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02/12/2003 | SUISSE | N°I.67/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 02 décembre 2003, I.67/02


{T 7}
I 67/02

Arrêt du 2 décembre 2002
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Meyer et Kernen. Greffier : M.
Berthoud

S.________, recourant, représenté par Me Jean-Daniel Kramer, avocat,
avenue
Léopold-Robert 88, 2301 La Chaux-de-Fonds,

contre

Office AI du canton de Neuchâtel, Espacité 4-5, 2302 La
Chaux-de-Fonds,
intimée

Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, Neuchâtel

(Jugement du 10 décembre 2001)

Faits :

A.
A.a Le 23 septembr

e 1998, S.________ a introduit une demande de rente
de
l'assurance-invalidité. A l'issue de son instruction, l'Office de
l'assuranc...

{T 7}
I 67/02

Arrêt du 2 décembre 2002
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Meyer et Kernen. Greffier : M.
Berthoud

S.________, recourant, représenté par Me Jean-Daniel Kramer, avocat,
avenue
Léopold-Robert 88, 2301 La Chaux-de-Fonds,

contre

Office AI du canton de Neuchâtel, Espacité 4-5, 2302 La
Chaux-de-Fonds,
intimée

Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, Neuchâtel

(Jugement du 10 décembre 2001)

Faits :

A.
A.a Le 23 septembre 1998, S.________ a introduit une demande de rente
de
l'assurance-invalidité. A l'issue de son instruction, l'Office de
l'assurance-invalidité du canton de Neuchâtel (l'office AI) a rejeté
la
demande, par décision du 28 mars 2000, au motif que sa capacité de
travail
était entière dans son activité professionnelle habituelle et qu'il
n'était
pas invalide. Pour statuer, l'office AI disposait notamment d'une
expertise
rhumatologique du docteur A.________, du 16 novembre 1999.

Par jugement du 31 août 2000, le Tribunal administratif du canton de
Neuchâtel a rejeté le recours que l'assuré avait formé contre la
décision du
28 mars 2000. Ce jugement n'a pas été attaqué et est entré en force.

A.b S.________ a présenté une nouvelle demande de rente, le 10
janvier 2001.
Il a fait état d'une arthrose importante et d'un problème au ménisque
du
genou droit, d'une atteinte à la colonne lombaire, de douleurs
cervicales,
dans la nuque et le bras droit, et d'un problème de disque; par
ailleurs, il
a indiqué qu'il ne pouvait marcher qu'avec des cannes. L'assuré n'a
produit
aucun avis médical à l'appui de sa demande, mais il a mentionné le
nom du
médecin qui le suivait, savoir le docteur B.________ à Y.________,
tout en
précisant que l'atteinte à la santé existait depuis le 7 novembre
1997.

Dans un projet de décision du 2 avril 2001, l'office AI a fait savoir
à
l'assuré qu'il envisageait de ne pas entrer en matière sur sa demande
de
prestations, dès lors qu'il n'avait pas rendu plausible que son
invalidité
s'était modifiée de manière à influencer ses droits. Il lui a imparti
un
délai de 14 jours pour se déterminer. Par lettre du 26 avril 2001, le
mandataire de l'assuré a répondu qu'il avait «requis différents avis
médicaux
afin de démontrer que le cas de S.________ a connu une détérioration
notable
depuis le dépôt du rapport du docteur A.________». Il a invité
l'administration à attendre ces documents avant de rendre sa décision.

Le 21 juin 2001, l'office AI a rappelé à l'assuré qu'il restait sans
nouvelles de sa part. Il lui a dès lors imparti un dernier délai
échéant le
10 juillet 2001 pour se déterminer, après quoi il statuerait par voie
de
décision sujette à recours. Par écriture du 10 juillet 2001, l'assuré
a
répondu qu'il ne disposait toujours pas des renseignements qu'il avait
demandés. Il a requis une nouvelle prolongation du délai, jusqu'à fin
août
2001, pour déposer ses observations.

