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25/11/2003 | SUISSE | N°1P.410/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 25 novembre 2003, 1P.410/2003


{T 0/2}
1P.410/2003/sch

Arrêt du 25 novembre 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du
Tribunal
fédéral, Catenazzi et Fonjallaz.
Greffier: M. Parmelin.

X. ________,
recourant, représenté par Me Lucien Lazzarotto, avocat, quai des
Bergues 23,
1201 Genève,

contre

A.________,
intimée, représentée par Me Marie-Flore Dessimoz, avocate, chemin du
Grand-Puits 42, 1217 Meyrin,
Département de l'aménagement, de l'équipement et du l

ogement du
canton de
Genève,
rue David-Dufour 5, case postale 22, 1211 Genève 8,
Tribunal administratif du canton de...

{T 0/2}
1P.410/2003/sch

Arrêt du 25 novembre 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du
Tribunal
fédéral, Catenazzi et Fonjallaz.
Greffier: M. Parmelin.

X. ________,
recourant, représenté par Me Lucien Lazzarotto, avocat, quai des
Bergues 23,
1201 Genève,

contre

A.________,
intimée, représentée par Me Marie-Flore Dessimoz, avocate, chemin du
Grand-Puits 42, 1217 Meyrin,
Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement du
canton de
Genève,
rue David-Dufour 5, case postale 22, 1211 Genève 8,
Tribunal administratif du canton de Genève, rue du Mont-Blanc 18, case
postale 1956, 1211 Genève 1.

autorisation de construire en zone à bâtir,

recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du
canton de
Genève du 20 mai 2003.

Faits:

A.
A. ________ est propriétaire des parcelles nos 4662 et 5047 du
registre
foncier de la commune de Veyrier, en quatrième zone B protégée au
sens des
art. 12 al. 5 et 19 al. 2 de la loi genevoise d'application de la loi
fédérale sur l'aménagement du territoire (LaLAT). La parcelle n° 5047
est
occupée par une ancienne bâtisse désaffectée de 64 mètres carrés,
séparée de
la parcelle n° 4653 par une bande de terrain de 19 mètres carrés,
correspondant à l'assiette d'un ancien chemin vicinal; cette surface
a été
rattachée à la parcelle n° 5047 en vertu d'un acte notarié passé le 6
octobre
1988 entre A.________ et l'ancien propriétaire de la parcelle n° 4653,
B.________. Cette dernière parcelle, dont X.________ a fait
l'acquisition le
28 juin 1996, supporte deux bâtiments d'habitation contigus
entièrement
rénovés, sis le long de la rue R.________, et une dépendance
désaffectée de
35 mètres carrés, cadastrée sous n° 44, dont les façades nord et
ouest sont
implantées en limite de propriété avec les parcelles nos 4662 et 5047.
Le 1er décembre 2000, A.________ a requis l'autorisation de
transformer
l'ancienne bâtisse érigée sur la parcelle n° 5047 en maison familiale
et de
l'agrandir par l'adjonction d'une annexe d'un seul niveau, qui
prendrait
place sur l'assiette de l'ancien chemin vicinal et dans le
prolongement de la
façade ouest du bâtiment n° 44, sur la parcelle n° 4662. La Commune de
Veyrier et la Commission des monuments, de la nature et des sites
ayant tous
deux émis un préavis défavorable, elle a présenté un projet modifié
le 1er
octobre 2001.
Le 15 novembre 2001, la Commune de Veyrier a délivré un préavis
défavorable
au motif que l'annexe projetée ne s'intégrait pas dans
l'environnement bâti
de la quatrième zone B protégée, relevant au surplus que la pose de
capteurs
solaires sur la toiture n'était pas judicieuse. La Commission des
monuments,
de la nature et des sites a en revanche donné un préavis favorable,
sous
diverses réserves liées au traitement des planchers, ainsi qu'au
choix des
matériaux et des teintes. Elle déclarait en outre ne pas être opposée
aux
dérogations éventuelles nécessaires selon l'art. 106 de la loi
genevoise sur
les constructions et les installations diverses (LCI).
Par décision du 10 décembre 2001, le Département cantonal de
l'aménagement,
de l'équipement et du logement (ci-après: le Département) a délivré
l'autorisation de construire sollicitée, compte tenu du préavis
favorable de
la Commission des monuments, de la nature et des sites, qui permettait
l'octroi de la dérogation prévue par l'art. 106 LCI pour
l'implantation de
l'agrandissement en limite de propriété. La Commission cantonale de
recours
en matière de constructions a rejeté le recours formé par X.________
contre
cette décision, au terme d'une décision prise le 27 août 2002 et
notifiée le
16 septembre 2002.
Le 16 octobre 2002, X.________ a recouru contre cette décision auprès
du
Tribunal administratif du canton de Genève (ci-après: le Tribunal
administratif ou la cour cantonale) en se plaignant notamment du fait
que
l'annexe projetée viendrait obturer l'une des ouvertures en façade
ouest du
bâtiment n° 44 donnant sur l'ancien chemin vicinal. Le 14 mars 2003,
il a
déposé une demande d'autorisation de construire visant à rendre
habitable le
bâtiment n° 44, moyennant l'octroi d'une dérogation pour des vues
droites
fondée sur l'art. 106 LCI. Il a sollicité la suspension de la
procédure de
recours pendante jusqu'à l'issue de l'instruction de cette requête.
Par arrêt du 20 mai 2003, le Tribunal administratif a rejeté le
recours de
X.________, après avoir écarté la demande de suspension. Il a
considéré en
substance que le Département était fondé à suivre le préavis de la
Commission
des monuments, de la nature et des sites, émis en toute connaissance
de
cause, plutôt que celui de la Commune de Veyrier. Il a estimé que le
projet
litigieux permettrait de respecter le principe de la contiguïté, qui
doit
prévaloir dans la quatrième zone B protégée, selon les art. 33 et 45
LCI, et
qu'il s'inscrivait parfaitement dans le site villageois, conformément
à
l'art. 106 LCI, en tant qu'il autorise la création d'un logement
familial
fonctionnel, la Commission des monuments, de la nature et des sites
ayant
donné son accord à une éventuelle dérogation aux distances aux
limites.

