIe Chambre Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Borella et Kernen. Greffier : M.Cretton R.________, recourante, représentée par Me Gilbert Bratschi, avocat, rued'Aoste 4, 1204 Genève, contre Office cantonal AI Genève, 97, rue de Lyon, 1203 Genève, intimé Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève (Jugement du 30 août 2004) Faits: A.Employée de banque née en 1960, R.________ a résilié son contrat de travailpour des raisons familiales et de santé (lettre du 27 janvier 1995). Placéeen arrêt maladie le 14 février 1995, elle n'a pl

us repris d'activitéslucratives depuis cette date. Elle a requis ...

{T 7}I 652/04 Arrêt du 3 avril 2006IIe Chambre Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Borella et Kernen. Greffier : M.Cretton R.________, recourante, représentée par Me Gilbert Bratschi, avocat, rued'Aoste 4, 1204 Genève, contre Office cantonal AI Genève, 97, rue de Lyon, 1203 Genève, intimé Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève (Jugement du 30 août 2004) Faits: A.Employée de banque née en 1960, R.________ a résilié son contrat de travailpour des raisons familiales et de santé (lettre du 27 janvier 1995). Placéeen arrêt maladie le 14 février 1995, elle n'a plus repris d'activitéslucratives depuis cette date. Elle a requis des prestations del'assurance-invalidité le 25 juin 1996, alléguant souffrir decervico-lombalgies et de polyinsertionite au niveau de la ceinturescapulaire. En cours d'instruction, l'Office de l'assurance-invalidité du canton deGenève (ci-après: l'Office AI) s'est procuré une copie du dossier constituépar l'assurance-maladie de l'intéressée. Y figurent notamment l'avis desdocteurs P.________ et U.________, médecins traitants, faisant état decervicalgies céphalogènes (rapports des 3 et 15 août 1995), ainsi que lerapport d'expertise établi le 19 décembre 1995 par le docteur J.________,rhumatologue FMH; l'examen clinique de ce dernier a permis de mettre enévidence des modifications dégénératives mineures ne justifiant pasl'intensité des plaintes et n'a confirmé la présence d'aucun syndromevertébral cervical ou lombaire. S'ajoutait à cette symptomatologie unepolyinsertionite (fibrosite, fibromyalgie, SPID) localisée exclusivement à laceinture scapulaire. L'administration a également recueilli l'opinion dudocteur P.________ qui, outre des éléments connus, a mentionné un étatdépressif d'origine mixte (rapport du 29 octobre 1996) et transmis un rapportétabli le 16 juillet 1996 par les docteurs Z.________ et F.________, divisionde rhumatologie de l'Hôpital X.________; les cervicalgies apparues dans uncontexte de surcharge professionnelle n'ont pas trouvé d'échos dans lesexamens radiologiques pratiqués (absence de pathologie osseuse, des tissusmous et de hernies discales). Il n'a été constaté aucun syndrome vertébral,ni radiculaire cervical ou lombaire. N'ayant pas jugé utile de procéder à un complément d'instruction, l'Office AIa rejeté la demande de l'assurée (décision du 26 octobre 1998), puis, durantla procédure de recours, est revenu sur sa décision le 19 avril 1999; il amandaté son Centre d'observation médicale (COMAI) de A.________, afin qu'ilréalise une expertise pluridisciplinaire. Faisant la synthèse desinvestigations menées par les docteurs E.________, psychiatre, et M.________,rhumatologue (rapport des 21 et 29 novembre 1999), les docteurs B.________ etN.________ ont retenu que R.________, dont la personnalité était instable,souffrait d'un trouble dysthymique endoréactionnel et d'une fibromyalgieprimitive; la pathologie rhumatologique était limitée, sans grande variationdepuis 1995 et clairement sous influence psychique (rapport du 3 décembre1999 rédigé en italien). Pour sa part, l'assurée a déposé différents avismédicaux, faisant état, entre autres affections, d'une dépression chroniqued'intensité moyenne à légère remontant à 1988, de boulimie et de phobiesociale (rapports des docteurs C.________ et V.________, psychiatres FMH, dela division de psychiatrie de liaison de l'Hôpital X.________, ainsi que dudocteur L.