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12/12/2003 | SUISSE | N°B.78/03

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 12 décembre 2003, B.78/03


{T 7}
B 78/03

Arrêt du 12 décembre 2003
Ire Chambre

MM. et Mme les Juges Schön, Président, Borella, Widmer, Kernen et
Frésard.
Greffier : M. Wagner

Fondation Fonds de prévoyance de X.________, recourante, représentée
par Me
Paul-Arthur Treyvaud, avocat, rue du Casino 1, 1400 Yverdon-les-Bains,

contre

P.________, intimé, représenté par le Syndicat Industrie & Bâtiment,
Section
nord vaudois, Haldimand 23, 1400 Yverdon-les-Bains

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne<

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(Jugement du 18 mars 2003)

Faits:

A.
P. ________ a travaillé au service de X.________ jusqu'au 31 déce...

{T 7}
B 78/03

Arrêt du 12 décembre 2003
Ire Chambre

MM. et Mme les Juges Schön, Président, Borella, Widmer, Kernen et
Frésard.
Greffier : M. Wagner

Fondation Fonds de prévoyance de X.________, recourante, représentée
par Me
Paul-Arthur Treyvaud, avocat, rue du Casino 1, 1400 Yverdon-les-Bains,

contre

P.________, intimé, représenté par le Syndicat Industrie & Bâtiment,
Section
nord vaudois, Haldimand 23, 1400 Yverdon-les-Bains

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 18 mars 2003)

Faits:

A.
P. ________ a travaillé au service de X.________ jusqu'au 31 décembre
1992,
date à laquelle ses rapports de travail ont pris fin ensuite de
résiliation
de ceux-ci par l'employeur. Durant ses rapports de travail, il a été
affilié
à la Fondation Fonds de prévoyance de X.________ (ci-après : la
Fondation).
Celle-ci avait conclu un contrat d'assurance de groupe auprès de COOP
Société
d'assurance pour la Vie. Ce contrat prévoyait, dans le cas du
prénommé, le
versement d'un capital en cas de vieillesse échéant le 1er septembre
2016 ou
le même capital en cas de décès avant cette date. Selon les
attestations de
COOP délivrées à l'intéressé, le début de l'assurance remontait au 1er
janvier 1985.

B.
Le 15 juillet 1998, P.________, représenté par le Syndicat Industrie &
Bâtiment SIB a saisi l'autorité de surveillance des fondations et
institutions de prévoyance du canton de Vaud pour lui demander
d'intervenir
auprès de la Fondation afin que celle-ci lui verse une prestation de
libre
passage. La Fondation a fait valoir que l'intéressé n'avait pas droit
à une
telle prestation, aux motifs que le fonds de prévoyance était soumis
à un
régime spécial, qu'il était uniquement alimenté par des contributions
patronales et qu'aucune prestation n'était versée quand les rapports
de
travail étaient résiliés par l'employeur.

C.
P.________ a assigné la Fondation en paiement «d'une prestation de
libre
passage calculée sur la base des dispositions légales applicables». La
défenderesse n'a pas répondu à la demande. Le 18 mars 2003, le
Tribunal des
assurances du canton de Vaud a admis la demande dans son principe et
statué
que le demandeur avait droit à une prestation de libre passage, avec
intérêts
dès le 1er janvier 1993, déterminée en application de l'art. 28 aLPP.

D.
La Fondation interjette un recours de droit administratif dans lequel
elle
conclut à l'annulation de ce jugement. P.________ conclut au rejet du
recours. Quant à l'Office fédéral des assurances sociales, il propose
de
l'admettre partiellement dans le sens de ses déterminations.

Considérant en droit:

1.
La recourante produit pour la première fois en procédure fédérale les
statuts
de la Fondation du 28 juin 1990, ainsi que le règlement du Fonds de
prévoyance de X.________ adopté le 16 août 1990 en application de
l'art. 11
al. 4 des statuts. Il en résulte que la Fondation alloue des
prestations
complémentaires de vieillesse, de survivants et d'invalidité, selon
un plan
et des critères préétablis. Selon les informations fournies par
l'OFAS, elle
n'est pas inscrite au registre de la prévoyance professionnelle (art.
48
LPP). Il s'agit ainsi d'une fondation en faveur du personnel au sens
de
l'art. 89bis CC.

