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23/12/2003 | SUISSE | N°8G.131/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 23 décembre 2003, 8G.131/2003


{T 0/2}
8G.131/2003 /pai

Arrêt du 23 décembre 2003
Chambre d'accusation

MM. les Juges Karlen, Président,
Fonjallaz, Vice-président, et Marazzi.
Greffier: M. Abrecht.

X. ________,
recourant, représenté par Me Yaël Hayat, avocate,

contre

Office fédéral de la justice, Division des affaires internationales,
Section
extraditions, Bundesrain 20, 3003 Berne.

Mandat d'arrêt en vue d'extradition,

recours contre le mandat d'arrêt en vue d'extradition délivré le 20
novembre> 2003 par l'Office fédéral de la justice.

Faits:

A.
Par message du 25 septembre 2003, complété le 27 octobre 2003,
...

{T 0/2}
8G.131/2003 /pai

Arrêt du 23 décembre 2003
Chambre d'accusation

MM. les Juges Karlen, Président,
Fonjallaz, Vice-président, et Marazzi.
Greffier: M. Abrecht.

X. ________,
recourant, représenté par Me Yaël Hayat, avocate,

contre

Office fédéral de la justice, Division des affaires internationales,
Section
extraditions, Bundesrain 20, 3003 Berne.

Mandat d'arrêt en vue d'extradition,

recours contre le mandat d'arrêt en vue d'extradition délivré le 20
novembre
2003 par l'Office fédéral de la justice.

Faits:

A.
Par message du 25 septembre 2003, complété le 27 octobre 2003,
Interpol
Belgrade a demandé l'arrestation provisoire en vue d'extradition de
X.________, suite aux mandats d'arrêt du Tribunal d'arrondissement de
Valjevo
et du 4e Tribunal communal de Belgrade décernés respectivement les 3
février
2003 et 18 juillet 2003, pour escroquerie.

X. ________ est fortement soupçonné d'avoir commis deux escroqueries.
Premièrement, en juillet et août 2002, il aurait agi comme
intermédiaire dans
une vente de framboises et réussi, moyennant des allégations
fallacieuses, à
se faire verser sur son compte personnel le montant de la transaction
(soit
quelque 33'000 EUR) par l'acheteur allemand, qui a cru payer son
fournisseur
serbe alors que ce dernier n'a rien touché. Deuxièmement, en
septembre et
octobre 2002, X.________ se serait fait livrer la quantité totale de
94'000
kg de sel en se faisant passer faussement pour l'un des responsables
d'une
tierce entreprise, et il aurait disparu sans payer son dû après avoir
reçu la
marchandise.

Le 11 novembre 2003, l'Ambassade de Serbie-et-Monténégro a transmis à
l'Office fédéral de la justice (ci-après: l'OFJ) une demande formelle
d'extradition à l'encontre de X.________. Ce dernier se trouvait en
effet
alors déjà en détention préventive pour le compte des autorités
genevoises
depuis le 15 mai 2003.

B.
Le 20 novembre 2003, l'OFJ a décerné un mandat d'arrêt en vue
d'extradition,
qui a été notifié à X.________ le 25 novembre 2003. Lors de son
audition le
25 novembre 2003 par un juge d'instruction de la République et canton
de
Genève, X.________ a reconnu être la personne visée par les mandats
d'arrêt
serbes des 3 février 2003 et 18 juillet 2003 et s'est opposé à son
extradition simplifiée au sens de l'art. 54 de la loi fédérale du 20
mars
1981 sur l'entraide internationale en matière pénale (EIMP; RS 351.1).

Par arrêt du 27 novembre 2003, la Cour correctionnelle sans jury de la
République et canton de Genève a condamné X.________, pour abus de
confiance
et faux dans les titres, à la peine de deux ans d'emprisonnement. En
sus de
cette peine ferme, une peine accessoire d'expulsion a été prononcée,
assortie
toutefois du sursis au regard des liens étroits de X.________ avec la
Suisse.
X.________ est actuellement détenu à la prison de Champ-Dollon à
Thônex.

C.
Le 5 décembre 2003, X.________ a formé un recours à la Chambre
d'accusation
du Tribunal fédéral contre le mandat d'arrêt en vue d'extradition
précité, en
concluant à son annulation et en sollicitant l'octroi de l'assistance
judiciaire.