B.
Agissant par la voie du recours de droit public, X.________ demande au
Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt, de refuser l'autorisation de
construire
sollicitée par A.________ et, le cas échéant, de renvoyer la cause au
Tribunal administratif pour instruction complémentaire dans le sens
des
considérants. Il se plaint à divers titres d'arbitraire dans la
constatation
des faits et dans l'application du droit cantonal. Il dénonce une
atteinte à
son droit de propriété garanti à l'art. 26 Cst.

Le Tribunal administratif se réfère à son arrêt. Le Département
cantonal de
l'aménagement, de l'équipement et du logement et A.________ concluent
au
rejet du recours dans la mesure où il est recevable.

C.
Par ordonnance du 29 août 2003, le Juge présidant la Ire Cour de
droit public
a admis la demande d'effet suspensif présentée par X.________.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
En vertu de l'art. 34 al. 1 et 3 de la loi fédérale sur l'aménagement
du
territoire (LAT; RS 700), seule la voie du recours de droit public est
ouverte contre l'octroi d'un permis de construire en zone à bâtir
dans la
mesure où le recourant fait essentiellement valoir des griefs tirés
d'une
application arbitraire des normes cantonales de procédure et de
police des
constructions et de la violation de son droit de propriété garanti
par le
droit constitutionnel fédéral (cf. ATF 123 II 88 consid. 1a/ cc p. 92
et les
arrêts cités).

