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03/05/2004 | SUISSE | N°1A.4/2004

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 03 mai 2004, 1A.4/2004


{T 0/2}
1A.4/2004 /svc

Arrêt du 3 mai 2004
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour
et Président du Tribunal fédéral, Nay, Reeb, Féraud
et Fonjallaz.
Greffier: M. Zimmermann.

1. Chuan Pu Andrew Wang,

2. Chia Hsing Wang,

3. Yeh Shiu Jun Wang,

4. Chia Yung Wang,

5. Chia Ming Wang,

6. Chung Ling Wang,

7. Bucellatie International Inc.,

8. Buleverd Company Ltd,

9. Cathay Entreprise Company Ltd,

10. Euromax L

td,

11. Kilkenny Investments,

12. Luxmore Inc.,

13. Middlebury Investments,

14. Sableman international Ltd,
recourants...

{T 0/2}
1A.4/2004 /svc

Arrêt du 3 mai 2004
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour
et Président du Tribunal fédéral, Nay, Reeb, Féraud
et Fonjallaz.
Greffier: M. Zimmermann.

1. Chuan Pu Andrew Wang,

2. Chia Hsing Wang,

3. Yeh Shiu Jun Wang,

4. Chia Yung Wang,

5. Chia Ming Wang,

6. Chung Ling Wang,

7. Bucellatie International Inc.,

8. Buleverd Company Ltd,

9. Cathay Entreprise Company Ltd,

10. Euromax Ltd,

11. Kilkenny Investments,

12. Luxmore Inc.,

13. Middlebury Investments,

14. Sableman international Ltd,
recourants,
tous représentés par MMes Dominique Poncet
et Gérald Page, avocats, Etude de MMes Poncet Turrettini Amaudruz, Neyroud et
Associés, avocats,

contre

Office des juges d'instruction fédéraux,
rue du Mont-Blanc 4, case postale 1795,
1211 Genève 1.

entraide judiciaire internationale en matière pénale à la France - CRI
01/2002, CRI 04/2002 et 01/2003 - OFJ B 104 288/09 GOP,

recours de droit administratif contre l'ordonnance de l'Office des juges
d'instruction fédéraux du
28 novembre 2003.

Faits:

A.
Paul Perraudin, Juge d'instruction à Genève, a conduit une procédure pénale
en relation avec les délits commis dans la gestion du groupe français
Elf-Aquitaine. Différents protagonistes de l'affaire ont laissé entendre que
des dirigeants de la société nationale française Thomson auraient soudoyé des
agents officiels de Taïwan lors de la conclusion d'un contrat portant sur la
vente de frégates. Des pots-de-vin, d'un montant considérable, auraient été
versés par l'intermédiaire d'un dénommé Wang à des personnalités officielles
taïwanaises, chinoises et françaises.

En rapport avec ces faits, des communications selon l'art. 9 LBA ont été
transmises aux autorités zurichoises et, par l'entremise de celles-ci, au
Juge Perraudin.

Le 20 juin 2001, le Procureur général du canton de Genève a ouvert une
procédure pénale (désignée sous la rubrique P/8410/2001), des chefs de
blanchiment d'argent, de défaut de vigilance en matière d'opérations
financières et de faux dans les titres, délits qui auraient été commis en
relation avec la vente des frégates à Taïwan.

Le 20 juin 2001, le Juge Perraudin a informé spontanément le Juge
d'instruction Renaud Van Ruymbeke, en charge des procédures concernant
Elf-Aquitaine en France, du nouveau volet de son enquête concernant le
contrat des frégates. Il a précisé que le dénommé Wang Chuan-pu et des
membres de sa famille détenaient des comptes bancaires en Suisse, dont la
saisie avait été ordonnée.

Le 2 octobre 2001, le Juge Perraudin a présenté aux autorités de la
République de Chine (Taïwan) une demande d'entraide portant sur la remise de
documents relatifs à la négociation et à la conclusion du contrat des
frégates, ainsi qu'au versement de commissions y relatives. Parallèlement, le
Juge d'instruction a adressé des demandes d'entraide aux autorités de la
France et du Liechtenstein.

Le 27 mars 2002, les autorités taïwanaises ont remis au Juge d'instruction
les pièces d'exécution de la demande du 2 octobre 2001.

B.
Le 26 novembre 2001, la Délégation culturelle et économique de Taipei à Berne
a remis à l'Office fédéral de la justice (ci-après: l'Office fédéral) une
demande d'entraide, du 6 novembre 2001, présentée par Lu Ren-fa, Procureur
général auprès de la Cour suprême de la République de Chine, pour les besoins
de la procédure pénale ouverte contre Wang Chuan-pu (Andrew Wang), ainsi que
contre les officiers supérieurs de la Marine Lei Shueh-min, Yao Neng-chun,
Wang Ching-sheng, Kang Shih-chwem et Cherng Jhyh-bo. Selon l'exposé des faits
joint à la demande, la Marine de la République de Chine (Taïwan) avait
projeté d'acquérir une nouvelle flotte de frégates (projet « Kwang-hua 2 »).
Dans un premier temps, son choix s'était porté sur une frégate coréenne. A la
suite de la visite en France du chef d'état-major général de la Marine
taïwanaise, il avait été envisagé de prendre en considération la frégate
française de la classe F-2000. Une délégation officielle emmenée par le
vice-amiral Lei Shueh-min s'était rendue en France et en Arabie saoudite pour
inspecter ces vaisseaux, en septembre 1989. C'est à cette occasion que la
délégation de Taïwan avait été informée du projet de nouvelle frégate F-3000,
alors en cours. Au retour de ce voyage, les prévenus, officiers supérieurs
chargés de la responsabilité du projet « Kwang-hua 2 », ont recommandé
l'acquisition de la frégate française F-3000, alors même que la construction
de celle-ci n'en était qu'au stade des études et qu'elle ne répondait pas aux
spécifications retenues (vitesse et tonnage). Sur la base des fausses
indications rapportées à ce propos par les prévenus, le Ministère de la
défense avait, le 5 octobre 1989, donné son aval au choix des frégates
F-3000. Le 1er août 1990, Thomson avait fait une offre portant sur un prix
de 11'148'000'000 FRF pour six frégates à construire à Taïwan. Le 28 juin
1991, ce prix a été porté à 15'574'000'000 FRF. Les prévenus auraient établi
des rapports favorables au projet, en se fondant sciemment sur des données
fausses, ainsi que sur des analyses et des comparaisons de prix tronqués,
notamment pour ce qui concernait le taux de change entre le franc français de
l'époque et le dollar taïwanais (NTD). Leur intervention aurait été décisive
pour amener les autorités supérieures à conclure le contrat.

