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09/12/2003 | SUISSE | N°8G.125/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 09 décembre 2003, 8G.125/2003


{T 0/2}
8G.125/2003 /pai

Arrêt du 9 décembre 2003
Chambre d'accusation

MM. les Juges Karlen, Président,
Fonjallaz, Vice-président, et Marazzi.
Greffier: M. Denys.

X. ________,
recourant, représenté par Me Jean-Marc Carnicé, avocat,

contre

Ministère public de la Confédération, Taubenstrasse 16, 3003 Berne.

Ordonnance de suspension (art. 106 PPF),

recours contre l'ordonnance du Ministère public de la Confédération
du 7
novembre 2003.

Faits:

A.
Le

8 octobre 2003, X._______ a porté plainte auprès du Ministère
public de la
Confédération contre A._______, B._______ et inconnu pour ...

{T 0/2}
8G.125/2003 /pai

Arrêt du 9 décembre 2003
Chambre d'accusation

MM. les Juges Karlen, Président,
Fonjallaz, Vice-président, et Marazzi.
Greffier: M. Denys.

X. ________,
recourant, représenté par Me Jean-Marc Carnicé, avocat,

contre

Ministère public de la Confédération, Taubenstrasse 16, 3003 Berne.

Ordonnance de suspension (art. 106 PPF),

recours contre l'ordonnance du Ministère public de la Confédération
du 7
novembre 2003.

Faits:

A.
Le 8 octobre 2003, X._______ a porté plainte auprès du Ministère
public de la
Confédération contre A._______, B._______ et inconnu pour actes
exécutés sans
droit par un Etat étranger (art. 271 CP), soit une infraction qui
ressortit à
la juridiction fédérale (art. 340 ch. 1 al. 7 CP). En bref, X._______
a
expliqué avoir reçu par voie postale en 1998 et 1999 à son domicile
genevois
des actes d'exécution forcée émanant de services fiscaux français.

B.
Par ordonnance du 3 novembre 2003, le Département fédéral de justice
et
police, agissant en vertu d'une délégation de compétence du Conseil
fédéral,
a refusé l'autorisation de poursuite contre A._______, B._______ et
inconnu.
Il en ressort que l'infraction invoquée (art. 271 CP) constitue un
délit
politique dont la poursuite doit être autorisée par le Conseil
fédéral selon
l'art. 105 PPF; que le mode de notification choisi par les autorités
françaises n'était pas valable sur le territoire suisse, à défaut
d'un traité
entre la Suisse et la France sur la transmission d'actes d'ordre
administratif; que toutefois, les autorités fédérales ont toujours
exigé des
actes d'une certaine gravité pour autoriser la poursuite pénale; qu'en
l'occurrence, les faits sont de peu de gravité et ne justifient pas
d'autoriser la poursuite.

C.
Par ordonnance du 7 novembre 2003, le Ministère public de la
Confédération,
en application de l'art. 106 PPF, a suspendu l'enquête de police
judiciaire
contre A._______, B._______ et inconnu. Il a en particulier rappelé le
contenu de l'ordonnance du 3 novembre 2003 du Département fédéral de
justice
et police, a indiqué qu'il avait requis l'Office fédéral de la
justice de
vérifier s'il y avait lieu d'adresser une note de protestation à la
France et
a conclu qu'il se justifiait de suspendre l'enquête.

D.
X._______ recourt à la Chambre d'accusation du Tribunal fédéral. Il
conclut à
l'annulation de l'ordonnance de suspension du 7 novembre 2003 et au
renvoi de
la cause au Ministère public de la Confédération pour ouverture d'une
instruction préparatoire.

La Chambre considère en droit:

1.
1.1 L'ordonnance de suspension du 7 novembre 2003 a été rendue en
application
de l'art. 106 PPF. Cette disposition prévoit en particulier à son
alinéa 1
que lorsqu'il n'y a pas de motif d'ouvrir l'instruction préparatoire,
le
procureur général suspend les recherches. Une décision prise sur
cette base
revient à mettre fin à la poursuite pénale en cours (cf. FF 1929 II
p. 638 ad
art. 107). En d'autres termes, une telle décision correspond à un
classement
ou non-lieu.

1.2 La première question à résoudre est de déterminer si le recourant
a
qualité pour attaquer l'ordonnance de suspension devant la Chambre
d'accusation du Tribunal fédéral. Le recourant fonde sa qualité pour
recourir
sur l'art. 105bis al. 2 PPF. Selon cette disposition, les opérations
et les
omissions du procureur général peuvent faire l'objet d'une plainte à
la
Chambre d'accusation du Tribunal fédéral en vertu des art. 214 à 219
PPF;
l'art. 214 al. 2 PPF ouvre une plainte aux parties, ainsi qu'à toutes
personnes à qui la décision du procureur général fait subir un
préjudice
illégitime; le délai pour recourir est de cinq jours (art. 217 PPF).

