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28/11/2003 | SUISSE | N°4C.279/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 28 novembre 2003, 4C.279/2002


{T 0/2}
4C.279/2002 /ech

Arrêt du 28 novembre 2003
Ire Cour civile

MM. les Juges Corboz, Président, Walter et Favre.
Greffière: Mme de Montmollin.

A. ________,
demanderesse et recourante, représentée par
Me François Chaudet,

contre

B.________,
défendeur et intimé, représenté par Me Baptiste Rusconi.

Contrat de vente immobilière; simulation; libération de dette

Recours en réforme contre le jugement de la Cour civile du Tribunal
cantonal
du canton de Vaud du 25 octobr

e 2001.

Faits:

A.
Le 8 novembre 1988, B.________, père de trois autres enfants d'un
premier
lit, et sa fille a...

{T 0/2}
4C.279/2002 /ech

Arrêt du 28 novembre 2003
Ire Cour civile

MM. les Juges Corboz, Président, Walter et Favre.
Greffière: Mme de Montmollin.

A. ________,
demanderesse et recourante, représentée par
Me François Chaudet,

contre

B.________,
défendeur et intimé, représenté par Me Baptiste Rusconi.

Contrat de vente immobilière; simulation; libération de dette

Recours en réforme contre le jugement de la Cour civile du Tribunal
cantonal
du canton de Vaud du 25 octobre 2001.

Faits:

A.
Le 8 novembre 1988, B.________, père de trois autres enfants d'un
premier
lit, et sa fille adoptive A.________ ont passé devant notaire une
convention
de vente par laquelle le premier cédait à la seconde des parts de
copropriété
sur des immeubles à Genève. Le prix était de 14 550 000 fr. payable à
raison
de 3 610 000 fr. par la reprise de dettes hypothécaires et de 10 940
000 fr.
d'entente entre les cocontractants.

Le même jour, les parties ont signé un document intitulé
"reconnaissance de
dette". Ce document se référait à l'acte de vente susmentionné. Le
vendeur y
déclarait verser à l'acheteuse 560 000 fr. destinés à payer les
droits, frais
et honoraires liés à la vente. La fille reconnaissait devoir au père
11 500
000 fr. avec intérêts à 6 % l'an payables par semestre, et
s'engageait en cas
de vente des parts de copropriété à rembourser intégralement le solde
de la
dette, en capital et intérêts; sous cette réserve, elle pouvait
rembourser le
prêt en tout temps, moyennant un préavis de douze mois.

Par acte manuscrit du 11 novembre 1988, B.________ a déclaré léguer à
sa
fille 11 500 000 fr. qu'il possédait sous forme de créance contre
elle.

Par acte notarié du 3 juillet 1990, les parties, après s'être
référées à
l'acte de vente du 8 novembre 1988, sont convenues que A.________
renonçait
irrévocablement à tous ses droits héréditaires dans la succession
future de
son père, notamment à sa réserve légale. En contrepartie, celui-ci
remettait
irrévocablement, au jour de son décès, la créance de 10 940 000 fr.
résultant
de l'acte de vente. Il était précisé que, jusqu'à sa mort, B.________
demeurerait titulaire de la créance et continuerait à en toucher les
intérêts
aux conditions fixées.

B.
A.________ a chargé sa régie de verser chaque mois 50 000 fr. - soit
600 000
fr. par an alors que l'intérêt annuel de 6 % sur 11 500 000 fr.
représente
690 000 fr. - à B.________ ainsi que 10 000 fr. à elle-même. Ces
instructions
ont été suivies pendant longtemps. Dès 1989, même s'il a connu
d'importantes
variations, le revenu net des immeubles a toujours été supérieur à
690 000
fr.

En mars 1993, B.________ a réclamé par écrit à sa fille le paiement
d'intérêts en retard. En avril 1997, il a fait notifier un premier
commandement de payer auquel la poursuivie a fait opposition. Le 12
mai 1997,
il a dénoncé au remboursement le prêt de 11 500 000 fr., dont il a
demandé la
restitution avec les accessoires dans un délai de six mois. Par la
suite, il
a encore engagé d'autres poursuites.