X. ________ est personnellement et directement touché par l'extension
projetée de l'immeuble de l'intimée en limite avec le bâtiment n° 44
dont il
est propriétaire; il a qualité pour agir selon l'art. 88 OJ (cf. ATF
127 I 44
consid. 2d p. 47 et les arrêts cités). Les conclusions qui vont
au-delà de la
simple annulation de l'arrêt attaqué sont irrecevables, dès lors
qu'aucune
des exceptions à la nature cassatoire du recours de droit public ne
sont
réunies (ATF 129 I 129 consid. 1.2.1 p. 131/ 132, 173 consid. 1.5 p.
176); il
en va de même des pièces annexées au recours, postérieures à l'arrêt
attaqué
(ATF 125 I 71 consid. 1d/aa p. 77 et les arrêts cités); sous ces
réserves, il
y a lieu d'entrer en matière sur le recours qui répond aux conditions
des
art. 86 al. 1 et 89 al. 1 OJ.

2.
Le recourant se plaint à divers titres d'une constatation arbitraire
et
incomplète des faits pertinents.

2.1 La jurisprudence reconnaît au juge un important pouvoir
d'appréciation
dans la constatation des faits et leur appréciation. Le Tribunal
fédéral
n'intervient que si celui-ci a outrepassé son pouvoir d'appréciation
et
établi les faits de manière arbitraire. Une constatation de fait
n'est pas
arbitraire pour la seule raison que la version retenue par le juge ne
coïncide pas avec celle de l'une ou l'autre des parties; encore
faut-il que
l'appréciation des preuves soit manifestement insoutenable, en
contradiction
flagrante avec la situation effective, constitue la violation d'une
règle de
droit ou d'un principe juridique clair et indiscuté ou encore qu'elle
heurte
de façon grossière le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 129
I 173
consid. 3.1 p. 178 et les arrêts cités). De plus, comme l'annulation
de la
décision attaquée ne se justifie que si elle est arbitraire non
seulement
dans sa motivation, mais également dans son résultat, le grief
d'arbitraire
dans la constatation des faits ne peut avoir de chance de succès que
s'il
porte sur des faits pertinents et décisifs, ce qu'il appartient au
recourant
d'établir.

2.2 Le recourant conteste avoir déposé son projet de rénovation du
bâtiment
n° 44 dans un but manifestement dilatoire; il en veut pour preuve les
différentes variantes, sous forme de plans et d'esquisses, qu'il
aurait
soumises à ses voisins entre 1997 et 2000. Ce point est cependant
dénué de
toute pertinence, s'agissant d'apprécier la conformité du projet de
l'intimée
avec les prescriptions de police des constructions et, en
particulier, avec
l'art. 106 LCI qui s'applique aux villages protégés.
Le recourant s'en prend également au qualificatif d'"ancienne grange
délabrée" attribué au bâtiment n° 44, alors que celui-ci a toujours
été
cadastré comme "habitation et dépendance". La nature de l'immeuble au
cadastre est sans incidence sur le point de savoir si la construction
projetée peut s'implanter en limite de propriété suivant les normes
de droit
public régissant la zone concernée; seule son affectation réelle est
déterminante à cet égard; or, le recourant ne conteste pas que ce
bâtiment
est désaffecté depuis des années et n'a jamais été voué à
l'habitation. Il
l'a d'ailleurs qualifié lui-même de rural dans le projet de
rénovation qu'il
a soumis au Département le 14 mars 2003.
Le recourant prétend également que l'ancien chemin vicinal séparant
les
parcelles nos 5047 et 4653 ne serait pas couvert, comme l'a retenu la
cour
cantonale, à tout le moins dans la partie sur laquelle donnent les
fenêtres
du bâtiment n° 44. Il ressort toutefois des photographies versées au
dossier
que ce chemin était protégé sur la totalité de son tronçon par des
tôles
ondulées, posées à titre provisoire et amovibles, dont certaines sont
tombées
avec les intempéries, ce qui exclut a priori