________, médecin traitant, des 6 janvier 1999, 13 septembre, 30août et 19 septembre 2000). Par décision du 3 mai 2001, l'administration a rejeté la demande del'intéressée, l'incapacité de travail et de gain de cette dernière nedépassant pas 25 à 30 %. B.R.________ a déféré cette décision à la Commission cantonale genevoise derecours en matière d'AVS/AI (ci-après: la Commission). Elle concluait àl'octroi d'une rente d'invalidité fondée sur un taux d'au moins 50 % et,subsidiairement, au renvoi de la cause pour instruction complémentaire. Atitre préalable, elle a requis la traduction du rapport d'expertise COMAI. Le Tribunal fédéral des assurances a annulé les jugements cantonaux danscette affaire à trois reprises (9 novembre 2001, 22 avril 2002 et 27 novembre2003) pour des motifs tenant à la composition de la Commission, puis duTribunal cantonal des assurances sociales, entré en fonction le 1er août 2003et ayant repris les compétences exercées jusque-là par la Commission, ainsiqu'à la violation d'une garantie de procédure (interdiction du formalismeexcessif). Les rapports des docteurs L.________ et S.________, généraliste FMH, des 24avril 2002 et 15 janvier 2003, faisant état de diagnostics connus, ont étéversés au dossier (courrier du 24 janvier 2003). Par jugement du 30 août 2004, la juridiction cantonale a débouté l'assurée deses conclusions, retenant un degré d'invalidité de 25 à 30 % n'ouvrant pasdroit à une rente. C.L'intéressée interjette recours de droit administratif contre ce jugementdont elle requiert l'annulation. Elle conclut, sous suite de frais et dépens,à l'octroi d'une rente correspondant à son taux d'invalidité et, à titresubsidiaire, à la mise en oeuvre d'une expertise pluridisciplinaire. L'administration conclut au rejet du recours. L'Office fédéral des assurancessociales a renoncé à se déterminer. Considérant en droit: 1.1.1 Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente d'invalidité,singulièrement sur le taux à la base de cette prestation. 1.2 La loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit desassurances sociales (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003,entraînant la modification de nombreuses dispositions légales dans le domainede l'assurance-invalidité. Cependant, le cas d'espèce reste régi par lesdispositions de la LAI en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002, eu égard auprincipe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au momentoù les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 130 V 445).Pour les mêmes motifs, les dispositions de la novelle du 21 mars 2003modifiant la LAI (4ème révision), entrées en vigueur le 1er janvier 2004 (RO2003 3852) ne sont pas non plus applicables. 1.3 Le jugement entrepris expose correctement les normes et la jurisprudencerelatives à la notion d'invalidité (art. 4 aLAI), à son évaluation chez lesassurés actifs, ainsi qu'à la valeur probante des rapports médicaux. Ilsuffit donc d'y renvoyer sur ces points. 2.Des rapports médicaux versés au dossier, il ressort que la recourante souffrede douleurs constantes et diffuses dans la nuque, les épaules, ainsi que dansles régions dorsales et lombaires. Aucune atteinte somatique significativen'ayant été décelée, la quasi-totalité des praticiens consultés, y compris ledocteur I.________, médecin-conseil de l'intimé, a posé le diagnostic defibromyalgie ou polyinsertionite. 2.1 En l'état actuel des connaissances, le Tribunal fédéral des assurances arécemment décidé qu'il se justifiait, sous l'angle juridique, d'appliquer paranalogie les principes développés par la jurisprudence en matière de troublessomatoformes douloureux, lorsqu'il s'agissait d'apprécier le caractèreinvalidant d'une fibromyalgie (cf. Arrêt S. du 8 février 2006, I 336/04,destiné à la publication dans le Recueil Officiel.Ces deux atteintes à la santé présentent en effet des points communs. Leursmanifestations cliniques sont pour l'essentiel similaires (plaintesdouloureuses diffuses; pour la définition du trouble somatoforme douloureux,cf. F 45.4 CIM-10), raison pour laquelle il n'est pas rare de voir certainsmédecins poser