A l'appui de son recours, X.________ fait valoir qu'il aurait des
liens très
étroits avec la Suisse, où il réside depuis 1986, actuellement au
bénéfice
d'un permis C. Depuis le décès de son épouse, survenu à Genève en
janvier
2002, il s'occupe seul de ses deux enfants qui vivent avec lui à
Genève (deux
autres enfants vivant en Serbie), à savoir A.________, âgée de 14
ans, qui
possède la nationalité suisse et poursuit actuellement sa formation
scolaire,
et B.________, âgé de 25 ans, qui est au bénéfice d'un permis C. Il
découlerait de ces circonstances que le recourant ne se soustraira
d'aucune
façon à l'extradition, si celle-ci devait être confirmée, et sa mise
en
liberté ne saurait entraver l'instruction déjà entreprise à son
endroit sur
des faits qui se seraient produits dans le courant de l'année 2002.
En outre,
le recourant serait pleinement disposé à remettre ses documents
d'identité et
à se soumettre à un contrôle régulier attestant de sa présence en
Suisse.

Invité à présenter ses observations sur le recours, l'OFJ expose que,
comme
le recourant est actuellement détenu à la prison de Champ-Dollon pour
le
compte des autorités genevoises, une mise en liberté immédiate est
exclue. Au
surplus, même s'il se trouvait uniquement en détention
extraditionnelle, le
risque de fuite ne pourrait être exclu, dès lors qu'il encourt en
Serbie-et-Monténégro une peine pouvant aller jusqu'à cinq ans
d'emprisonnement, ce qui pourrait l'encourager à prendre la fuite
vers un
pays d'où une extradition ne serait pas possible ou extrêmement
difficile à
obtenir. Le dépôt de ses papiers d'identité ne pourrait pas garantir
sa
présence en Suisse dans le cadre de la procédure d'extradition.
Concernant la
situation familiale du recourant, l'OFJ observe que sa fille a tout
de même
déjà 14 ans et que son grand frère de 25 ans vit avec elle. Cela
semble
assurer la garde de cette mineure, et le recourant a d'ailleurs déjà

trouver une solution à ce problème puisqu'il se trouve en détention
depuis
plus de six mois. Cette indépendance des enfants du recourant
laisserait
penser que ce dernier pourrait, en fin de compte, fuir une
extradition sans
que sa famille s'en trouve complètement démunie.

La Chambre considère en droit:

1.
1.1 En vertu de l'art. 48 al. 2 EIMP, la Chambre d'accusation du
Tribunal
fédéral est compétente pour connaître des recours dirigés contre le
mandat
d'arrêt à titre extraditionnel (ATF 117 IV 359 consid. 1a; 109 IV 60
consid.
1). Adressé au Président de la Chambre d'accusation (art. 216 PPF,
applicable
par analogie en vertu de l'art. 48 al. 2 EIMP) dans les dix jours à
compter
de la notification écrite du mandat d'arrêt (art. 48 al. 2 EIMP), le
recours
est formellement recevable.

1.2 Bien que le mandat d'arrêt aux fins d'extradition ne produise pas
d'effets tant que la personne poursuivie est détenue pour les besoins
d'une
instruction ou l'exécution d'un jugement (art. 49 al. 2 EIMP), le
recours à
la Chambre d'accusation du Tribunal fédéral contre ce mandat peut
être formé
dans les dix jours dès sa notification au détenu (ATF 119 Ib 74). Il
y a donc
lieu d'entrer en matière sur le recours.

2.
Ainsi que le Tribunal fédéral l'a déclaré à de nombreuses reprises, la
détention de l'accusé constitue la règle dans le cadre d'une procédure
d'extradition (ATF 117 IV 359 consid. 2a in fine; 111 IV 108 consid.
2; 109
IV 159 consid. 1; 109 Ib 58 consid. 2, 223 consid. 2b).

2.1 Exceptionnellement, le mandat d'arrêt en vue d'extradition peut
être
annulé, respectivement la mise en liberté ordonnée, s'il apparaît que
la
personne poursuivie ne se soustraira pas à l'extradition et
n'entravera pas
l'instruction (art. 47 al. 1 let. a EIMP), si un alibi peut être
fourni sans
délai (art. 47 al. 1 let. b EIMP), si la personne poursuivie ne peut
subir
l'incarcération ou si d'autres motifs le justifient (art. 47 al. 2
EIMP), si
la demande d'extradition et ses annexes ne sont pas fournies à temps
(art. 50
al. 1 EIMP) ou si l'extradition est manifestement inadmissible (art.
51 al. 1
EIMP en corrélation avec les art. 2-5 EIMP); en outre, la détention
en vue
d'extradition est levée si l'extradition est refusée (art. 56 al. 2
EIMP) ou
si l'État requérant ne prend pas en charge le détenu en temps utile
(art. 61
EIMP a contrario) (ATF 117 IV 369 consid. 2a; arrêt non publié
G.31/1995 du
21 juin 1995, consid. 1).

