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24/11/2003 | SUISSE | N°6S.368/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 24 novembre 2003, 6S.368/2003


{T 0/2}
6S.368/2003 /pai

Arrêt du 24 novembre 2003
Cour de cassation pénale

MM. et Mme les Juges Schneider, Président,
Kolly et Pont Veuthey, Juge suppléante.
Greffière: Mme Bendani.

X. ________,
recourant, représenté par Me Thomas Barth, avocat,
16, rue de Candolle, 1205 Genève,

contre

Y.________,
intimé, représenté par Me Ramon Rodriguez, avocat, rue Prévost-Martin
5, case
postale 145, 1211 Genève 4,
Procureur général du canton de Genève,
place du Bourg-de-Four 1, cas

e postale 3565, 1211 Genève 3.

Ordonnance de classement (lésions corporelles, omission de prêter
secours),

pourvoi...

{T 0/2}
6S.368/2003 /pai

Arrêt du 24 novembre 2003
Cour de cassation pénale

MM. et Mme les Juges Schneider, Président,
Kolly et Pont Veuthey, Juge suppléante.
Greffière: Mme Bendani.

X. ________,
recourant, représenté par Me Thomas Barth, avocat,
16, rue de Candolle, 1205 Genève,

contre

Y.________,
intimé, représenté par Me Ramon Rodriguez, avocat, rue Prévost-Martin
5, case
postale 145, 1211 Genève 4,
Procureur général du canton de Genève,
place du Bourg-de-Four 1, case postale 3565, 1211 Genève 3.

Ordonnance de classement (lésions corporelles, omission de prêter
secours),

pourvoi en nullité contre l'ordonnance de la Cour de justice du
canton de
Genève, Chambre d'accusation, du 5 septembre 2003.

Faits:

A.
Le 24 mars 2003, X.________ a déposé plainte pour avoir été frappé à
la tempe
par le gérant de l'établissement "Z.________", à Genève. Il a précisé
qu'il
était alors accompagné de trois amis, A.________, B.________ et
C.________.

A.a Selon le rapport de police du 2 mai 2003, dans la nuit du 15 au
16 mars
2003, vers 5 heures, une échauffourée est survenue entre X.________ et
Y.________, gérant du bar "Z.________". Le premier a reçu un coup de
son
adversaire qui l'a fait tomber. Il a alors perdu connaissance, puis a
été
conduit à l'hôpital cantonal où il a subi quatre points de suture à
la tête.
Le certificat médical mentionne une contusion et un hématome avec
lacération
de la peau au niveau occipitotemporal côté droit. Selon les gendarmes
qui
sont intervenus le soir de l'incident, le gérant a reconnu avoir
bousculé un
client ivre qui est tombé en se blessant à la tête. Lors de son
audition,
Y.________ a indiqué que, cette nuit-là, X.________, qui avait
beaucoup bu,
avait quitté son établissement à sa demande et qu'une bousculade avec
échange
de coups s'en était suivie. Il a prétendu avoir frappé X.________
après que
celui-ci lui ait donné un coup de coude sur l'épaule droite et alors
qu'il
s'apprêtait à lui asséner un coup de poing.

A.b Entendu comme témoin, B.________ a confirmé en substance la
version du
plaignant, précisant qu'il n'avait pas vu le gérant porter secours à
son ami
tombé à terre. D.________, portier du Z.________, a confirmé la
version de
son employeur.

B.
Par décision de classement du 19 mai 2003, le Procureur général du
canton de
Genève a renoncé à poursuivre l'affaire aux motifs que le
comportement du
plaignant était à l'origine de l'échauffourée et que le mis en cause
n'avait
fait que de se défendre contre ce dernier.

C.
Par ordonnance du 5 septembre 2003, la Chambre d'accusation de la
Cour de
justice genevoise a rejeté le recours de X.________, estimant que le
refus de
poursuivre, motivé en opportunité, ne violait pas le droit fédéral.

D.
Soutenant que le classement en opportunité viole l'art. 123 CP,
X.________
forme un pourvoi en nullité au Tribunal fédéral et conclut à
l'annulation de
l'arrêt attaqué. Il requiert l'assistance judiciaire.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Rendue en dernière instance cantonale, la décision attaquée, qui
rejette
un recours contre une décision de classement, met un terme à l'action
pénale;
elle constitue donc une ordonnance de non-lieu au sens de l'art. 268
ch. 2
PPF, de sorte que le pourvoi est ouvert à son encontre (ATF 122 IV 45
consid.
1c p. 46).

1.2 Saisie d'un pourvoi en nullité, qui ne peut être formé que pour
violation
du droit fédéral (art. 269 PPF), la Cour de cassation contrôle
l'application
de ce droit sur la base d'un état de fait définitivement arrêté par
l'autorité cantonale (cf. art. 277bis et 273 al. 1 let. b PPF). Le
raisonnement juridique doit donc être mené sur la base des faits
retenus dans
la décision attaquée, dont le recourant est irrecevable à s'écarter
(ATF 126
IV 65 consid. 1 p. 66 et les arrêts cités).

1.3 En vertu de l'art. 270 let. e ch. 1 PPF, le lésé qui est une
victime
d'une infraction au sens de l'art. 2 LAVI peut exercer un pourvoi en
nullité
s'il était déjà partie à la procédure et dans la mesure où la
sentence touche
ses prétentions civiles ou peut avoir des incidences sur le jugement
de
celles-ci.