C.
Les 12 février, 2 mars et 31 août 1998, A.________ a introduit trois
actions
en libération de dette devant la Cour civile du Tribunal cantonal
vaudois.
Par accord du 18 novembre 1998, les parties sont convenues de joindre
ces
trois actions et une demande unique a été déposée le 22 février 1999.
Dans
ses dernières conclusions, A.________ réclamait qu'il soit dit
qu'elle ne
devait pas au défendeur les sommes de 90 000 fr., de 390 000 fr. et
de 60 000
fr., toutes avec intérêts, les oppositions aux commandements de payer
dans
les poursuites introduites contre elle étant maintenues. Elle
concluait en
outre à ce qu'il soit constaté que la reconnaissance de dette non
datée
portant sur la somme de 11 500 000 fr. avec intérêts à 6 % était
nulle,
annulée et de nul effet et qu'elle devait au défendeur non pas le 6 %
de 11
500 000 fr. par an, mais une somme correspondant au solde disponible
du
revenu locatif que lui procuraient les immeubles désignés dans l'acte
de
vente du 8 novembre 1988, après déduction de toutes charges
immobilières,
taxes et impôts y afférents, ainsi que d'une somme de 10 000 fr. par
mois,
cela avec effet rétroactif au 8 novembre 1988. Enfin, elle concluait
à ce
qu'il soit constaté que la reconnaissance de dette du 8 novembre 1988
était
nulle, annulée et de nul effet, de même que l'acte de vente notarié
du 8
novembre 1988, celui-ci étant converti en acte de donation, sous
réserve d'un
usufruit viager en faveur du donateur.

Par jugement du 25 octobre 2001, la Cour civile du Tribunal cantonal
vaudois
a admis partiellement l'action en libération de dette, prononçant que
la
demanderesse devait au défendeur les montants de 60 000 fr., 90 000
fr. et
240 465 fr. 75 , intérêts en sus, les oppositions aux commandements
de payer
dans les poursuites n°s 434 112, 412 063 et 431 880 de l'Office des
poursuites de Morges étant définitivement levées à due concurrence.

D.
A.________ recourt en réforme au Tribunal fédéral contre le jugement
du 25
octobre 2002, renouvelant en substance les conclusions prises dans sa
réplique du 1er juillet 1999. En bref, elle soutient que les actes
invoqués
par le défendeur étaient simulés et qu'elle lui a versé entre 1988 et
1997
des sommes plus élevées que ce qu'elle lui devait en réalité; de la
sorte,
celui-ci n'aurait plus de prétentions à faire valoir contre elle.

Le défendeur invite le Tribunal fédéral à rejeter le recours.

La cour cantonale se réfère à ses considérants.

E.
Par arrêt du 12 février 2003, la Chambre des recours du Tribunal
cantonal
vaudois a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, un recours que la
demanderesse avait interjeté devant elle parallèlement à son recours
en
réforme au Tribunal fédéral.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Déposé dans les formes et délai légaux, le recours est recevable.

2.
Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son
raisonnement juridique - n'étant pas lié par celui de la cour
cantonale ou
par les motifs invoqués par les parties (art. 63 al. 1 et 3 OJ; ATF
127 III
248 consid. 2c) - sur la base des faits contenus dans la décision
attaquée, à
moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été
violées, qu'il n'y ait lieu à rectification de constatations reposant
sur une
inadvertance manifeste (art 63 al. 2 OJ) ou qu'il ne faille compléter
les
constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu
compte
de faits pertinents et régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF 127
III 248
consid. 2c), toutes exceptions que le recourant doit soulever
expressément
s'il entend s'en prévaloir. En dehors de ces cas exceptionnels, le
recourant
ne peut présenter de griefs contre les constatations de fait (art. 55
al. 1
let. c OJ), ni contre l'appréciation des preuves à laquelle l'autorité
cantonale s'est livrée (ATF 127 III 543 consid. 2c; 126 III 189
consid. 2a;
125 III 78 consid. 3a).

3.
La Cour civile a retenu que le contrat de vente et la reconnaissance
de dette
ainsi que le testament olographe du 11 novembre 1988 puis le pacte
successoral de renonciation formaient un contrat composé et que ces
différents actes - entrant dans les limites tracées par l'ordre
juridique,
ensemble ou séparément - correspondaient à la volonté réelle des
parties.

Vu l'interdépendance des conventions, les premiers juges ont écarté
les
conclusions en annulation de l'acte de vente et de la reconnaissance
de dette
du 8 novembre 1988. La demanderesse avait en effet omis d'attaquer le
pacte
successoral de renonciation du 3 juillet 1990.

