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22/12/2003 | SUISSE | N°5P.370/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 22 décembre 2003, 5P.370/2003


{T 0/2}
5P.370/2003 /frs

Arrêt du 22 décembre 2003
IIe Cour civile

MM. et Mme les Juges Raselli, Président,
Nordmann et Marazzi.
Greffier: M. Abrecht.

X. ________,
recourante,

contre

Ordre des avocats de Genève, ayant son siège au Palais de Justice,
place du
Bourg-de-Four 1, 1204 Genève,
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case
postale 3108,
1211 Genève 3.

(sanction contre un membre d'une association),

recours de droit public contre l'arrÃ

ªt de la Chambre civile de la
Cour de
justice du canton de Genève du 19 septembre 2003.

Faits:

A.
L'Ordre des Av...

{T 0/2}
5P.370/2003 /frs

Arrêt du 22 décembre 2003
IIe Cour civile

MM. et Mme les Juges Raselli, Président,
Nordmann et Marazzi.
Greffier: M. Abrecht.

X. ________,
recourante,

contre

Ordre des avocats de Genève, ayant son siège au Palais de Justice,
place du
Bourg-de-Four 1, 1204 Genève,
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case
postale 3108,
1211 Genève 3.

(sanction contre un membre d'une association),

recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre civile de la
Cour de
justice du canton de Genève du 19 septembre 2003.

Faits:

A.
L'Ordre des Avocats de Genève (ci-après : l'OdA ou l'Ordre) est une
association constituée au sens des art. 60 ss CC. Elle a notamment
pour but
de défendre la profession d'avocat et de sauvegarder les intérêts de
ceux qui
l'exercent, de fixer les Us et Coutumes du barreau genevois et de
veiller à
leur respect (art. 2 des statuts). L'OdA est dirigé et administré par
Conseil
de l'Ordre (art. 20 des statuts). Celui-ci veille, notamment, à ce
que les
membres de l'Ordre exercent leur profession avec dignité, observent le
respect dû aux magistrats et à leurs confrères et défendent les
intérêts qui
leur sont confiés avec probité et conscience (art. 25 ch. 2 des
statuts). Le
Conseil de l'Ordre tranche les différends d'ordre déontologique
pouvant
survenir entre les membres de l'Ordre et exerce le pouvoir
disciplinaire
(art. 25 ch. 6 et 7 des statuts). Il statue sur tout manquement
commis par
l'un des membres de l'Ordre aux devoirs professionnels tels qu'ils
sont
définis par le serment prévu à l'article 27 de la loi sur la
profession
d'avocat, par les statuts et par les Us et Coutumes du barreau de
Genève
(art. 34 des statuts). A ce titre, le Conseil de l'Ordre peut
prononcer les
sanctions suivantes : l'admonestation, l'avertissement, le blâme, la
censure
et l'exclusion, les trois dernières pouvant être assorties d'une
amende de
100 fr. à 10'000 fr. (art. 38B al. 3 et 4 des statuts). La censure
peut en
outre être communiquée au Procureur général et aux membres de
l'Ordre; pour
le surplus, la procédure devant le Bâtonnier et le Conseil est
confidentielle
(art. 39 al. 3 et 39bis des statuts).

B.
X.________ pratique comme avocate indépendante inscrite au barreau de
Genève
depuis 1975. Elle a été admise à l'OdA en 1976.

B.a Par décision du 7 juillet 1999, le Conseil de l'OdA a prononcé un
avertissement à l'encontre de X.________. Il a retenu que celle-ci
avait
enfreint l'art. 6 des statuts, ainsi que l'art. 24 des Us et
Coutumes, en
s'affranchissant de l'autorisation du Bâtonnier pour procéder au
dépôt, le 29
mars 1999, d'une plainte pénale contre quatre de ses confrères.

