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27/03/2006 | SUISSE | N°4P.322/2005

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 27 mars 2006, 4P.322/2005


{T 0/2}4P.322/2005 /ech Arrêt du 27 mars 2006Ire Cour civile MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Klett et Favre.Greffier: M. Ramelet. A. ________,recourant, représenté par Me Philippe Schweizer, contre B.________,intimé, représenté par Me Benoît Ribaux,Ie Cour civile du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel,rue du Pommier 1, case postale 1161, 2001 Neuchâtel 1. procédure civile, droit d'être entendu, recours de droit public contre le jugement de la Ie Cour civile du Tribunalcantonal de la République et canton de Neuchâtel du 31 octobre 2005. Faits: A.Le 3

novembre 1990, B.________, A.________ et cinq tiers, formant ...

{T 0/2}4P.322/2005 /ech Arrêt du 27 mars 2006Ire Cour civile MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Klett et Favre.Greffier: M. Ramelet. A. ________,recourant, représenté par Me Philippe Schweizer, contre B.________,intimé, représenté par Me Benoît Ribaux,Ie Cour civile du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel,rue du Pommier 1, case postale 1161, 2001 Neuchâtel 1. procédure civile, droit d'être entendu, recours de droit public contre le jugement de la Ie Cour civile du Tribunalcantonal de la République et canton de Neuchâtel du 31 octobre 2005. Faits: A.Le 3 novembre 1990, B.________, A.________ et cinq tiers, formant une sociétésimple, ont acquis, pour le prix de 750'000 fr., un immeuble, à LaChaux-de-Fonds. Les associés, sous la forme d'un consortium, ont procédé àd'importants travaux de rénovation sur le bâtiment, lesquels ont provoqué desdépenses élevées financées par un prêt hypothécaire de la banque X.________,devenue par la suite Y.________ SA. L'affaire n'ayant pas procuré le rendement attendu, des mesuresd'assainissement ont dû être prises, dans le cadre desquelles la banqueprécitée a partiellement abandonné sa créance, le prêt étant ramené à2'600'000 fr. en capital, valeur au 30 septembre 1994. Par acte notarié du 2 juin 1995, les associés ont dissous, avec effet au 30septembre 1994, le consortium qu'ils formaient et cédé à B.________ etA.________ leurs droits indivis sur le bien-fonds susmentionné; lescessionnaires ont déclaré affecter l'immeuble au régime de la copropriété ausens des art. 646 ss CC, par part égale entre eux, et reprendre commecodébiteurs solidaires les dettes et engagements contractés auprès ducréancier hypothécaire pour un montant en capital de 2'600'000 fr. En raison des retards survenus dans la couverture des intérêts hypothécaires,Y.________ SA a dénoncé, le 17 février 2000, son prêt au remboursement etréclamé paiement aux deux codébiteurs solidaires du montant de 2'821'323fr.15. Après avoir introduit des poursuites en réalisation de gageimmobilier, Y.________ SA a requis le 22 février 2001 la vente de l'immeuble,dont une expertise a estimé la valeur à 1'875'000 fr. Le 7 mars 2001, B.________ a signé avec Y.________ SA une convention selonlaquelle il s'engageait, d'une part, à verser à celle-ci immédiatement unamortissement extraordinaire de 1'000'000 fr., montant pour lequel il étaitsubrogé dans les droits de l'établissement bancaire, et, d'autre part, àacheter, lors de la vente aux enchères à intervenir, l'immeuble au prixrésiduel de 1'600'000 fr. Le 10 juillet 2001, conformément à cet accord,B.________ a acquis le bien-fonds pour le prix précité au cours d'enchèrespubliques. B.B.aLe 12 août 2002, B.________ a fait notifier une poursuite à A.________,que ce dernier a frappée d'opposition. Par demande du 26 juin 2003, B.________ a ouvert action contre A.