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29/03/2006 | SUISSE | N°4C.8/2006

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 29 mars 2006, 4C.8/2006


{T 0/2}4C.8/2006 /ech Arrêt du 29 mars 2006Ire Cour civile MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Klett et Favre.Greffière: Mme Crittin. A. ________,défenderesse et recourante, représentée par Me Pierre-Bernard Petitat, contre Fondation X.________,demanderesse et intimée. contrat de bail à loyer; évacuation pour défaut de paiement, recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre d'appel en matière de baux etloyers du canton de Genève du14 novembre 2005. Faits: A.Par contrat de bail à loyer pour habitation du 24 juillet 1997, A.________ apris à bail un appartement de deux pièc

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{T 0/2}4C.8/2006 /ech Arrêt du 29 mars 2006Ire Cour civile MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Klett et Favre.Greffière: Mme Crittin. A. ________,défenderesse et recourante, représentée par Me Pierre-Bernard Petitat, contre Fondation X.________,demanderesse et intimée. contrat de bail à loyer; évacuation pour défaut de paiement, recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre d'appel en matière de baux etloyers du canton de Genève du14 novembre 2005. Faits: A.Par contrat de bail à loyer pour habitation du 24 juillet 1997, A.________ apris à bail un appartement de deux pièces et demie, situé au cinquième étaged'un immeuble, à Genève. Au moment de la conclusion du contrat, l'immeubleappartenait à la SI Y.________. En 1998, l'immeuble en question est devenupropriété de Z.________ S.A., puis, en septembre 2002, de la FondationX.________, entreprise de droit public de siège à Genève. Le loyer s'élevaità 1'021 fr. par mois, charges comprises. Dès le mois de juin 1999, A.________ a consigné son loyer; elle se plaignaitd'une perte de jouissance de son logement, en raison de salissures, demauvaises odeurs et de la présence de blattes. Par décision du 12 septembre2000, la Commission de conciliation en matière de baux et loyers a notammentconstaté que le loyer avait été valablement consigné à concurrence de 50% dèsle 1er juin 1999 jusqu'à complète exécution des travaux; elle a égalementréduit le loyer à raison de 20% pour la période du 1er septembre 1998 au 30avril 2000. Par la suite, la locataire a continué à consigner les loyers.Toutefois, leur paiement s'est opéré de manière irrégulière, certains moisétant versés à la régie et d'autres n'étant tout simplement pas acquittés. Plusieurs autres procédures devant la Commission de conciliation, ainsi quedevant le Tribunal des baux et loyers, ont été introduites, sans pour autantêtre menées à terme par les parties. B.B.aPar avis comminatoire du 12 octobre 2004, la bailleresse a mis lalocataire en demeure de régler dans les trente jours le montant de 13'364 fr.à titre d'arriéré de loyers et de charges à cette date. Elle lui signifiaitégalement qu'à défaut de paiement intégral dans ce délai, le bail seraitrésilié conformément à l'art. 257d CO. Par avis officiel du 22 novembre 2004, notifié le 25 suivant, la bailleressea résilié le bail pour le 31 décembre 2004.Le 29 décembre 2004, A.________ a saisi la Commission de conciliationcompétente, afin de contester le congé qui lui avait été notifié. En cours deprocédure, elle a formé une demande de réduction de loyer. Par requêtedéposée le 14 janvier 2005 devant cette même autorité, la FondationX.________ (ci-après: la demanderesse) a sollicité l'évacuation de lalocataire des locaux non libérés à l'échéance du bail. B.b Non conciliées, ces deux causes ont été régulièrement portées devant leTribunal des baux et loyers du canton de Genève, où elles ont été jointes pardécision présidentielle du 4 avril 2005. Par jugement rendu le 15 juin 2005, le Tribunal des baux et loyers a déclaréirrecevable la demande de A.________ en annulation du congé expédié le 22novembre 2004, de même que sa demande additionnelle en réduction de loyer. Letribunal a constaté la validité de l'avis de résiliation signifié le 22novembre 2004 pour le 31 décembre 2004 et, enfin, condamné A.