Selon l'arrêt attaqué, le recourant a reçu un coup, est tombé, a perdu
connaissance et a ensuite été conduit à l'hôpital où on lui a fait
quatre
points de suture à la tête. D'après le certificat médical, il a subi
une
contusion et un hématome avec lacération de la peau au niveau
occipitotemporal côté droit. Dans son mémoire, il se plaint aussi
d'importantes séquelles psychologiques et de céphalées dues à
l'altercation.
L'atteinte à son intégrité physique paraît donc présenter une
importance
suffisante pour justifier sa qualité de victime au sens de l'art. 2
LAVI. Il
est admis qu'il a déjà participé à la procédure, dès lors qu'il a
déposé
plainte et provoqué, par son recours, la décision attaquée. On ne
saurait lui
reprocher de ne pas avoir pris de conclusions civiles sur le fond,
puisque la
procédure n'a pas été menée jusqu'à un stade qui aurait permis de le
faire.
Le recourant indique dans son mémoire qu'il entend réclamer à
l'intimé des
dommages et intérêts ainsi que la réparation de son préjudice moral.
En
conséquence, il y a lieu d'admettre qu'il a qualité pour recourir en
application de l'art. 270 let. e ch. 1 PPF.

2.
Selon le recourant, les éléments constitutifs de l'art. 123 CP sont
réalisés
et le classement en opportunité, dont la motivation est insuffisante,
viole
le droit fédéral.

2.1 Avec le principe d'opportunité, l'autorité de poursuite pénale
jouit d'un
pouvoir d'appréciation qui l'autorise à poursuivre ou non une
infraction
selon que la poursuite lui paraît socialement opportune (arrêt du
Tribunal
fédéral du 2 décembre 2002, 6P.141/2002 et 6S.417/2002).
L'application de ce
principe permet d'éviter les conséquences irréversibles liées à une
poursuite
pénale aussi bien dans l'intérêt de l'auteur de l'infraction que de la
victime et de tenir compte de toutes les circonstances de
l'infraction et des
particularités du délinquant (peu de gravité de la faute, faible
préjudice).
En outre, il permet, dans une certaine mesure, d'éviter l'engagement
de
poursuites ou la condamnation dans des cas douteux (cf. Gérard
Piquerez,
Procédure pénale suisse, Zurich 2000, p. 151). Le Tribunal fédéral a
admis
que le droit fédéral n'exclut pas que les cantons prévoient la
possibilité
d'un classement pour des motifs d'opportunité. Il a toutefois précisé
que de
telles décisions n'étaient admissibles que dans certaines limites.
Comme le
droit cantonal ne saurait faire obstacle à une saine application du
droit
fédéral, un classement pour des motifs d'opportunité viole le droit
fédéral
s'il trahit une volonté de l'autorité compétente de ne pas appliquer
le droit
fédéral ou d'en modifier la portée. Il en va de même si le classement
repose
sur une motivation tellement peu convaincante que l'on doive
l'assimiler à un
refus d'appliquer le droit fédéral (ATF 120 IV 38 consid. 3 p. 42;
119 IV 92
consid. 3b p. 101).

2.2 La Chambre d'accusation a relevé que la première décision de
classement
était intervenue aux motifs que le comportement du plaignant était à
l'origine de l'échauffourée survenue dans le bar et que le mis en
cause
s'était seulement défendu. Elle a jugé disproportionné de poursuivre
l'enquête en raison du doute subsistant quant au déroulement exact des
incidents vu les déclarations divergentes tant des parties que des
témoins et
du peu de gravité des faits dans la mesure où il n'en résultait
apparemment
pas de traumatisme majeur pour la victime. La cour cantonale n'a pas
nié que
l'intimé avait reconnu avoir frappé le plaignant lui causant ainsi les
blessures décrites dans le certificat médical, de sorte que
l'infraction de
voies de fait, voire de lésions corporelles simples, pouvait être
considérée
comme étant réalisée. Elle a toutefois relevé que, selon la version de
l'intimé, celui-ci avait demandé au recourant, qui était ivre, de
quitter son
établissement et l'avait frappé après avoir reçu un coup de coude sur
l'épaule droite de sa part et alors que ce dernier s'apprêtait à lui
asséner
un coup de poing. Au regard de cette version des faits, il n'est pas
exclu de
mettre l'intimé au bénéfice de la légitime défense. En outre, cette
thèse ne
paraît pas plus invraisemblable que celle présentée par le plaignant
et est
d'ailleurs confirmée par le témoignage du portier du bar. Les
versions des
parties demeurent donc contradictoires et aucun témoin neutre ne peut
lever
les doutes relatifs au déroulement exact des faits litigieux. Enfin,
la cour
cantonale a justifié le classement en raison du peu de gravité des
faits et
de l'absence de traumatisme majeur pour la victime. Au regard de ces
motifs,
soit des versions divergentes des parties et des témoins, du fait que
l'intimé se prévaut de la légitime défense, qu'il demeure un doute sur
l'exactitude des faits dénoncés, que les faits sont peu graves et les
conséquences pour le recourant limitées, le classement en opportunité
ne
dénote pas une volonté de l'autorité cantonale de ne pas appliquer le
droit
fédéral ou d'en modifier la portée et ne repose pas non plus sur une
motivation à ce point peu raisonnable qu'il faille y voir une
violation du
droit fédéral. Le grief du recourant doit donc être rejeté.

3.
Le pourvoi est rejeté. Comme il était d'emblée dénué de chances de
succès,
l'assistance judiciaire ne peut être accordée (art. 152 al. 1 OJ), de
sorte
que le recourant, qui succombe, supportera les frais (art. 278 al. 1
PPF)
dont le montant sera fixé en tenant compte de sa situation financière.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le pourvoi est rejeté.

2.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Un émolument judiciaire de 800 francs est mis à la charge du
recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties,
au
Procureur général du canton de Genève et à la Cour de justice du
canton de
Genève, Chambre d'accusation.

Lausanne, le 24 novembre 2003

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6S.368/2003
Date de la décision : 24/11/2003
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-11-24;6s.368.2003 ?
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