indistinctement l'un ou l'autre diagnostic ou assimiler lafibromyalgie au trouble somatoforme douloureux. Dans un cas comme dansl'autre, il n'existe pas non plus de pathogenèse claire et fiable pouvantexpliquer l'origine des douleurs, ce qui rend la limitation de la capacité detravail difficilement mesurable, celle-ci ne pouvant être déduite du simplediagnostic posé. Enfin, un diagnostic de fibromyalgie ou de troublesomatoforme douloureux ne renseigne pas sur l'intensité des douleursressenties par la personne concernée, ni sur leur évolution ou sur lepronostic que l'on peut poser dans un cas concret. Certains auteurs déclarentd'ailleurs que la plupart des patients atteints de fibromyalgie ne setrouvent pas notablement limités dans leurs activités (cf. WolfgangHausotter, Begutachtung somatoformer und funktionneller Störungen, 2ème éd.Urban et Fischer, Munich 2004, p. 119; Karl C. Mayer, Fibromyalgie -Stichworte zu einer Kontroverse, soushttp://www.neuro24.de/fibromyalgie.htm). 2.22.2.1En règle générale, les troubles somatoformes douloureux n'entraînent pasune limitation de longue durée de la capacité de travail pouvant conduire àune invalidité (cf. ATF 130 V 354 consid. 2.2.3). Il existe une présomptionselon laquelle ceux-ci ou leurs effets peuvent être surmontés par un effortde volonté raisonnablement exigible (ATF 131 V 50). Au regard de ce quiprécède, il y a lieu de poser la même présomption en présence d'unefibromyalgie. 2.2.2 Cependant, le Tribunal fédéral des assurances a reconnu qu'il existaitdes facteurs déterminés qui, par leur intensité et leur constance, rendaientla personne incapable de fournir cet effort de volonté et établi des critèrespermettant d'apprécier le caractère invalidant des troubles somatoformesdouloureux (cf. ATF 130 V 354, 131 V 50). Il est légitime d'admettre que cescirconstances sont également susceptibles de fonder exceptionnellement unpronostic défavorable dans les cas de fibromyalgie. A cet égard, on retiendrala présence d'une comorbidité psychiatrique importante par sa gravité, sonacuité et sa durée. Peut constituer une telle comorbidité un état dépressifmajeur (en matière de troubles somatoformes douloureux, cf. ATF 130 V 358consid. 3.3.1 et la référence). Parmi les autres critères déterminants,doivent être considérés comme pertinents et transposables au contexte de lafibromyalgie, un processus maladif s'étendant sur plusieurs années sansrémission durable (symptomatologie inchangée ou progressive), des affectionscorporelles chroniques, une perte d'intégration sociale dans toutes lesmanifestations de la vie et l'échec de traitements ambulatoires oustationnaires conformes aux règles de l'art (même avec différents types detraitement), cela en dépit de l'attitude coopérative de la personne assurée.En présence d'une comorbidité psychiatrique, il sera également tenu compte del'existence d'un état psychique cristallisé résultant d'un processusdéfectueux de résolution du conflit, mais apportant un soulagement du pointde vue psychique (profit primaire tiré de la maladie, fuite dans la maladie).Enfin, comme dans les cas de troubles somatoformes douloureux, on conclura àl'absence d'atteinte à la santé ouvrant droit aux prestations d'assurance, siles limitations liées à l'exercice d'une activité résultent d'une exagérationdes symptômes ou d'une constellation semblable (par exemple une discordanceentre les douleurs décrites et le comportement observé, l'allégationd'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, l'absence dedemande de soins, de grandes divergences entre les informations fournies parle patient et celles ressortant de l'anamnèse, le fait que des plaintes trèsdémonstratives laissent insensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourdshandicaps malgré un environnement psychosocial intact). 2.3 Une expertise psychiatrique est, en principe, nécessaire quand il s'agitde se prononcer sur l'incapacité de travail que les troubles somatoformesdouloureux sont susceptibles d'entraîner (ATF 130 V 353 consid. 2.2.2 et 399consid. 