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21/11/2003 | SUISSE | N°4P.147/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 21 novembre 2003, 4P.147/2003


{T 0/2}
4P.147/2003 /ech

Arrêt du 21 novembre 2003
Ire Cour civile

Mme et MM. les Juges Corboz, Président, Klett et Favre.
Greffière: Mme Charif Feller.

A. ________, recourant, représenté par Maîtres François Roger
Micheli et
Jean-Marie Crettaz,

contre

B.________,
intimée, représentée par Maîtres Serge Morosow et Cyrille Piguet,
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case
postale 3108,
1211 Genève 3.

arbitraire,

recours de droit public contr

e l'arrêt de la Chambre civile de la
Cour de
justice du canton de Genève du 16 mai 2003.

Faits:

A.
A. ________, c...

{T 0/2}
4P.147/2003 /ech

Arrêt du 21 novembre 2003
Ire Cour civile

Mme et MM. les Juges Corboz, Président, Klett et Favre.
Greffière: Mme Charif Feller.

A. ________, recourant, représenté par Maîtres François Roger
Micheli et
Jean-Marie Crettaz,

contre

B.________,
intimée, représentée par Maîtres Serge Morosow et Cyrille Piguet,
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case
postale 3108,
1211 Genève 3.

arbitraire,

recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre civile de la
Cour de
justice du canton de Genève du 16 mai 2003.

Faits:

A.
A. ________, citoyen hollandais domicilié à Monaco et propriétaire
d'un
immeuble à Gstaad, est le père de deux filles, nées respectivement en
1994 et
en 1996. Elles sont issues d'une liaison avec une ressortissante
espagnole,
née à Genève et domiciliée à Z.________ (Espagne).

Le 21 août 1998, la mère des enfants a déposé plainte auprès de la
police de
son quartier en dénonçant le fait que le père les avait enlevés, ce
qui a
donné lieu à une procédure pénale confiée à la Juge d'instruction
B.________,
en fonction à Z.________. Le 2 mai 2000, celle-ci a émis un mandat
d'arrêt
international à l'encontre du père.

Le 21 septembre 2000, A.________ a été arrêté à la frontière de
Bardonnex,
Genève, et placé en détention extraditionnelle jusqu'au 8 décembre
2000, date
de sa libération par la Chambre d'accusation du Tribunal fédéral,
moyennant
le dépôt d'une caution de 1 million frs. et un contrôle de présence.
A.________ a néanmoins quitté la Suisse et s'est rendu à Monaco, où
ses deux
filles sont scolarisées.

A. ________ a recouru contre l'ordonnance d'écrou de la Juge
d'instruction de
Z.________, rendue le 25 septembre 2000, devant la Cour d'appel de
Malaga,
qui a rejeté le recours le 20 avril 2001.

Par arrêt du 2 avril 2001, le Tribunal fédéral a écarté un recours de
droit
administratif contre la décision d'extradition de A.________ à
l'Espagne,
prise le 10 janvier 2001 par l'Office fédéral de la justice.

Le 26 juin 2001, A.________ a requis du Conseil général du pouvoir
judiciaire
espagnol une procédure disciplinaire contre deux juges du Tribunal de
Z.________, dont B.________. Le 18 décembre 2001, la procédure a été
classée
sans suite, décision communiquée à B.________ le 5 mars 2002.

B.
Le 9 juillet 2001, A.________ a ouvert action devant le Tribunal de
première
instance de Genève contre B.________ en paiement de 15'800 fr. à titre
d'indemnité pour les 79 jours de détention extraditionnelle subis, à
raison
de 200 fr. par jour. Il a reproché, en substance, à la juge espagnole
d'avoir
décerné contre lui un mandat d'arrêt international en violation de la
loi.
B.________ a contesté sa légitimation passive et soulevé des
exceptions
d'incompétence ratione loci et materiae. Elle a invoqué le bénéfice de
l'immunité de juridiction. Par jugement du 7 novembre 2002, le
tribunal s'est
déclaré compétent, à raison de la matière, pour connaître de l'action
susmentionnée.