________devant l'une des Cours civiles du Tribunal cantonal neuchâtelois. Ledemandeur a conclu à ce que le défendeur lui verse 429'285 fr.75 plusintérêts à 5 % l'an dès le dépôt de la demande, l'opposition formée à lapoursuite précitée étant levée à due concurrence. Le demandeur a fait valoirqu'il avait versé pour acquérir l'immeuble un montant total de 2'600'000 fr.,auquel s'ajoutaient 15'977 fr. de frais du service des réalisationsimmobilières et 26'400 fr. à titre de droits de mutation ou "lods". Comme lebien-fonds ne valait que 1'875'000 fr., la perte qu'il avait subiereprésentait 767'377 fr. Les parties étant codébitrices solidaires, ledéfendeur devait lui rembourser la moitié de la perte, soit 383'688 fr.50,plus la moitié d'un décompte d'intérêts s'élevant à 91'194 fr.55,c'est-à-dire 45'597 fr.25. Par réponse datée du 1er décembre 2003, le défendeur a conclu au rejet de lademande; reconventionnellement, il a requis que le demandeur soit condamné àlui payer 45'470 fr.15 avec intérêts à 5 % dès le dépôt de la réponse. Ausujet de la demande principale, A.________ a soutenu que l'action étaitprématurée dès lors que la société simple formée par les plaideurs n'étaitpas liquidée, que de toute manière le demandeur n'avait pas éprouvé de perte,l'immeuble valant bien 2'600'000 fr., et que le préjudice éventuellement subipar ce dernier résultait de la transaction que l'intéressé avait conclue avecY.________ SA. Sur la reconvention, le défendeur a exposé que l'accord passéentre B.________ et Y.________ SA n'avait pas eu pour effet de le libérer deses obligations à l'endroit de cette banque, laquelle lui avait imposé unplan de redressement en relation avec la créance qu'elle déduisait ducertificat d'insuffisance de gages délivré le 6 décembre 2002 pour un montanten capital et intérêts de 221'981 fr.75. Le défendeur a ainsi allégué qu'aujour du dépôt de la réponse, il avait payé à Y.________ SA un montant de90'940 fr.30, dont le demandeur lui devait remboursement de la moitié, soit45'470 fr.15. Dans sa duplique du 16 février 2004, le défendeur a exposé que les versementsqu'il avait effectués pour éteindre la créance de Y.________ SA s'élevaientdésormais à 137'079 fr.80 et que le demandeur était son débiteur de la moitiéde cette somme, à savoir 68'539 fr.90. Pour qu'il soit tenu compte en instance cantonale des versements successifsopérés par le défendeur au profit de Y.________ SA en remboursement ducertificat d'insuffisance de gages, sans que ce plaideur soit obligé decompléter à chaque fois ses mémoires, les parties ont conclu les 3 et 8 mars2004 une convention de procédure, à teneur de laquelle le défendeur "(était)autorisé, avant clôture des débats, à alléguer et documenter tout paiementqu'il aurait pu effectuer en mains de Y.________ SA à compter de ce jour ......". Le juge instructeur a pris acte de cette convention à son audience du16 mars 2004. La procédure probatoire, qui a comporté le dépôt de pièces littérales etl'audition de divers témoins, a été clôturée le 19 octobre 2004. Le 14 décembre 2004, le juge instructeur a écrit aux mandataires des partiesde lui indiquer si leurs mandants acceptaient que le jugement soit rendu parvoie de circulation, en application de l'art. 334 al. 1 du Code de procédurecivile neuchâtelois du 30 septembre 1991 (CPC/NE), ou s'ils souhaitaient quela cause soit citée pour plaidoiries et jugement. Par écritures des 19 et 24 janvier 2005, respectivement le demandeur et ledéfendeur ont déclaré accepter que la Cour civile rende son jugement par voiede circulation. B.b Dans son jugement du 31 octobre 2005, la Ie Cour civile du Tribunalcantonal neuchâtelois a condamné le défendeur à verser au demandeur la sommede 370'488 fr. avec intérêts à 5 % l'an dès le 31 juillet 2001 (1), condamnéle demandeur à payer au défendeur le montant de 83'540 fr. plus intérêts à 5% l'an dès le 1er mars 2004 (2), ordonné la compensation entre les créancesprécitées (3), prononcé, à concurrence de 360'258 fr., la mainlevéedéfinitive de l'opposition totale formée par le défendeur à la poursuite quilui a été notifiée (4), rejeté toutes autres ou plus amples conclusions (5),enfin statué sur les frais (6) et dépens (6, recte: 7). C.A.