________(ci-après: la défenderesse) à évacuer immédiatement de sa personne et de sesbiens l'appartement loué. B.c La défenderesse ayant appelé du jugement, la Chambre d'appel en matièrede baux et loyers s'est prononcée le 14 novembre 2005. Elle a confirmé lejugement entrepris et condamné la défenderesse à verser à l'Etat de Genève unémolument de 300 francs. En substance, l'autorité cantonale a considéré que les premiers juges ontexaminé la validité du congé conformément à la loi. En ce qui concerne plusparticulièrement la créance de la bailleresse, telle que figurant dans l'aviscomminatoire et contestée par la partie adverse, il ressort du jugementattaqué que la défenderesse a reconnu n'avoir pas régulièrement payé sonloyer ou consigné celui-ci et ainsi devoir à la demanderesse un certainmontant - lequel a varié en cours de procédure - à titre de loyer. Ainsi, ladéfenderesse a admis devoir 1'317 fr., le 28 octobre 2003, 921 fr., le 20septembre 2004, 2'317 fr., dans sa demande de contestation de congé ou encore5'369 fr.10 dans ses conclusions motivées. En sus, sur la base des piècesversées en cause, les magistrats ont souligné le défaut de justificatif depaiement concernant plusieurs mois des années 2002, 2003 et 2004, tout enrelevant l'absence de contestation de la défenderesse sur le fait qu'aucunpaiement n'est intervenu dans le délai comminatoire. S'agissant del'objection de compensation soulevée par la défenderesse, l'instancecantonale a arrêté que, même si elle avait été soulevée à temps à hauteur ducoût des travaux, du montant de la franchise d'assurance pour des dégâtsd'eau et de l'excédent des charges à hauteur de 600 fr., ces montants avaientdéjà été pris en compte dans le calcul des montants reconnus. Pour le reste,la défenderesse n'a pas établi avoir invoqué d'autres créances compensatoiresdans le délai comminatoire, dont en particulier la réduction de loyer de 35%.Ainsi, les juges cantonaux sont arrivés à la conclusion que le congé a àjuste titre été tenu pour efficace, indépendamment du fait que la créance dela bailleresse était ou non inférieure au montant réclamé dans l'aviscomminatoire. C.La défenderesse interjette un recours en réforme contre ce dernier prononcé.Elle conclut à sa réforme et à sa mise à néant, tout en invitant le Tribunalfédéral à constater l'inefficacité du congé donné le 22 novembre 2004, à direqu'il convient de déterminer le montant éventuellement dû par elle-même aubailleur à titre d'arriérés de loyer, préalablement à un avis comminatoire ausens de l'art. 257d CO et, subsidiairement, à annuler ledit congé ouconstater la nullité de celui-ci. Plus subsidiairement encore, elle sollicitele renvoi de la cause à l'autorité judiciaire cantonale pour nouvelledécision. A l'appui de son recours, la défenderesse fait grief à la Chambred'appel d'avoir violé le droit fédéral, plus particulièrement les art. 124,257d et 273 CO. La demanderesse propose le rejet du recours, sous suite de frais et dépens. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.1.1 Le jugement prononçant l'évacuation du locataire pour défaut de paiementdu loyer selon les règles de la procédure genevoise doit être considéré commeune décision finale au sens de l'art. 48 al. 1 OJ, ouvrant la voie du recoursen réforme (art. 48 al. 1 OJ; arrêt 4C.129/2005 du 5 août 2005, consid. 1.1;arrêt 4C.413/1996 du 27 février 1997, SJ 1997 538 consid. 1b). Le litige est de nature pécuniaire. L'expulsion étant liée à une résiliationimmédiate, la valeur litigieuse se détermine selon le loyer dû pour lapériode durant laquelle le contrat subsiste nécessairement, en supposant quel'on admette la contestation, et qui s'étend jusqu'au moment pour lequel unnouveau congé aurait pu être donné ou l'a été effectivement (arrêt4C.155/2000 du 30 août 2000, SJ 2001 I 17 consid. 1a; 4C.310/1996 du 16 avril1997, SJ 1997 493 consid. 2a; 119 II 147 consid. 1; 111 II 384 consid. 1;Bernard Corboz, Le recours en réforme au Tribunal fédéral, SJ 2000 II 1ss, p.28 ad note 226). Pour déterminer la prochaine échéance possible, il faut doncsupposer que l'on admette la contestation, c'est-à-dire que le congélitigieux ne soit pas valable. Lorsque le bail bénéficie de la protectioncontre les congés des art. 271 ss CO, il convient, sauf exceptions, deprendre en considération la période de trois ans prévue à l'art. 271a al. 1let. e CO (cf. arrêt 4C.155/2000 du 30 août 2000, SJ 2001 I 17 consid. 