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19/11/2003 | SUISSE | N°U.323/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 19 novembre 2003, U.323/02


{T 7}
U 323/02

Arrêt du 19 novembre 2003
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Lustenberger et Kernen. Greffière :
Mme
Berset

R.________, recourant, représenté par Me Serge Beuret, avocat, rue des
Moulins 12, 2800 Delémont,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1,
6004 Lucerne, intimée

Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Chambre des
assurances,
Porrentruy

(Jugement du 9 octobre 2002)

Fait

s:

A.
R. ________, ressortissant espagnol né en 1963, a travaillé en Suisse
depuis
1983, tout d'abord en qualité de sai...

{T 7}
U 323/02

Arrêt du 19 novembre 2003
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Lustenberger et Kernen. Greffière :
Mme
Berset

R.________, recourant, représenté par Me Serge Beuret, avocat, rue des
Moulins 12, 2800 Delémont,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1,
6004 Lucerne, intimée

Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Chambre des
assurances,
Porrentruy

(Jugement du 9 octobre 2002)

Faits:

A.
R. ________, ressortissant espagnol né en 1963, a travaillé en Suisse
depuis
1983, tout d'abord en qualité de saisonnier, au service de
l'entreprise de
maçonnerie B.________ à C.________. A ce titre, il était assuré
auprès de la
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA). Le 3
mai 1988,
il a été victime d'une fracture du scaphoïde droit, entièrement
guérie à fin
septembre 1989. La CNA a pris le cas en charge.

Le 8 juillet 1996, alors qu'il travaillait pour l'entreprise
d'étampage
V.________, à D.________, il a subi un nouvel accident au poignet
droit, pris
en charge par une autre compagnie d'assurance. En septembre 1997, il a
annoncé à la CNA une rechute de l'accident de 1988, sous forme
d'arthrose
radio-carpienne débutante. La CNA a pris en charge les suites de cette
rechute, y compris l'intervention chirurgicale du 12 février 1999.

A l'issue des investigations médicales et économiques, par décision
du 28
décembre 2000, la CNA a reconnu à l'assuré le droit à une rente
d'invalidité
fondée sur une incapacité de gain de 20 %, à partir du 1er janvier
2000, et à
une indemnité pour atteinte à l'intégrité d'un taux de 15 %. Saisie
d'une
opposition, la CNA l'a écartée dans une nouvelle décision du 18
septembre
2001.

Ayant également déposé une demande de prestations de
l'assurance-invalidité,
R.________ s'est vu accorder par l'Office de l'assurance-invalidité
du canton
du Jura (ci-après: office AI) une rente d'invalidité entière, fondée
sur un
taux d'invalidité de 72 %, avec effet au 1er mars 1999, par décision
du 6
avril 2001.

B.
Saisi d'un recours contre la décision sur opposition de la CNA, le
Tribunal
cantonal de la République et canton du Jura, chambre des assurances,
l'a
rejeté par jugement du 9 octobre 2002.

C.
R.________ interjette recours de droit administratif contre ce
jugement, dont
il requiert l'annulation, en concluant, sous suite de frais et dépens,
principalement à l'octroi d'une rente d'invalidité fondée sur une
incapacité
de gain de 72 % et un gain déterminant de 54'001 fr. 75, ainsi qu'à
une
indemnité pour atteinte à l'intégrité de 50 % fondée sur un gain
assuré de
97'200 fr. Subsidiairement, il demande le renvoi de la cause à la
juridiction
cantonale pour instruction complémentaire sous forme d'une expertise
médicale.

La CNA conclut au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances
sociales
a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances
sociales du 6
octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003,
entraînant la
modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de
l'assurance-accidents. Cependant, le cas d'espèce reste régi par les
dispositions de la LAA en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002, eu égard
au
principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur
au moment
où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 127 V
467
consid. 1, 121 V 366 consid. 1b).

2.
Le litige porte sur le taux de la rente d'invalidité et la
détermination du
gain annuel assuré servant de base au calcul de la rente, ainsi que
sur le
taux de l'indemnité pour atteinte à l'intégrité et sur le gain
déterminant
pour le calcul de l'indemnité. Sur ces points, le jugement entrepris
et la
décision sur opposition attaquée exposent correctement les
dispositions
légales applicables, de sorte qu'on peut y renvoyer.

3.
Le recourant reprend en substance les griefs formulés devant
l'instance
cantonale en ce qui concerne le taux d'invalidité. Il ne fait
cependant
valoir aucun argument de nature à mettre en cause le point de vue,
dûment
motivé, des juges cantonaux.