2.
Sur le plan de la procédure, il en résulte que les voies de droit
prévue par
l'art. 73 LPP sont ouvertes entre un ayant droit et la Fondation.
L'art. 73
LPP s'applique en effet, d'une part, aux institutions de prévoyance
enregistrées de droit privé ou de droit public - aussi bien en ce qui
concerne les prestations minimales obligatoires qu'en ce qui concerne
les
prestations s'étendant au-delà (art. 49 al. 2 LPP) - et, d'autre
part, aux
fondations de prévoyance en faveur du personnel non enregistrées
(art. 89bis
al. 6 CC; ATF 128 II 389 consid. 2.1.1, 128 V 44 consid. 1b, 258
consid. 2a,
127 V 35 consid. 3b et les références).
La Fondation a conclu un contrat d'assurance avec la société COOP.
L'assureur
et la Fondation sont seuls parties à ce contrat. Le travailleur est
l'assuré,
qui ne peut en principe pas faire valoir un droit propre contre la
société
COOP, mais contre la Fondation uniquement (Brühwiler, Die betriebliche
Personalvorsorge in der Schweiz, p. 466 ch. 38 s.).
C'est donc à bon droit que les premiers juges - statuant comme
tribunal
cantonal au sens de l'art. 73 al. 1 LPP - sont entrés en matière sur
la
demande dont ils étaient saisis. Le jugement attaqué est ainsi
susceptible de
recours devant le Tribunal fédéral des assurances (art. 73 al. 4 LPP).

3.
La Loi sur le libre passage (LFLP), entrée en vigueur le 1er janvier
1995, ne
s'applique pas en l'espèce, le cas invoqué de libre passage étant
survenu
antérieurement à cette date. De même les anciennes dispositions de la
LPP sur
le libre passage ne sont pas non plus applicables, s'agissant d'une
fondation
de prévoyance non enregistrée (art. 5 al. 2 LPP). C'est donc à tort
que les
premiers juges ont considéré que l'intimé avait droit à une
prestation de
libre passage selon les art. 27 aLPP et 28 aLPP.

4.
S'agissant d'une institution de prévoyance - enregistrée ou non
enregistrée -
qui pratique la prévoyance professionnelle plus étendue, il convient
donc de
se référer en l'occurrence aux art. 331a et 331b CO dans leur teneur
en
vigueur avant le 1er janvier 1995 (ATF 117 V 227 consid. 5b; Riemer:
Das
Recht der beruflichen Vorsorge in der Schweiz, § 5 ch. m. 6 p. 110).
Ces
dispositions fixent le montant minimum de la créance du travailleur
en cas de
versement de cotisations d'assurance-vieillesse survivants ou
invalidité à un
fonds d'épargne (art. 331a aCO) ou à une institution d'assurance
(art. 331b
aCO) et qu'il n'en reçoit pas de prestations à la fin du contrat de
travail.
En l'occurrence, selon les pièces produites, on est visiblement en
présence
d'une institution d'assurance (et non d'un fonds d'épargne), dans la
mesure
où les prestations sont fixées selon une planification et une
mutualisation
propre à l'assurance, soit en l'occurrence une rente de vieillesse
s'élevant
à un certain pourcentage du salaire assuré par année de service, des
prestations complémentaires en cas de décès ou d'invalidité si les
prestations n'atteignent pas un minimum fixé à l'art. 2 du règlement
(voir
sur la notion d'institution d'assurance : ATF 126 V 168 consid. 6b;
Riemer,
op. cit., § 2 ch. m. 15 p. 53; Brühwiler, op. cit., p. 98 ch. 7;
Jacques-André Schneider, Les régimes complémentaires de retraite en
Europe :
Libre circulation et participation, Etude de droit suisse et comparé,
thèse
Genève 1994, p. 327).
Dans le cas d'une institution d'assurance, la créance du travailleur
correspond au moins aux contributions du travailleur, déduction faite
des
prestations versées en couverture d'un risque pour la durée des
rapports de
travail (art. 331b al. 1 aCO); si les cotisations du travailleur et de
l'employeur ou, en vertu d'un accord, de l'employeur seulement, ont
porté sur
cinq années ou davantage, la créance du travailleur comprend une part
équitable, eu égard aux années de cotisations, de la réserve
mathématique
calculée au moment où prend fin le contrat (art. 331b al. 2 aCO).
Cette
réglementation était de caractère relativement impératif, les
institutions de
prévoyance pouvant adopter une réglementation divergente, pour autant
que
celle-ci accorde au salarié des droits équivalents (ATF 117 V 227
consid. 5b,
114 V 246 consid. 6a). La réserve mathématique doit être calculée de
manière
telle que la contre-valeur des contributions futures du travailleur
et de
l'employeur fixées par règlement vienne en déduction de la
contre-valeur des
prestations futures, compte tenu d'un éventuel déficit technique
(art. 331b
al. 4 aCO).
Le droit du travailleur est indépendant d'une contribution propre de
sa part,
pour autant qu'il existe un accord entre employeur et salarié;
l'existence
d'une telle convention doit être admise si le travailleur se voit
reconnaître
un droit réglementaire à des prestations (Willi HummelPuerta, Die
Freizügigkeit in der freiwilligen Beruflichen Vorsorge, Diss.
Saint-Gall
1983, p. 133), ce qui est le cas en l'espèce. Il ne s'agit pas, en
effet,
d'une fondations patronale de bienfaisance, laquelle offre des
prestations à
titre gracieux, c'est-à-dire en dehors de toute obligation
réglementaire
(Jacques-André Schneider, Fonds libres et liquidations de caisses de
pensions, Eléments de jurisprudence, in : RSAS 2001 p. 451 s., en
part. p.
478/479; arrêt du Tribunal fédéral du 10 octobre 2002 [2A.189/2002]).