________ forme un recours de droit public au Tribunal fédéral contre lejugement précité. Invoquant une application arbitraire des règles cantonalesde procédure et une double violation de son droit d'être entendu, il conclutà l'annulation de la décision cantonale. L'intimé conclut au rejet du recours, alors que la cour cantonale déclare seréférer à son jugement. Le Tribunal fédéral considère en droit: 1.Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre une décisioncantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens (art. 84al. 1 let. a OJ). Le jugement rendu par la cour cantonale, qui est final, n'est susceptibled'aucun autre moyen de droit sur le plan fédéral ou cantonal dans la mesureoù le recourant invoque la violation directe d'un droit de rangconstitutionnel, de sorte que la règle de la subsidiarité du recours de droitpublic est respectée (art. 84 al. 2 et 86 al. 1 OJ). En revanche, si lerecourant soulève une question relevant de l'application du droit fédéral, legrief n'est pas recevable, parce qu'il pouvait faire l'objet d'un recours enréforme (art. 43 al. 1 et 84 al. 2 OJ). Le recourant est personnellement touché par la décision attaquée, qui rejetteses conclusions libératoires, de sorte qu'il a un intérêt personnel, actuelet juridiquement protégé à ce que cette décision n'ait pas été prise enviolation de ses droits constitutionnels; en conséquence, il a qualité pourrecourir (art. 88 OJ). Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'examine que lesgriefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés dans l'actede recours (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 130 I 26 consid. 2.1 p. 31, 258consid. 1.3 p. 261/262). Dans un recours de droit public pour arbitraire, les moyens de fait ou dedroit nouveaux sont prohibés (ATF 124 I 208 consid. 4b p. 212). Le Tribunalfédéral se fonde dès lors sur l'état de fait tel qu'il a été retenu dansl'arrêt attaqué, à moins que le recourant ne démontre que la cour cantonale aretenu ou, au contraire, ignoré de manière insoutenable des faitsdéterminants pour l'issue de la querelle (ATF 118 Ia 20 consid. 5a p. 26). Lerecours de droit public n'étant pas un appel, il n'appartient pas au Tribunalfédéral de substituer sa propre appréciation à celle de l'autorité cantonale;il n'entre par conséquent pas en matière sur les griefs revêtant un caractèreappellatoire (ATF 129 I 113 consid. 2.1 p. 120; 128 III 50 consid. 1c). 2.L'autorité cantonale a considéré que le consortium qu'avaient constitué lesplaideurs avec cinq tiers avait pris fin, si ce n'est par la volonté unanimedes associés, en tout cas lors de la vente forcée de l'immeuble intervenue le10 juillet 2001, de sorte que la demande introduite par B.________ n'étaitpas prématurée. Elle a admis que le demandeur, lequel avait versé àY.________ SA un montant de 2'600'000 fr., avait éteint la créance en capitalde celle-ci, que ce paiement avait eu un effet libératoire à l'encontre dudéfendeur et que B.________ disposait donc d'une créance récursoire contreA.