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03/05/2004 | SUISSE | N°1A.3/2004

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 03 mai 2004, 1A.3/2004


{T 0/2}
1A.3/2004 /svc

Arrêt du 3 mai 2004
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour
et Président du Tribunal fédéral, Nay, Reeb, Féraud
et Fonjallaz.
Greffier: M. Zimmermann.

1. Chuan Pu Andrew Wang,

2. Chia Hsing Wang,

3. Yeh Shiu Jun Wang,

4. Chia Yung Wang,

5. Chia Ming Wang,

6. Chung Ling Wang,

7. Bucellatie International Inc.,

8. Buleverd Company Ltd,

9. Cathay Entreprise Company Ltd,

10. Euromax L

td,

11. Kilkenny Investments,

12. Luxmore Inc.,

13. Middlebury Investments,

14. Sableman international Ltd,
recourants...

{T 0/2}
1A.3/2004 /svc

Arrêt du 3 mai 2004
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour
et Président du Tribunal fédéral, Nay, Reeb, Féraud
et Fonjallaz.
Greffier: M. Zimmermann.

1. Chuan Pu Andrew Wang,

2. Chia Hsing Wang,

3. Yeh Shiu Jun Wang,

4. Chia Yung Wang,

5. Chia Ming Wang,

6. Chung Ling Wang,

7. Bucellatie International Inc.,

8. Buleverd Company Ltd,

9. Cathay Entreprise Company Ltd,

10. Euromax Ltd,

11. Kilkenny Investments,

12. Luxmore Inc.,

13. Middlebury Investments,

14. Sableman international Ltd,
recourants,
tous représentés par MMes Dominique Poncet
et Gérald Page, avocats, Etude de MMes Poncet Turrettini Amaudruz, Neyroud et
Associés, avocats,

contre

Juge d'instruction fédéral,
Rue du Mont-Blanc 4, Case postale 1795,
1211 Genève 1.

entraide judiciaire internationale en matière pénale à Taïwan -
OJIF/7/02/0126 - OFJ B 104 288/09 GOP,

recours de droit administratif contre l'ordonnance du Juge d'instruction
fédéral du 28 novembre 2003.

Faits:

A.
Paul Perraudin, Juge d'instruction à Genève, a conduit une procédure pénale
en relation avec les délits commis dans la gestion du groupe français
Elf-Aquitaine. Différents protagonistes de l'affaire ont laissé entendre que
des dirigeants de la société nationale française Thomson auraient soudoyé des
agents officiels de Taïwan lors de la conclusion d'un contrat portant sur la
vente de frégates. Des pots-de-vin, d'un montant considérable, auraient été
versés par l'intermédiaire d'un dénommé Wang à des personnalités officielles
taïwanaises, chinoises et françaises.

En rapport avec ces faits, des communications selon l'art. 9 LBA ont été
transmises aux autorités zurichoises et, par l'entremise de celles-ci, au
Juge Perraudin.

Le 20 juin 2001, le Procureur général du canton de Genève a ouvert une
procédure pénale (désignée sous la rubrique P/8410/2001), des chefs de
blanchiment d'argent, de défaut de vigilance en matière d'opérations
financières et de faux dans les titres, délits qui auraient été commis en
relation avec la vente des frégates à Taïwan.

Dans le cadre de cette procédure, le Juge Perraudin a ordonné de multiples
mesures d'investigation, dont le séquestre de comptes bancaires. Le 2 octobre
2001, il a présenté aux autorités de la République de Chine (Taïwan) une
demande d'entraide portant sur la remise de documents relatifs à la
négociation et à la conclusion du contrat des frégates, ainsi qu'au versement
de commissions y relatives. Parallèlement, le Juge d'instruction a adressé
des demandes d'entraide aux autorités de la France et du Liechtenstein.

Le 27 mars 2002, les autorités taïwanaises ont remis au Juge d'instruction
les pièces d'exécution de la demande du 2 octobre 2001.

B.
Le 26 novembre 2001, la Délégation culturelle et économique de Taipei à Berne
a remis à l'Office fédéral de la justice (ci-après: l'Office fédéral) une
demande d'entraide, du 6 novembre 2001, présentée par Lu Ren-fa, Procureur
général auprès de la Cour suprême de la République de Chine, pour les besoins
de la procédure pénale ouverte contre Wang Chuan-pu (Andrew Wang), ainsi que
contre les officiers supérieurs de la Marine Lei Shueh-min, Yao Neng-chun,
Wang Ching-sheng, Kang Shih-chwem et Cherng Jhyh-bo. Selon l'exposé des faits
joint à la demande, la Marine de la République de Chine (Taïwan) avait
projeté d'acquérir une nouvelle flotte de frégates (projet « Kwang-hua 2 »).
Dans un premier temps, son choix s'était porté sur une frégate coréenne. A la
suite de la visite en France du chef d'état-major général de la Marine
taïwanaise, il avait été envisagé de prendre en considération la frégate
française de la classe F-2000. Une délégation officielle emmenée par le
vice-amiral Lei Shueh-min s'était rendue en France et en Arabie saoudite pour
inspecter ces vaisseaux, en septembre 1989. C'est à cette occasion que la
délégation de Taïwan avait été informée du projet de nouvelle frégate F-3000,
alors en cours. Au retour de ce voyage, les prévenus, officiers supérieurs
chargés de la responsabilité du projet « Kwang-hua 2 », ont recommandé
l'acquisition de la frégate française F-3000, alors même que la construction
de celle-ci n'en était qu'au stade des études et qu'elle ne répondait pas aux
spécifications retenues (vitesse et tonnage). Sur la base des fausses
indications rapportées à ce propos par les prévenus, le Ministère de la
défense avait, le 5 octobre 1989, donné son aval au choix des frégates
F-3000. Le 1er août 1990, Thomson avait fait une offre portant sur un prix
de 11'148'000'000 FRF pour six frégates à construire à Taïwan. Le 28 juin
1991, ce prix a été porté à 15'574'000'000 FRF. Les prévenus auraient établi
des rapports favorables au projet, en se fondant sciemment sur des données
fausses, ainsi que sur des analyses et des comparaisons de prix tronqués,
notamment pour ce qui concernait le taux de change entre le franc français de
l'époque et le dollar taïwanais (NTD). Leur intervention aurait été décisive
pour amener les autorités supérieures à conclure le contrat.