L'art. 6 des statuts prévoit qu'"[u]n membre de l'Ordre ne peut
procéder en
son nom personnel ou au nom d'un client contre un membre de l'Ordre
sans en
avoir au préalable saisi le Bâtonnier, qui tente de résoudre le
conflit à
l'amiable et au besoin le soumet au Conseil. Toute infraction à cette
disposition est passible d'une des sanctions prévues aux articles 38A
et
38B". L'art. 24 des Us et Coutumes dispose que "[t]out incident entre
avocats
doit être soumis immédiatement au Bâtonnier. Aucune action judiciaire
ne peut
être introduite contre un confrère sans que le litige n'ait
préalablement été
soumis au Bâtonnier, qui essaiera de l'aplanir".

B.b Le 5 décembre 2001, le Conseil de l'OdA a prononcé une décision de
censure, assortie d'une amende de 1'000 fr., à l'encontre de
X.________. Il a
considéré que celle-ci avait, d'une part, passé outre l'interdiction
du
Bâtonnier de déposer une plainte pénale susceptible d'atteindre un
confrère,
l'avocat W.________, en violation de l'art. 6 des statuts ainsi que
de l'art.
24 des Us et Coutumes, et, d'autre part, dénoncé à tort ce confrère
en lui
reprochant une violation de la règle de confidentialité prévue par
l'art. 20
des Us et Coutumes, enfreignant ainsi les art. 2, 12 et 18 des Us et
Coutumes.

Le Conseil de l'OdA a exposé dans sa décision que, lors de la séance
de
conciliation appointée le 6 juillet 2001 par le Bâtonnier,
l'attention de
X.________ avait été attirée sur le principe de l'indivisibilité de la
plainte découlant de l'art. 30 CP; cette dernière était ainsi
parfaitement
consciente qu'en agissant contre la cliente de l'avocat W.________
pour lui
reprocher des propos jugés attentatoires à son honneur contenus dans
des
écrits de son avocat, ce dernier était directement visé. Le Conseil
de l'OdA
a aussi relevé que l'avocat W.________ avait bien produit en justice,
dans le
cadre d'une procédure de mainlevée, une proposition transactionnelle
adressée
par X.________ à un autre confrère; cependant, cette production
faisait suite
au fait que X.________ avait elle-même produit en justice, dans le
cadre de
la même procédure, la lettre de refus de cette proposition
transactionnelle,
déliant ainsi son confrère de l'obligation de confidentialité, ce
qu'elle
avait tu au Bâtonnier le temps de l'instruction préparatoire.

B.c Les décisions des 7 juillet 1999 et 5 décembre 2001 n'ont pas été
communiquées aux membres de l'OdA, ni au Procureur général ou à la
Commission
du barreau.

C.
Le 20 décembre 2001, X.________ a interjeté un recours de droit
public contre
la décision du Conseil de l'OdA du 5 décembre 2001. Le Tribunal
fédéral a
déclaré ce recours irrecevable par arrêt du 24 janvier 2002
(5P.473/2001). Il
a considéré que la décision incriminée, rendue par un organe d'une
association selon les art. 60 ss CC sur la base des statuts de
celle-ci et
des Us et Coutumes du barreau genevois, pouvait faire l'objet, après
épuisement des moyens internes éventuels, de l'action en justice
prévue par
l'art. 75 CC et dont le Tribunal fédéral aurait pu connaître, le cas
échéant,
par le biais d'un recours contre le jugement de dernière instance
cantonale;
le recours était ainsi irrecevable faute d'être dirigé contre un acte
de
souveraineté cantonal au sens de l'art. 84 OJ.

D.
Le 28 février 2002, X.________ a déposé devant le Tribunal de première
instance du canton de Genève une demande principale en constatation
de la
nullité des décisions sociales prises les 7 juillet 1999 et 5
décembre 2001
par le Conseil de l'OdA ¿ ainsi qu'en cessation d'une atteinte
illicite, mais
cette conclusion a ensuite été retirée en appel ¿ et une demande
subsidiaire
en annulation de la décision sociale prononcée le 5 décembre 2001 par
le
Conseil de l'OdA.