1a;4C.310/1996 du 16 avril 1997, SJ 1997 493 consid. 2a). Le délai de protectioncourt à compter de la fin de la procédure judiciaire, c'est-à-dire enl'espèce à compter de l'arrêt du Tribunal fédéral (art. 38 OJ). Compte tenudu montant du loyer en cause, il n'est pas douteux que la valeur litigieusede 8'000 fr. est atteinte. Interjeté par la partie condamnée à évacuer les locaux loués et dirigé contreun jugement final rendu en dernière instance cantonale par un tribunalsupérieur (art. 48 al. 1 OJ) sur une contestation civile dont la valeurlitigieuse atteint le seuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ), le recours en réformeest en principe recevable, puisqu'il a été déposé en temps utile (art. 54 al.1 OJ). Il y a lieu, partant, d'entrer en matière sur le recours etd'examiner, le cas échéant, la recevabilité des griefs articulés par ladéfenderesse. 1.2 Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral, maisnon pour violation directe d'un droit de rang constitutionnel (art. 43 al. 1OJ) ou pour violation du droit cantonal (ATF 127 III 248 consid. 2c). L'actede recours doit contenir les motifs à l'appui des conclusions; il doitindiquer succinctement quelles sont les règles de droit fédéral violées parla décision attaquée et en quoi consiste cette violation (art. 55 al. 1 let.c OJ). 1.3 Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire sonraisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décisionattaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aientété violées, qu'il y ait lieu à rectification de constatations reposant surune inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter lesconstatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu comptede faits pertinents, régulièrement allégués et clairement établis (art. 64OJ; ATF 130 III 102 consid. 2.2). 2.La défenderesse reproche tout d'abord à la Chambre d'appel en matière de bauxet loyers, dans une argumentation confuse, d'avoir déclaré irrecevable sademande, lors même qu'il appartenait "à la Cour, sur la base de sesconsidérants, à réformer le jugement du Tribunal inférieur et, statuant ànouveau, constater que le congé était efficace dans le cas d'espèce". Quant bien même la défenderesse fait état dans son grief d'une violation desart. 257d et 273 CO, elle n'expose pas, d'une manière conforme à l'art. 55al. 1 let. c OJ, en quoi ces dispositions légales auraient été mal appliquéespar l'autorité cantonale. Sur ce point, le grief est irrecevable. En sus,contrairement à ce que semble soutenir la défenderesse, la Chambre d'appelest bien entrée en matière sur les conditions de validité du congé, ce quin'a du reste pas échappé à la défenderesse qui a remis en cause l'efficacitédu congé dans un grief séparé. 3.Ainsi, la défenderesse soutient que la Chambre d'appel a enfreint l'art. 257dCO pour avoir constaté l'efficacité du congé notifié. A son sens, l'autoritécantonale aurait dû tenir le congé en question pour inefficace, dès lors quele montant réclamé par la bailleresse n'était manifestement pas conforme auxsommes éventuellement dues. Vu la situation "très embrouillée", ilappartenait à la bailleresse de faire déterminer, dans un premier temps, lemontant de son hypothétique créance contre la locataire, l'éventuel retarddans le paiement du loyer n'étant ni certain, ni déterminé. 3.1 A teneur de l'art. 257d al. 1 CO, lorsque, après réception de la chose,le locataire a du retard pour s'acquitter d'un terme ou de frais accessoireséchus, le bailleur peut lui fixer par écrit un délai de paiement et luisignifier qu'à défaut de paiement dans ce délai il résiliera le bail. Ledélai doit être d'au moins trente jours pour les baux d'habitations. L'art.257d al. 2 CO dispose que, faute de paiement dans le délai fixé, les bauxd'habitations peuvent être résiliés moyennant un délai de congé minimum detrente jours pour la fin d'un mois. En principe, le locataire en retard dans le paiement de son loyer est endemeure, ce qui justifie l'application de la procédure prévue à l'art. 257dCO (cf. ATF 119 II 232 consid. 3; Peter Higi, Commentaire zurichois, n. 12 adart. 257d CO). Tel n'est toutefois pas le cas lorsque le bailleur estlui-même en demeure (art. 91 CO), lorsque le locataire a valablement consignéle loyer (art. 259g al. 2 CO) ou lorsque la compensation est invoquée à temps(art. 124 al. 1 CO; ATF 119 II 241 consid. 