Les négociations engagées à cette fin ont abouti à la conclusion, le 31 août
1991, d'un contrat passé entre la société taïwanaise China Shipbuilding
Corporation (ci-après: CSBC) et la société française Thomson-CSF (devenue
dans l'intervalle Thales S.A., ci-après: Thomson), portant sur la vente par
Thomson de six navires d'observation et de surveillance (frégates; MOPS), de
type F-3000, à construire à Taïwan pour le compte de la Marine nationale de
la République de Chine. Le prix brut a été fixé à 2'512'585'152 USD, le prix
net (incluant les taxes) à 2'525'692'731 USD (art. 3.2 du contrat). Il était
prévu un mécanisme d'ajustement du prix (art. 3.3). Selon l'art. 18 du
contrat, le vendeur s'est engagé à ne fournir aucun don, cadeau ou paiement
personnel, direct ou indirect, à des employés de l'acheteur (art. 18.1), ni à
recourir à aucun tiers, personne physique ou morale, agent, représentant ou
intermédiaire, pour recevoir une commission, pourcentage, courtage, honoraire
ou rétribution d'aucune sorte en lien avec la conclusion du contrat (art.
18.2).
Wang Chuan-pu était intervenu pour le compte de Thomson dans le déroulement
de la négociation. Il était soupçonné d'avoir établi des contacts étroits
avec Lei Shueh-min et consorts, et de leur avoir versé des commissions pour
le compte de Thomson, à titre de rétribution pour leur rôle dans la
conclusion du contrat. Thomson aurait payé des pots-de-vin pour un montant
total de 3'000'000'000 FRF, dont une partie aurait été acheminée sur des
comptes bancaires en Suisse. Wang Chuan-pu était également soupçonné d'être
mêlé à l'homicide de Yin Chin-feng, officier de marine qui avait refusé de se
laisser corrompre dans une affaire d'acquisition d'armement pour les
frégates. Wang Chuan-pu était poursuivi des chefs d'escroquerie, de
corruption, de blanchiment d'argent et de meurtre.
La demande tendait à la remise de la documentation concernant tous les
comptes bancaires détenus ou contrôlés par Wang Chuan-pu, son épouse Ye
Hsiu-chen, ses fils Wang Chia-hsing (Bruno Wang), Wang Chia-ming et Wang
Chia-yung, ainsi que sa fille Wang Chun-ling, et à la remise de tout document
utile tiré de la procédure pénale en Suisse.

L'Office fédéral a confié au Juge Perraudin l'exécution de cette demande
(procédure n° CP/19/2002).

C.
En juillet 2002, le Ministère public de la Confédération a repris la
procédure P/8410/2001, comme objet de sa compétence selon l'art. 340bis CP.
Le 30 juillet 2002, Paul Perraudin, devenu Juge d'instruction fédéral dans
l'intervalle, a ouvert une enquête préparatoire au sens de l'art. 109 PPF.

Le 7 août 2002, l'Office fédéral a délégué au Juge Perraudin l'exécution de
la procédure d'entraide avec Taïwan (CP/19/2002).

Au terme de ses investigations, le Juge d'instruction a ordonné la saisie
notamment des comptes suivants, ainsi que la remise de la documentation y
relative:

auprès de la banque A.________:

1), ouvert le 28 novembre 2000, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang) est le
titulaire;

auprès de la banque B.________:

2), ouvert le 1er juillet 1997, dont la société des Iles Caïman Middlebury
Investments (ci-après: Middlebury) est la titulaire, Wang Chia-hsing (Bruno
Wang), Wang Chia-yung (Brian Wang) et Wang Chia-ming (Richard Wang) les
ayants droit;

3), ouvert le 1er juillet 1997, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang), Wang
Chia-yung (Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang) et Wang Chung-ling
(Rebecca Wang) sont les titulaires;

4), ouvert le 1er juillet 1997, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang), Wang
Chia-yung (Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang) et Wang Chung-ling
(Rebecca Wang) sont les titulaires;

5), ouvert le 18 août 1997, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang) est le
titulaire, Wang Chia-yung (Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang) et Wang
Chung-ling (Rebecca Wang) les ayants droit;

6), ouvert le 24 juin 1994, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang) est le
titulaire;

7), ouvert le 30 mars 2001, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang), Wang Chia-yung
(Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang), Wang Chung-ling (Rebecca Wang)
et Wang Yeh Shiu-jun (Pauline Wang) sont les titulaires;

8), ouvert le 30 mars 2001, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang), Wang Chia-yung
(Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang), Wang Chung-ling (Rebecca Wang)
et Wang Yeh Shiu-jun (Pauline Wang) sont les titulaires;

auprès de la banque C.________:

9), ouvert le 12 décembre 2000, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang) est le
titulaire;

auprès de la banque D.________:

10), ouvert le 22 novembre 2000, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang) est le
titulaire;

auprès de banque E.________:

11), ouvert le 12 mars 2001, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang) est le
titulaire;

auprès de la banque F.________:

12), ouvert le 29 novembre 2000, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang) est le
titulaire;