une constatation arbitraire des faits sur ce point. Au demeurant, le
recourant n'explique pas en quoi ce fait serait pertinent pour
l'issue du
litige.
L'arrêt attaqué retient en revanche à tort que le recourant a acquis
la
parcelle n° 4653 par voie d'enchères publiques, alors qu'il l'a
achetée à
l'ancien propriétaire au terme d'une vente passée de gré à gré le 28
juin
1996. Le Tribunal administratif en a déduit que le recourant devait
connaître
le rapport d'expertise établi le 27 décembre 1995 par l'architecte
C.________
à la demande de l'Office cantonal des poursuites et des faillites, qui
n'attribuait aucune valeur vénale au bâtiment n° 44 en raison de
l'impossibilité d'obtenir des droits de vue et de le vouer à
l'habitation.
Même si le recourant n'avait peut-être pas connaissance du rapport
d'expertise, il ne pouvait ignorer l'état de délabrement du bâtiment
n° 44,
lorsqu'il l'a acquis, et l'impossibilité de le rendre habitable sans
créer de
nouvelles ouvertures. Dans ces conditions, l'erreur dans la
constatation des
faits ne porte pas à conséquence et ne postule nullement l'annulation
de
l'arrêt attaqué.
Le recourant reproche enfin au Tribunal administratif d'avoir admis à
tort,
dans son exposé des faits, que les jours du bâtiment n° 44 donnant sur
l'ancien chemin vicinal avaient été obstrués et qu'il devrait
nécessairement
négocier des droits de jours avec ses voisins s'il entendait réaliser
son
projet de rénovation. Il ressort des pièces versées au dossier que
l'ancien
propriétaire de la parcelle n° 4653 s'était engagé, au terme d'un
échange de
correspondance annexée à l'acte notarié du 6 octobre 1988, à
condamner les
deux ouvertures de cave en façade ouest du bâtiment n° 44 et à rendre
le mur
mitoyen. Selon les photographies versées au dossier par l'intimée,
l'une des
ouvertures a été murée, alors que l'autre a simplement été obturée
par un
plastique opaque. La cour cantonale n'a donc pas relaté les faits de
manière
arbitraire en relevant que les parties à l'acte notarié du 6 octobre
1988
avaient supprimé les ouvertures de cave et que les jours avaient été
obstrués. Il est vrai que lors de l'inspection locale, la seconde
ouverture
avait été dégagée des matériaux qui la bouchaient, comme cela ressort
du
procès-verbal repris dans l'exposé des faits de l'arrêt attaqué. La
cour
cantonale n'a donc pas constaté les faits de manière arbitraire. Pour
le
surplus, en indiquant qu'il serait nécessaire de négocier les droits
de jour
avec les propriétaires voisins, le Tribunal administratif s'est borné
à
reprendre les propos de l'expert mandaté par l'Office cantonal des
poursuites
et des faillites. La question de savoir s'il pouvait faire sienne
cette
opinion ne ressort pas de la constatation des faits, mais de leur
appréciation.
La qualification de véranda pour une annexe de quelque septante
mètres carrés
est certes inadéquate; toutefois, le recourant ne prétend pas que la

cour
cantonale en aurait tiré des conséquences arbitraires sur le plan
juridique.
Les griefs relatifs aux constatations de fait de l'arrêt attaqué sont
donc
soit infondés, soit dénués de pertinence.

