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18/12/2003 | SUISSE | N°5C.108/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 18 décembre 2003, 5C.108/2003


{T 0/2}
5C.108/2003 /frs

Séance du 18 décembre 2003
IIe Cour civile

MM. et Mmes les Juges Raselli, Président, Nordmann, Escher, Meyer et
Hohl.
Greffière: Mme Krauskopf

A.________, (époux),
défendeur et recourant, représenté par Me Jean-Franklin Woodtli,
avocat,

contre

Dame A.________, (épouse),
demanderesse et intimée, représentée par Me Madjid Lavassani, avocat,

effets accessoires du divorce (prévoyance professionnelle,
contribution
d'entretien),

recours en rÃ

©forme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de
justice
du canton de Genève du 14 mars 2003.

Faits:

A.
A....

{T 0/2}
5C.108/2003 /frs

Séance du 18 décembre 2003
IIe Cour civile

MM. et Mmes les Juges Raselli, Président, Nordmann, Escher, Meyer et
Hohl.
Greffière: Mme Krauskopf

A.________, (époux),
défendeur et recourant, représenté par Me Jean-Franklin Woodtli,
avocat,

contre

Dame A.________, (épouse),
demanderesse et intimée, représentée par Me Madjid Lavassani, avocat,

effets accessoires du divorce (prévoyance professionnelle,
contribution
d'entretien),

recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de
justice
du canton de Genève du 14 mars 2003.

Faits:

A.
A. ________, né le 1er février 1943, et dame A.________, née le 10
février
1943, se sont mariés le 11 novembre 1966. Trois enfants, aujourd'hui
majeurs,
sont issus de leur union. Les conjoints vivent séparés depuis avril
1994.

A. ________ travaille en qualité d'ingénieur ETS. Il est affilié à
une caisse
de prévoyance depuis plus de 33 ans. Il pourrait prendre une retraite
anticipée, mais il a choisi de continuer à travailler. Dame
A.________, qui a
une formation de jardinière d'enfants, s'est consacrée à la tenue du
ménage
et à l'éducation des enfants. En 1979, elle a pris un emploi
accessoire dans
la vente. Depuis 1998, elle travaille en qualité de vendeuse dans un
magasin
de chaussures à raison de 80%. Elle est également affiliée à une
caisse de
prévoyance.

B.
Le 27 novembre 2000, dame A.________ a ouvert une action en divorce, à
laquelle son époux ne s'est opposé qu'en ce qui concerne la
liquidation du
régime matrimonial, le partage des avoirs de prévoyance
professionnelle et la
contribution d'entretien.
Par jugement du 30 mai 2002, le Tribunal de première instance de
Genève a
prononcé le divorce, condamné le défendeur à verser à la demanderesse
33'196
fr. 50 à titre de liquidation du régime matrimonial et ordonné le
partage par
moitié de la prestation de sortie de l'épouse et le transfert de
1'670 fr. à
la caisse de prévoyance de l'époux. Il a également condamné le
défendeur à
verser à la demanderesse un montant de 1'217 fr. 60 par mois jusqu'à
concurrence de 438'327 fr. à titre d'indemnité équitable au sens de
l'art.
124 CC, ainsi qu'une contribution d'entretien selon l'art. 125 CC de
1'000
fr. par mois - indexée pour autant que le revenu du débiteur le soit -
jusqu'à l'âge de la retraite de celle-ci.
Statuant sur appel et appel incident le 14 mars 2003, la Cour de
justice du
canton de Genève a réformé le premier jugement et fixé l'indemnité
équitable
à 1'860 fr. par mois jusqu'à concurrence de 647'164 fr. 80 et la
contribution
d'entretien à 1'910 fr. par mois jusqu'en février 2008, puis à 600
fr. par
mois jusqu'au décès de l'ex-épouse.