________. La Cour civile a calculé le montant de cette créance en prenanten compte le prix payé par le demandeur pour acquérir l'immeuble aux enchères(i.e. 2'600'000 fr.) plus les frais versés à l'Etat (i.e.15'977 fr.), soit2'615'977 fr., somme qu'elle a divisée par deux, d'où un quotient de1'307'988 fr., dont elle a déduit 937'500 fr., c'est-à-dire la moitié de lavaleur du bien-fonds déterminée par expertise (i.e. 1'875'000 fr. / 2), pourobtenir en fin de compte le montant de 370'488 fr. (1'307'988 fr. - 937'500fr.); elle a jugé, en se référant à la pièce 3 (cotée D 8/3) des lots dedocuments produits par le défendeur, que cette créance devait porter intérêtsà 5 % dès le 31 juillet 2001, échéance de la mise en demeure. Les magistrats neuchâtelois ont encore jugé que le défendeur, sur la base ducertificat d'insuffisance de gages obtenu par Y.________ SA, avait de soncôté versé à cette banque 167'079 fr.80 jusqu'à la clôture des débats,laquelle était intervenue à fin janvier 2005 puisque les deux parties avaientrenoncé à plaider. A.________ disposait ainsi d'une créance récursoire de lamoitié de ce montant contre B.________, soit de 83'540 fr. (aprèsarrondissement au franc supérieur), plus intérêts à 5 % dès le 1er mars 2004,date moyenne des remboursements effectués. La créance du demandeur, avec les intérêts courus, représentait au jour dujugement 450'759 fr., alors que celle du défendeur, y compris les intérêts,se montait à la même date à 90'501 fr. Après compensation, la cour cantonalea obtenu une somme de 360'258 fr., à concurrence de laquelle elle a prononcéla mainlevée définitive de l'opposition formée par le défendeur à lapoursuite qui lui avait été notifiée le 12 août 2002. 3.3.1A l'appui de son premier moyen, qui se subdivise en trois volets, lerecourant fait tout d'abord valoir que la Cour civile a statué ultra petitaet enfreint arbitrairement l'art. 56 al. 1 CPC/NE. Alors que le demandeurréclamait un montant en capital avec des intérêts dès le dépôt de la demande,poursuit le défendeur, la cour cantonale lui a accordé des intérêts à compterd'une date antérieure de près de deux ans au point de départ requis.Puis, le défendeur soutient que l'octroi desdits intérêts sur la base d'unemise en demeure qui n'a jamais été ni alléguée ni prouvée consacrerait uneapplication arbitraire de l'art. 57 al. 1 CPC/NE. Enfin, le recourant déclare qu'il ne pouvait pas s'attendre à ce que lesmagistrats neuchâtelois fixent le point de départ des intérêts dus à l'intimédès le 31 juillet 2001, si bien qu'il aurait été privé de la possibilité defaire valoir ses moyens et aurait été victime d'une violation de son droitd'être entendu. Il expose à ce propos qu'il a été condamné au minimum à 6jours d'intérêts qui n'étaient pas dus, cela sans avoir eu la faculté de sedéfendre3.23.2.1Le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de natureformelle, dont la violation doit entraîner l'annulation de la décisionattaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond (ATF127 V 431 consid. 3d/aa p. 437). Il sied donc d'examiner en priorité ledernier pan du moyen (ATF 124 I 49 consid. 1). Le droit d'être entendu doit être reconnu et respecté lorsque singulièrementle juge envisage de fonder sa décision sur une norme ou un motif juridiquenon évoqué dans la procédure antérieure et dont aucune des parties enprésence ne s'est prévalue et ne pouvait supputer la pertinence in casu (ATF125 V 368 consid. 4a p. 370 et les références). En l'espèce, l'intimé a conclu dans sa demande du 26 juin 2003 à l'octroid'une somme en capital de 429'285 fr. 75 et au versement d'intérêtsmoratoires (art. 104 et 105 CO) au taux de 5 % l'an "dès le dépôt de lademande". Saisie de cette conclusion, la Cour civile devait ainsi juger dubien-fondé de la créance invoquée, en fixer la quotité si la prétention étaitjustifiée et arrêter le dies a quo et le taux de la dette accessoired'intérêt. Dans ce contexte, il est totalement exclu d'admettre qu'en ayantdéterminé le point de départ des intérêts moratoires dus par le défendeur àsa partie adverse, l'autorité cantonale a statué sur un point inattendu, ausujet duquel ce dernier n'a pas pu présenter ses moyens. Que le dies a quofixé par les magistrats neuchâtelois ne satisfasse pas le recourant n'a rienà voir avec une atteinte à son droit d'être entendu. Ce pan du grief confine à la témérité. 