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27/03/2006 | SUISSE | N°B.131/05

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 27 mars 2006, B.131/05


{T 7}B 131/05 Arrêt du 27 mars 2006IVe Chambre MM. et Mme les Juges Ursprung, Président, Widmer et Frésard. Greffière : MmeBerset S.________, recourante, représentée par Me Mauro Poggia, avocat, rueDe-Beaumont 11, 1206 Genève, contre Caisse de pensions X.________, intimée, représentée par Me Jacques-AndréSchneider, avocat, rue du Rhône 100, 1204 Genève Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève (Jugement du 1er novembre 2005) Faits: A.S. ________ a travaillé à temps partiel en qualité de professeur de françaisauprès de l'Ecole X.________ du 6 septembre 1999 au 31 janv

ier 2003. A cetitre, elle a été affiliée à la Caisse de pensions X...

{T 7}B 131/05 Arrêt du 27 mars 2006IVe Chambre MM. et Mme les Juges Ursprung, Président, Widmer et Frésard. Greffière : MmeBerset S.________, recourante, représentée par Me Mauro Poggia, avocat, rueDe-Beaumont 11, 1206 Genève, contre Caisse de pensions X.________, intimée, représentée par Me Jacques-AndréSchneider, avocat, rue du Rhône 100, 1204 Genève Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève (Jugement du 1er novembre 2005) Faits: A.S. ________ a travaillé à temps partiel en qualité de professeur de françaisauprès de l'Ecole X.________ du 6 septembre 1999 au 31 janvier 2003. A cetitre, elle a été affiliée à la Caisse de pensions X.________. Le 15 décembre2000, elle a rempli et signé à l'intention de la Caisse de pensionsX.________ une formule intitulée « Déclaration de santé » contenant une sériede questions. A la question 1 « Etes-vous aujourd'hui en bonne santé etentièrement apte au travail, sans restriction due à votre santé, etétiez-vous également dans cet état durant les 12 derniers mois? », elle acoché d'une croix la case « oui » en précisant néanmoins sous une rubrique «Nature de vos ennuis de santé »: « Accidentée, entorse de la cheville ». A laquestion 2 « Souffrez-vous d'une maladie chronique (par exemple du diabète,d'hypertension) ou souffrez-vous des suites d'une maladie ou d'un accidentantérieurs? », elle a également coché d'une croix la case « oui » enprécisant qu'elle souffrait d'hypothyroïdie. Elle a encore indiqué,concernant la question 4 relative à la prise de médicaments, qu'elle prenaitde l'Eltroxine, prescrit par le docteur J.________ et de la Fluctine, àraison d'un comprimé par jour, prescrite par la doctoresse K.________. A partir du mois de février 2002, S.________ a été totalement oupartiellement incapable de travailler, en raison, notamment, d'un AVCthalamique antérieur gauche, d'un état dépressif, de fibromyalgie,d'hyperthyroïdie et d'atteinte ligamentaire des deux chevilles. Le 14décembre 2002, elle a été victime d'un accident vasculaire cérébral. Par décision du 2 septembre 2003, communiquée tant à l'assurée qu'à la Caissede pensions X.________, l'Office cantonal de l'assurance-invalidité a accordéà S.________ une rente entière d'invalidité, à partir du 1er février 2003,fondée sur un taux d'invalidité de 100 pour cent. Cette prestation étaitassortie d'une rente complémentaire pour conjoint et de trois rentes pourenfants. Par lettre du 25 février 2004, la Caisse de pensions X.________ a écrit àS.________ pour l'informer que son médecin-conseil avait pris connaissance dudossier de l'assurance-invalidité et constaté que la « Déclaration de santé »remplie le 15 septembre 2000 était incomplète. Il était en particulierreproché à l'assurée de n'avoir pas mentionné qu'elle avait souffertprécédemment de dépression, de thrombose veineuse profonde, de fibromyalgieet de migraines. Aussi bien la Caisse de pensions X.________ déclarait-elledénoncer avec effet immédiat le contrat de prévoyance dans la mesure où il serapportait aux prestations dépassant le minimum obligatoire selon la LPP.Elle informait l'assurée que, dans ces limites, elle avait droit,mensuellement, à une rente d'invalidité de 107 fr. et de trois rentes pourenfant de 22 fr. chacune. B.Par écriture du 7 janvier 2005, S.________ a assigné la Caisse de pensionsX.________ en paiement, avec effet au 1er novembre 2003, des prestationsréglementaires, soit une rente d'invalidité de 276 fr. par mois, assortied'une rente pour chaque enfant de 109 fr. par mois, sous déduction desprestations légales déjà versées. La défenderesse a conclu au rejet de la demande. Après avoir procédé àdiverses mesures d'instruction, le Tribunal cantonal des assurances du cantonde Genève a rejeté la demande par jugement du 1er novembre 2005. C.S.________ interjette un recours de droit administratif dans lequel elleconclut à l'annulation du jugement cantonal et à l'admission de sesconclusions de première instance. La Caisse de pensions X.________.conclut aurejet de la demande. Quant à l'Office fédéral des assurances sociales, ilrenonce à se déterminer. Considérant en droit: 1.La Caisse de pensions X.