L'art. 105bis al. 2 PPF assure la possibilité d'un contrôle
judiciaire par le
Tribunal fédéral de l'activité du procureur général dans la procédure
d'investigation (ATF 129 IV 197 consid. 1.5 p. 200). Un recours fondé
sur
l'art. 105bis al. 2 PPF concerne donc les opérations de l'enquête en
tant que
telle. Une décision de suspension au sens de l'art. 106 PPF sort de
ce cadre
car il ne s'agit pas d'une décision relative à un acte
d'investigation mais
d'une décision qui met fin à la procédure. L'art. 105bis al. 2 PPF ne
saurait
donc ouvrir un recours contre une ordonnance de suspension.

L'art. 106 al. 1bis PPF donne à la victime au sens de l'art. 2 de la
loi
fédérale sur l'aide aux victimes d'infractions (LAVI; RS 312.5) la
possibilité de recourir dans un délai de dix jours contre la décision
de
suspension. L'art. 106 PPF ne prévoit aucune autre hypothèse de
recours. La
systématique légale exclut d'envisager que l'alinéa 1bis ait pour
unique
fonction d'assurer à la victime LAVI un délai plus long pour recourir
contre
une décision qui serait aussi attaquable en vertu de l'art. 105bis
al. 2 PPF
(dix jours au lieu de cinq). Il faut conclure que l'art. 106 PPF
régit seul
la voie de recours contre une décision de suspension, qu'il réserve
en vertu
de son alinéa 1bis exclusivement à la victime LAVI.
A noter au demeurant qu'il importe peu qu'au pied de l'ordonnance
attaquée,
le Ministère public de la Confédération ait mentionné la faculté de
recourir
sur la base de l'art. 105bis al. 2 PPF, une indication erronée ne
pouvant pas
créer un recours qui n'existe pas (ATF 129 IV 197 consid. 1.5 p.
200/201).

1.3 Il convient d'examiner si le recourant est une victime LAVI,
ainsi que
l'exige l'art. 106 al. 1bis PPF. Par victime LAVI, on entend toute
personne
qui a subi, du fait d'une infraction, une atteinte directe à son
intégrité
corporelle, sexuelle ou psychique (ATF 129 IV 197 consid. 1.6 p. 201).

L'infraction invoquée par le recourant est celle réprimée par l'art.
271 ch.
1 CP, qui punit en particulier de l'emprisonnement ou, dans les cas
graves,
de la réclusion, le comportement de celui qui, sans y être autorisé,
aura
procédé sur le territoire suisse pour un Etat étranger à des actes qui
relèvent des pouvoirs publics. Cette infraction fait partie du titre
treizième du Code pénal concernant les crimes ou délits contre l'Etat
et la
défense nationale. Le bien juridique protégé est la souveraineté
territoriale
ainsi que l'indépendance de la Confédération (cf. Thomas Hopf, Basler
Kommentar, Strafgesetzbuch II, 2003, art. 271 CP n. 5; Stefan
Trechsel,
Kurzkommentar, 2ème éd., Zurich 1997, art. 271 CP n. 1). Le titulaire
du bien
juridique est donc l'Etat, à l'exclusion des personnes privées qui ne
peuvent
le cas échéant qu'être atteintes indirectement. Il s'ensuit que
l'infraction
en cause n'est pas susceptible de léser directement le recourant dans
un
intérêt personnel et juridiquement protégé. Le recourant n'est donc à
l'évidence pas une victime LAVI, ne pouvant se réclamer d'une atteinte
directe à son intégrité corporelle, sexuelle ou psychique (dans le
même sens,
cf. ATF 129 IV 197 consid. 1.6 p. 201).

1.4 Faute d'être une victime LAVI, le recourant n'est pas légitimé à
recourir
contre l'ordonnance de suspension. Son recours est ainsi irrecevable.

2.
En raison de l'indication erronée des voies de recours contenue dans
l'ordonnance attaquée, il est statué sans frais.

Par ces motifs, la Chambre prononce:

1.
Le recours est irrecevable.

2.
Il n'est pas perçu de frais.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant,
au
Ministère public de la Confédération et à M. A.________ et Mme
B.________
(pour ces derniers, respectivement inspecteur des impôts et receveur
principal, Direction des services fiscaux, Paris Ouest, la
notification
intervient également par voie postale, conformément à l'art. X de
l'Accord du
28 octobre 1996 entre le Conseil fédéral suisse et le Gouvernement de
la
République française en vue de compléter la Convention européenne
d'entraide
judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959 [RS 0.351.934.92]).

Lausanne, le 9 décembre 2003

Au nom de la Chambre d'accusation
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 8G.125/2003
Date de la décision : 09/12/2003
Chambre d'accusation

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-12-09;8g.125.2003 ?
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