3.1 En particulier, la cour cantonale a exposé de manière
convaincante les
motifs qui l'ont conduite à écarter le taux d'invalidité de 72 %
retenu par
l'assurance-invalidité, selon les principes dégagés par la
jurisprudence
relative à l'uniformité de la notion d'invalidité (ATF 126 V 298
consid. 2d).
A cet égard, il est pour l'essentiel renvoyé aux consid. 4 et 5 du
jugement
cantonal; on rappellera que l'évaluation de l'assurance-invalidité
est basée
sur une observation professionnelle réalisée pendant une période où
l'intimée
reconnaissait à l'assuré une capacité de travail de 25 %, dans un
premier
temps, et de 50 % par la suite, et que la décision de l'office AI du
6 avril
2001 ne fait que reprendre l'appréciation effectuée en 1999, sans
qu'il y ait
eu un nouvel examen approfondi de la capacité de travail de l'assuré.
Partant, quoi qu'en dise le recourant, les premiers juges ont admis à
juste
titre que la décision de l'office AI n'était pas du tout convaincante
et que
l'intimée était fondée à s'en écarter. Le fait que cette dernière
n'ait pas
émis d'objections à la mise en place d'un stage d'observation
impliquant une
activité de montage de montres, quelques mois après l'opération au
poignet
subie par l'assuré n'y saurait rien changer.

3.2 La juridiction cantonale a considéré que le recourant présente une
capacité de travail entière, avec plein rendement, dans une activité
ne
nécessitant pas d'effort avec le poignet droit, en particulier pas de
mouvements répétitifs et en rotation ou de force de la main et du
poignet
droits, ni port de charges des deux mains, ni travail précis avec de
longs
doigts. Cette appréciation, qui correspond à l'exigibilité décrite
par le
docteur S.________, médecin d'arrondissement de la CNA, dans son
rapport du
11 février 2000, n'est pas remise en cause devant la cour de céans et
le
recourant ne produit aucune pièce médicale qui justifierait de s'en
écarter
ou de procéder à une instruction complémentaire.

3.3 Comme en procédure cantonale, le recourant conteste aussi bien le
revenu
sans invalidité que le revenu d'invalide fixés par la CNA et
confirmés par
les premiers juges, tout en admettant que sont déterminants pour la
comparaison des revenus les rapports existant au moment de
l'ouverture du
droit à la rente, soit, en l'espèce, le 1er janvier 2000 (ATF 128 V
174
consid. 4a).

3.3.1 Pour déterminer le revenu d'invalide, l'intimée a versé au
dossier
cinq descriptions de poste de travail (DPT) relatives à des activités
adaptées au handicap du recourant selon le docteur S.________
(rapport du 16
novembre 2000). L'intéressé estime pour sa part qu'aucune d'entre
elles n'est
adéquate. Selon la jurisprudence, les données salariales qui
résultent de
tels documents peuvent servir au calcul du revenu d'invalide si
certaines
conditions sont remplies (arrêt C. du 28 août 2003, destiné à la
publication,
[U 35/00 et U 47/00]). Ainsi l'assureur doit produire cinq DPT et
préciser,
en cas de contestation, le nombre total de places de travail
documentées
entrant en considération pour le handicap donné, les salaires maximum
et
minimum de celles-ci et le salaire moyen du groupe correspondant. En
l'occurrence, dès lors que ces conditions ne sont pas remplies, les
données
salariales résultant des DPT ne peuvent servir au calcul du revenu
d'invalide.

3.3.2 Aussi, lorsque, comme en l'espèce, l'assuré n'a pas repris
d'activité
lucrative, il y a lieu de se référer aux données statistiques, telles
qu'elles résultent des enquêtes sur la structure des salaires de
l'Office
fédéral de la statistique (arrêt C. du 28 août 2003 précité; ATF 126
V 76
consid. 3b/aa et bb) pour déterminer le revenu d'invalide. On se
réfère alors
à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant
toujours sur
la médiane ou valeur centrale.

En l'espèce, compte tenu de l'activité légère de substitution que
pourrait
exercer le recourant, le salaire de référence est celui auquel peuvent
prétendre les hommes effectuant des activités simples et répétitives
dans le
secteur privé, soit en 2000, 4'437 fr. par mois, part au 13ème salaire
comprise (Enquête suisse sur la structure des salaires 2000, p. 31,
TA1;
niveau de qualification 4). Comme les salaires bruts standardisés
tiennent
compte d'un horaire de travail de quarante heures, soit une durée
hebdomadaire inférieure à la moyenne usuelle dans les entreprises en
2000
(41,8 heures; La Vie économique, 7/2003, p. 90, tableau B 9.2), ce
montant
doit être porté à 4'636 fr. (4'437 fr. x 41,8 : 40), ce qui donne un
salaire
annuel de 55'632 fr.