3.2.2 A teneur de l'art. 56 CPC/NE, le juge est lié par les conclusions desparties en ce sens qu'il ne peut accorder ni plus ni autre chose que ce quiest demandé (al. 1); il peut accorder moins (al. 2). Cette norme estl'expression de l'adage latin "Ne eat judex ultra petita partium". Celasignifie que le demandeur détermine librement l'étendue de la prétentionqu'il déduit en justice, alors le défendeur décide de la mesure dans laquelleil veut se soumettre à l'action (cf. par ex. Oscar Vogel/Karl Spühler,Grundriss
des Zivilprozessrechts, 8e éd., chap. 6, n. 9; Max Kummer,Grundriss des Zivilprozessrechts, 4e éd, p. 81). In casu, comme on l'a vu, le demandeur a sollicité que le défendeur soitcondamné à lui verser le montant de 429'285 fr. 75, avec intérêts à 5 % l'andès le 26 juin 2003, jour du dépôt de la demande. Le demandeur n'a pas réduitses conclusions pendant le procès. Dans le jugement attaqué, la Cour civile aoctroyé au demandeur la somme de 370'488 fr. plus intérêts à 5 % l'an dès le31 juillet 2001. Le montant accordé au recourant par l'autorité cantonale, sil'on y ajoute les intérêts moratoires à partir du dies a quo qu'elle a fixé,représentait en valeur au moment de l'introduction d'instance, à savoir au 26juin 2003 (i.e., pour simplifier, 23 mois plus tard), la somme de 405'994 fr.(370'488 fr. + 18'525 du 31 juillet 2001 au 31 juillet 2002 (5% de 370'488fr. ) + 16'981 du 1er août 2002 au 30 juin 2003 (11/12e de 18'525 fr.)). Partant, il appert que la cour cantonale, compte tenu des accessoires de lacréance admise, n'a pas appliqué arbitrairement l'art. 56 al. 1 CPC/NEinterdisant qu'il soit jugé ultra petita, puisque la somme dont le défendeura été reconnu redevable est inférieure de plus de 20'000 fr. aux prétentionsen capital que l'intimé avait présentées dans sa demande. Cette partie du grief est privé de fondement. 3.2.3 Selon l'art. 57 al. 1 CPC/NE, le juge ne peut ni suppléer ni suggérerdes faits qu'une partie n'alléguerait pas spontanément, mais il peut exigerdes explications sur les moyens ou conclusions qui lui paraissent obscurs oucontradictoires. Pour François Bohnet (Code de procédure civile neuchâtelois commenté, 2e éd.,Bâle 2005, p. 93 in medio), qui se fonde sur les dispositions de l'ancienCode de procédure cantonale, l'allégué doit pouvoir être interprété largementet comprendre les faits qui normalement sont liés au fait allégué.De toute manière, le principe posé par l'art. 57 al. 1 CPC/NE trouve seslimites dans la prohibition du formalisme excessif, qui est une formeparticulière du déni de justice formel (cf. art. 29 al. 1 Cst.). Il y aformalisme excessif seulement lorsque la stricte application des règles deprocédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient unefin en soi et complique de manière insoutenable la réalisation du droitmatériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux; l'excès deformalisme peut résider soit dans la règle de comportement imposée aujusticiable par le droit cantonal, soit dans la sanction qui lui est attachée(ATF 128 II 139 consid. 2a; 127 I 31 consid. 2a/bb; 125 I 166 consid. 