________ est une institution de prévoyance pratiquantla prévoyance obligatoire et plus étendue (institution dite « enveloppante »:ATF 117 V 45 consid. 3b). Il n'est pas contesté que la recourante a droit à une rente d'invalidité autitre des prestations minimales obligatoires selon la LPP (art. 6 LPP). Estseul litigieux le droit à une rente d'invalidité plus élevée découlant de laprévoyance professionnelle plus étendue (art. 49 al. 2 LPP). 2.Dans le domaine de la prévoyance plus étendue, même après l'entrée en vigueurde la LFLP et des modifications du Code des obligations qu'elle a entraînées(art. 331a - c), les institutions de prévoyance sont fondées, en l'absence dedispositions statutaires et réglementaires idoines, à se départir du contratde prévoyance en cas de réticence de l'assuré par application analogique desart. 4 ss LCA (ATF 130 V 9). En l'espèce, cette possibilité est expressémentprévue à l'art. 57 du règlement de la Caisse de pensions X.________ (édition1998) qui prévoit, en particulier, qu'en cas d'infraction à l'obligationd'information, les prestations sont réduites au niveau obligatoire légal;selon cette disposition réglementaire, le délai pour se départir du contratest de six mois, de sorte que l'art. 6 LCA n'est pas applicable. En l'espèce,il n'est pas contesté que ce délai de six mois a été respecté. 3.3.1Pour juger si un assuré a commis ou non une réticence, on applique pour lesurplus, en l'absence de dispositions statutaires ou réglementaires idoines,les règles des art. 4 ss LCA (ATF 119 V 286 consid. 4, 116 V 218). Aux termes de l'art. 4 LCA, le proposant doit déclarer par écrit à l'assureursuivant un questionnaire ou en réponse à toutes autres questions écrites,tous les faits qui sont importants pour l'appréciation du risque tels qu'ilslui sont ou doivent lui être connus lors de la conclusion du contrat (al. 1).Sont importants tous les faits de nature à influer sur la détermination del'assureur de conclure le contrat ou de le conclure aux conditions convenues(al. 2). Sont réputés importants les faits au sujet desquels l'assureur aposé par écrit des questions précises, non équivoques (al. 3).Les faits en question sont tous les éléments qui doivent être pris enconsidération lors de l'appréciation du risque et qui peuvent éclairerl'assureur sur l'étendue du risque à couvrir; il ne s'agit donc pas seulementdes facteurs du risque, mais aussi des circonstances qui permettent deconclure à l'existence de facteurs de risque (ATF 116 V 226 consid. 5aet les références citées). D'après la jurisprudence, il résulte clairement du texte des art. 4 et 6 LCAqu'il ne faut adopter ni un critère purement subjectif, ni un critèrepurement objectif pour juger si le proposant a rempli ou non ses obligationsquant aux déclarations à faire. Du moment que la loi ne se contentepas de ce que le proposant, en réponse aux questions correspondantes,communique à l'assureur les faits importants pour l'appréciation du risquequi lui sont effectivement connus, mais prescrit en outre que le proposantdoit déclarer également les faits importants pour l'appréciation du risquequi doivent être connus de lui, cette loi institue un critèreobjectif (indépendant de la connaissance effective qu'a le proposant desfaits concrets). Toutefois, pour appliquer ce critère, on tiendra compte descirconstances du cas particulier, notamment des qualités (intelligence,formation, expérience) et de la situation du proposant. Ce qui est finalement décisif, c'est de juger si et dans quelle mesure leproposant pouvait donner de bonne foi une réponse déterminée à une questionde l'assureur, selon la connaissance qu'il avait de la situation et, le caséchéant, selon les renseignements que lui ont fournis des personnesqualifiées. Le proposant remplit l'obligation qui lui est imposée s'ildéclare, outre les faits qui lui sont connus sans autre réflexion, ceux quine peuvent pas lui échapper s'il réfléchit sérieusement aux questions del'assureur (sur ces divers points, voir ATF 116 V 226 consid. 5a et b, 116 II339 sv. consid. 1b et c). 3.2 En l'espèce, il est établi que la recourante, au moment où elle a signéla déclaration de santé, était en arrêt de travail depuis une quinzaine dejours en raison d'une entorse. Les premiers juges considèrent que, pour cetteraison déjà, elle a commis une réticence. La recourante objecte qu'elle asignalé, sous la question no 1, qu'elle souffrait d'une entorse à lacheville. Sa réponse devait être interprétée en ce sens qu'elle n'était pasapte à travailler en raison de cette atteinte à la santé.Cette objection n'est pas fondée. La recourante a clairement répondu parl'affirmative à la question lui demandant si elle était apte au travail et sielle l'avait également été dans les douze derniers mois. En signalant, enregard de la même question, l'existence d'une entorse à la cheville (sans enpréciser la date), elle donnait à penser que ce fait n'entraînait aucuneincapacité de travail et n'en avait pas provoquée dans les douze derniersmois. Comme le relèvent avec raison les premiers juges, la question de lacapacité de travail de l'assuré au moment où il remplit un questionnaire desanté est une question importante et précise qui appelle une réponse claire,affirmative ou négative. Peu importe, par ailleurs, que l'entorse ne soit enl'espèce pas la cause de l'invalidité qui est survenue ultérieurement (voirATF 109 II 64; Urs Ch. Nef, Basler Kommentar, Bundesgesetz über denVersicherungsvertrag [VVG], 2001, n. 55 ad art. 4 LCA). Du reste, selon ladoctoresse K.