Les juges vaudois ont considéré que la demanderesse ne pouvait pas
invoquer
la lésion ou d'éventuels vices de volonté, le délai péremptoire des
art. 21
al. 2 et 31 al. 2 CO étant échu. Les conditions permettant une
correction du
contrat fondée sur l'imprévision n'étaient en outre pas réalisées.

L'argumentation de la demanderesse reposait avant tout sur la
simulation. La
juridiction cantonale a également rejeté le moyen.

La Cour civile a retenu que ni la modicité du prix de vente, ni
l'étendue du
prêt consenti par le vendeur, ni la renonciation à en exiger le
remboursement
n'établissaient la simulation. Le montage financier reposait en effet
sur les
relations de parenté entre les parties. Le legs puis le pacte de
renonciation
démontraient que le défendeur n'avait pas l'intention de réclamer le
remboursement du capital, mais uniquement de s'assurer le versement
d'un
intérêt. Ensuite, le profit fiscal réalisé par le défendeur au moyen
du
montage contractuel, certes important (53,3 % d'économie d'impôts), ne
constituait pas non plus un indice de simulation, étant souligné que
la
demanderesse ne soutenait pas que le complexe de contrats aurait
éludé une
règle impérative de droit civil fédéral, qu'elle réalisait aussi une
économie
d'impôts puisqu'une donation aurait été taxée immédiatement et qu'elle
n'avait pas établi que les parties auraient convenu à titre interne
que le
défendeur assumerait la charge fiscale sur les immeubles. Quant au
non-respect des modalités de paiement, la cour ne voyait pas en quoi
il
aurait constitué un indice de simulation. Dans un premier temps, le
défendeur
avait accepté de recevoir 50 000 fr. par mois, soit 600 000 fr. par
an, un
complément lui étant parfois versé au début de l'exercice suivant; en
1992,
il avait toléré un retard substantiel, mais il avait réclamé dès 1993
les
soldes annuels qui lui étaient dus. Cette attitude devait être
replacée dans
le contexte familial; le défendeur savait que les immeubles allaient
procurer
à sa fille des revenus suffisant à payer l'intérêt conventionnel, et
n'ignorait pas que les régies ont pour habitude de dresser des
décomptes
annuels. Enfin, la Cour civile a jugé qu'on ne pouvait tirer de la
lettre de
la gérance datée du 8 décembre 1988 rappelant les instructions de la
demanderesse, ou d'un courrier adressé le 8 juillet 1995 par le
défendeur à
sa fille, l'existence d'une donation grevée d'un usufruit viager
partiel:
rien n'indiquait que le défendeur avait eu connaissance de l'ordre
donné à la
régie de virer mensuellement 10 000 fr. sur le compte de la
demanderesse et,
si le second document montrait que le défendeur entendait laisser à la
demanderesse une partie des revenus des immeubles, ainsi que cela
ressortait
de la projection établie par lui le 14 octobre 1988, son auteur y
rappelait
que les profits et les risques étaient passés à l'acquéreur. Il n'y
avait
donc pas de garantie d'un revenu minimal pour le futur. L'expression
"virtuellement seule propriétaire" utilisée par le défendeur dans la
lettre
du 8 juillet 1995 devait quant à elle se comprendre au regard du fait
qu'en
raison des intérêts convenus, la demanderesse ne pouvait bénéficier, à
l'instar d'un propriétaire, de l'entier des revenus de l'immeuble.
L'utilisation du terme "rente" s'expliquait comme une référence à cet
intérêt
qui, de fait, constituait bien une rente pour le défendeur.

En définitive, la Cour civile a considéré que la simulation supposait
que les
parties aient échangé des volontés réciproques et concordantes
permettant de
définir et d'exécuter le contrat réel dissimulé derrière le contrat
fictif.
La demanderesse échouait dans la preuve de l'existence d'une donation
grevée
d'usufruit partiel. En conséquence, la simulation ne pouvait être
retenue.

4.
A l'appui de son recours, la demanderesse critique d'abord le refus
de la
Cour civile d'entrer en matière sur ses conclusions tendant à la
constatation
de la nullité du contrat de vente et de la reconnaissance de dette en
raison
de l'absence de conclusions portant sur la nullité du pacte de
renonciation.
Cette manière de voir reposerait sur une conception contraire au droit
fédéral de la simulation, qui peut aussi être partielle.