5.
Le dossier contient un règlement séparé de la Fondation, adopté par le
Conseil de fondation le 20 novembre 1991. Ce règlement détermine
notamment
le sort de la réserve mathématique en cas de départ avant l'âge de la
retraite. Il est prévu qu'en cas de congé donné par l'employeur,
aucune
prestation n'est allouée à l'affilié. En cas de «départ prématuré», la
prestation de sortie est fonction des «années d'assurance». Elle
s'élève à 5
pour cent dès la 6ème année, à 10 pour cent dès la 7ème année, à 20
pour cent
dès la 8ème année et à 10 pour cent de plus pour chaque année
supplémentaire.
En cas de «licenciement collectif important», le travailleur a droit
à la
totalité de la réserve mathématique.
On constate d'emblée que ce règlement n'est pas conforme à la loi,
dans la
mesure où il stipule que le travailleur n'a droit à aucune prestation
lorsque
l'employeur donne le congé. On doit ainsi admettre que cette clause
n'est pas
opposable à l'intimé.

6.
Il résulte de ce qui précède que le l'intimé a en principe droit à une
prestation de libre passage. Mais c'est à l'aune des dispositions du
code des
obligations ci-dessus exposées que la cause doit être examinée. La
Cour de
céans ne dispose pas des renseignements nécessaires pour fixer
elle-même le
montant de la prestation en cause. On ignore au demeurant si l'intimé
a été
licencié dans le cadre d'un licenciement collectif. En outre, les
parties ne
se sont pas prononcées à ce sujet au regard du droit applicable. Il
convient
donc de renvoyer la cause aux premiers juges pour qu'ils complètent
les faits
et statuent à nouveau.

7.
Vu la nature du litige, la procédure est gratuite (art. 134 OJ).
La Fondation recourante obtient gain de cause dans la mesure où son
recours
tend à l'annulation du jugement attaqué. Cependant, dès lors qu'elle
n'a pas
déposé de réponse en procédure cantonale et que c'est seulement
devant le
Tribunal fédéral des assurances qu'elle a produit des documents
permettant de
définir le cadre juridique du litige, il y a lieu d'allouer des
dépens à
l'intimé - qui est au bénéfice d'une représentation qualifiée au sens
de la
jurisprudence (ATF 126 V 11 consid. 2) - à la charge de la recourante
(art.
159 al. 5 OJ en corrélation avec les art. 156 al. 6 et 135 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est admis en ce sens que le jugement attaqué du 18 mars
2003 est
annulé, la cause étant renvoyée au Tribunal des assurances du canton
de Vaud
pour complément d'instruction et nouvelle décision au sens des motifs.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
La recourante versera à l'intimé la somme de 1'000 fr. (y compris la
taxe sur
la valeur ajoutée) à titre de dépens pour l'instance fédérale.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des
assurances du
canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 12 décembre 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la Ire Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : B.78/03
Date de la décision : 12/12/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-12-12;b.78.03 ?
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