6b/bb; David Lachat, Commentaireromand, n. 7 ad art. 257d CO). 3.2 Selon l'état de fait cantonal qui lie la juridiction de réforme, ladéfenderesse a reconnu n'avoir pas régulièrement payé son loyer ou consignécelui-ci et n'avoir pas plus procédé à un quelconque paiement dans le délaicomminatoire imparti. Elle a donc admis être en demeure, ce qui en principe,sous réserve de l'objection de compensation soulevée, justifie l'applicationde la procédure prévue à l'art. 257d CO. A cet égard, il importe peu, commel'a relevé à juste titre la Chambre d'appel, que le montant articulé par lademanderesse était supérieur à celui reconnu par la défenderesse. 4.4.1Pour contester s'être trouvée en demeure de payer le loyer, ladéfenderesse a objecté, devant les juridictions cantonales, de lacompensation. La Chambre d'appel a écarté ce moyen. Cette autorité a certesarrêté que la compensation a été soulevée à temps à hauteur du coût destravaux, du montant de la franchise d'assurance pour des dégâts d'eau, ainsique pour l'excédent des charges à concurrence de 600 francs. Toutefois, dansla mesure où ces éléments ont déjà été pris en considération dans le calculdes montants reconnus par la défenderesse, les juges cantonaux ont concluqu'ils ne sauraient valablement être portés une nouvelle fois en déductiondes loyers dus. Pour le reste, il a été retenu que la défenderesse n'avaitpas justifié avoir invoqué d'autres créances compensatoires dans le délaicomminatoire, dont en particulier la réduction de loyer de 35%. Relativement à cette objection, la défenderesse fait état d'une mauvaiseapplication de l'art. 124 CO. De son point de vue, c'est à tort que laChambre d'appel a retenu que la défenderesse n'avait pas fait connaître sonintention d'invoquer la compensation. 4.2 L'art. 124 CO prévoit en son premier alinéa que la compensation n'a lieuqu'autant que le débiteur fait connaître au créancier son intention del'invoquer. ll s'agit là d'une déclaration de volonté formatrice, qui doitexprimer de manière non équivoque l'intention de compenser de son auteur(arrêt 4C.65/2003 du 23 septembre 2003, consid. 3.3; arrêt 4C.174/1999 du 14juillet 1999, consid. 2b et les références, SJ 2000 I 78).Savoir s'il y a eu ou non une déclaration de compensation pendant le délai degrâce est une question de fait. Partant, la juridiction fédérale de réformeest liée par la réponse négative que les juges précédents ont apporté à cettequestion (art. 63 al. 2 OJ) en lien avec la réduction de loyer de 35% - etnon pas de 20% tel que nouvellement allégué par la défenderesse dans sonécriture de recours. L'objection de compensation s'en trouve dès lors privéede tout fondement, la défenderesse n'ayant par ailleurs pas remis en cause laprise en compte des montants valablement objectés en compensation dans lecalcul de ceux reconnus par la locataire. 5.Force est, enfin, d'admettre que la demanderesse a respecté
le délai desommation fixé par l'art. 257d al. 1 CO, lorsqu'elle a invité ladéfenderesse, le 12 octobre 2004, à lui payer dans les trente jours la sommede 13'364 fr. à titre d'arriéré de loyers et de charges. La bailleresse s'estaussi conformée aux exigences de l'art. 257d al. 2 CO en résiliant le bail le22 novembre 2004 pour l'échéance du 31 décembre 2004. Il s'ensuit que legrief de violation de l'art. 257d CO ne saurait être retenu. 6.Les considérants qui précèdent commandent le rejet du recours, dans la mesurede sa recevabilité. 7.La défenderesse, qui succombe, paiera l'émolument judiciaire et versera à lademanderesse une indemnité à titre de dépens (art. 156 al. 1 et 159 al. 1OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 2.L'émolument de justice, arrêté à 2'000 fr., est mis à la charge de larecourante. 3.La recourante versera à l'intimée une indemnité de 2'500 fr., à titre dedépens. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et à la Chambre d'appelen matière de baux et loyers du canton de Genève. Lausanne, le 29 mars 2006 Au nom de la Ire Cour civiledu Tribunal fédéral suisse Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.8/2006
Date de la décision : 29/03/2006
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-03-29;4c.8.2006 ?
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