Par jugement du 27 février 2003, le Tribunal de première instance a
débouté
X.________ de sa demande principale et a déclaré irrecevable sa
demande
subsidiaire, dépens à sa charge.

E.
Statuant par arrêt du 19 septembre 2003 sur appel de X.________, la
Chambre
civile de la Cour de justice du canton de Genève a confirmé le
jugement de
première instance et a mis les dépens à la charge de l'appelante. La
motivation de cet arrêt, dans ce qu'elle a d'utile à retenir pour
l'examen du
recours, est la suivante :
E.aL'appelante soutenait que l'OdA, en l'empêchant de déposer plainte
contre
ses confrères, respectivement en la sanctionnant pour avoir passé
outre les
injonctions du Bâtonnier, entravait son activité professionnelle,
ruinait sa
réputation et pratiquait à son encontre une stratégie de harcèlement
illicite
et contraire aux moeurs, tous motifs qui justifiaient à ses yeux la
constatation de la nullité absolue des décisions sociales des 7
juillet 1999
et 5 décembre 2001.

E.a .aLa cour cantonale a exposé que selon la jurisprudence, la
nullité
absolue d'une décision d'association ne devait être admise que
restrictivement, soit uniquement lorsque celle-ci souffrait d'un vice
de
forme caractérisé ¿ hypothèse non réalisée ni même invoquée en
l'espèce ¿ ou,
sous l'angle notamment de l'art. 27 al. 2 CC, lorsqu'elle entravait la
capacité concurrentielle et l'activité professionnelle individuelle
d'un
sociétaire dans une mesure telle que son existence économique
paraisse en
danger (ATF 104 II 6 consid. 2).

E.a .bEn l'espèce, il ressortait de l'état de fait que les sanctions
disciplinaires infligées n'avait été assorties d'aucune mesure de
publicité.
De plus, l'OdA était une association de droit privé qui ne jouissait
d'aucune
exclusivité quant à l'exercice de la profession d'avocat à Genève, et
qui
n'exerçait aucune influence sur la Commission du barreau, seule
autorité
légalement compétente pour interdire ou suspendre l'exercice de cette
profession en raison de manquements aux devoirs professionnels
prescrits par
la loi genevoise sur la profession d'avocat.

Par ailleurs, X.________ avait admis n'avoir perdu aucun mandat en
raison des
sanctions disciplinaires prises à son encontre, ni s'être vu refuser
l'autorisation d'exercer la profession d'avocat dans aucun canton,
après
s'être expliquée sur la nature de ces sanctions.

Enfin, l'appelante avait librement demandé à devenir membre de l'OdA,
s'engageant à adhérer sans réserve à ses statuts, à se soumettre aux
décisions du Conseil et de l'assemblée générale et à se conformer en
toutes
circonstances aux Us et Coutumes du barreau de Genève (art. 3 et 5 des
statuts de l'OdA). Elle était libre de sortir de l'association et
n'était dès
lors pas livrée à l'arbitraire d'un tiers pour organiser la suite de
son
activité professionnelle.

E.a .cEn conséquence, les décisions incriminées de l'OdA ne
constituaient pas
une restriction excessive des droits de la personnalité de X.________
au sens
notamment de l'art. 27 al. 2 CC, de sorte que sa demande principale en
constatation de la nullité de ces décisions devait être rejetée.
Seule la
voie de l'action en annulation de l'art. 75 CC demeurait ainsi
ouverte à
l'appelante, s'agissant de la décision du 5 décembre 2001.

E.b La cour cantonale a exposé à cet égard que la décision du Conseil
de
l'OdA du 5 décembre 2001 avait été communiquée à l'appelante le 14
décembre
2001. Déposée le 28 février 2002, l'action en annulation ne
respectait pas le
délai de péremption d'un mois de l'art. 75 CC. X.________ invoquait
toutefois
la restitution de délai de l'art. 139 CO, en exposant qu'elle avait
agi le 20
décembre 2001 en annulation de cette décision par un recours de droit
public
que le Tribunal fédéral avait déclaré irrecevable en procédant selon
elle à
une modification inopinée de sa jurisprudence.