5.3.2). Quand bien même le diagnostic de fibromyalgie est d'abord lefait d'un médecin rhumatologue, il convient ici aussi d'exiger le concoursd'un médecin spécialiste en psychiatrie, d'autant plus que les facteurspsychosomatiques ont, selon l'opinion dominante, une influence décisive surle développement de cette atteinte à la santé. Une expertiseinterdisciplinaire tenant à la fois compte des aspects rhumatologiques etpsychiques apparaît donc la mesure d'instruction adéquate pour établir demanière objective si l'assuré présente un état douloureux d'une gravité telleque la mise en valeur de sa capacité de travail sur le marché du travail nepeut plus du tout ou seulement partiellement être exigible de sa part (cf.aussi P. Henningsen, Zur Begutachtung somatoformer Störungen in: Praxis94/2005, p. 2007 ss). On peut réserver les cas où le médecin rhumatologue estd'emblée en mesure de constater, par des observations médicales concluantes,que les critères déterminants ne sont pas remplis, ou du moins pas d'unemanière suffisamment intense, pour conclure à une incapacité de travail. 3.Au regard des principes qui ont été développés, il s'agit d'examiner si lesrapports figurant au dossier permettent de statuer à satisfaction de droitsur le caractère invalidant de la fibromyalgie diagnostiquée. 3.1 Il ressort desdits rapports que la recourante souffre, sans qu'uneexagération des symptômes n'ait jamais été constatée, de douleurs auxvertèbres cervicales et lombaires, de céphalées, de troubles dysthymiquesendoréactionnels, d'une personnalité instable, de troubles compulsifs ducomportement alimentaire (crises boulimiques), d'un état dépressif chroniqued'intensité moyenne à légère, de troubles du sommeil et de phobie sociale. Les investigations médicales pratiquées n'ont révélé aucune atteintesomatique pouvant expliquer cet état de santé (absence de pathologie osseuse,des tissus mous et de hernies discales). Cette symptomatologie douloureusesans substrat organique objectivable a amené la très grande majorité desmédecins consultés, y compris le docteur I.________, à poser le diagnostic depolyinsertionite ou de fibromyalgie. On notera que ce diagnostic n'a pasvarié depuis le dépôt de la demande et que les médecins n'ont constaté aucunchangement, sur le plan physique en tout cas (modifications vertébralesdégénératives mineures; pour le surplus, examens neurologiques, radiologiqueset de laboratoire dans les normes), à l'exception de périodes de crise et derémission. On ne possède par ailleurs que peu d'informations sur la vie sociale del'intéressée. Il apparaît malgré tout que la vie familiale quotidienne estqualifiée de bonne globalement et que l'entente est plus que satisfaisante.Enfin, si la recourante a adopté une attitude coopérante, il n'en demeure pasmoins, selon le docteur J.________, qu'elle reste dans l'attentisme passifd'une guérison qui tarde à venir, vivant sa condition, si ce n'est aveccomplaisance, en tout cas avec une parfaite intégration; elle manque dedétermination à mettre tout en oeuvre afin de reprendre une activitécompatible avec son état et de poursuivre l'effort raisonnable en vue derecouvrer sa capacité de gain (cf. ATF 123 V 233 consid. 3c, 117 V 278consid. 2b, 400 consid. 4b et les arrêts cités). 3.2 Les médecins du COMAI, sans qu'il ne soit possible de mettre en douteleur objectivité ou de suspecter une éventuelle prévention à l'égard del'intéressée (cf. ATF 124 V
175; arrêt B. du 26 juillet 2002 [I 19/02]), ontretenu une incapacité d'au plus 30 % tant dans l'ancien métier d'employée debanque que dans l'activité de ménagère. Le rapport d'expertise prend enconsidération les plaintes de la recourante; il a été établi en pleineconnaissance de l'anamnèse; la description du contexte médical etl'appréciation de la situation médicale sont claires; les conclusions sontdûment motivées (cf. ATF 125 V 352 consid. 