13), ouvert le 29 novembre 2000, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang) est le
titulaire;

auprès de la banque G.________:

14), ouvert le 1er décembre 2000, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang) est le
titulaire;

15), ouvert le 5 décembre 2000, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang) est le
titulaire;

auprès de la banque H.________:

16), ouvert le 15 mars 2001, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang) est le
titulaire;

auprès de la banque K.________:

17), ouvert le 24 novembre 2000, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang) est le
titulaire;

auprès de la banque L.________:

18), ouvert le 30 mars 2001, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang) est le
titulaire;

auprès de la banque M.________:

19), ouvert le 8 septembre 1991, dont la société des Iles Vierges
Britanniques Euromax Ltd (ci-après: Euromax) est la titulaire, Wang Chuan-pu
(Andrew Wang), Wang Chia-yung (Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang),
Wang Yeh Shiu-jun (Pauline Wang), Wang Chia-hsing (Bruno Wang) et Wang
Chung-ling (Rebecca Wang) les ayants droit;

20), ouvert le 30 mars 2000, dont Euromax est la titulaire, Wang Chuan-pu
(Andrew Wang), Wang Chia-yung (Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang),
Wang Yeh Shiu-jun (Pauline Wang), Wang Chia-hsing (Bruno Wang) et Wang
Chung-ling (Rebecca Wang) les ayants droit;

21), ouvert le 7 décembre 1992, dont la société des Iles Vierges britanniques
Bucellatie International Inc. (ci-après: Bucellatie) est la titulaire, Wang
Chuan-pu (Andrew Wang), Wang Chia-yung (Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard
Wang), Wang Yeh Shiu-jun (Pauline Wang), Wang Chia-hsing (Bruno Wang) et Wang
Chung-ling (Rebecca Wang) les ayants droit;

22), ouvert le 31 mars 2000, dont Buccelatie est la titulaire, Wang Chuan-pu
(Andrew Wang), Wang Chia-yung (Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang),
Wang Yeh Shiu-jun (Pauline Wang), Wang Chia-hsing (Bruno Wang) et Wang
Chung-ling (Rebecca Wang) les ayants droit;

23), ouvert le 13 juillet 1990, dont la société des Iles Caïman Kilkenny
Investments (ci-après: Kilkenny) est la titulaire, Wang Chia-yung (Brian
Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang), Wang Chia-hsing (Bruno Wang) et Wang
Chung-ling (Rebecca Wang) les ayants droit;

24), ouvert le 31 mars 2000, dont Kilkenny est la titulaire, Wang Chuan-pu
(Andrew Wang), Wang Chia-yung (Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang),
Wang Yeh Shiu-jun (Pauline Wang), Wang Chia-hsing (Bruno Wang) et Wang
Chung-ling (Rebecca Wang) les ayants droit;

25), ouvert le 18 octobre 1994, dont la société des Iles Vierges britanniques
Sableman International Ltd est la titulaire, Wang Chia-yung (Brian Wang),
Wang Chia-ming (Richard Wang), Wang Chia-hsing (Bruno Wang) et Wang
Chung-ling (Rebecca Wang) les ayants droit;
26), ouvert le 13 juillet 1998 et clos le 9 avril 2001, dont Kilkenny était
la titulaire;

27), ouvert le 6 avril 2000 et clos le 29 mai 2001, dont Kilkenny était la
titulaire;

28), ouvert le 3 mars 1998 et clos le 31 mai 2001, dont Sableman était la
titulaire, Wang Chuan-pu (Andrew Wang), Wang Yeh Shiu-jun (Pauline Wang),
Wang Chia-hsing (Bruno Wang), Wang Chia-yung (Brian Wang), Wang Chia-ming
(Richard Wang) et Wang Chung-ling (Rebecca Wang) les ayants droit;

29), ouvert le 3 mars 1998 et clos le 9 mai 2001, dont Middlebury était la
titulaire;

30), ouvert le 21 décembre 1994 et clos le 30 mars 2001, dont Middlebury
était la titulaire, Wang Chia-yung (Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard
Wang), Wang Chia-hsing (Bruno Wang) et Wang Chung-ling (Rebecca Wang) les
ayants droit;

31), ouvert le 28 janvier 1995 et clos le 29 décembre 2000, dont la société
Buleverd Company (ci-après: Buleverd) était la
titulaire;

32), ouvert le 6 avril 2000, dont Buleverd est la titulaire;

33), ouvert le 3 septembre 1991 et clos le 9 avril 2001, dont Wang Chuan-pu
était le titulaire;

34), ouvert le 10 février 1994 et clos le 5 avril 2001, dont Wang Chia-yung
(Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang) et Wang Chia-hsing (Bruno Wang)
étaient les titulaires;

35), ouvert le 10 février 1994 et clos le 5 avril 2001, dont Wang Chia-yung
(Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang) et Wang Chia-hsing (Bruno Wang)
étaient les titulaires;

36), ouvert le 10 février 1994 et clos le 5 avril 2001, dont Wang Chia-yung
(Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang) et Wang Chia-hsing (Bruno Wang)
étaient les titulaires;
37), ouvert le 10 février 1994, dont Wang Chia-yung (Brian Wang), Wang
Chia-ming (Richard Wang) et Wang Chia-hsing (Bruno Wang) sont les titulaires;

38), ouvert le 10 février 2000, dont Wang Chuan-pu (Andrew Wang), Wang
Chia-yung (Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang), Wang Yeh Shiu-jun
(Pauline Wang), Wang Chia-hsing (Bruno Wang) et Wang Chung-ling (Rebecca
Wang) sont les titulaires;