Par décision du 11 juillet 2001, l'office AI a refusé d'entrer en
matière sur
la demande de prestations du 10 janvier 2001.

B.
S.________ a déféré cette décision au Tribunal administratif du
canton de
Neuchâtel, en concluant à son annulation et au renvoi de la cause à
l'office
AI pour instruction complémentaire. Il a produit deux rapports
médicaux
émanant des docteurs C.________ (du 12 juillet 2001) et B.________
(du 3
septembre 2001).

La juridiction de recours l'a débouté par jugement du 10 décembre
2001.

C.
S.________ interjette recours de droit administratif contre ce
jugement dont
il demande l'annulation ainsi que celle de la décision du 11 juillet
2001,
avec suite de dépens, en concluant derechef au renvoi de la cause à
l'office
AI pour instruction complémentaire et nouvelle décision. Il requiert
l'audition des docteurs B.________ et C.________.

L'intimé conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit :

1.
La loi fédérale sur la partie générale des assurances sociales (LPGA)
du 6
octobre 2000, entrée en vigueur le 1er janvier 2003, n'est pas
applicable au
présent litige, dès lors que le juge des assurances sociales n'a pas à
prendre en considération les modifications du droit ou de l'état de
fait
postérieures à la date déterminante de la décision litigieuse du 11
juillet
2001 (ATF 127 V 467 consid. 1, 121 V 366 consid. 1b).

2.
Lorsque la rente ou l'allocation pour impotent a été refusée parce
que le
degré d'invalidité était insuffisant ou parce qu'il n'y avait pas
d'impotence, la nouvelle demande ne peut être examinée que si
l'assuré rend
plausible que son invalidité ou son impotence s'est modifiée de
manière à
influencer ses droits (art. 87 al. 3 et 4 RAI). Cette exigence doit
permettre
à l'administration qui a précédemment rendu une décision de refus de
prestations entrée en force, d'écarter sans plus ample examen de
nouvelles
demandes dans lesquelles l'assuré se borne à répéter les mêmes
arguments,
sans alléguer une modification des faits déterminants (ATF 125 V 412
consid.
2b, 117 V 200 consid. 4b et les références).

Lorsqu'elle est saisie d'une nouvelle demande, l'administration doit
commencer par examiner si les allégations de l'assuré sont, d'une
manière
générale, plausibles. Si tel n'est pas le cas, l'affaire est liquidée
d'entrée de cause et sans autres investigations par un refus d'entrée
en
matière. A cet égard, l'administration se montrera d'autant plus
exigeante
pour apprécier le caractère plausible des allégations de l'assuré que
le laps
de temps qui s'est écoulé depuis sa décision antérieure est bref.
Elle jouit
sur ce point d'un certain pouvoir d'appréciation que le juge doit en
principe
respecter. Ainsi, le juge ne doit examiner comment l'administration a
tranché
la question de l'entrée en matière que lorsque ce point est litigieux,
c'est-à-dire quand l'administration a refusé d'entrer en matière en se
fondant sur l'art.87 al. 4 RAI et que l'assuré a interjeté recours
pour ce
motif. Ce contrôle par l'autorité judiciaire n'est en revanche pas
nécessaire
lorsque l'administration est entrée en matière sur la nouvelle
demande (ATF
109 V 114 consid. 2b).

3.
En bref, le recourant reproche à l'office intimé de n'avoir pas
respecté le
principe inquisitoire régissant l'instruction de sa demande de
prestations,
par le fait d'avoir omis d'élucider d'office les faits pertinents de
sa
cause. A ses yeux, l'intimé aurait dû attendre d'être en possession
des avis
médicaux qu'il avait requis avant de statuer. Il soutient aussi que la
situation était différente de l'éventualité où l'administration
écarte une
demande en raison du défaut de collaborer de l'assuré, laquelle
n'était, à
son avis, pas réalisée.