E.b .aIl ressortait de l'art. 139 CO que le créancier ne peut jouir
d'un
délai supplémentaire de soixante jours pour faire valoir ses droits
que
lorsque son action ou a été rejetée par suite de l'incompétence du
juge
saisi, ou en raison d'un vice de forme réparable, ou encore parce
qu'elle
était prématurée, si le délai de prescription ou de péremption est
expiré
dans l'intervalle. Était considérée comme un vice de forme réparable,
au sens
de cette disposition, un manquement à une règle de procédure dont le
formalisme était sans commune mesure avec la saine administration de
la
justice, comme l'omission de la procuration de l'avocat à l'acte de la
demande ou l'omission de la communication de l'ordonnance qui
constatait
l'échec de la tentative de conciliation (Engel, Traité des
obligations en
droit suisse, 1997, p. 821).

E.b .bEn l'espèce, indépendamment du point de savoir si la décision
prise le
5 décembre 2001 par le Conseil de l'OdA pouvait faire l'objet de
l'action en
justice de l'art. 75 CC, le recours de droit public interjeté par
X.________
avait été déclaré irrecevable parce qu'il n'était pas dirigé contre
un acte
de souveraineté cantonal au sens de l'art. 84 OJ, mais contre la
décision
d'un organe d'une association selon les art. 60 ss CC. En effet, le
recours
de droit public n'était recevable que si l'acte attaqué émanait d'une
autorité cantonale agissant en vertu de la puissance publique (arrêt
5P.53/2002 du 18 février 2002 [par lequel le Tribunal fédéral a
rejeté la
demande de révision formée par X.________ de l'arrêt 5P.473/2001 du 24
janvier 2002]).

Si le non-respect par X.________ des conditions de recevabilité du
recours de
droit public était bien un vice de nature procédurale, il ne
constituait pas
l'un des motifs énumérés à l'art. 139 CO permettant au demandeur
éconduit
pour des motifs de procédure de bénéficier d'un délai supplémentaire.

En outre, contrairement à ce qu'elle prétendait, X.________ ne
pouvait pas
légitimement se croire fondée à agir comme elle l'avait fait, en
déposant un
recours de droit public. En effet, l'arrêt du 24 janvier 2002 ne
constituait
pas le bouleversement jurisprudentiel décrit par l'appelante, le
Tribunal
fédéral ayant déjà entrouvert, dans des jurisprudences antérieures,
la voie
du recours juridictionnel de l'art. 75 CC contre les décisions
disciplinaires
de l'organe de l'association (ATF 119 II 271 consid. 3c [in fine];
108 II 15
consid. 3). Il était d'ailleurs reconnu en doctrine que les sanctions
infligées pour violation des obligations incombant aux membres d'une
association, telles qu'un blâme ou une amende, pouvaient faire
l'objet d'un
contrôle judiciaire selon l'art. 75 CC (Perrin, Droit civil V, Droit
de
l'association, 1992, p. 139; Heini/Scherrer, Basler Kommentar,
Zivilgesetzbuch I, n. 8 ad art. 75 CC [déjà dans la première édition
de
1996]).

E.b .cIl n'existait ainsi aucun motif de restituer un délai à
l'appelante en
application
de l'art. 139 CO. Tardive, son action en annulation de la
décision du 5 décembre 2001 devait être déclarée irrecevable.