3a). Il résulte du dossier que l'intimé a allégué, sous chiffre 11 de sa demande,qu'" à de multiples reprises et sous diverses formes, (il) a invité ledéfendeur ... ... à participer à la perte subie par le (premier)". Quant aurecourant, il a produit dans sa réponse, à l'appui de ses allégués 31 et 32,la pièce, cotée D. 8/3, sur laquelle la cour cantonale s'est fondée pourdéterminer le moment où le défendeur a été interpellé par son adverse partie(cf. art. 102 al. 1 CO). Par ce document, daté du 12 juillet 2001, ledemandeur, par l'entremise de son conseil, mettait expressément en demeure ledéfendeur de lui rembourser le montant de 792'800 fr. "jusqu'au 31 juillet2001". La Cour civile a certes procédé à une interprétation très large de l'allégué11 de la demande en rapprochant le fait qui y était énoncé d'une piècedéposée par le recourant à l'appui d'allégations ayant un tout autre objet, àsavoir les circonstances ayant entouré la conclusion de la convention du 7mars 2001 entre l'intimé et Y.________ SA. Il n'en demeure pas moins qu'iln'était pas insoutenable, au vu de l'opinion de l'auteur précité et del'interdiction du formalisme excessif, de prendre en compte cette écriturepour déterminer le jour à partir duquel le défendeur était en demeured'exécuter l'obligation dont le demandeur était créancier à son endroit. Le troisième volet du moyen est infondé. 4.4.1En guise de second moyen, le recourant fait longuement grief à l'autoritécantonale d'avoir fait abstraction des remboursements qu'il a effectuésauprès de Y.________ SA au cours de l'année 2005 et d'avoir levédéfinitivement son opposition à la poursuite à concurrence d'un montantirréel, cela au mépris de l'accord de procédure intervenu en mars 2004. Il yvoit une violation crasse de son droit d'être entendu et du "principe de fairplay en procédure". Il fait grand cas d'une écriture qu'il a adressée au jugeinstructeur de la Cour civile le 13 décembre 2004, dans laquelle il requéraitla possibilité d'ajuster ses conclusions jusqu'à la clôture des débats enfonction des paiements successifs opérés en faveur de ladite banque. Ilprétend que ce magistrat est revenu par la suite sur cette "facultéprocédurale" sans aucun avertissement, contrairement à ce qu'il aurait laisséentendre dans son pli du 14 décembre 2004. 4.1.1 On peut sérieusement douter que le moyen, dont le caractèreappellatoire est prédominant, satisfasse aux exigences strictes de motivationinstaurées par l'art. 90 al. 1 let. b OJ. Il n'importe dès lors que lacritique est infondée. 4.1.2 Le recourant n'invoquant aucune règle du droit cantonal de procédureprotégeant son droit d'être entendu, le grief sera examiné exclusivement auregard des principes découlant de l'art. 29 al. 2 Cst. (ATF 126 I 15 consid.2a et les arrêts cités). La jurisprudence a en particulier déduit de l'art. 29 al. 2 Cst. le droitpour le justiciable de participer à l'administration des preuves essentiellesou pour le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela pourraitinfluer sur le sort de la querelle (ATF 129 II 497 consid. 2.2 p. 505; 127 I54 consid. 2b p. 56). Le droit d'être entendu confère ainsi aux plaideurs ledroit de s'exprimer sur tous les points importants avant qu'une décision nesoit prise; cette règle s'applique sans restriction aux questions de fait(ATF 124 I 49 consid. 3c p. 52). 4.1.3 Dans le cas présent, les parties ont passé les 3 et 8 mars 2004 uneconvention de procédure, en vertu de laquelle le défendeur était désormaisautorisé, "avant clôture des débats", à faire état des remboursementsauxquels il pourrait procéder en mains de Y.________ SA. Le juge instructeura pris acte de cette convention le 16 mars 2004. En application de cet accord, le recourant, par le truchement de son avocat,a requis du juge instructeur le 13 décembre 2004 qu'il fasse connaître ladate à laquelle les débats seraient clos, afin qu'il soit à même, au besoin,d'"ajuster (ses) conclusions". Le 14 décembre 2004, ce magistrat a prié lesparties de lui indiquer jusqu'au 20 janvier 2005 si elles acceptaient que lejugement soit rendu par voie de circulation comme le permet l'art. 334 al. 1CPC/NE ou si elles souhaitaient que la cause soit citée pour plaidoiries etjugement; le juge