C.
Contre cet arrêt, A.________ exerce un recours en réforme au Tribunal
fédéral, concluant, sur le fond, au versement d'une indemnité
équitable
viagère de 600 fr. par mois dès le moment où il touchera une rente de
son
institution de prévoyance et d'une contribution d'entretien viagère
mensuelle
de 600 fr. L'intimée propose le rejet du recours et la confirmation de
l'arrêt attaqué. Elle sollicite le bénéfice de l'assistance
judiciaire.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
L'arrêt attaqué tranche une contestation civile portant sur des
droits de
nature pécuniaire (ATF 116 II 493 consid. 2a p. 495; 95 II 68 consid.
2d),
dont la valeur litigieuse atteint manifestement 8'000 fr. Formé en
temps
utile contre une décision finale prise par le tribunal suprême du
canton, le
recours est recevable au regard des art. 46, 48 al. 1, 54 al. 1 et 34
al. 1
let. a OJ.

2.
La cour cantonale a renoncé à trancher la question de savoir si les
expectatives de prévoyance des époux pouvaient encore être partagées
lorsque
l'un d'eux a atteint la limite d'âge réglementaire pour prendre une
retraite
anticipée, au motif que les parties et le premier juge admettaient
tous
l'impossibilité du partage. Constatant que l'ex-époux pourrait
prendre une
retraite anticipée, elle a fixé l'indemnité équitable due par
celui-ci à son
ex-épouse à 1'860 fr. par mois jusqu'à concurrence de 647'164 fr. 80.
Elle a
par ailleurs ordonné le partage par moitié de la prestation de sortie
de
l'ex-épouse.
La Cour de justice a procédé ensuite au calcul des revenus des
ex-époux, de
leurs minimums vitaux LP et de leurs disponibles. Elle a considéré
que le
solde disponible de l'ex-époux devait servir en premier lieu au
versement de
l'indemnité équitable de 1'860 fr., puis à la couverture du déficit de
l'ex-épouse de 86 fr. 50, le solde restant devant être partagé par
moitié
entre les ex-époux. Elle a ainsi arrêté la contribution d'entretien de
l'ex-épouse à 1'910 fr. par mois jusqu'en février 2008, puis à 600
fr. par
mois jusqu'à son décès.
D'après l'arrêt attaqué, le défendeur dispose donc, en sus de son
minimum
vital LP, de 1'825 fr. par mois et la demanderesse de 1'823 fr. 50, à
quoi
s'ajoute l'indemnité équitable de 1'860 fr. Lorsqu'il sera à la
retraite, le
défendeur aura encore 1'057 fr. en sus de son minimum vital.

3.
Le défendeur reproche tout d'abord à la cour cantonale d'avoir violé
l'art.
124 CC en le condamnant à payer immédiatement une indemnité équitable
mensuelle de 1'860 fr., alors qu'il n'a pas pris de retraite
anticipée et ne
touche donc pas de prestations de sa caisse de prévoyance. Il conclut
au
versement d'une indemnité équitable viagère de 600 fr. par mois dès
le jour
où il touchera de telles prestations.

3.1 Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral applique le
droit
d'office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties,
mais il
n'est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 63 al. 2
OJ), ni par
l'argumentation juridique retenue par la cour cantonale (art. 63 al.
3 OJ;
ATF 128 III 22 consid. 2e/cc p. 29; 127 III 248 consid. 2c p. 252 s.;
126 III
59 consid. 2a p. 65). Il peut donc admettre un recours pour d'autres
motifs
que ceux invoqués par le recourant (ATF 127 III 248 consid. 2c p. 252
s.).
3.2 En vertu de l'art. 122 al. 1 CC, tant qu'aucun cas de prévoyance
n'est
survenu, le juge du divorce doit partager par moitié les prestations
de
sortie. Par convention, les époux peuvent toutefois renoncer en tout
ou en
partie à leur droit à la moitié de la prestation de sortie, à
condition
qu'ils bénéficient d'une autre manière d'une prévoyance vieillesse et
invalidité équivalente (art. 123 al. 1 CC), ce que le juge doit
vérifier
d'office (art. 141 al. 3 CC). Lorsqu'un cas de prévoyance est déjà
survenu
pour l'un des époux ou pour les deux, le juge doit fixer une indemnité
équitable (art. 124 al. 1 CC).
Devant le tribunal de première instance, les parties avaient conclu
toutes
deux au partage par moitié des prestations de sortie, mais, sur
invitation du
juge, qui estimait l'art. 122 al. 1 CC inapplicable dès lors que
l'époux
avait la possibilité de prendre une retraite anticipée, elles ont
pris des
conclusions tendant à l'attribution d'une indemnité équitable de
l'art. 124
CC, sur le montant de laquelle elles sont demeurées divisées. On
n'est donc
pas en présence d'une convention des parties au sens de l'art. 123
al. 1 CC.
Il s'impose dès lors d'examiner si les prestations de sortie doivent
être
partagées conformément à l'art. 122 al. 1 CC ou s'il y a lieu de
fixer une
indemnité équitable au sens de l'art. 124 al. 1 CC.