Les négociations engagées à cette fin ont abouti à la conclusion, le 31 août
1991, d'un contrat passé entre la société taïwanaise China Shipbuilding
Corporation (ci-après: CSBC) et la société française Thomson-CSF (devenue
dans l'intervalle Thales S.A., ci-après: Thomson), portant sur la vente par
Thomson de six navires d'observation et de surveillance (frégates; MOPS), de
type F-3000, à construire à Taïwan pour le compte de la Marine nationale de
la République de Chine. Le prix brut a été fixé à 2'512'585'152 USD, le prix
net (incluant les taxes) à 2'525'692'731 USD (art. 3.2 du contrat). Il était
prévu un mécanisme d'ajustement du prix (art. 3.3). Selon l'art. 18 du
contrat, le vendeur s'est engagé à ne fournir aucun don, cadeau ou paiement
personnel, direct ou indirect, à des employés de l'acheteur (art. 18.1), ni à
recourir à aucun tiers, personne physique ou morale, agent, représentant ou
intermédiaire, pour recevoir une commission, pourcentage, courtage, honoraire
ou rétribution d'aucune sorte en lien avec la conclusion du contrat (art.
18.2).

Wang Chuan-pu était intervenu pour le compte de Thomson dans le déroulement
de la négociation. Il était soupçonné d'avoir établi des contacts étroits
avec Lei Shueh-min et consorts, et de leur avoir versé des commissions pour
le compte de Thomson, à titre de rétribution pour leur rôle dans la
conclusion du contrat. Thomson aurait payé des pots-de-vin pour un montant
total de 3'000'000'000 FRF, dont une partie aurait été acheminée sur des
comptes bancaires en Suisse. Wang Chuan-pu était également soupçonné d'être
mêlé à l'homicide de Yin Chin-feng, officier de marine qui avait refusé de se
laisser corrompre dans une affaire d'acquisition d'armement pour les
frégates. Wang Chuan-pu était poursuivi des chefs d'escroquerie, de
corruption, de blanchiment d'argent et de meurtre.

La demande tendait à la remise de la documentation concernant tous les
comptes bancaires détenus ou contrôlés par Wang Chuan-pu, son épouse Ye
Hsiu-chen, ses fils Wang Chia-hsing (Bruno Wang), Wang Chia-ming et Wang
Chia-yung, ainsi que sa fille Wang Chun-ling, et à la remise de tout document
utile tiré de la procédure pénale en Suisse.
L'Office fédéral a confié au Juge Perraudin l'exécution de cette demande
(procédure n° CP/19/2002).

C.
Le 13 novembre 2001, le Procureur général près la Cour d'appel de Paris a
transmis au Procureur général du canton de Genève une demande d'entraide,
établie le 7 novembre 2001 par le Juge Van Ruymbeke pour les besoins de la
procédure ouverte contre inconnus du chef d'abus de biens sociaux et de recel
d'abus de biens sociaux. Cette demande se rapportait à plusieurs documents
relatifs au contrat du 31 août 1991 et aux modalités de paiement du prix des
frégates, qui avaient fait naître le soupçon que des dirigeants de Thomson


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1A.4/2004
Date de la décision : 03/05/2004
1re cour de droit public

Analyses

Entraide internationale en matière pénale avec la France; art. 1a, 28 et 67a EIMP; art. 2, 14 et 15 CEEJ; art. XIII et XIV de l'Accord complémentaire avec la France (RS 0.351.934.92); art. 10 et 23 CBl. L'objection selon laquelle les documents à transmettre seraient, en France, protégés par le secret de la défense nationale, n'est pas opposable à l'autorité suisse qui exécute la demande d'entraide française (consid. 4.1, 4.2 et 4.5); il en va de même pour ce qui concerne la Convention franco-suisse pour la protection de ce secret dans les relations entre les armées des deux Etats (consid. 4.3). Portée de l'aval donné par l'autorité requérante à la remise des documents litigieux (consid. 4.4). Modes d'acheminement des demandes d'entraide entre la Suisse et la France (consid. 5). Communication spontanée d'informations touchant au domaine secret selon l'art. 67a EIMP (consid. 6.1 et 6.2). Exigences quant au contenu de la demande d'entraide adressée à l'étranger (consid. 6.3). En l'occurrence, le défaut de procès-verbal au sens de l'art. 67a al. 6 EIMP n'a pas porté à conséquence (consid. 6.4).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2004-05-03;1a.4.2004 ?
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