instructeur a encore ajouté que le point soulevé par leconseil du défendeur le 13 décembre 2004 serait examiné quand les partiesauront "fait connaître leur détermination sur le mode d'envisager lejugement". Le conseil du demandeur a accepté, par courrier du 19 janvier 2005, que lejugement soit rendu par voie de circulation. Le même jour, le conseil dudéfendeur s'est borné à prendre note du contenu de l'écriture du jugeinstructeur datée du 14 décembre 2004 et à signaler qu'un nouveau versementde 5'000 fr. était survenu le 24 décembre 2004, sans toutefois se déterminersur l'option proposée par ce magistrat. Relancé par le Greffier du Tribunalcantonal, l'avocat du défendeur, par pli du 24 janvier 2004 reçu lelendemain, a affirmé qu'il était d'accord qu'il soit statué sur le différendpar voie de circulation. Les cantons déterminent librement à quel stade du procès les moyens d'attaqueet de défense doivent être formulés (cf. Fabienne Hohl, Procédure civile,tome I, ch. 813 p. 157). En principe, les parties peuvent invoquer leursmoyens jusqu'à la clôture des débats (Kummer, op. cit., p. 83 in medio;Vogel/Spühler, op. cit., chap. 6, n. 104 et 105). En droit neuchâtelois, l'art. 329 al. 1 CPC/NE dispose que s'il y aplaidoiries, le président du tribunal accorde à chaque partie deux tours deparole, puis il prononce la clôture des débats. Quant à l'art. 334 al. 1CPC/NE, il prescrit qu'en cas de défaut ou d'acquiescement, ou si les partiesy ont expressément consenti, le président du tribunal peut proposer de jugerla cause par voie de circulation, sans débat oral ni délibération en public. Il résulte de ces éléments que dans l'instance divisant les parties, laclôture des débats est intervenue le 25 janvier 2005, soit le jour où legreffe de l'autorité cantonale a reçu la lettre expédiée par l'avocat durecourant manifestant sans restriction l'accord de celui-ci à la redditiond'une décision par voie de circulation. C'est ce qu'a retenu la Cour civile,qui a fixé ladite clôture à fin janvier 2005. Après avoir formellement renoncé à plaider, cela alors qu'en droitneuchâtelois les plaidoiries précèdent immédiatement la clôture des débats(cf. art. 329 al. 1 CPC/NE), le recourant ne pouvait pas s'attendre à pouvoirpar la suite présenter de nouveaux moyens de défense.Les parties ayant ainsi consenti à ce que la cause soit jugée par voie decirculation, la question soulevée précédemment par le recourant dans son plidu 13 décembre 2004 à propos de l'ajustement éventuel de sa reconventionavait perdu son objet, de sorte que le juge instructeur pouvait se dispenserd'y répondre. On ne discerne pas de violation du droit d'être entendu en l'occurrence. Aucune volte-face inopinée ne pouvant être reprochée au magistratinstructeur, le grief de "fair play" en procédure, à supposer qu'il ait uneportée propre, est sans consistance. 5.Il suit de là que le recours doit être rejeté dans la mesure de sarecevabilité. Vu l'issue du litige, le recourant supportera l'émolument dejustice et versera à l'intimé une indemnité de dépens (art. 156 al. 1 et 159al. 1 OJ). Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 1.Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 2.Un émolument judiciaire de 6'500 fr. est mis à la charge du recourant. 3.Le recourant versera à l'intimé une indemnité de 7'500 fr. à titre de dépens. 4.Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à laIe Cour civile du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel. Lausanne, le 27 mars 2006 Au nom de la Ire Cour civiledu Tribunal fédéral suisse Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.322/2005
Date de la décision : 27/03/2006
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2006-03-27;4p.322.2005 ?
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