39), ouvert le 10 février 2000, dont Wang Chuan-pu (Andrew Wang), Wang
Chia-yung (Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang), Wang Yeh Shiu-jun
(Pauline Wang), Wang Chia-hsing (Bruno Wang) et Wang Chung-ling (Rebecca
Wang) sont les titulaires;

40), ouvert le 31 mars 2000, dont Wang Chia-hsing (Bruno Wang) est le
titulaire;

41), ouvert le 3 avril 2000, dont Wang Chia-yung (Brian Wang), Wang Chia-ming
(Richard Wang), Wang Chia-hsing (Bruno Wang) et Wang Chung-ling (Rebecca
Wang) sont les titulaires;

42), ouvert le 3 avril 2000 et clos le 12 avril 2001, dont Wang Chia-yung
(Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang), Wang Chia-hsing (Bruno Wang) et
Wang Chung-ling (Rebecca Wang) étaient les titulaires;
43), ouvert le 3 avril 2000 et clos le 12 avril 2001, dont Wang Chia-yung
(Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang), Wang Chia-hsing (Bruno Wang) et
Wang Chung-ling étaient les titulaires;

44), ouvert le 3 avril 2000 et clos le 12 avril 2001, dont Wang Chia-yung
(Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang), Wang Chia-hsing (Bruno Wang) et
Wang Chung-ling étaient les titulaires;

45), ouvert le 31 mars 2000 et clos le 12 avril 2001, dont Wang Chuan-pu
(Andrew Wang), Wang Chia-yung (Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang),
Wang Yeh Shiu-jun (Pauline Wang), Wang Chia-hsing (Bruno Wang) et Wang
Chung-ling étaient les titulaires;
46), ouvert le 12 juillet 1996 et clos le 28 août 1997, dont Yeh Chia-bin et
Kuo Chun-lan étaient les titulaires, et sur lequel Wang Chia-hsing (Bruno
Wang) et Wang Chia-yung (Brian Wang) détenaient une procuration.

Ont été bloqués les fonds se trouvant sur les comptes n°s1 à 7, 9 à 14, et 16
à 25, pour un montant total équivalent à 494'885'804,60 USD.

Les 27 mars et 15 novembre 2002, ainsi que le 10 avril 2003, les autorités de
Taïwan ont fait parvenir des pièces complémentaires, parmi lesquelles la
traduction anglaise de l'acte d'inculpation (« indictment ») établi le 5
juillet 2001 par le Ministère public. Le 26 mars 2002, le Juge d'instruction
a reçu, à sa demande, Tsai Chiou-ming, Procureur adjoint auprès du Parquet de
Taipei, qui lui a remis plusieurs pièces se rapportant à la demande
d'entraide, dont une traduction de l'acte d'inculpation du 5 juillet 2001.

Le 28 novembre 2003, le Juge d'instruction a rendu une décision d'entrée en
matière et de clôture partielle de la procédure d'entraide. Il a ordonné la
transmission aux autorités de la République de Chine de la documentation
relative aux comptes n°s1 à 46; de la documentation concernant Bucellatie,
Buleverd, Cathay, Euromax, Kilkenny, Luxmore, Middlebury et Sableman; des
pièces et de la correspondance se rapportant aux accords passés entre Thomson
et les sociétés dominées par Wang Chuan-pu; des pièces concernant les
montants payés par Thomson; le compte-rendu des déclarations faites le 28
septembre 2000 par Wang Chia-hsing; des tableaux des flux des fonds, ainsi
que la liste des comptes dont les membres de la famille Wang sont les
titulaires ou ayants droit. Le Juge d'instruction a ordonné en outre le
séquestre des fonds bloqués. Il a réservé le principe de la spécialité.

D.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, Wang Chuan-pu (Andrew
Wang), Wang Chia-hsing (Bruno Wang), Wang Yeh Shiu-jun (Pauline Wang), Wang
Chia-yung (Brian Wang), Wang Chia-ming (Richard Wang), Wang Chung-ling
(Rebecca Wang), ainsi que Bucellatie International Inc., Buleverd Company,
Cathay Entreprise Company, Euromax Ltd, Kilkenny Investments, Luxmore Inc.,
Middlebury Investments et Sableman International Ltd, demandent au Tribunal
fédéral d'annuler la décision du 28 novembre 2003 et de rejeter la demande
d'entraide. Ils invoquent les art. 1a, 2, 5, 8, 18, 27, 28, 29, 63, 64, 67a
et 80b de la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale, du
20 mars 1981 (EIMP; RS 351.1), ainsi que l'art. 301 CP.
Le Juge d'instruction se réfère à sa décision. L'Office fédéral propose le
rejet du recours.

Invités à répliquer, les recourants ont maintenu leurs conclusions.

E.
L'Etat requérant a demandé à pouvoir participer à la procédure. Cette requête
a été rejetée le 19 janvier 2004.

F.
Parallèlement au recours de droit administratif, les recourants sont
intervenus le 8 janvier 2004 auprès du Département fédéral de justice et
police pour qu'il constate que l'octroi de l'entraide à Taïwan compromettrait
les intérêts essentiels de la Suisse au sens de l'art. 1a EIMP. Cette
procédure est en cours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
La Confédération suisse et la République de Chine ne sont pas liées par un
traité régissant l'entraide judiciaire en matière pénale. Seul le droit
interne est applicable (ATF 113 Ib 257 consid. 2 p. 264; 111 Ib 138 consid. 2
p. 141; 110 Ib 173 consid. 2 p. 176, et les arrêts cités, consid. 1 non
publié de l'ATF 129 II 453), soit en l'occurrence l'EIMP et son ordonnance
d'exécution (OEIMP; RS 351.11).