3a). Les experts ont relevé quel'intéressée présentait une pathologie centrée sur des troublesrhumatologiques (limités, sans grande évolution depuis 1995 et clairementsous influence psychique) et psychiatriques (dépression réactionnelle,n'ayant jamais atteint le niveau de gravité le plus élevé). Outre la présencede tous les «tender points» nécessaires pour diagnostiquer une fibromyalgie,ils ont aussi noté la quasi normalité de tous les examens (neurologiques,radiographiques et de laboratoire) pratiqués et l'existence de périodes derémission durant lesquelles la recourante ne présentait pas depsychopathologies invalidantes particulières. Tous les autres médecins consultés, antérieurement ou postérieurement àl'établissement du rapport d'expertise COMAI, ont abouti à des diagnosticsidentiques. Seules divergent leurs conclusions se rapportant à l'évaluationde la capacité de travail. Cette différence, étant donné la concordance de latotalité des avis émis sur les autres points, ne justifie pas d'écarter l'unou l'autre rapport au motif que sa valeur probante serait inférieure.Cependant, dans la mesure où la grande majorité des praticiens consultésdirectement par l'intéressée, dont on sait, par expérience, qu'ils sontenclins à prendre parti pour leur patient en raison de la relation deconfiance qui les unit (cf. ATF 125 V 353 consid. 3b/cc), s'est contentée deretenir une incapacité totale de travail, voire de 50 %, sans motiver plusavant leurs conclusions, il n'y pas lieu de prendre en considération leursopinions à ce sujet (cf. notamment les rapports des docteurs P.________,U.________, Z.________ et F.________, ainsi que L.________ des 3 et 15 août1995, 16 juillet et 29 décembre 1996 et 19 septembre 2000).On retiendra de surcroît que le docteur J.________ admettait, en 1995 déjà,qu'au vu des rachialgies et céphalées incontestables, mais aussi de l'absencede causes anatomiques et de la psychothérapie en cours, une capacitérésiduelle de travail d'au moins 50 % (dès le 15 janvier 1996), pouvant allerjusqu'à 100 % ultérieurement (dès le 15 février 1996), était exigible; seulun état dépressif majeur aurait été susceptible de justifier un tauxinférieur à 50 %, ce qui n'était pas le cas et ne l'a jamais été. Le docteurL.________, quant à lui, ne voyait pas de contre-indications professionnellesdues spécifiquement à la fibromyalgie et à la dépression chronique, maisestimait qu'en raison du retrait prolongé du monde du travail, critèreéconomique et non médical dont l'assurance-invalidité n'a pas à répondre, ons'acheminait vers une invalidité totale (sur le rôle du médecin, cf. ATF 125V 261 consid. 4, 115 V 134 consid. 2, 114 V 314 consid. 3c, 105 V 158 consid.1). Au regard de ce qui précède, il n'existe donc aucun motif permettant des'écarter de l'évaluation de la capacité de travail faite par les experts duCOMAI. 3.3 La recourante reproche encore à la juridiction cantonale de ne pas avoirpris en considération la péjoration de son état de santé survenue depuis lafin de l'année 1999 («aucun fait nouveau sur le plan médical n'est postérieurau 3 mai 2001 [...] il ne s'agit que de l'aggravation inexorable des élémentsconstatés depuis longtemps déjà»). Son argumentation est une nouvelle fois erronée. Le rapport du 15 janvier2003 de la doctoresse S.________ fait certes référence à des élémentsantérieurs à la décision litigieuse (diagnostics), connus et admis par sesconfrères, mais il est avant tout axé sur les plaintes existantes au momentde son établissement, sur des examens physiques et de laboratoires actuels etsur l'évolution des handicaps depuis le mois d'octobre 2002 (état dépressifmarqué et syndrome fibromyalgique «dans une phase douloureuse importante»).Les mêmes remarques sont valables pour le rapport du 24 avril 2002 du docteurL.________; si le diagnostic posé est bel et bien identique à celui figurantdans son rapport du 19 septembre 2000, il mentionne toutefois expressémentque la capacité de travail de l'intéressée est nulle, «pour le moment», etqu'une reprise de l'activité est quasi insurmontable en raison de l'arrêt detravail conséquent. Les appréciations apportées par les deux médecins dansleur rapport respectif constituent donc des faits dont il ne peut être tenucompte. En effet, le Tribunal fédéral des assurances apprécie la légalité desdécisions attaquées, en règle générale, d'après l'état de fait existant aumoment où elles ont été rendues (ATF 121 V 366 consid. 