3.3 L'art. 22 al. 1 de la loi fédérale du 17 décembre 1993 sur le
libre
passage dans la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et
invalidité (LFLP; RS 831.42) prévoit qu'en cas de divorce, les
prestations de
sortie acquises durant le mariage sont partagées conformément aux
art. 122,
123, 141 et 142 CC. L'application de l'art. 122 al. 1 CC présuppose
donc que
l'époux dispose d'un droit à une prestation de sortie à l'encontre de
son
institution de prévoyance (cf. ATF 128 V 41 consid. 3b p. 48; 127 III
433
consid. 2b p. 437 et les références). Savoir si un tel droit existe
est une
difficulté relative au rapport de prévoyance, qui relève de la
compétence
matérielle du juge des assurances sociales (ATF 128 V 41 consid. 1b
et 2c in
fine); toutefois, le juge du divorce, qui doit régler le sort de la
prévoyance professionnelle des époux, doit examiner cette question à
titre
préjudiciel (ATF 128 V 41 consid. 3b p. 49 et la référence).

3.3.1 Aux termes de l'art. 2 al. 1 LFLP, si l'assuré quitte
l'institution de
prévoyance avant la survenance d'un cas de prévoyance, il a droit à
une
prestation de sortie. La survenance du cas de prévoyance est donc le
critère
décisif pour juger de l'existence du droit à une prestation de sortie
de
l'assuré à l'égard de sa caisse. Les art. 122 al. 1 et 124 al. 1 CC
reprennent ce critère. Ainsi, tant qu'aucun cas de prévoyance n'est
survenu,
le droit à la prestation de sortie existe; dès qu'il s'est produit,
il n'y a
plus de droit à une prestation de sortie. En règle générale, le cas de
prévoyance "vieillesse" se produit, pour les hommes, dès qu'ils ont
atteint
l'âge de 65 ans et, pour les femmes, dès qu'elles ont atteint l'âge
de 62 ans
(art. 13 al. 1 let. a et b de la loi fédérale du 25 juin 1982 sur la
prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité; LPP,
RS
831.40). Les dispositions réglementaires de l'institution de
prévoyance
peuvent toutefois prévoir que le droit aux prestations de vieillesse
prend
naissance dès le jour où l'activité lucrative prend fin (art. 13 al.
2 1ère
phrase LPP).
Interprétant l'art. 2 al. 1 en relation avec l'art. 1 al. 2 LFLP, le
Tribunal
fédéral des assurances a jugé que l'assuré n'a droit à la prestation
de
sortie que s'il quitte la caisse avant d'avoir atteint l'âge
réglementaire
pour prendre une retraite anticipée. Il a ainsi nié l'existence du
droit à la
prestation de sortie lorsque la résiliation du rapport de travail
intervient
à un âge auquel l'assuré peut, en vertu des dispositions du règlement
de
l'institution de prévoyance, prétendre à des prestations de
vieillesse au
titre de la retraite anticipée (ATF 129 V 381 consid. 4 p. 382; 126 V
89
consid. 5a p. 92 [question laissée ouverte]; 120 V 306 consid. 4a p.
309
[ancien droit]).
Cette jurisprudence ne peut pas être appliquée lorsque les
prestations de
sortie doivent être partagées entre les époux en cas de divorce,
contrairement à ce que proposent Schneider/Bruchez (La prévoyance
professionnelle et le divorce, in Le nouveau droit du divorce,
Lausanne 2000,
p. 221 et note 121). Le conjoint ne saurait être privé de la moitié
des
avoirs de prévoyance à laquelle il a droit en cas de divorce en vertu
de
l'art. 122 al. 1 CC; selon la volonté du législateur, chaque époux a
un droit