2.
Le Tribunal fédéral examine d'office et avec une pleine cognition la
recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 129 I 173 consid. 1 p. 174,
185 consid. 1 p. 188, 337 consid. 1 p. 339, et les arrêts cités).

2.1 La voie du recours de droit administratif est ouverte contre la décision
portant sur la transmission de la documentation bancaire et la saisie de
comptes (cf. art. 25 al. 1 EIMP).

2.2 A qualité pour agir quiconque est personnellement et directement touché
par la mesure d'entraide et a un intérêt digne de protection à ce qu'elle
soit annulée ou modifiée (art. 80h let. b EIMP).
Les personnes physiques et morales titulaires (ou cotitulaires) de comptes
dont la documentation est transmise ou les avoirs bloqués ont qualité pour
agir au regard de l'art. 80h let. b EIMP mis en relation avec l'art. 9 let. a
OEIMP (ATF 127 II 198 consid 2d p. 205; 126 II 258 consid. 2d/aa p. 260; 125
II 356 consid. 3b/bb p. 362, et les arrêts cités). Wang Chuan-pu (Andrew
Wang) a qualité pour agir s'agissant des comptes n°s33, 38, 39 et 45, Wang
Chia-hsing (Bruno Wang) pour ce qui concerne les comptes n°s1, 3 à 18 et 34 à
45; Wang Yeh Shiu-jun (Pauline Wang) pour les comptes n°s7, 8, 38, 39 et 45,
Wang Chia-yung (Brian Wang) pour les comptes n°s3, 4, 7, 8, 34 à 39 et 41 à
45, Wang Chia-ming (Richard Wang) pour les comptes n°s3, 4, 7, 8, 34 à 39, et
41 à 45, Wang Chung-ling (Rebecca Wang) pour les comptes n°s3, 4, 7, 8, 38,
39 et 41 à 45, Euromax pour les comptes n°s19 et 20, Bucellatie pour les
comptes n°s21 et 22, Kilkenny pour les comptes n°s23, 24, 26 et 27, Sableman
pour les comptes n°s25 et 28, Middlebury pour les comptes n°s2, 29 et 30,
Buleverd pour les comptes n°s31 et 32. Les sociétés Cathay et Luxmore ne sont
pas titulaires des comptes visés par la demande. Le fait que des documents
saisis émanent d'elles ou les concernent ne suffit pas pour leur reconnaître
la qualité pour agir sous cet aspect (ATF 123 II 153 consid. 2b p. 157). Le
recours est irrecevable en tant qu'il émane d'elles. En outre, les titulaires
du compte n°46 n'ont pas recouru. Pour ceux-là, la décision attaquée est
passée en force; la documentation y relative peut être transmise. Le fait que
Wang Chia-hsing (Bruno Wang) et Wang Chia-yung (Brian Wang) détenaient une
procuration sur ce compte ne leur donne pas la qualité pour agir en rapport
avec lui.

2.3 Le Tribunal fédéral examine librement si les conditions pour accorder
l'entraide sont remplies et dans quelle mesure la coopération internationale
doit être prêtée (ATF 123 II 134 consid. 1d p. 136/137; 118 Ib 269 consid. 2e
p. 275). Il statue avec une cognition libre sur les griefs soulevés sans être
toutefois tenu, comme le serait une autorité de surveillance, de vérifier
d'office la conformité de la décision attaquée à l'ensemble des dispositions
applicables en la matière (ATF 123 II 134 consid. 1d p. 136/137; 119 Ib 56
consid. 1d p. 59).

3.
Les recourants se plaignent de la violation de leur droit d'être entendus.

3.1 Les parties ont le droit d'être entendues (art. 29 al. 2 Cst.). Cela
inclut pour elles de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à leur
détriment, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la
décision, d'avoir accès au dossier, de participer à l'administration des
preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 129
I 85 consid. 4.1 p. 88/89; 129 II 497 consid. 2.2 p. 504/505, et les arrêts
cités). Le droit d'accès au dossier comprend celui de consulter les pièces au
siège de l'autorité, de prendre des notes et de faire des photocopies, pour
autant que cela n'entraîne aucun inconvénient excessif pour l'administration
(ATF 126 I 7 consid. 2b p. 10; 122 I 109 consid. 2d p. 112, et les arrêts
cités). Ce droit n'est toutefois pas absolu; il est limité à ce qui est
nécessaire pour la décision à prendre et la sauvegarde des intérêts de
l'ayant droit (art. 80b al. 1 EIMP). Un tel intérêt existe, notamment, en
rapport avec les pièces dont l'autorité d'exécution a ordonné la transmission
dans la décision de clôture. Pour le surplus, l'ayant droit ne saurait
prétendre consulter des pièces ou se déterminer sur des points qui ne le
concernent pas; il n'est pas davantage habilité à revoir toute la procédure
pénale étrangère ou prendre la défense de tiers (consid. 2b et c non publié
de l'ATF 127 II 151; arrêt 1A.109/2000 du 18 juillet 2000, consid. 2a).
Ainsi, contrairement à ce qu'ils affirment, les recourants ne peuvent exiger
un accès inconditionnel et illimité à tout le dossier de la procédure pénale
nationale et de la procédure d'entraide.

3.2 Dans un premier moyen, les recourants prétendent ne pas avoir eu accès à
toutes les pièces décisives pour la décision à prendre.

3.2.1 Dans la procédure pénale (nationale) comme dans la procédure
d'entraide, les mandataires des recourants et le Juge d'instruction ont
entretenu une correspondance nourrie.