Saisie d'un appel de B.________, la Cour de justice a annulé le
jugement
entrepris et déclaré irrecevable l'action introduite par A.________,
par
arrêt du 16 mai 2003. Elle a retenu principalement que la Convention
de
Lugano du 16 septembre 1988 concernant la compétence judiciaire et
l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (CL; RS
0.275.11)
ne s'appliquait pas aux actions en responsabilité ouvertes contre un
magistrat ou un fonctionnaire, qui relèvent du droit public, ce qui
est le
cas à Genève. Il en allait de même en Espagne, selon les art. 411 et
412 de
la loi espagnole d'organisation judiciaire. Le droit public obéissant
avant
tout au principe de la territorialité, les tribunaux genevois ne
sauraient se
prononcer sur d'éventuels manquements imputables au juge
d'instruction de
Z.________. La règle de renvoi de l'art. 133 de la loi fédérale du 18
décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP; RS 291) à la
loi du
pays où s'est produit de manière prévisible le dommage causé par
l'acte
illicite (Suisse, Genève) n'entrait pas en ligne de compte au profit
du droit
espagnol, à teneur de l'art. 413 ch. 1 de la loi d'organisation
judiciaire de
ce pays. Enfin, comme la procédure pénale était encore pendante,
l'action en
responsabilité était de toute manière prématurée.

C.
Agissant par la voie du recours de droit public, A.________ demande au
Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt susmentionné avec suite de frais et
dépens. Invoquant l'art. 30 al. 1 Cst., il reproche à la cour
cantonale la
non-application de l'art. 133 al. 2 LDIP, constitutive d'un déni de
justice.
Cette règle prescrirait l'application du droit suisse, singulièrement
de
l'art. 61 al. 1 CO conduisant à retenir les principes régissant la
responsabilité civile pour les interventions des agents publics, ce
qui
serait aussi le cas en Espagne, et dans de nombreux autres pays
européens. Le
principe de la territorialité utilisé par la cour cantonale
accorderait une
immunité de juridiction absolue au juge d'instruction étranger devant
les
tribunaux genevois. De plus, la Cour de justice aurait arbitrairement
méconnu
l'art. 27 de la loi genevoise d'organisation judiciaire, consacrant la
plénitude de juridiction du Tribunal de première instance.
L'intimée conclut à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à
son rejet,
avec suite de frais et dépens.

La Cour de justice se réfère aux considérants de son arrêt.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des
recours
qui lui sont soumis (ATF 129 I 337 consid. 1 p. 339; 129 II 225
consid. 1 p.
227 et les arrêts cités).

En raison du principe de la subsidiarité absolue du recours de droit
public,
ce moyen n'est recevable que si la prétendue violation ne peut pas
être
soumise par une action ou par un autre moyen de droit quelconque au
Tribunal
fédéral (art. 84 al. 2 OJ).

Dans le cas présent, le recourant se plaint d'une atteinte à l'art.
30 al. 1
Cst. garantissant l'accès à un tribunal compétent à raison de la
matière et
du lieu (Jean-François Aubert/Pascal Mahon, Petit commentaire de la
Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999,
Zurich
2003, n. 5 ad art. 30, p. 280) pour juger de l'action en
responsabilité
civile qu'il a introduite contre l'intimée, juge d'instruction
espagnole
auprès du Tribunal de Z.________.

Le recourant invoque la violation des art. 129 al. 2 LDIP et 5 ch. 3
CL,
ainsi que l'interprétation erronée de l'art. 61 al. 1 CO, concerné
par le
renvoi de l'art. 133 al. 2 LDIP. Il fait également valoir une
application
arbitraire de l'art. 27 de la loi d'organisation judiciaire genevoise
consacrant le principe de la plénitude de juridiction du Tribunal de
première
instance. A cet égard, il sied de relever que l'application de cette
disposition cantonale suppose que les tribunaux suisses soient
compétents
pour connaître de la demande.

En réalité, le recourant reproche à la cour cantonale la violation de
diverses normes de droit fédéral sur la compétence, grief qui peut
donner
lieu à un recours en réforme en vertu de l'art. 43 al. 1 OJ (cf. ATF
126 III
327 consid. 1c; 124 III 382 consid. 2a in fine p. 386 et les arrêts
cités).
Comme ces moyens peuvent tous être évoqués dans le cadre du recours en
réforme, que le recourant a par ailleurs déposé parallèlement au
présent
recours de droit public, celui-ci doit être déclaré irrecevable à
teneur de
l'art. 84 al. 2 OJ mentionné ci-dessus.

2.
Vu l'issue du litige, un émolument sera mis à la charge du recourant
qui
succombe (art. 156 al. 1 OJ). Celui-ci devra également payer une
indemnité à
titre de dépens en faveur de l'intimée (art. 159 al. 2 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours de droit public est irrecevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le recourant versera à l'intimée une indemnité de 2'500 fr. à titre de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à la
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 21 novembre 2003

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.147/2003
Date de la décision : 21/11/2003
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-11-21;4p.147.2003 ?
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