F.
Agissant par la voie du recours de droit public au Tribunal fédéral,
X.________ conclut avec suite de frais et dépens à l'annulation de
cet arrêt.
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Saisi d'un recours de droit public pour arbitraire, le Tribunal
fédéral
ne prend pas en considération les allégations, preuves ou faits qui
n'ont pas
été soumis à l'autorité cantonale; nouveaux, ils sont irrecevables
(ATF 119
II 6 consid. 4a; 118 III 37 consid. 2a et les arrêts cités). Le
Tribunal
fédéral s'en tient dès lors aux faits constatés par l'autorité
cantonale, à
moins que le recourant ne démontre que ces constatations sont
arbitrairement
fausses ou incomplètes (ATF 118 Ia 20 consid. 5a p. 26). Le Tribunal
fédéral
ne prendra par conséquent pas en considération les compléments ou
rectifications que la recourante, dans son long "exposé des faits
essentiels
et pertinents", entend apporter aux constatations de fait de l'arrêt
attaqué
sans démontrer que celles-ci soient arbitrairement fausses ou
incomplètes.

1.2 Le recours de droit public n'étant recevable qu'à l'encontre des
décisions prises en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 OJ), la
recourante ne peut diriger ses griefs que contre la décision de la
dernière
instance cantonale, et non contre la ou les décisions prises par les
instances précédentes (cf. ATF 125 I 492). En l'occurrence, le
recours de
droit public est formé contre l'arrêt du 19 septembre 2003 par lequel
la Cour
de justice a, d'une part, rejeté la demande principale en
constatation de la
nullité des décisions sociales prises les 7 juillet 1999 et 5
décembre 2001
par le Conseil de l'OdA (cf. lettre E.a supra) et, d'autre part,
déclaré
irrecevable la demande subsidiaire en annulation de la décision
sociale
prononcée le 5 décembre 2001 par le Conseil de l'OdA (cf. lettre E.a
supra).
La recourante ne peut ainsi s'en prendre qu'à ces décisions de la
Cour de
justice, et non aux décisions du Conseil de l'OdA des 7 juillet 1999
et 5
décembre 2001.

1.3 Selon la jurisprudence, l'arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst.,
ne
résulte pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en
considération ou même qu'elle serait préférable; le Tribunal fédéral
n'annulera la décision attaquée que lorsque celle-ci est manifestement
insoutenable, qu'elle se trouve en contradiction claire avec la
situation de
fait, qu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique
indiscuté,
ou encore lorsqu'elle heurte de manière choquante le sentiment de la
justice
et de l'équité; pour qu'une décision soit annulée pour cause
d'arbitraire, il
ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut
encore
que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 129 I 8
consid.
2.1 et les arrêts cités).

2.
2.1La recourante se plaint d'abord d'une appréciation arbitraire des
preuves
en tant que la cour cantonale aurait constaté, de manière absolument
contraire au dossier, que la recourante se serait affranchie de
l'autorisation du Bâtonnier pour déposer une plainte pénale le 29
mars 1999
(cf. lettre B.a supra), qu'elle aurait passé outre l'interdiction du
Bâtonnier de déposer une plainte pénale susceptible d'atteindre
l'avocat
W.________, et enfin qu'elle aurait violé une obligation de
confidentialité
envers ce dernier (cf. lettre B.b supra).
Ces constatations ne sont pas le fait de la cour cantonale, qui s'est
bornée
à rappeler la motivation des décisions sociales prises les 7 juillet
1999 et
5 décembre 2001 par le Conseil de l'OdA. Elles sont de toute façon
sans
pertinence sur l'issue du litige. En effet, la cour cantonale a
considéré,
sur la demande principale, que les décisions sociales prises les 7
juillet
1999 et 5 décembre 2001 par le Conseil de l'OdA ne pouvaient pas être
considérées comme nulles dès lors qu'elles n'entravaient de toute
manière pas
la capacité concurrentielle et l'activité professionnelle
individuelle de la
recourante dans une mesure telle que son existence économique
paraisse en
danger (cf. lettre E.a supra). Cette argumentation est absolument
indépendante du point de savoir si les décisions sociales incriminées
reposaient sur des constatations de fait exactes ou au contraire
arbitrairement fausses, puisque l'entrave à la capacité
concurrentielle et à
l'activité professionnelle de la recourante est exactement la même
dans les
deux cas. Quant à l'argumentation qui a conduit la cour cantonale à
juger
irrecevable la demande subsidiaire en annulation de la décision
sociale du 5
décembre 2001 (cf. lettre E.b supra), elle se révèle tout aussi
indépendante
du point de savoir si cette décision reposait ou non sur des
constatations de
fait arbitraires. Partant, le grief d'appréciation arbitraire des
preuves
formulé par la recourante apparaît d'emblée impropre à démontrer que
l'arrêt
attaqué serait arbitraire dans son résultat (cf. consid. 1.3 supra)
et doit
pour ce motif être écarté.