Les recourants ont reçu une copie de la demande d'entraide et de ses annexes,
comme l'atteste leur courrier adressé le 24 décembre 2002 au Juge
d'instruction. Celui-ci a fait verser à la procédure d'entraide la
documentation bancaire relative aux comptes n°s1 à 46, saisie dans le cadre
de la procédure pénale, que les recourants avaient déjà eu l'occasion de
consulter, comme le confirment le courrier que leur a adressé le Juge
d'instruction le 1er novembre 2001 et leur réponse du 12 novembre 2001.
Malgré plusieurs demandes en ce sens du Juge d'instruction, Wang Chuan-pu n'a
pas voulu être entendu personnellement. Les recourants sont intervenus et ont
produit des pièces à décharge les 29 octobre 2001, 10 janvier, 1er février et
15 avril 2002, ainsi que les 24 avril 2002 et 20 mai 2003. Le 2 août 2002,
les mandataires des recourants ont consulté le dossier; ils ont obtenu la
photocopie de 7599 pièces de celui-ci.
Le 26 août 2002, le Juge d'instruction a averti les recourants du séquestre
qu'il entendait prononcer pour les besoins de la procédure pénale. Après leur
avoir fait un compte-rendu précis de l'état de ses investigations, il leur a
donné accès aux pièces bancaires saisies à titre provisoire. Le 16 septembre
2002, les mandataires des recourants ont à nouveau consulté le dossier et
reçu 800 photocopies supplémentaires. Le 18 octobre 2002, les recourants ont
produit des pièces à décharge. Le 24 décembre 2002, ils ont fait parvenir au
Juge d'instruction une prise de position détaillée, portant sur tous les
éléments de la demande.

Le 27 mai 2003, le Juge d'instruction a fait part aux recourants de son
intention de rendre les décisions de clôture de la procédure d'entraide. Il
leur a accordé le droit de consulter sans restriction le dossier, y compris
les demandes suisses adressées à l'étranger. Le 12 juin 2003, il leur a
imparti un délai pour se déterminer. Les mandataires des recourants ont eu
l'occasion de consulter le dossier au siège de l'autorité et de recevoir, le
13 juin 2003, 2536 photocopies. Le 25 juin 2003, les recourants ont à nouveau
consulté le dossier et reçu 74 photocopies supplémentaires. Le 15 juillet
2003, le Juge d'instruction leur a refusé l'accès aux pièces d'exécution des
demandes suisses d'entraide, la procédure nationale n'étant pas
contradictoire. Il a accepté en revanche de porter à leur connaissance des
pièces remises lors d'une visite en Suisse du Procureur Tsai Chiou-ming. Le
31 juillet 2003, les recourants ont produit une prise de position reprenant
tous leurs arguments. S'agissant du droit d'être entendu, ils ont réitéré
leur demande d'avoir accès à l'intégralité des pièces versées au dossier de
la procédure d'entraide; ils ont suggéré qu'une décision séparée soit rendue
sur ce point et exigé qu'un inventaire détaillé des pièces à transmettre soit
établi. Le 18 août 2003, ils ont communiqué au Juge d'instruction
leur
détermination finale, comportant plus de deux cent pages de texte. Le 22 août
2003, ils ont établi une note concernant l'inventaire des pièces reçues et
non reçues. Le Juge d'instruction leur a répondu, le 26 août 2003, en leur
communiquant un lot de pièces supplémentaires. Les recourants se sont
déterminés à ce propos les 2, 8 et 25 septembre 2003, ainsi que le 2 octobre
2003. Le 18 septembre 2003, les mandataires des recourants ont consulté le
dossier et reçu 140 photocopies supplémentaires.

3.2.2 Il résulte de ce qui précède que les recourants ont eu accès à toutes
les pièces qu'ils pouvaient prétendre consulter. Cela concerne notamment les
demandes d'entraide, la documentation bancaire dont le Juge d'instruction a
ordonné la transmission, et leurs annexes. Il est vrai que sur ce dernier
point, le Juge d'instruction a complété, à plusieurs reprises, le cercle des
documents consultés. Cela ne signifie pas pour autant qu'il aurait procédé à
une sélection arbitraire de celles-ci, caché des documents ou ordonné la
transmission d'autres pièces que celles à propos desquelles les recourants
ont eu la possibilité de s'exprimer à plusieurs reprises, ce qu'ils n'ont pas
manqué de faire, au demeurant. En particulier, il n'existe pas d'autres
pièces fournies par le Procureur Tsai que celles remises aux recourants.

3.2.3 A cinq reprises au moins, ceux-ci ont eu la faculté de se rendre au
siège de l'autorité, de compulser le dossier de la procédure d'entraide et
d'en lever des copies. L'argument selon lequel la documentation dont la
consultation a été autorisée ne correspondrait pas à celle dont la remise a
été ordonnée, ne repose sur rien. Pour le surplus, les recourants ne
sauraient prétendre avoir accès, sous couvert de la procédure d'entraide, à
des éléments qui ne sont pas touchés par la décision attaquée mais figurent
au dossier de la procédure pénale (nationale); pour la même raison, il n'y
avait pas de motif de les laisser consulter les dossiers se rapportant à
l'exécution des demandes d'entraide françaises ou adressées par la Suisse à
Taïwan. A ce propos, l'affirmation selon laquelle les pièces déterminantes de
la procédure nationale auraient été apportées au dossier de la procédure
d'entraide de manière désordonnée, est mal fondée, car la portée de cette
mesure, telle qu'elle a été définie, était clairement circonscrite quant à
son objet. Le prononcé de décisions formelles sur ce point n'était pas
nécessaire. Un inventaire numéroté des pièces aurait sans doute été utile;
mais la loi ne prescrit pas à l'autorité d'exécution de l'entraide d'en
confectionner un. Il importe peu que le Juge d'instruction ait fait parvenir
aux recourants un tel inventaire après le prononcé de la décision de clôture.
Au demeurant, ce document est clair.