inconditionnel à la moitié des expectatives de prévoyance constituées
pendant
le mariage (ATF 129 III 577 consid. 4 p. 578; cf. Message concernant
la
révision du code civil suisse du 15 novembre 1995, in FF 1996 I 1 ss,
101).
En cas de divorce, la survenance du cas de prévoyance "vieillesse" se
produit
donc au moment où l'assuré perçoit réellement des prestations de
vieillesse
de son institution de prévoyance professionnelle, et non pas déjà dès
l'instant où il pourrait prendre une retraite anticipée selon le
règlement de
son institution de prévoyance. Tant que l'assuré ne reçoit pas de
telles
prestations, il dispose d'une prestation de sortie à l'égard de sa
caisse; le
partage de celle-ci est donc possible et le conjoint y a droit en
vertu de
l'art. 122 al. 1 CC. Inversement, dès que l'assuré touche des
prestations,
son droit à la prestation de sortie s'éteint; un partage n'est
techniquement
plus possible et seule une indemnité équitable peut être fixée
conformément à
l'art. 124 al. 1 CC (ATF 129 V 444 consid. 5.1 p. 446 et les
références).
Cette solution est retenue par la doctrine quasi unanime (Geiser,
Vorsorgeausgleich: Aufteilung bei Vorbezug für Wohneigentumserwerb
und nach
Eintreten eines Vorsorgefalls, FamPra 2002 p. 86 et Berufliche
Vorsorge im
neuen Scheidungsrecht, in: Vom alten zum neuen Scheidungsrecht, n.
2.97;
Baumann/Lauterburg, Praxiskommentar, Scheidungsrecht 2000, n. 18 et
20 ad
art. 122 CC; Walser, Commentaire bâlois, n. 4 ad art. 124 CC; Trigo
Trindade,
Prévoyance professionnelle, divorce et succession, SJ 2000 II p. 493;
Kieser,
Ehescheidung und Eintritt des Vorsorgefalles der beruflichen Vorsorge
-
Hinweise für die Praxis, PJA 2001 p. 155, 156; Grütter/Summermatter,
Erstinstanzliche Erfahrungen mit dem Vorsorgeausgleich bei Scheidung,
insbesondere nach Art. 124 ZGB, FamPra 2002 p. 641, 647;
Sutter/Freiburghaus,
Kommentar zum neuen Scheidungsrecht, n. 3 ad art. 124 CC. Contra:
Schneider/
Bruchez, op. cit., p. 221 et note 121).

3.3.2 A la date déterminante de l'entrée en force du prononcé du
divorce,
soit au jour du dépôt de la réponse et de l'appel incident du
défendeur le 12
septembre 2002, le défendeur n'avait pas pris de retraite anticipée;
il
travaillait encore. Il était donc titulaire d'une prétention à une
prestation
de sortie à l'égard de son institution de prévoyance. La demanderesse
travaillait encore elle aussi. Aucun cas de prévoyance "vieillesse"
n'était
donc survenu ni pour l'un, ni pour l'autre des époux (art. 124 al. 1
CC a
contrario). Les prestations de sortie des parties, calculées pour la
durée du
mariage, doivent par conséquent être partagées par moitié
conformément
à
l'art. 122 al. 1 et 2 CC.
Le partage par moitié de la prestation de sortie de la demanderesse a
déjà
été ordonné par le Tribunal de première instance, un montant de 1'670
fr.
ayant été transféré à la caisse de prévoyance du défendeur; il n'a
pas été
remis en cause dans la présente procédure. Il reste donc à partager la
prestation de sortie du défendeur. Le juge du divorce ne devant fixer
que la
proportion dans laquelle le partage doit être effectué (art. 142 al.
1 CC),
la Cour de céans ordonnera, conformément à l'art. 122 al. 1 CC, le
partage
par moitié de la prestation de sortie constituée par le défendeur
pendant la
durée du mariage.