2.2 La recourante invoque une violation de son droit d'être entendue
du fait
que les juges cantonaux n'ont pas donné suite à sa requête d'audition
du
Bâtonnier Argand; en effet, cette audition aurait permis d'établir
d'une part
que l'autorisation sollicitée préalablement au dépôt de la plainte
pénale du
29 mars 1999 avait été octroyée ¿ comme l'avait retenu le premier
juge ¿ et,
d'autre part, que le Bâtonnier ne peut pas refuser l'autorisation
sollicitée
si la médiation a échoué.
Ces faits apparaissent toutefois sans pertinence pour l'issue du
litige. En
effet, comme on l'a vu (cf. consid. 2.1 supra), l'argumentation qui a
conduit
la cour cantonale à rejeter la demande principale et à déclarer
irrecevable
la demande subsidiaire est absolument indépendante du point de savoir
si les
décisions sociales prises les 7 juillet 1999 et 5 décembre 2001 par le
Conseil de l'OdA reposaient sur une constatation arbitraire des
faits. Or
l'art. 29 al. 2 Cst., qui garantit le droit d'être entendu, ne
confère aux
parties le droit d'obtenir qu'il soit donné suite à leurs offres de
preuves
qu'à la condition ¿ parmi d'autres ¿ qu'il s'agisse de prouver des
faits
pertinents (ATF 126 I 15 consid. 2a/aa et les arrêts cités). Le moyen
tiré de
la violation de cette disposition ne peut par conséquent qu'être
écarté.

2.3 C'est également en vain que la recourante se plaint d'une
application
arbitraire de l'art. 6 des statuts de l'OdA ainsi que des art. 20 et
24 des
Us et Coutumes. En effet, même si le Conseil de l'OdA, en rendant ses
décisions des 7 juillet 1999 et 5 décembre 2001, devait avoir
appliqué les
dispositions précitées de manière arbitraire ¿ point sur lequel la
Cour de
justice n'a pas pris position, se bornant à résumer la motivation des
décisions en question ¿, cela n'aurait aucune incidence sur le
raisonnement
juridique par lequel la cour cantonale a considéré, d'une part, que
ces
décisions sociales n'étaient pas nulles et, d'autre part, que la
demande
subsidiaire en annulation formée par la recourante contre la seconde
de ces
décisions était tardive (cf. consid. 2.1 supra).