En conclusion sur ce point, malgré le volume considérable de la documentation
visée par la décision attaquée (près de 20'000 pièces au total), les
recourants ont disposé de la faculté, effective et concrète, de consulter le
dossier et de faire valoir leurs arguments concernant la transmission de tel
ou tel document (cf. ATF 126 II 258 consid. 9b p. 262-264).

3.2.4 Postérieurement à la notification de la décision de clôture, le Juge
d'instruction a fait parvenir aux recourants deux documents, intitulés «
tableau des flux des fonds des frégates » n°s1 et 2. Il s'agit de deux
feuilles de papier de grandes dimensions, sur lesquelles sont représentés,
sous une forme cartographique, les mouvements des fonds effectués entre les
différents comptes impliqués dans l'affaire. Ces documents ne constituent
pas, à cet égard, des pièces nouvelles, même s'ils doivent être communiqués à
l'autorité étrangère. Ils présentent plutôt les traits d'une synthèse imagée
des informations contenues dans la documentation bancaire saisie
préalablement. Comme ils n'ont pas de valeur probante particulière, il
n'était pas indispensable de les porter à la connaissance des recourants
avant la clôture de la procédure. De toute manière, même à supposer que le
droit d'être entendus des recourants ait été violé à cet égard, ce défaut
aurait été guéri dans le cadre du présent recours (cf. ATF 124 II 132 consid.
2d p. 138/139).

3.3 Dans un deuxième moyen, les recourants reprochent au Juge d'instruction
de leur avoir indûment interdit l'accès à la documentation relative à l'un de
leurs comptes.

La décision attaquée évoque le soupçon que Wang Chuan-pu aurait détenu des
fonds destinés à des responsables de Thomson. Cette hypothèse serait
confortée par le fait qu'un responsable de Thomson aurait été désigné par
Wang Chuan-pu pour recevoir copie de la correspondance relative à un compte
ouvert auprès de la banque B.________. Après le prononcé de la décision de
clôture, les recourants ont entendu contester ce point et requis le Juge
d'instruction, le 23 décembre 2003, de leur communiquer la pièce attestant le
fait litigieux. Le 6 janvier 2004, le Juge d'instruction a remis aux
recourants une copie de la communication selon l'art. 9 LBA faite le 20 avril
2001 par la banque B.________. Les recourants affirment ne pas avoir eu
connaissance de ce document avant le prononcé de la décision de clôture. Cela
est contredit par le fait que la pièce en question se trouve dans la
documentation relative aux comptes n°s2 à 8.

3.4 Les griefs tirés de la violation du droit d'être entendu sont ainsi mal
fondés.

4.
Les recourants prétendent que la demande serait entachée d'erreurs, de
lacunes et de contradictions manifestes.

4.1 La demande d'entraide doit indiquer l'organe dont elle émane et le cas
échéant, l'autorité pénale compétente (art. 28 al. 2 let. a EIMP), son objet
et ses motifs (art. 28 al. 2 let. b EIMP), la qualification juridique des
faits (art. 28 al. 2 let. c EIMP), la désignation aussi précise et complète
que possible de la personne poursuivie (art. 28 al. 2 let. d EIMP), ainsi
qu'un bref exposé des faits essentiels (art. 28 al. 3 let. a EIMP). Les
indications fournies à ce titre doivent simplement suffire pour vérifier que
la demande n'est pas d'emblée inadmissible (ATF 116 Ib 96 consid. 3a p. 101;
115 Ib 68 consid. 3b/aa p. 77). L'autorité suisse saisie d'une requête
d'entraide en matière pénale n'a pas à se prononcer sur la réalité des faits
évoqués dans la demande; elle ne peut que déterminer si, tels qu'ils sont
présentés, ils constituent une infraction. Cette autorité ne peut s'écarter
des faits décrits par l'Etat requérant qu'en cas d'erreurs, lacunes ou
contradictions évidentes et immédiatement établies (ATF 126 II 495 consid.
5e/aa p. 501; 118 Ib 111 consid. 5b p. 121/122; 117 Ib 64 consid. 5c p. 88,
et les arrêts cités). La demande se rapportant à des faits de blanchiment ne
doit pas nécessairement contenir la preuve de la commission de ce délit ou de
l'infraction principale; elle peut se borner à faire état de transactions
douteuses (ATF 129 II 97). Lorsque la demande tend, comme en l'espèce, à la
remise de documents bancaires et au blocage de fonds, l'Etat requérant ne
peut se limiter à communiquer une liste des personnes recherchées et des
sommes qui auraient été détournées; il lui faut joindre à la demande des
éléments permettant de déterminer, de manière minimale, que les comptes en
question ont été utilisés dans le déroulement des opérations délictueuses
poursuivies dans l'Etat requérant (arrêts 1A.125/2003 du 15 juillet 2003,
consid. 2.1 et 1A.211/1992 du 29 juin 1993; consid. 3a non publié de l'ATF
126 II 258 et consid. 6a non publié de l'ATF 125 II 356).

4.2 La demande et ses annexes, ainsi que les documents fournis en cours de
procédure par les autorités requérantes, décrivent de manière détaillée les
péripéties de la conclusion du contrat relatif à l'acquisition des frégates
françaises par la Marine de Taïwan. Au cours des pourparlers préliminaires,
le vice-amiral français Pujo a évoqué en mai 1989 la possibilité de faire
construire les frégates à Taïwan. L'offre était la suivante: 1'225'000'000
FRF pour une frégate F-2000 construite en France et 925'000'000 FRF pour les
éléments d'une frégate à construire à Taïwan (soit, pour six frégates,
7'350'000'000 FRF et 5'550'000'000 FRF). En septembre 1989, une délégation
taïwanaise emmenée par le vice-amiral Lei Shueh-min est allée inspecter les
F-2000 en France et en Arabie saoudite. C'est alors qu'elle a été informée du
projet de nouvelle frégate F-3000. A leur retour à Taïwan, les officiers
supérieurs chargés de la responsabilité de ce projet (parmi lesquels Lei
Shueh-min et Cherng Jhyh-bo) ont recommandé la frégate française Flex-3000,
alors même que celle-ci n'en était qu'aux stades des études et qu'elle ne
répondait pas aux spécifications retenues, s'agissant de la vitesse et du
tonnage. Ils auraient rapporté à ce propos de fausses indications.