2.2 La question de savoir si les conditions qui justifient
l'annulation du
mandat d'arrêt, respectivement l'élargissement au cours de la
procédure
d'extradition, sont remplies dans le cas concret doit être examinée
selon des
critères rigoureux, de manière à ne pas rendre illusoire l'engagement
pris
par la Suisse de remettre la personne poursuivie, en cas d'admission
de la
demande d'extradition, à l'État qui a fait cette demande (arrêt non
publié
G.31/1995 du 21 juin 1995, consid. 1; ATF 111 IV 108 consid. 2; cf. en
l'espèce le Traité d'extradition du 28 novembre 1887 entre la Suisse
et la
Serbie, RS 0.353.981.8). C'est d'ailleurs le sens qu'il faut donner
aux art.
47 ss EIMP, de l'organisation desquels il se déduit que la détention
de
l'accusé est la règle (ATF 111 IV 108 consid. 2).

3.
En l'espèce, on ne voit pas de raisons suffisantes de s'écarter de
cette
règle et d'annuler le mandat d'arrêt en vue d'extradition. Le
recourant
allègue lui-même qu'il était au chômage avant d'être placé en
détention
préventive pour le compte des autorités genevoises. Par ailleurs, il
s'oppose
à son extradition, en faisant valoir que s'il devait faire l'objet
d'une
extradition en Serbie-et-Monténégro, sa vie serait menacée par des
personnes
qui sont en relation avec les faits pour lesquels l'extradition est
demandée
et qui voudraient nuire à ses intérêts. Comme enfin les enfants du
recourant
qui vivent avec lui à Genève ¿ apparemment seuls depuis sa mise en
détention
préventive le 15 mai 2003 ¿ semblent suffisamment indépendants pour
que le
recourant puisse le cas échéant fuir une extradition sans que sa
famille s'en
trouve complètement démunie, un risque de fuite ne saurait être
écarté malgré
les liens du recourant avec la Suisse. Dans ces circonstances, les
mesures
auxquelles le recourant se dit prêt à se soumettre (dépôt de ses
documents
d'identité et soumission à un contrôle régulier de sa présence en
Suisse) ne
fournissent pas une garantie suffisante à sa présence en vue de son
extradition pour le cas où celle-ci devrait être accordée (cf. arrêt
non
publié 1A.53/1989 du 14 mars 1989, consid. 2b). En définitive, il ne
se
justifie pas d'annuler le mandat d'arrêt en vue d'extradition décerné
le 20
novembre 2003, lequel ne produit pas d'effets tant que le recourant
est placé
en détention préventive ou en exécution de peine (art. 49 EIMP).

4.
Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté. Quoique
le
recourant n'obtienne pas gain de cause, on ne peut pas dire que ses
conclusions étaient d'emblée vouées à l'échec, de sorte qu'il convient
d'accéder à sa requête d'assistance judiciaire, la condition du
besoin étant
manifestement remplie en l'espèce (art. 152 al. 1 OJ). Le recourant
se verra
ainsi désigner comme conseil d'office pour la procédure fédérale Me
Yaël
Hayat, dont les honoraires fixés à 700 fr. seront supportés par la
Caisse du
Tribunal fédéral. Comme on ne peut considérer que le recours a été
déposé à
la légère, les frais doivent de toute manière être supportés par la
Confédération (art. 219 al. 3 PPF, applicable par analogie en vertu
de l'art.
48 al. 2 EIMP).

Par ces motifs, la Chambre prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
La demande d'assistance judiciaire du recourant est admise et Me Yaël
Hayat,
avocate, lui est désignée comme conseil d'office pour la procédure
fédérale.

3.
La Caisse du Tribunal fédéral versera à Me Yaël Hayat une indemnité
de 700
fr. à titre d'honoraires d'avocat d'office.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant et à l'Office
fédéral
de la justice, Division des affaires internationales, Section
extraditions.

Lausanne, le 23 décembre 2003

Au nom de la Chambre d'accusation
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 8G.131/2003
Date de la décision : 23/12/2003
Chambre d'accusation

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-12-23;8g.131.2003 ?
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