3.
Le recourant tient pour arbitraire le refus du Tribunal administratif
de
suspendre la cause jusqu'à droit connu sur sa demande d'autorisation
de
construire. Selon lui, la possibilité de rénover le bâtiment n° 44 à
des fins
d'habitation était un élément déterminant pour statuer en pleine
connaissance
de cause sur le projet litigieux et, en particulier, sur la
possibilité pour
l'intimée d'agrandir le bâtiment érigé sur la parcelle n° 5047
jusqu'en
limite de propriété.
Le Tribunal administratif a refusé de faire droit à cette requête sous
prétexte qu'aucun des motifs de suspension de la procédure évoqués à
l'art.
78 de la loi genevoise sur la procédure administrative (LPA gen.)
n'étaient
réalisés. Le recourant ne conteste pas cette motivation, mais il
prétend que
sa demande aurait dû être examinée au regard de l'art. 14 LPA gen.,
qui
permet de suspendre la procédure administrative lorsque son sort
dépend de la
solution d'une question de nature civile, pénale ou administrative
relevant
de la compétence d'une autre autorité et faisant l'objet d'une
procédure
pendante devant ladite autorité.
Il ne ressort nullement de la systématique de la loi que cette
disposition ne
s'appliquerait pas aux autorités de recours; l'art. 78 LPA gen.
indique les
motifs pour lesquels la suspension de la procédure doit intervenir
d'office,
alors que l'art. 14 LPA gen. définit les cas dans lesquels une telle
mesure
peut être ordonnée. Le Tribunal administratif ne pouvait ainsi se
borner à
examiner la demande de suspension au regard de l'art. 78 LPA gen.,
mais elle
devait également le faire sous l'angle de l'art. 14 LPA gen. Cela ne
signifie
pas encore qu'une suspension de la procédure s'imposait en vertu de
cette
disposition et que l'arrêt serait arbitraire.
Une décision s'expose à un tel grief lorsqu'elle viole gravement une
norme ou
un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit
d'une
manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le
Tribunal
fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de
dernière instance que si elle apparaît insoutenable, en contradiction
manifeste avec la situation effective, ou encore si elle a été
adoptée sans
motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En outre, il ne
suffit
pas que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables,
encore
faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 129
I 8
consid. 2.1 p. 9; 128 I 177 consid. 2.1 p. 182; 273 consid. 2.1 p.
275 et les
arrêts cités).
En l'occurrence, le Tribunal administratif devait examiner si le
Département
avait admis à tort que le projet litigieux répondait aux exigences de
l'art.
106 LCI et pouvait être autorisé moyennant l'octroi d'une dérogation
fondée
sur cette disposition. A supposer que la possibilité de rénover le
bâtiment
n° 44 aux fins d'habitation présente une quelconque pertinence pour
résoudre
cette question, la cour cantonale était en mesure de la trancher sur
la base
des documents versés au dossier et des constatations faites lors de
l'inspection locale; il n'était en particulier pas nécessaire de
connaître le
sort réservé à la demande de sanction définitive déposée par le
recourant
quant à son projet de rénovation du bâtiment n° 44. Dans ces
conditions, le
refus de suspendre l'instruction de la procédure de recours jusqu'à
droit
connu sur cette requête n'était nullement arbitraire dans son
résultat.

4.
Le recourant conteste que l'extension projetée matérialise le
principe de
contiguïté censé prévaloir dans la quatrième zone B protégée selon
les art.
33 et 45 LCI. Il dénonce également la prépondérance accordée au
préavis de la
Commission des monuments, de la nature et des sites, s'agissant de
l'application de l'art. 106 LCI; selon lui, la cour cantonale aurait

l'examiner d'un regard critique, compte tenu des propos de la
représentante
de cette commission suivant lesquels elle aurait apprécié le projet
litigieux
pour lui-même, sans égard à son impact sur le bâtiment n° 44 et, en
particulier, aux possibilités de rénovation de celui-ci. En se
fondant sur un
préavis favorable qui n'avait ni le poids ni le contenu intrinsèque
qu'il lui
a prêté, le Tribunal administratif aurait appliqué arbitrairement
l'art. 106
LCI.