3.4 Cela étant, l'arrêt attaqué doit être annulé en ce qui concerne
l'indemnité équitable de l'art. 124 CC (chiffre 5 du dispositif) et le
partage par moitié de la prestation de sortie constituée par le
défendeur
pendant la durée du mariage, soit du 12 novembre 1966 au 12 septembre
2002,
doit être ordonné.
A réception du présent arrêt, la cour cantonale transférera l'affaire
au juge
des assurances du lieu du divorce (art. 142 al. 2 CC; 73 al. 1 LPP),
qui est
compétent pour exécuter le partage (art. 25a al. 1 LFLP) et qui
déterminera
le montant précis des avoirs de prévoyance du défendeur qui doit être
transféré à la caisse de prévoyance de la demanderesse (ATF 129 V 444
consid.
5.2 p. 447; 128 V 41 consid. 2c p. 46).

4.
Bien que l'annulation de l'indemnité équitable de 1'860 fr. par mois
ait pour
conséquence une diminution correspondante des charges de l'ex-époux
et donc
une augmentation de son disponible (cf. consid. 2 ci-dessus), la
juridiction
de réforme ne peut pas augmenter d'office la contribution d'entretien
de
l'ex-épouse (art. 125 CC). Le juge du divorce doit certes procéder au
partage
des prestations de sortie et tenir compte de son résultat lors de la
fixation
de la contribution d'entretien du conjoint. Cette façon de faire que
lui
impose l'art. 125 al. 2 ch. 8 CC ne change toutefois rien au fait
qu'il est
lié par les conclusions des parties. La contribution d'entretien du
conjoint
au sens de l'art. 125 CC est en effet soumise au principe de
disposition (ATF
129 III 417 consid. 2.1.2 p 420; 128 III 411 consid. 3.2.2. p. 414).
Ainsi,
en l'absence de recours principal ou de recours joint de la
demanderesse sur
le montant de la contribution d'entretien qui lui a été alloué par la
cour
cantonale, la juridiction de réforme ne peut pas l'augmenter (art. 63
al. 1
OJ), et ce quand bien même elle est saisie de la question de la
quotité de
cette contribution par le recours en réforme du défendeur.

5.
Il reste donc à examiner les griefs du défendeur quant au montant de
la
contribution d'entretien de 1'910 fr. arrêté par la cour cantonale. Le
défendeur reproche à celle-ci de n'avoir pas tenu compte de différents
éléments et, partant, d'avoir violé l'art. 125 CC et notamment son
al. 3 ch.
2. Il s'engage à verser à ce titre 600 fr. par mois.

5.1 Selon l'art. 125 al. 1 CC, si l'on ne peut raisonnablement
attendre d'un
époux qu'il pourvoie lui-même à son entretien convenable, y compris la
constitution d'une prévoyance vieillesse appropriée, son conjoint lui
doit
une contribution équitable. Cette disposition concrétise deux
principes:
d'une part, celui du "clean break", qui veut que, dans la mesure du
possible,
chaque époux doive acquérir son indépendance économique et subvenir
lui-même
à ses propres besoins après le divorce; d'autre part, celui de la
solidarité,
qui implique que les conjoints sont responsables l'un envers l'autre
non
seulement des effets que le partage des tâches adopté durant le
mariage a pu
avoir sur la capacité de gain de l'un d'eux, mais également des
autres motifs
qui empêcheraient celui-ci de pourvoir lui-même à son entretien (cf.
Message
du Conseil fédéral du 15 novembre 1995 concernant la révision du code
civil
suisse, FF 1996 I 1 ss, 31 s.). L'obligation d'entretien repose donc
sur les
besoins de l'époux demandeur. Si l'on ne peut attendre de lui qu'il
augmente
sa capacité de travail ou reprenne une activité lucrative interrompue
à la
suite du mariage, une contribution lui est due pour assurer son
entretien
convenable. Dans son principe, comme dans son montant et sa durée,
cette
allocation doit être fixée en tenant compte des éléments énumérés de
façon
non exhaustive à l'art. 125 al. 2 CC.