Invoquant toujours une violation de l'art. 18 CO, la demanderesse
reproche
ensuite à la Cour civile d'avoir affirmé que l'interprétation des
actes
litigieux selon le principe de la confiance démontrait qu'ils
correspondaient
à la volonté réelle des parties. La cour cantonale se serait, à la
lire,
livrée à "un exercice de salamitage du complexe contractuel",
omettant d'en
qualifier l'ensemble. Le contrat de vente et la reconnaissance de
dette
aboutiraient à une construction financière tout-à-fait inhabituelle,
voire
"baroque ou ésotérique". La demanderesse n'aurait eu aucun intérêt
raisonnable à acheter les immeubles aux conditions décrites dans les
contrats
du 8 novembre 1988, si ce n'est en combinaison avec le pacte
successoral, de
sorte qu'il ne serait pas possible d'imputer aux parties la volonté de
transférer à titre onéreux les parts de copropriété des immeubles.
L'ensemble
des circonstances démontrerait que le défendeur n'avait quant à lui
pas
l'intention d'encaisser le prix de vente. Les parties n'auraient
évité de
choisir la forme contractuelle adéquate correspondant à l'usage en
Suisse de
la donation immobilière grevée d'un usufruit que pour procurer au
défendeur,
sa vie durant, un revenu non soumis à l'impôt.

Au demeurant, plusieurs éléments imposeraient de retenir que les
parties sont
liées par une convention qui, si elle avait été apparente, aurait
privé
l'intimé de toute économie d'impôts. La demanderesse
invoque les
termes de
"rente", de "rétribution", ou encore les formules "virtuellement
propriétaire" et "créance génératrice de revenus" utilisés par le
défendeur
dans la projection du 14 octobre 1988; ces expressions n'auraient de
sens que
par rapport à l'acte dissimulé qu'elle allègue et au comportement des
parties, notamment à leur attitude ultérieure.

La demanderesse se plaint dans ce cadre d'une inadvertance manifeste
au sens
de l'art. 63 al. 2 OJ, faisant grief à la Cour civile de n'avoir pas
mentionné, dans sa décision, l'allégué 129 de la réponse, admis sans
réserve
dans les déterminations de la réplique; selon l'allégué invoqué, de
novembre
1988 à novembre 1994, la recourante aurait versé ce qu'elle devait.
Cet aveu
au sens de l'art. 164 CPC/VD démontrerait que le défendeur
n'entendait pas
recevoir 690 000 fr. par an de sa fille.

Au vu de ce qui précède, la demanderesse soutient que le contrat
dissimulé
serait une vente immobilière grevée d'un usufruit sur le revenu
locatif net -
moins les 10 000 fr. que l'intéressée aurait encaissé de son propre
chef au
motif qu'elle assumait toutes les charges, y compris fiscales, des
immeubles
cédés. L'usufruit mobilier serait valable en la forme. Quant à l'acte
de
donation, qui aurait dû être passé en la forme authentique, il serait
tout de
même opposable à l'intimé nonobstant le vice de forme qui l'affecte,
l'art. 2
al. 2 CC interdisant à ce dernier de se prévaloir de ce vice.

5.
Un acte juridique est simulé lorsque les parties conviennent
d'émettre des
déclarations de volonté qui ne correspondent pas à leur volonté
véritable.
Les contractants déclarent qu'ils veulent conclure un acte apparent
(simulé)
mais ils passent en outre un accord interne manifestant leur
intention de ne
pas accepter les effets essentiels de cet acte dans leurs relations
réciproques et, le cas échéant, dans leurs relations avec les tiers
autres
que ceux qu'ils veulent tromper. Leur volonté véritable tendra soit à
ne
produire aucun effet juridique, soit à produire un autre effet que
celui de
l'acte apparent (ATF 112 II 337 consid. 4a et les références). Dans ce
dernier cas, les parties entendent en réalité conclure un second
acte, dit
dissimulé (arrêt du Tribunal fédéral du 9 septembre 1987 in SJ 1988
p. 117,
consid. 6b). La simulation peut être partielle (ATF 117 II 382
consid. 2a;
cf. aussi arrêt 4C.56/1994 du 26 septembre 1994, consid. 3a).