1). Les faits survenuspostérieurement et qui ont modifié la situation doivent normalement fairel'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 117 V 293 consid. 4). Quant au rapport du 28 mai 2001 de la doctoresse V.________, il faiteffectivement référence à la période antérieure à la décision litigieuse(amélioration, puis péjoration de l'état dépressif et des troublesalimentaires), mais n'apporte aucun élément qui ne soit déjà connu; lesmédecins du COMAI parlait également de périodes de rémission et de périodesde crise. En définitive, les rapports médicaux produits entre la date de l'expertise etla décision litigieuse n'établissent pas de péjoration de l'état de santé,mais laissent penser, au contraire, que la situation est restée stable, toutcomme elle l'était depuis 1995. Le seul élément nouveau est le trouble ducomportement alimentaire, présent depuis quinze ans aux dires de ladoctoresse V.________ et dont il est fait mention pour la première fois dansle rapport du 30 août 2000 de la division de psychiatrie de liaison del'Hôpital X.________. La doctoresse V.________, qui a suivi la recourante en1992 et 1993, puis à partir de 1999, n'a pas jugé utile de le mentionnerauparavant. Au regard de ce qui précède, rien ne permet de dire que l'état de santé sesoit dégradé de manière telle qu'il ne corresponde plus, au moment de ladécision litigieuse, à celui qui avait été constaté au moment de l'expertise. 3.4 L'intéressée critique encore l'évaluation de son invalidité.Reconnaissant certes l'influence réciproque de la fibromyalgie et destroubles psychiques, mais constatant que les médecins mandatés par le COMAIavaient oeuvré de manière totalement indépendante et que chacun d'eux avaitretenu un taux d'incapacité de l'ordre de 20 à 25 %, elle soutenait que sonincapacité globale ne pouvait être que bien supérieur au taux retenu, même siselon les experts, les incapacités de travail ne pouvaient pas simplements'additionner. Cette argumentation est erronée dans la mesure où ce sontd'autres médecins qui ont fait une pondération des examens pratiqués par lesdocteurs E.________ et M.________. Bénéficiant d'une vision globale, ils ontintégré les différentes informations (troubles rhumatologiques limités, sansgrande évolution depuis 1995 et clairement sous influence psychique,dépression n'ayant jamais atteint le niveau de gravité le plus élevé, etc.)pour aboutir au taux de 25 à 30 % d'incapacité de travail.Au regard de tout ce qui précède, on ne saurait dès lors tenir pour établi,au degré de la vraisemblance prépondérante (cf. ATF 126 V 360 consid. 5b, 125V 195 consid. 2 et les références), que les affections dont souffre larecourante sont d'une intensité telle qu'elles entraînent, globalement, uneincapacité de travail - et de gain - de 40 % ou plus, ouvrant droit à unerente, un abattement approprié tenant suffisamment compte des limitationsliées aux handicaps de l'intéressée étant déjà compris dans cette évaluation. 4.Le dossier contenant en outre suffisamment d'indications médicales fiables,dont une expertise pluridisciplinaire motivée et convaincante, il ne sejustifie pas de mettre en oeuvre une mesure d'instruction complémentairetelle que requise. Le recours se révèle ainsi en tout point mal fondé. 5.La procédure est gratuite, dès lors qu'elle porte sur l'octroi ou le refus deprestations d'assurance (art. 134 OJ). La recourante, qui n'obtient pas gainde cause, ne saurait prétendre à une indemnité de dépens (art. 159 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Il n'est pas perçu de frais de justice. 3.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal desassurances sociales et à l'Office fédéral des assurances sociales. Lucerne, le 3 avril 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances La Présidente de la IIe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.652/04
Date de la décision : 03/04/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-04-03;i.652.04 ?
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