5.2 Le défendeur soutient tout d'abord que la Cour de justice a
mentionné le
revenu de la demanderesse de 2'935 fr. 25 dans la partie "En fait" de
son
arrêt, mais qu'elle n'en a pas tenu compte lors de la fixation de la
contribution d'entretien.
Ce grief est infondé. En page 5 de son arrêt, la cour cantonale a
fait état
d'un revenu mensuel total (salaire + revenu sur la fortune) net de
2'939 fr.
et d'un minimum vital élargi de 3'025 fr. 50, d'où un déficit de 86
fr. 50,
qu'elle a pris en considération dans la détermination du montant de la
contribution en page 14.

5.3 Le défendeur reproche aussi à la Cour de justice de n'avoir pas
tenu
compte du fait que le revenu de la demanderesse pourrait être plus
élevé si
elle travaillait comme vendeuse à 100%, que, si elle reprenait son
activité
de jardinière d'enfants, elle pourrait réaliser un salaire de 6'000
fr. par
mois et, partant, d'avoir violé l'art. 125 al. 3 ch. 2 CC .

5.3.1 Savoir si l'on peut raisonnablement exiger du créancier une
augmentation de son revenu est une question de droit, qui peut être
revue en
instance de réforme. En revanche, savoir quel revenu une personne a la
possibilité effective de réaliser est une question de fait, qui ne
peut être
remise en cause par la voie du recours en réforme (ATF 128 III 4
consid.
4c/bb p. 7; 126 III 10 consid. 2b p. 12-13).

5.3.2 La Cour de justice a retenu que l'état de santé de la
demanderesse ne
lui permettait en aucun cas d'augmenter son taux d'activité comme
vendeuse.
Au vu de cette constatation de fait, qui lie le Tribunal fédéral
(art. 63 al.
2 OJ), on ne saurait reprocher à la cour cantonale d'avoir violé le
droit
fédéral en ne retenant pas un revenu hypothétique.
Lorsqu'il soutient que, compte tenu de sa formation, la demanderesse
serait
en mesure de reprendre une activité de jardinière d'enfants et de
réaliser un
salaire de 6'000 fr., le défendeur ne tient aucun compte de la
motivation de
la cour cantonale, selon laquelle une reconnaissance de la formation
de la
demanderesse ne pourrait entrer en considération que pour un poste
auprès
d'une institution genevoise de la petite enfance et que la reprise
d'une
telle activité après de nombreuses années, à un âge avancé, est
quasiment
impossible. Son grief est donc irrecevable (art. 55 al. 1 let. c OJ;
ATF 116
II 745 consid. 3 p. 749).
Dès lors qu'il ne se fonde sur aucun fait constaté et n'est même pas
motivé,
le grief de violation de l'art. 125 al. 3 ch. 2 CC est également
irrecevable
(art. 55 al. 1 let. c OJ; ATF 116 II 745 consid. 3 p. 749).