4.
Dans un arrêt du 16 octobre 2003 en la cause D. (I 249/01), prévu
pour la
publication dans le Recueil officiel, le Tribunal fédéral des
assurances a
modifié sa jurisprudence relative à l'art. 87 al. 3 RAI (dans sa
teneur en
vigueur jusqu'au 31 décembre 2002) et jugé que le principe
inquisitoire,
selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés
d'office
par l'autorité (cf. ATF 125 V 195 consid. 2, 122 V 158 consid. 1a et
les
références), ne s'applique pas à cette procédure. Eu égard au
caractère
atypique de celle-ci dans le droit des assurances sociales, la Cour
de céans
a précisé que l'administration pouvait appliquer par analogie l'art.
73 RAI
(en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002; actuellement, voir l'art. 43
al. 3
LPGA) - qui permet aux organes de l'AI de statuer en l'état du
dossier en cas
de refus de l'assuré de coopérer - à la procédure régie par l'art. 87
al. 3
RAI, à la condition de s'en tenir aux principes découlant de la
protection de
la bonne foi (cf. art. 5 al. 3 et 9 Cst.; arrêt B. du 13 juillet
2000, H
290/98). Ainsi, lorsqu'un assuré introduit une nouvelle demande de
prestations ou une procédure de révision sans rendre plausible que son
invalidité ou son impotence se sont modifiés, notamment en se bornant
à
renvoyer à des pièces médicales qu'il propose de produire
ultérieurement ou à
des avis médicaux qui devraient selon lui être recueillis d'office,
l'administration doit lui impartir un délai raisonnable pour déposer
ses
moyens de preuve, en l'avertissant qu'elle n'entrera pas en matière
sur sa
demande pour le cas où il ne se plierait pas à ses injonctions.
Enfin, cela
présuppose que les moyens proposés soient pertinents, en d'autres
termes
qu'ils soient de nature à rendre plausible les faits allégués.

Cette nouvelle jurisprudence vaut pour les cas futurs, ainsi que pour
les
affaires pendantes devant un tribunal au moment de son changement
(cf. ATF
122 V 184 consid. 3b, RAMA 2000 n° U 370 p. 106 consid. 2, avec les
références citées).

5.
A partir du 2 avril 2001, jour où l'intimé a fait savoir au recourant
qu'il
n'avait pas rendu plausibles les faits qu'il alléguait, l'intéressé a
bénéficié d'un délai de plus de trois mois (compte tenu d'une ultime
prolongation accordée le 21 juin 2001) pour se déterminer et déposer
ses
moyens de preuve. En pareilles circonstances (proximité temporelle de
la
précédente décision de refus; allégués non documentés), un tel délai
précédant le refus d'entrée en matière du 11 juillet 2001, doit être
qualifié
de raisonnable. S'il fallait suivre le raisonnement du recourant,
l'administration devrait suspendre indéfiniment le traitement de ce
genre de
demandes.

C'est dès lors à juste titre que l'intimé a refusé d'entrer en
matière sur la
nouvelle demande de prestations, car son auteur n'avait pas rendu
plausible,
comme cela le lui incombait dans le délai imparti, que le degré de son
invalidité s'était modifié de manière à influencer ses droits. Le
recours est
donc mal fondé, sans qu'il soit nécessaire d'entendre les témoins
cités par
le recourant.

6.
Le 12 septembre 2001, le recourant a produit deux rapports des
docteurs
C.________ et B.________ (datés des 12 juillet et 3 septembre 2001)
devant le
Tribunal administratif. Ces avis pourraient le cas échéant justifier
une
nouvelle demande de prestations, au sens de l'art. 87 al. 3 RAI,
point sur
lequel il n'incombe toutefois pas à la Cour de céans de s'exprimer en
l'état.

Il sied dès lors de transmettre la cause à l'intimé, afin qu'il se
prononce à
ce sujet par voie de décision.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est rejeté.

2.
La cause est transmise à l'intimé afin qu'il procède conformément au
consid.
6.

3.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal
administratif du
canton de Neuchâtel et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 2 décembre 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIIe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.67/02
Date de la décision : 02/12/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-12-02;i.67.02 ?
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