4.1 A teneur de l'art. 19 al. 2 let. b LaLAT, la quatrième zone B,
dans
laquelle s'inscrit le projet litigieux, est destinée principalement
aux
maisons d'habitation comportant en principe plusieurs logements.
Suivant
l'art. 12 al. 5 LaLAT, lorsque la zone est en outre protégée,
l'aménagement
et le caractère architectural des quartiers et localités considérés
peuvent
être préservés. L'art. 106 al. 1 LCI prévoit que dans les villages
protégés,
le département, sur préavis de la commune et de la commission des
monuments,
de la nature et des sites, fixe dans chaque cas particulier
l'implantation,
le gabarit, le volume et le style des constructions à édifier, de
manière à
sauvegarder le caractère architectural et l'échelle de ces
agglomérations
ainsi que le site environnant. Le département peut en conséquence, à
titre
exceptionnel, déroger aux dispositions régissant les distances entre
bâtiments, les distances aux limites de propriétés et les vues
droites.
L'art. 107 LCI précise que dans la mesure où il n'y est pas dérogé par
l'article précédent, les dispositions applicables à la quatrième zone
rurale
sont applicables aux constructions édifiées dans la zone des villages
protégés.
L'art. 30 al. 1 LCI, qui règle l'ordre des constructions en quatrième
zone,
prévoit que les constructions sont, en règle générale, édifiées en
ordre
contigu. A teneur de l'art. 33 al. 1 let. a LCI, les constructions ne
peuvent
être édifiées au-dessus du sol, à la limite de propriétés privées,
que sur
une profondeur de 20 mètres mesurée de l'alignement de construction
fixé le
long des voies publiques ou privées. Selon l'art. 33 al. 2 LCI, le
département peut cependant autoriser des constructions à la limite de
propriétés privées, au-delà des 20 mètres spécifiés ci-dessus,
lorsque deux
propriétaires se sont mis d'accord pour édifier simultanément des
constructions contiguës et de même hauteur, ou lorsqu'un propriétaire
veut
adosser une nouvelle construction à un mur d'attente. En vertu des
art. 34
al. 1 et 2 LCI, lorsque la construction n'est pas édifiée à la limite
de
propriétés privées, une distance égale à la hauteur du gabarit, mais
de six
mètres au minimum, doit être respectée. L'art 45 LCI, applicable aux
quatre
premières zones, dispose que les distances entre deux constructions ne
peuvent être inférieures à la somme des distances qui seraient
exigibles
entre chacune de ces constructions et une limite de propriété passant
par
elle (al. 1). Toutefois, cette disposition n'est pas applicable
lorsqu'il
existe, sur la propriété voisine, une construction autorisée avant le
1er mai
1940 et qui ne bénéficie pas d'une servitude sur le fonds où s'élève
la
nouvelle construction (al. 2). Les dispositions des art. 33 et 43 sont
réservées (al. 3).

4.2 En l'espèce, le projet litigieux permettrait de vouer à
l'habitation un
volume vide, en conformité avec la destination de la quatrième zone
(cf. art.
19 al. 2 let. b LaLAT). Le Tribunal administratif n'a pas clairement
tranché
la question de savoir si la construction envisagée par l'intimée
respectait
les normes régissant la quatrième zone et, en particulier, celles de
l'art.
33 al. 1 LCI, mais il s'est borné à constater que le projet litigieux
permettait de respecter le principe de la contiguïté, selon les art.
33 et 45
LCI. Cette question peut rester ouverte, car les dispositions de la
quatrième
zone ne doivent être appliquées, en vertu de l'art. 107 LCI, que dans
la
mesure où le Département ne fait pas usage de la possibilité d'y
déroger
offerte à l'art. 106 LCI. Le Tribunal administratif devait ainsi
examiner si
par son implantation, son gabarit, son volume et son style, la
construction
projetée n'était pas de nature à porter préjudice au caractère
architectural
du village protégé et au site environnant, dont fait partie le
bâtiment n° 44
du recourant, compte tenu des préavis de la Commune et de la
Commission des
monuments, de la nature et des sites.