2.4 La recourante se prévaut ensuite d'une violation du principe
nulla poena
sine lege consacré par l'art. 7 CEDH; elle expose que, dans la mesure
où la
seule obligation de l'avocat serait de soumettre tout litige entre
avocats au
Bâtonnier, elle aurait été sanctionnée à deux reprises pour des actes
qui ne
constituaient pas des violations des statuts ni des Us et Coutumes de
l'OdA.
Ce moyen ne peut qu'être écarté du fait déjà que les sanctions
disciplinaires
prises à l'encontre d'un avocat ¿ y compris des amendes s'élevant à
plusieurs
milliers de francs ¿ ne constituent pas, selon la jurisprudence, une
peine au
sens de l'art. 7 CEDH (ATF 128 I 346 consid. 2.2 et 2.3).
2.5 La recourante invoque par ailleurs une violation du principe de
l'égalité, de l'interdiction de l'abus de droit (art. 17 CEDH) et de
la
prohibition de l'arbitraire (art. 9 Cst.). Elle fait valoir qu'elle a
été
sanctionnée à deux reprises pour avoir exercé le droit fondamental de
faire
constater par un tribunal la fausseté de graves accusations formulées
à son
encontre, ces sanctions étant au surplus motivées par le fait qu'elle
n'avait
pas obtenu d'autorisation bâtonnale pour procéder, alors qu'une action
identique accomplie par l'ex-Bâtonnier Bonnant avait été jugée
conforme aux
statuts et aux Us et Coutumes de l'OdA. L'arrêt attaqué, en tant qu'il
confirmerait une décision abusive (sanction pour exercice d'un droit
fondamental) et consacrerait une inégalité de traitement, serait ainsi
insoutenable et arbitraire.
Cette argumentation méconnaît le fait que par l'arrêt attaqué, la cour
cantonale n'a pas confirmé les décisions sociales incriminées : elle
a rejeté
la demande principale en constatation de la nullité et déclaré
irrecevable la
demande subsidiaire en annulation pour des motifs qui ne sauraient
être
affectés par le point de savoir si les décisions sociales prises les 7
juillet 1999 et 5 décembre 2001 par le Conseil de l'OdA ont été ou non
rendues en violation des principes invoqués par la recourante. Les
griefs de
la recourante apparaissent ainsi mal fondés en tant qu'ils sont
dirigés
contre l'arrêt de la Cour de justice, et irrecevables en tant qu'ils
sont
dirigés contre les décisions sociales prises les 7 juillet 1999 et 5
décembre
2001 par le Conseil de l'OdA (cf. consid. 1.2 supra).

2.6 La recourante se plaint enfin d'une violation de son droit
d'accès à un
tribunal, garanti par les art. 6 § 1 CEDH et 30 Cst., du fait qu'elle
n'a pas
pu faire examiner judiciairement la décision disciplinaire du 5
décembre
2001. Selon elle, dans la mesure où, suite à un changement de
jurisprudence,
la voie du recours de droit public au Tribunal fédéral n'était plus
ouverte,
l'art. 139 CO ¿ instaurant un délai supplémentaire pour ouvrir une
action mal
introduite bien qu'en temps utile ¿ devrait s'appliquer si l'on
interprète de
bonne foi et sans formalisme excessif le texte de cette disposition.
Cette critique est mal fondée. L'accès aux tribunaux n'est garanti
que dans
les formes et les délais prescrits par la loi. En l'espèce, l'action
en
annulation de la décision sociale du 5 décembre 2001 était
incontestablement
tardive au regard de l'art. 75 CC. Seule entrait donc en ligne de
compte la
possibilité de reconnaître à la recourante le bénéfice d'un délai
supplémentaire en application par analogie de l'art. 139 CO. Or la
motivation
par laquelle la cour cantonale a exposé que la recourante ne pouvait
se
prévaloir de cette disposition en l'espèce (cf. lettre E.b supra)
échappe à
la critique. La recourante ne prétend d'ailleurs elle-même pas que la
voie du
recours de droit public ait jamais été ouverte contre des décisions du
Conseil de l'OdA, lesquelles n'émanent pas d'une autorité cantonale
agissant
en vertu de la puissance publique, et il ne s'agit manifestement pas
là d'un
vice de forme réparable au sens de l'art. 139 CO.

3.
En définitive, le recours se révèle mal fondé en tant qu'il est
recevable et
ne peut ainsi qu'être rejeté dans cette même mesure, avec suite de
frais pour
son auteur (art. 156 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge de la
recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie à la recourante, à l'Ordre
des
avocats de Genève et à la Chambre civile de la Cour de justice du
canton de
Genève.

Lausanne, le 22 décembre 2003

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.370/2003
Date de la décision : 22/12/2003
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-12-22;5p.370.2003 ?
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