________, entendue en procédure cantonale, il existe unecertaine relation entre l'entorse et l'aggravation des troubles psychiques,attendu qu'à partir du mois de novembre 2000, la patiente a eu beaucoup depeine à supporter son état d'incapacité de travail, ce qui l'a conduite à «culpabiliser » puis, finalement à « déprimer »; c'est la limitation de lamobilité de sa cheville qui a fragilisé psychiquement l'intéressée. On doit donc admettre, avec les premiers juges, que la recourante a commisune réticence en ne signalant pas qu'elle était incapable de travailler aumoment où elle a rempli la « Déclaration de santé ». 3.3 Il est établi, également, que la recourante, à l'époque des faits,souffrait depuis 15 ans environ d'un état dépressif, pour lequel elle suivaitun traitement régulier auprès de la doctoresse K.________. Plus précisément,celle-ci a attesté à l'intention de l'office de l'assurance-invalidité que lapatiente souffrait de dépression mélancoliforme, de fibromyalgie et demigraines, cela «depuis des années», avec une péjoration en 2002. Certes, audire du médecin, ces affections n'ont provoqué une incapacité de travail qu'àpartir du mois de février 2002. Cependant, de par sa nature et sa durée, cetraitement psychiatrique est un fait important que, loyalement, la recourantene pouvait passer sous silence en pensant qu'elle n'intéressait pasl'institution de prévoyance. Il s'agit d'une maladie qui méritait d'êtresignalée sous chiffre 1 de la déclaration de santé (la requérante ne pouvaitse déclarer en bonne santé) ou sous chiffre 2 (relatif aux maladieschroniques). La recourante ne saurait prétendre que la question 1 n'étaitguère intelligible. Les termes étaient suffisamment clairs pour que tout unchacun - et surtout une professeure de français - soit à même de donner lesinformations voulues : il s'agissait pour la requérante de dire si elle étaiten bonne santé et entièrement apte à travailler. Sans doute la recourante a-t-elle signalé sous chiffre 4 («Prenez-vous desmédicaments?») qu'elle prenait de la Fluctine - qui est un antidépresseur - àraison d'un comprimé par jour, sur prescription de la doctoresse K.________.Mais, compte tenu des réponses données aux chiffres précédents, cetteindication - prise d'un médicament à sa dose minimale (cf. Compendium suissedes médicaments 2003) - était loin d'évoquer un suivi psychiatrique de quinzeans pour un état dépressif qui ne peut être qualifié ni de léger ni depassager, pour une fibromyalgie, ainsi que pour des migraines. Le fait queles douleurs attribuées à la fibromyalgie ont disparu depuis l'accidentcérébral et que la recourante ne souffrait plus de fybromyalgie en 2004(rapport de la doctoresse L.________ du 12 octobre 2004 et de la doctoresseK.________ des 4 août et 23 juillet 2004) n'est pas déterminant du momentqu'il se rapporte à une situation postérieure à la signature de la «Déclaration de santé ». Par ailleurs les déclarations - faites après coup-par la doctoresse K.________, selon lesquelles la patiente n'était en réalitépas consciente qu'elle souffrait de fibromyalgie ne sont pas convaincantes.De toute façon, la recourante ne pouvait se déclarer en bonne santé déjà enraison des problèmes psychiques évoqués ci-dessus et ayant nécessité untraitement au long cours. En donnant des informations incomplètes sur sa santé psychique notamment, larecourante a également commis une réticence. 3.4 En définitive, si la recourante a fourni quelques indications sur sonétat de santé, ces informations étaient incomplètes. Or le but d'unedéclaration de santé est d'obtenir de la personne des déclarations franches,dont le contenu doit revêtir un caractère informatif : il s'agit de donnerdes indications claires et sans équivoque (cf. Nef, op. cit., n. 24 ad art.4). Dans le cas particulier, la recourante a visiblement adopté une attitudedéfensive en ne donnant que des informations fragmentaires et en cherchant àminimiser certains faits dont elle ne pouvait ignorer l'importance. 4.Il suit de là que le recours est mal fondé. Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 1.Le recours est rejeté. 2.Il n'est pas perçu de frais de justice. 3.Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal desassurances sociales et à l'Office fédéral des assurances sociales. Lucerne, le 27 mars 2006 Au nom du Tribunal fédéral des assurances Le Président de la IVe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : B.131/05
Date de la décision : 27/03/2006
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-03-27;b.131.05 ?
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