Le juge doit relever d'office la simulation (ATF 97 II 201 consid.
5). La
convention de simulation n'est soumise à aucune forme. Elle peut se
déduire à
partir d'actes concluants des intéressés (ATF 112 II 337 consid. 4b).
Le
fardeau de la preuve incombe à celui qui l'invoque. Le juge se
montrera
exigeant à cet égard; de simples allégations de caractère général ou
de
simples présomptions ne suffisent pas (ATF 112 II 337 consid. 4a). La
constatation de la volonté interne des parties au moment de la
conclusion du
contrat et celle des actes, paroles et attitudes par lesquels elles
se sont
exprimées relèvent du fait et lient le Tribunal fédéral saisi d'un
recours en
réforme (art. 63 al. 2 OJ; ATF 129 III 118 consid. 2.5; 126 III 375
consid.
2e/aa). C'est en revanche une question de droit que de donner aux
faits
constatés par la juridiction cantonale leur qualification juridique,
d'examiner si, l'intention de simuler étant dûment établie de part et
d'autre, les parties ont ou non réciproquement manifesté leur
intention d'une
manière qui permette de considérer leur accord sur ce point comme
parfait au
sens de l'art. 1er CO (ATF 66 II 30 consid. 2), ou encore de
déterminer si
l'autorité cantonale a défini exactement la notion de simulation -
soit, en
bref, de dire si les faits constatés permettent d'admettre une
simulation
(ATF 112 II 337 consid. 4; 106 II 141 consid. 3b; 97 II 201 consid.
5; 85 II
97 consid. 1; ATF in SJ 1988 p. 117 consid. 6b).

6.
La prémisse sur laquelle la demanderesse fonde son argumentation est
que la
cour cantonale s'en serait remise au principe de la confiance et
aurait ainsi
traité une question de droit pour déterminer la portée du complexe
contractuel apparemment formé par les actes litigieux (p. 6-7 du
recours). La
recourante fait valoir à cet égard que si la Cour civile a jugé que la
reconnaissance de dette du 8 novembre 1988 correspondait à la volonté
réelle
des parties, elle a précisé, en page 7 du jugement, qu'il n'était en
revanche
pas possible de déterminer sur la base des témoignages divergents
recueillis
à ce propos quels étaient les buts visés à titre interne par les
parties
lorsqu'elles ont passé le contrat de vente du 8 novembre 1988 et le
pacte de
renonciation du 3 juillet 1990.

Ces assertions, qui reposent sur l'état de fait dressé par la cour
cantonale,
doivent cependant se lire en rapport avec les considérants de droit
qui y
font suite. La Cour civile a expressément posé que les actes passés
entre les
parties correspondaient à leur volonté réelle, et que chacun des buts
indiqués par les témoins, s'il ne suffisait pas à résumer toute la
portée du
complexe de contrats, contenait une part de vérité: l'opération
permettait en
effet cumulativement de régler la succession du défendeur en lui
assurant un
revenu sans payer d'impôt et en conservant l'immeuble dans le
patrimoine
familial (p. 31). Plus loin, la cour cantonale a également noté que la
demanderesse avait échoué dans sa preuve de l'existence d'une
donation grevée
d'usufruit partiel (p. 39).

Le Tribunal fédéral est lié par ces constatations de fait. C'est en
vain que
la demanderesse les discute dans son recours. L'inadvertance manifeste
qu'elle invoque concerne en réalité un point de procédure cantonale,
à savoir
la portée d'un aveu dans l'appréciation des preuves selon l'art. 164
CPC/VD;
cette question ne peut être soumise au Tribunal fédéral dans la
procédure du
recours en réforme sous couvert de l'inadvertance manifeste, destinée
à
rectifier des erreurs de lecture ou de calcul; le grief a d'ailleurs
été
soigneusement examiné, et rejeté, par la Chambre des recours du
Tribunal
cantonal vaudois dans le cadre du recours en nullité que la
demanderesse
avait interjeté parallèlement. Cela étant, la cour cantonale n'a pas
méconnu
la notion juridique de simulation au sens de l'art. 18 CO, ni violé
les
règles sur la formation des contrats selon l'art. 1 CO. Le recours
doit être
rejeté.

7.
La recourante qui succombe supportera les frais de justice et versera
une
indemnité de dépens à l'intimé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 30 000 fr. est mis à la charge de la
recourante.

3.
La recourante versera à l'intimé une indemnité de 40 000 fr. à titre
de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à la
Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 28 novembre 2003

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.279/2002
Date de la décision : 28/11/2003
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-11-28;4c.279.2002 ?
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