En opérant une déduction globale généreuse de 20 %, pour tenir compte
d'un
certain nombre de facteurs susceptibles d'influencer le revenu d'une
activité
lucrative (ATF 126 V 79 sv. consid. 5b/aa-cc), il en résulte un revenu
d'invalide de 3'709 fr. par mois ou 44'508 fr. par an.

3.3.3 En ce qui concerne le revenu sans invalidité, la CNA l'a fixé à
46'560
fr., soit le salaire (annualisé) que le recourant aurait perçu en
2000 s'il
avait continué à travailler pour l'entreprise de maçonnerie
B.________. Pour
sa part, l'office AI a fixé le revenu sans invalidité à 52'635'fr.
50, en se
fondant sur la moyenne des bénéfices d'exploitation réalisés par le
recourant
en 1996 et 1997 en qualité de gérant du restaurant X.________, à
D.________.
En partant de ce montant, le plus favorable au recourant, on obtient
un
montant de 53'854 fr. par an après adaptation à l'évolution des
salaires de
1997 à 1998 (+ 0.7 %), de 1998 à 1999 (+ 0.3 %) et de 1999 à 2000 (+
1,3 %).
La comparaison avec le revenu d'invalide de 44'508 fr. par an conduit
à un
taux d'invalidité légèrement inférieur à celui retenu par l'intimée,
sur
lequel il n'y a pas lieu de revenir (ATF 119 V 249 consid. 5, 110 Ib
330
consid. 8b).

3.4 C'est également en vain que le recourant conteste le montant du
gain
assuré servant au calcul de la rente, fixé à 33'975 fr. 75 par
l'intimée.
Ainsi que les premiers juges l'ont à juste titre rappelé, lorsque le
droit à
la rente naît plus de cinq ans après l'accident, le salaire
déterminant est
celui que l'assuré aurait reçu, pendant l'année qui précède
l'ouverture du
droit à la rente, s'il n'avait pas été victime de l'accident (art. 24
al. 2
OLAA, dans sa teneur en vigueur, applicable en l'espèce, jusqu'au 31
décembre
2002, dont la cour de céans a confirmé la conformité à la
constitution et à
la loi au consid. 3 non publié de l'arrêt ATF 127 V 456; RAMA 2002 no
U 451
p. 62 ss consid. 3). Cette disposition s'applique également en
présence de
plusieurs accidents invalidants, si le droit à la rente naît cinq ans
après
le premier accident (ATF 123 V 45). La limitation, dans le cas d'un
travailleur saisonnier, de la conversion du salaire à la durée
normale de
l'activité saisonnière au sens de l'art. 22 al. 4 OLAA demeure
applicable
dans une telle hypothèse (ATF 118 V 298; Jean-Maurice Frésard,
L'assurance-accidents obligatoire, in: Schweizerisches
Bundesverwaltungsrecht
[SBVR], Soziale Sicherheit, no 56 p. 26).

Si le recourant avait poursuivi son activité saisonnière au service de
l'entreprise de maçonnerie B.________, il aurait perçu en 1999 selon
les
indications, non contestées, de son ancien employeur, un salaire de
33'975
fr. 75 pour neuf mois de travail (y compris la part au 13ème
salaire). En
effet, sont litigieuses dans le cas d'espèce les suites de l'accident
du 3
mai 1988 et non celles du 8 juillet 1996.

4.
4.1Quant à la conclusion du recourant tendant à l'octroi d'une
indemnité pour
atteinte à l'intégrité d'un taux de 50 %, elle doit être rejetée pour
les
motifs retenus par les premiers juges dans leurs considérants.
Ceux-ci sont
en effet conformes à la jurisprudence et s'appuient sur le rapport
convaincant du 11 février 2000 du docteur S.________.

4.2 Par ailleurs, selon l'art. 25 al. 1 LAA, l'indemnité pour
atteinte à
l'intégrité ne doit pas excéder le montant maximum du gain annuel
assuré à
l'époque de l'accident. Or le gain assuré en 1988 était fixé à 81'600
fr. par
le Conseil fédéral (art. 22 al. 1 OLAA, dans sa teneur en vigueur
depuis le
1er janvier 1987, RO 1986 825) de sorte de le montant de l'indemnité
fixé à
12'240 fr. (81'600 fr. x 15 %) par l'intimée ne prête pas le flanc à
la
critique.

Le recours se révèle dès lors en tous points mal fondé.

5.
Le recourant, qui succombe, ne peut prétendre de dépens. Par
ailleurs, la
procédure est gratuite, dès lors qu'elle porte sur l'octroi ou le
refus de
prestations d'assurances (art. 134 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal de
la
République et canton du Jura, Chambre des assurances, et à l'Office
fédéral
des assurances sociales.

Lucerne, le 19 novembre 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIIe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.323/02
Date de la décision : 19/11/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-11-19;u.323.02 ?
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