Le 5 octobre 1989, le Ministère de la défense a donné son aval au choix des
frégates Flex-3000. Le 6 octobre 1989, la Société française de matériels
d'armement (ci-après: SOFMA) a proposé un prix total de 9'645'000'000 FRF
pour six frégates construites en France et de 6'916'180'000 FRF pour six
frégates à assembler à Taïwan. Le 23 décembre 1989, les autorités françaises
ont fait une nouvelle offre, selon laquelle le prix des six frégates
construites en France a été fixé à 13'259'100'000 FRF et à 11'454'000'000 FRF
pour la fourniture du matériel nécessaire pour la construction de six
frégates à Taïwan. Les négociations ont alors commencé. Elles furent
cependant interrompues après que le Président Mitterrand a déclaré, en
janvier 1990, que le permis d'exportation des frégates ne serait pas accordé.
Celui-ci fut néanmoins délivré le 12 juin 1991.

Les pourparlers ont alors repris. Dans le cadre de ceux-ci, Cherng Jhyh-bo
aurait établi une proposition portant sur le prix de 11'148'000'000 FRF pour
six frégates à construire à Taïwan, soit 10'928'000'000 NTD par frégate. Les
représentants de Thomson ont fait une contre-proposition portant sur un prix
total de 15'574'000'000 FRF, le 28 juin 1991. Dans leur rapport à leur
hiérarchie, le groupe d'officiers autour de Lei Shueh-min a, sur la base d'un
taux de change volontairement erroné, pris en compte un prix unitaire de
10'900'000'000 NTD. Malgré les ordres de leurs supérieurs, les prévenus n'ont
pas exigé des représentants de Thomson de rabattre du prix. Dans l'examen de
la proposition de Thomson, Lei Shueh-min et Cherng Jhyh-bo auraient sciemment
trompé leurs supérieurs, en leur présentant des documents falsifiés ou
tronqués, sur la base desquels le Ministère de la défense a consenti de
passer le contrat selon les termes fixés le 31 août 1991.

Après sa conclusion, le contrat a été amendé à six reprises. L'amendement
(n°2) du 4 juin 1993 a introduit deux modifications essentielles.
Premièrement, l'Office d'acquisition d'armement naval (Navy Weaponry
Acquisition Management Office; Nawamo) s'est substitué, du côté de Taïwan, à
CSBC. Deuxièmement, il a été décidé de construire les frégates en France,
plutôt que de les assembler à Taïwan. Cette décision a eu pour conséquence de
renchérir le prix, pour un montant de 218'096'581 USD. Le montant du prix
brut total a ainsi atteint 2'730'671'733 USD. Ce prix a été ajusté
conformément à l'art. 3.3 du contrat, pour être fixé à 2'831'826'413 USD
(soit 16'478'397'900 FRF).

Les autorités de Taïwan ont, en plusieurs versement échelonnés jusqu'en
décembre 2001, payé un montant total de 2'832'237'952,89 USD (soit
16'480'792'647,70 FRF). Le paiement a été effectué soit en USD (pour un
montant total de 2'593'750'320 USD), soit en FRF (pour un montant total de
1'385'364'786 FRF). Un acompte de 753'744'510 USD a été payé le 26 septembre
1991 par câble (telex). Le prix de base et le prix augmenté à raison de
l'amendement n°2 ont été payés par le moyen de lettres de crédit selon le
système interbancaire Swift (pour un montant total de 1'758'756'411 USD et de
1'262'936'000 FRF). Le montant ajusté selon l'art. 3.3 du contrat a été payé
sans lettre de crédit (pour un montant total de 834'993'908 USD et
122'428'786 FRF). Pour les paiements en dollars, quatorze lettres de crédit
ont été émises, la dernière le 24 juillet 1998. Les montants correspondants
ont été acheminés de la banque P.________ sur un compte ouvert au nom de la
banque S.________ auprès de la banque T.________, avec l'ordre de les
reverser sur le compte n°xxx ouvert au nom de Thomson auprès de la banque
S.________. L'acompte du 26 septembre 1991 et les autres versements sans le
moyen de lettres de crédit ont été effectués sur le compte de la banque
S.________ auprès de la banque T.________. Pour les paiements en francs
français, ne


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1A.3/2004
Date de la décision : 03/05/2004
1re cour de droit public

Analyses

Entraide internationale en matière pénale; art. 1a, 2, 5, 8 et 80p EIMP. Il est possible d'accorder l'entraide à la République de Chine (Taïwan), malgré que cet Etat ne soit pas reconnu par la Suisse (consid. 5). L'octroi de l'entraide à Taïwan est-il de nature à compromettre les intérêts essentiels de la Suisse, réservés à l'art. 1a EIMP? Question laissée indécise (consid. 6). La condition de la réciprocité est remplie (consid. 7). Exigence du respect des garanties de procédure dans la procédure pénale conduite à l'étranger (consid. 8). La condition de la prescription s'examine au regard du droit suisse en vigueur au moment du prononcé de la décision de clôture, soit, en l'occurrence, l'art. 73 ch. 1 aCP (consid. 11).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2004-05-03;1a.3.2004 ?
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