5.4 Le défendeur fait encore valoir que ses charges mensuelles de
5'000 fr.
ne lui permettent pas de faire face au paiement de la contribution
d'entretien de 1'910 fr. et de l'indemnité équitable de 1'860 fr.
Dans la mesure où il se fonde sur des charges supérieures à celles de
3'047
fr. retenues par la cour cantonale, sa critique est irrecevable.
Par ailleurs, force est de constater que le défendeur dispose d'un
revenu
mensuel net de 8'642 fr., que son minimum vital légèrement élargi est
de
3'047, que l'indemnité équitable de 1'860 fr. a été supprimée (cf.
consid. 3
ci-dessus) et que son disponible est donc de 5'595 fr. Quant à la
demanderesse, elle a un revenu de 2'939 fr. et un minimum vital
légèrement
élargi de 3'025 fr. 50, d'où un déficit de 86 fr. 50. Le paiement de
la
contribution d'entretien de 1'910 fr. fixée par la cour cantonale
laisse au
demandeur un solde de 3'685 fr. en sus de son minimum vital, alors
que la
demanderesse dispose de son côté d'un montant de 1'823 fr. 50 en sus
de son
minimum vital. A l'évidence, un tel résultat ne viole pas le droit
fédéral.

6.
Dans ses conclusions, le défendeur conclut également à l'annulation du
chiffre 6 du dispositif du jugement, qui concerne la liquidation du
régime
matrimonial. Dès lors que son mémoire de recours ne contient aucun
grief sur
ce point, il n'y a pas lieu d'entrer en matière (art. 55 al.1 let. c
OJ).

7.
Au vu de ce qui précède, le recours doit être partiellement admis
dans la
mesure où il est recevable. Les frais de la procédure seront donc mis
par
moitié à la charge de chaque partie (art. 156 al. 3 OJ) et les dépens
seront
compensés. La cause sera renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle
décision
sur les frais et dépens des instances cantonales.
La requête d'assistance judiciaire de la demanderesse est rejetée,
dès lors
qu'il n'est pas établi qu'elle soit indigente. Comme elle l'indique
elle-même, elle dispose d'un revenu mensuel net moyen de 3'329 fr. 25
(2'939
fr. selon l'arrêt attaqué) et d'une pension provisoire de 1'953 fr.,
soit au
total de 5'282 fr. 25 alors que ses charges incompressibles, impôts
compris,
se montent, selon ses indications, à 3'073 fr. Elle ne peut invoquer
ses
retards d'impôts pour faire admettre qu'elle est indigente. Il
ressort en
outre des constatations de fait de l'arrêt attaqué qu'elle dispose
d'une
fortune de 33'196 fr. 50, à la suite de la liquidation du régime
matrimonial,
somme qui pourrait être mise à contribution pour payer ses frais de
procès
(ATF 119 Ia 11 consid. 5 p. 12 et la jurisprudence citée). Au
demeurant, il
n'est pas établi qu'une provisio ad litem ne pourrait lui être
allouée à
cette fin (ATF 91 II 253 consid. 1 p. 255).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours en réforme est partiellement admis dans la mesure où il est
recevable, l'arrêt attaqué est annulé en ce qui concerne l'indemnité
équitable de l'art. 124 CC (chiffre 5) et il est réformé comme suit:

Le partage par moitié des avoirs de prévoyance constitués par
A.________
pendant la durée du mariage est ordonné.

2.
Le requête d'assistance judiciaire de la demanderesse est rejetée.

3.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis par moitié à la charge
des
parties.

4.
Les dépens sont compensés.

5.
La cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision
sur les
frais et dépens des instances cantonales.

6.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à la
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 18 décembre 2003

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5C.108/2003
Date de la décision : 18/12/2003
2e cour civile

Analyses

Art. 122 al. 1 et 124 al. 1 CC; époux qui pourrait prendre une retraite anticipée, mais continue à exercer une activité professionnelle. La question de savoir si un époux dispose au moment du divorce d'un droit à une prestation de sortie peut être examinée à titre préjudiciel par le juge du divorce (consid. 3.3). La survenance du cas de prévoyance vieillesse au sens des art. 122 et 124 CC se produit au moment où l'assuré perçoit réellement des prestations de vieillesse (consid. 3.3.1).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-12-18;5c.108.2003 ?
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