4.3 Cette dernière a émis un préavis favorable sur la base des
constatations
faites sur place par l'une de ses déléguées. Il n'est nullement
établi que
celle-ci aurait ignoré la présence de jours existants ou obturés sur
la
façade du bâtiment n° 44 donnant sur l'ancien chemin vicinal. Peu
importe en
définitive. Dans le cadre du préavis qu'elle était appelée à donner
en vertu
de l'art. 106 LCI, la Commission des monuments, de la nature et des
sites
devait se borner à examiner si la construction projetée était
compatible avec
le caractère architectural du village et le site environnant; il ne
lui
appartenait en revanche pas d'examiner si ce projet était de nature à
empêcher toute rénovation du bâtiment voisin à des fins d'habitation,
voire
si la présence d'anciennes ouvertures en sur la façade du bâtiment
voisin
était de nature à entraver le projet. Dans ces conditions, supposé
établi, le
fait que la déléguée aurait ignoré la présence des deux ouvertures
donnant
sur l'ancien chemin vicinal n'est pas de nature à remettre en cause la
pertinence de son préavis au regard de l'art. 106 LCI. Ni le
Département, ni
le Tribunal administratif n'avaient donc de raison de mettre en doute
la
validité du préavis favorable émis par la Commission des monuments,
de la
nature et des sites.
Pour le surplus, cette dernière a soigneusement examiné l'impact des
travaux
envisagés par l'intimée sur le tissu bâti existant, puisqu'elle a
exigé une
amélioration du projet initial, avant de délivrer son préavis
favorable; elle
devait également être consciente du fait que le projet s'inscrivait
en limite
de propriété avec le bâtiment voisin, dès lors qu'elle s'est
prononcée en
faveur de l'octroi d'une dérogation aux règles sur les distances aux
limites,
si nécessaire. L'extension aurait certes pour effet de cacher les
façades
nord et ouest du bâtiment n° 44 au niveau du rez-de-chaussée; le
recourant ne
prétend pas que cette ancienne dépendance présenterait une qualité
architecturale qui s'opposerait à une implantation de l'immeuble
voisin
jusqu'en limite de propriété. Le préavis négatif de la Commune de
Veyrier
avait trait essentiellement à l'intégration dans le site du nouveau
bâtiment
et n'était nullement lié à la préservation du bâtiment n° 44 dans sa
configuration actuelle. Le Tribunal administratif, qui s'est
également rendu
sur les lieux, n'a donc pas fait preuve d'arbitraire en considérant
que le
projet litigieux ne portait pas atteinte au site villageois, selon
l'art. 106
LCI, et qu'il pouvait bénéficier d'une dérogation aux règles sur les
distances aux limites.
Certes, l'extension prévue aurait pour effet de masquer le jour
existant au
rez-de-chaussée du bâtiment n° 44. La question de savoir si le
recourant peut
se prévaloir de ce jour pour s'opposer à l'implantation de la
construction en
limite de propriété, au regard notamment de la convention passée le 6
octobre
1988, dont il paraît avoir eu connaissance, relève du droit privé,
dans la
mesure où la dérogation accordée en vertu de l'art. 106 LCI est en
accord
avec le principe de contiguïté qui est de mise en zone protégée. A
cet égard,
il ne serait certainement pas admissible de délivrer un permis de
construire
pour un projet à la réalisation duquel le voisin aurait de sérieuses
chances
de s'opposer avec succès sur le plan civil. Cette question est pour
le moins
délicate en l'occurrence dans la mesure où la parcelle n° 4653 ne
bénéficie
d'aucune servitude de vue ou de jour grevant les parcelles voisines
nos 4662
et 5047, qui lui permettrait d'utiliser le jour existant comme vue
droite ou
qui l'autoriserait à rétablir les anciennes ouvertures, voire à en
créer de
nouvelles. Dans ces conditions, le recourant ne saurait se prévaloir
de la
présence d'une ouverture en façade ouest du bâtiment n° 44 pour
s'opposer au
projet de l'intimée sous l'angle du droit public. L'octroi du permis
de
construire étant conforme aux prescriptions de police des
constructions, une
atteinte au droit de propriété du recourant n'entre pas en
considération. Le
grief tiré d'une violation de l'art. 26 al. 1 Cst. est mal fondé.

5.
Le recours doit par conséquent être rejeté dans la mesure où il est
recevable, aux frais du recourant qui succombe (art. 156 al. 1 OJ). Ce
dernier versera des dépens à l'intimée qui obtient gain de cause avec
l'assistance d'un mandataire professionnel (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Une indemnité de 2'000 fr. est allouée à l'intimée à titre de dépens,
à la
charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties,
ainsi
qu'au Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement et
au
Tribunal administratif du canton de Genève.


Lausanne, le 25 novembre 2003

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.410/2003
Date de la décision : 25/11/2003
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-11-25;1p.410.2003 ?
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